Antisémite et réactionnaire, le philosophe allemand a pu être rapproché de l'idéologie nazie. On sait que Mussolini et Hitler en ont fait l'éloge. L'éthique et l'esthétique néo-païennes nazies renvoient à Nietzsche elles aussi. Bref, le dossier est lourd.
Cependant il y a un aspect décisif qui empêche de poser l'équivalence de la doctrine de Nietzsche et du nazisme ; cet aspect concerne le travail. On connaît la fameuse devise, à l'entrée des camps de travail où les Juifs furent notoirement réduits en esclavage : "Le travail rend libre". Bien plus que la nostalgie de l'antiquité, elle permet de caractériser le régime nazi, par conséquent proche des régimes soviétiques et anglo-saxons concurrents.
"Le travail rend libre" ou "Le sexe rend libre" sont deux devises équivalentes, formant le socle de la culture bourgeoise occidentale ; sur ce point, qui est son principal mobile, le nazisme n'est pas réactionnaire, donc pas "nietzschéen". Le travail, au regard de la culture antique que Nietzsche prend comme point de référence, est une valeur "barbare". Le nazisme a part à la modernité technocratique, de toute évidence, et le qualifier de "réactionnaire", de la part de ses concurrents, est une stratégie de blanchiment.