Prêchant contre le capitalisme, j'ai toujours eu le sentiment de prêcher dans le désert. Pour cette raison je publie "Orwell & les Gilets jaunes", espérant ainsi toucher des esprits moins obtus que mes relations proches, des esprits plus vifs et moins féminins aussi, car la culture capitaliste est une culture du "baiser à la mort", c'est-à-dire du renoncement à l'existence - pour reprendre un terme choyé des clercs capitalistes, c'est une culture de la résilience pour la résilience, qui ne prône pas la patience féminine comme une vertu mais comme une fin en soi.
Prêcher contre le capitalisme est de surcroît un devoir chrétien en raison du mensonge charrié par la culture capitaliste, largement ésotérique.
Pour ne citer qu'un seul exemple de cet ésotérisme, citons celui du "ruissellement capitaliste", qui relève de la superstition, entretenue par un clergé abondant. Imagine-t-on Moïse tolérant le culte du Veau d'or parmi son "peuple" ? Non ; pourtant les papes catholiques et les pasteurs protestants tolèrent depuis la fin du XIXe siècle une idolâtrie semblable : le ruissellement providentiel, démenti tous les dix ans par un krach meurtrier.
Prêcher contre le capitalisme est sans doute plus facile aux Etats-Unis où sévit un capitalisme "sans filtre", dont la violence sociale saute aux yeux et qui est acceptée par les Etatsuniens à la manière d'une ordalie. L'âpreté du capitalisme est donc plus grande aux Etats-Unis que sur notre continent ; le mouvement des Gilets jaunes est le premier mouvement politique à se heurter à la violence (contenue) des élites capitalistes. Accuser les Gilets jaunes de "populisme" est une démarche pharisienne puisqu'elle consiste à accuser les passagers de 3e classe du "Titanic" d'être responsables du naufrage.
Le fétichisme de la marchandise est sans doute l'aspect le plus évident de la consistance du pronostic marxiste. En effet, au XXIe siècle, les biens marchands, produits en quantité industrielle, valent AVANT TOUT comme fétiches, c'est-à-dire comme objets de culte. Cela rend leur valeur incalculable, exactement comme des oeuvres d'art. Ce fétichisme de la marchandise a pour conséquence l'extraordinaire fluctuation des marchés.
Le capitalisme est à l'économie véritable ce que le sport de compétition est au sport véritable. Cette comparaison très simple me semble le meilleur moyen pour faire comprendre à la jeune génération que représente le capitalisme sur le plan social. Cette comparaison permet aussi de mesurer assez précisément la vitesse d'américanisation de la France ; à partir de quand, par exemple, l'automobile est devenu un objet de culte, le cinéma une religion, le téléphone une âme portative, les mathématiques une "science dure".
Cette comparaison permet d'observer de surcroît que la culture libérale américaine et la culture soviétique sont, en dépit de leur opposition de principe, idéologique, très similaires (ce que George Orwell dévoile à la suite d'Aldous Huxley). Le régime soviétique, au cours de la guerre l'opposant à l'Allemagne nazie, a rétabli l'utopie dans ses droits.
J'ai donc cru bon de développer cette comparaison dans le chapitre intitulé "Le dopage légal".
Commentaires
Vous prenez un sacré raccourci entre le fétichisme de la marchandise et la folie des marchés !
J'ai pris un raccourci car je voulais introduire ici mon illustration des ravages du capitalisme par la comparaison avec le sport.
Pour le reste, l'incertitude croissante sur la valeur d'une marchandise ou d'un service explique largement les fluctuations hénaurmes de la valorisation de certaines multinationales cotées en Bourse. L'ère du capitalisme ésotérique est annoncée par le propos sur le fétichisme de la marchandise.