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motu proprio

  • Un peu d'exotisme

    Le motu proprio, la décision personnelle du pape d’accorder à ses ouailles qui le désirent la liberté d’assister de nouveau à la messe en latin est… un non-événement.
    Il n’y a pas besoin d’avoir l’oreille de Mozart pour reconnaître la beauté spéciale du grégorien ; on se souvient que Brassens lui-même déplore qu’on célèbre dorénavant la messe sur des airs pas très solennels (Depuis Georges Brassens, l’image de la solennité s’est dégradée, c’est vrai, on imagine un discours du président de la République un 14 juillet, quelque chose dans ce goût-là forcément, alors que la solennité peut-être plus profonde que ça.)

    Que ce non-événement fasse couler beaucoup d’encre, chez les détracteurs comme chez les partisans du motu proprio, en revanche, il n’y a là rien de surprenant, dans un pays et à une époque où on a jamais autant aimé se gargariser de mots, où l’idéologie règne, à côté des lois fondamentales du capitalisme.
    Pour les lecteurs du Monde, l’expression de motu proprio a presque une saveur exotique et on peut compter sur les rédacteurs du quotidien pour exploiter le filon à fond.
    Que le concile de Vatican II ait provoqué une sorte de "Babel liturgique" au sein de l’Église d’Occident, quiconque s’est trouvé dans la cacophonie d’une cérémonie internationale modernisante ne peut le nier. Le pape a dû être le premier à s’en apercevoir (Il est allemand, en outre, et les Allemands supportent mal la cacophonie.)

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    La réalité - politique -, quelle est-elle ? Les églises, les séminaires sont presque vides. Quel que soit le rite liturgique qui l'emporte, il n’y aura bientôt plus personne pour le célébrer.
    Les évêques les plus conciliaires, les plus démocrates-chrétiens, ont déjà laisssé entendre qu’ils feront en sorte de ne pas appliquer la mesure du pape ; ils savent qu’il y a assez de forces médiatiques, en France, pour appuyer leur rebellion.
    Ils entendent ainsi, disent-ils, défendre leurs prérogatives, leur pouvoir d’évêque, contre la montée du fachisme liturgique. Comme si ce pouvoir des évêques n’était pas déjà presque totalement mouché…
    Si d’aventure un évêque se montre réticent à ratifier un des dogmes de la nouvelle religion d’État capitaliste et laïque, il se fait immédiatement rappeler à l’ordre par les médias et peut ainsi mesurer l’étendue de ses prérogatives.
    Il n’y a que les démocrates-chrétiens pour oser prétendre le contraire, car dans le fond, qu’est-ce qu’un démocrate-chrétien si ce n’est quelqu’un qui aime les évêques tels qu’ils sont actuellement, à savoir impuissants ; quelqu’un qui se satisfait de la société civile telle qu’elle est, et qui a plus confiance dans Sarkozy pour procéder à quelques ajustements, à quelques économies, que dans le pape lui-même. Dans une perspective démocrate-chrétienne, un pape philosophe, c’est l’idéal.

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    Un dernier argument en faveur de ce motu proprio que j’ai pu lire, c’est qu’il indique le caractère “bienveillant” de Benoît XVI à l’égard de TOUS les fidèles, aussi peu appréciés des médias soient-ils.
    On se console comme on peut, mais, à propos de “bienveillance”, on se souvient que les papes qui protégèrent Michel-Ange, d’Alexandre VI à Pie IV, en passant par Jules II et Clément VII (pas moins de dix papes en tout !) n’étaient pas spécialement “bienveillants” ; il paraît même au contraire que Jules II avait un caractère sacrément despotique (Jésus a décidé de bâtir sur Pierre et pas sur Jean). Ces papes n’en avaient pas moins un sens aigü de leur mission apostolique et la volonté farouche de conserver les moyens de la mettre en œuvre. Combien d’âmes d’artistes ont-elles été aspirées vers la voûte de la Sixtine ?