Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jose bove

  • Provocateur-né

    Un de mes potes, génétiquement programmé pour être un provocateur, au milieu d’une conversation (sur Maurice Dantec - beaucoup trop vacharde pour être reproduite ici) lance que mes idées politiques ne sont pas finalement très différentes de celles de… José Bové !? Saligaud ! José Bové, ce mec poilu et décérébré qui donne des frissons aux pucelles démocrates-chrétiennes… c'est tout ce que je déteste ! Je sais que je ne devrais pas, mais j’éprouve le besoin de me justifier, Henri.

    L'“antilibéralisme” de Bové est complètement idiot. Bové croit dur comme fer au libéralisme, comme Madelin ou Bernard Arnault, alors que le libéralisme ça n’existe pas, ni spectre ni bon génie de la lampe ; il n’y a MÊME PAS une doctrine libérale cohérente, juste quelques éclairages micro-économiques plus ou moins pertinents et n’importe quel macro-économiste, pas besoin d’avoir fait l’école des Chartes, n'importe quel économiste sait qu’il n’y a pas de système économique idéal. « Il est interdit d'interdire », dans le domaine de l'économie comme des mœurs, ce n'est qu'un slogan hypocrite et ringard.
    Que reste-t-il, dans ce cas, des invectives de Bové ? Si le libéralisme n'existe pas, qui sont les "libéraux" ? Un conglomérat de grands patrons qui se regroupe autour de quelques intérêts sonnants et trébuchants communs, qui arrosent les médias et les hommes politiques avec leur pognon et n'hésitent pas à se poignarder dans le dos lorsque c'est nécessaire ; je n’ai jamais entendu Bové dire ça clairement. Ça supposerait un jugement historique et moral dont il est incapable.

    Il n’y a qu’à observer d'ailleurs l’anticléricalisme inné de Bové : il ferait presque croire à la théorie de l’hérédité des caractères acquis de Darwin, lorsqu’on le voit aboyer de rage dès qu’il aperçoit la bobine d’évêque antéconciliaire de Philippe de Villiers, alors que les “cléricaux” ont perdu pratiquement tout pouvoir d’influence en France depuis longtemps ! Encore une fois il met à côté de la plaque, cette enclume de Bové.

    La vérité c’est que José Bové est une caricature. Il sert d’épouvantail à tous ces enculés de patron en costume-cravate qui collectionnent des œuvres d’art contemporain. Il est parfait pour faire peur au troupeau des démocrates-chrétiens, des centristes et autres bobos bêlants. Aucun risque qu'il fasse un score important comme Le Pen.
    Le mariage de Bové avec une sainte-nitouche démocrate-chrétienne n’est donc pas si improbable lorsqu’on sait le nombre d’industriels que la bourgeoisie démocrate-chrétienne a engendré, dans la grande distribution ou dans le pneu, et comment elle protège ses roulements à billes avec soin.

    De nos trois théoriciens fumeux : Madelin, Bové et Arnault, difficile de dire à vue de nez qui est le plus con, mais celui qui a certainemement le plus de pouvoir des trois, vu le pognon qu’il brasse, c’est B. Arnault.

  • Totems et tabous

    medium_hrousseau.gif

    Je le dis franchement aux fidèles de la religion laïque qui passeraient par là, l'art sacré républicain provoque parfois une réaction de dégoût esthétique chez les catholiques. Tous ces fétiches, toutes ces devises, cette statuaire grandiloquente, ces superstitions, ces monuments… à force donnent un haut-le-corps, d'autant plus en période électorale où on nous rebat les oreilles du matin au soir de sermons laïcs, de cérémonies républicaines, de sondages d'opinion. En Union soviétique, au moins, aux confins de l'empire, on pouvait échapper à la propagande. Chez nous, il n'y a guère qu'au beau milieu des monts pelés du Larzac ou des landes dépeuplées du Finistère intérieur qu'on peut se recueillir et prier un autre Dieu. Et encore risque-t-on d'y tomber sur un militant de José Bové !
    J'admets avoir été bien reçu chez des militants de José Bové, un jour où il faisait froid et que je grelottais, je n'avais pas mangé depuis deux jours, ils m'ont ouvert la porte de leur logis, ils m'ont servi une omelette au lard et aux champignons inoubliable, ils m'ont fait faire le tour de leur plantation de cannabis et m'ont enseigné l'art d'élever cette plante capricieuse… mais qu'est-ce qu'ils ont pu me casser les couilles avec leur prêchi-prêcha égalitaire, et Untel s'en met trop dans les fouilles, et blablabla, la barbe.

