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L'Oeil du cyclone

Il m'a fallu plusieurs minutes, hier soir, pour convaincre un pote sincèrement pacifiste que l'instinct est le mouvement le plus opposé à la paix et la liberté. Cela en dit long sur l'impact dévastateur de trois chienlits convergentes, et qui se soutiennent les unes les autres en paraissant s'opposer : le libéralisme, le républicanisme et la démocratie-chrétienne.

Faire passer l'instinct pour un mouvement libre est le propre de la religion, habile à maquiller l'instinct en rituel ou en communion, à accorder à la musique plus que la vitamine dont elle est capable : un mysticisme de pacotille, équivalent de la gastronomie.

Accusez la religion tant que vous voudrez de n'être qu'un refuge pour les esprits peureux, mais ayez le courage de couper court à la musique, qui procède exactement de la même rengaine païenne rassurante.

A l'intérieur du christianisme, qui réprouve le plus vigoureusement l'art démoniaque de la musique, le progrès de celle-ci est un indice certain de la lâcheté croissante des institutions soi-disant chrétiennes. Au stade de l'opéra italo-boche, il n'y a plus que des femelles.

Le mouvement instinctif est l'amplitude minimum, à laquelle les institutions républicaines ont réduit les artistes, afin d'en faire des petits chiens dociles ; assez cons pour ne pas comprendre que l'instinct est l'impuissance, dont les pouvoirs publics s'accommodent le mieux. Si Louis-Ferdinand Céline se limitait à l'instinct, il ne serait qu'un suceur de bites parmi cent littérateurs modernes.

Car de l'instinct même, dionysiaque, la politique s'éloigne afin de gagner en puissance, sans qu'il soit même à ce stade, question d'art, mais seulement de religion, de musique ou de cinéma ; et donc de hochets tendus au peuple par un clergé de brutes sournoises. La propriété intellectuelle ? Vous entendez ça, il faut en plus payer la saloperie de propagande néo-nazie ; ça ne suffit pas d'être bombardés de slogans publicitaires par des débiles mentaux collectionneurs de godemichets, il faut en plus souscrire un abonnement.

Celui qui prend le mouvement instinctif pour le mouvement libre, prend la soupape, le carnaval pour la liberté. C'est un opprimé. Son mouvement n'est pas libre, mais déterminé par la peur. C'est elle qui lui donne toute sa vivacité. Enchaînés par les pouvoirs publics à la musique, confondant vitesse et précipitation, l'ivresse qu'elle procure avec la liberté, ainsi sont les petits soldats assassins enrôlés par Satan, et non les artisans de paix. Il n'y a pas d'autre solution que d'affonter la bête sociale immonde comme Shakespeare, ou planter le pieu dans l'oeil de Polyphème comme Ulysse et ses compagnons. Vous voulez la paix, faites-la. La guerre est l'oeuvre des fainéants et des papes.

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