- N'ayez pas peur ! dit Jésus-Christ à ses apôtres.
Or la peur est le ciment social par excellence ; on ne peut pas parler de régime totalitaire, c'est-à-dire d'un régime asservissant un myriade d'humains (l'aspect quantitatif est une dimension importante du totalitarisme), sans évoquer le chapitre de la peur, d'où part l'adhésion au totalitarisme ; mais on ne peut pas parler non plus de la famille, formule sociale primitive, sans parler aussi de la peur, qui justifie la vie domestique. On voit le Messie, à l'entame de sa vie publique, s'émanciper des affaires et considérations domestiques.
L'indifférence du chrétien aux questions sociales et politiques tient sans doute à ceci qu'il n'a pas peur ; l'avenir est une chose qui préoccupe surtout les lâches - ce qu'il y a de lâche en chaque homme et l'incite à "cultiver ses racines" ou autre religion païenne mystique du même goût.
On peut ainsi aisément relier la peur et l'argent, comme Molière nous y invite dans sa comédie de "L'Avare", où l'argent n'a plus seulement le sens d'une transaction banale, mais une valeur mystique d'assurance, illusoire et analogue à "l'au-delà" de la mort.
On voit que l'avenir est la religion ou la préoccupation des personnes riches, qui possèdent beaucoup d'argent ou de biens.
Le jeune homme riche de la parabole respecte scrupuleusement les prescriptions de la religion juive, mais il ne veut pas renoncer à ses richesses, probablement parce qu'il n'est pas capable de dépasser sa peur, cette peur qui nous éloigne de dieu et nous oblige à garder les yeux rivés sur cette terre comme des lâches.