    Pour que les athées comprennent que leur art n'est pas aussi "universel" qu'ils ont l'habitude de l'estimer, ils doivent faire cette comparaison avec la production catholique dite "sulpicienne", l'effet que peuvent leur faire ces statues "kitsch", fabriquées en série, ou cette peinture trop "léchée", imitée d'Ingres, mais dépourvue de tout ce qui fait le talent d'Ingres, une féminité à la fois lourde et sensuelle.
    Certes, les laïcs peuvent revendiquer David, mais David est surtout un bon portraitiste. C'est-à-dire qu'à l'exception notable de son "Marat", où la foi du martyr républicain est magistralement rendue, l'art religieux de David n'est pas très vivant. De fait on ne peut mettre sur le même plan les "Noces" de Vélazquez et le "Couronnement de Napoléon" qu'à condition d'avoir une connaissance… approximative (j'ai failli dire "démocratique") de l'art pictural. À tout prendre, "Le Radeau de la Méduse" est un morceau d'art sacré bien supérieur. Le désespoir fou de ces condamnés au néant des abysses, qui tendent les bras vers l'horizon presque vide… à côté de ce morceau d'anthologie, "L'Être et le Néant" de Sartre, quelle piètre expression !

    J'ose le dire, s'il n'y avait pas David, je placerais l'art démocratique à peu près au même niveau que l'art nazi.

    *

    Alors, au milieu de tout ça, le panthéisme de Nicolas Hulot est assez divertissant. On a beau se sentir éloigné des civilisations primitives, le panthéisme n'est jamais très loin. Même si la société capitaliste s'interpose largement entre l'homme et la nature, évidemment cet écran est artificiel, la société, aussi "high-tech" soit elle, ne fait pas le poids face aux forces de la nature, et l'homme ne peut tout à fait en perdre la conscience.
    L'angoisse existentielle, que la surabondance de biens de consommation ne parvient pas complètement à étouffer, pousse de façon cyclique les citoyens vers le panthéisme. Il ne s'agit pas en cette circonstance du panthéisme de Rousseau, beaucoup plus poétique, ni de celui de Diderot, beaucoup plus grec, non, c'est un panthéisme qui a des causes essentiellement psychologiques.

    Ce qui permet de parler de "poussée de fièvre religieuse panthéiste", c'est que si Nicolas Hulot est certainement au courant de la théorie climatique et des indices du Hambougeois Detlef Quadfasel, par exemple, la plupart de ses ouailles n'en ont même pas entendu parler. Ils font entièrement confiance à un animateur de télé, quelques présentateurs vedettes, voire d'"éminents" éditorialistes, comme le fruste dévôt fait confiance au prêtre qui lui parle de la vie éternelle. C'est la foi du charbonnier. J'ai fait cette expérience de demander à un disciple de Nicolas Hulot de m'expliquer comment le réchauffement dû à l'effet de serre pouvait provoquer pardoxalement un refroidissement de l'Europe jusqu'à atteindre une température sibérienne, et il m'a regardé avec l'air d'un catéchumène à qui on se mettrait à causer transsubstantation. Alors que c'est à la portée de tout le monde, la théorie de Quadfasel, en gros.
    Ce n'est pas un hasard non plus si le discours de Hulot est complètement infecté de malthusianisme, et qu'il est par conséquent complètement "régressif", ce n'est pas seulement parce que Hulot n'est qu'un vulgaire animateur télé.
    Même s'ils ne représentent plus qu'une part infime de l'opinion publique, les catholiques ont une réaction face à cette ferveur parfaitement logique. Évidemment leur foi en Dieu, dominant les forces de la nature, les protège contre la peur de l'apocalypse. Et puis les chrétiens sont habitués à une morale qui réprouve le gaspillage, il suffit de se rappeler Jésus, qui après que les pains sont distribués à la foule, insiste pour que l'excédent soit soigneusement réservé.
    Le discours démocratique de Nicolas Hulot, qui évite autant que possible la morale, c'est le "tri sélectif" (ça sonne un peu nazi comme expression), nos oreilles ne sont pas faites pour ce langage.
    Et puis il y a une tradition scientifique encore vivace qui permet aux catholiques de voir que les harangues de Hulot sont tout ce qu'il y a de plus confus, au moins, au plan des sciences humaines et des sciences de la nature - et même des sciences politiques. Il apparaît clairement aux catholiques, je ne parle pas évidemment des imbéciles démocrates-chrétiens, compromis jusqu'au cou, que pour prendre des décisions impopulaires, rapidement, comme le réclame Nicolas Hulot, nul régime n'est moins bien adapté que le régime démago-capitaliste.