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petitmangin

  • Trêve pascale

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    Je me suis un peu calmé contre Benoît XVI. Son voyage diplomatique en Turquie n'y est pas pour rien ; à l'idéologie allemande a succédé le pragmatisme allemand, de mon point de vue. Il faut laisser la question turque aux Allemands, ils sont mieux placés que les Français, à cheval sur leurs principes républicains, pour traiter avec les Turcs.
    Plus calmement, donc, ce qui me gêne dans l'appel de Benoît XVI à plus de rationalité, c'est son flou qui entoure son exorde. Le retour à la pensée grecque, fort bien, mais de quels Grecs Benoît XVI parle-t-il ? de Thucydide ou d'Homère ? de Platon ou d'Aristote ? de Sophocle ou d'Aristophane ? de Protagoras ou de Socrate ? Vu que les Grecs ont tout dit et presque tout inventé…

    En farfouillant aux Puces de Saint-Ouen à la recherche de la perle rare, j'ai exhumé ce petit trésor de l'Éducation nationale française d'avant la réforme libérale : Une Histoire sommaire de la littérature grecque de H. Petitmangin. Comme il en dit plus long qu'une encyclique sur l'"esprit grec", je recopie, pour préciser utilement le "néo-classicisme" du pape :

    Origine du peuple grec - On ne peut affirmer que bien peu de chose sur l'origine des Grecs.

    La légende - Les Grecs, les Athéniens surtout, croyaient leur race "autochtone", née dans le pays même. Pour expliquer la parenté des ses diverses branches, ils les disaient issues des fils d'Hellen, leur ancêtre commun.

    L'histoire - Il semble qu'en réalité le peuple grec provienne de la fusion de plusieurs races : les antiques Pélasges, qui occupèrent la Grèce continentale à l'âge de la pierre ; les Egéo-crétois, répandus en Crète et dans les Cyclades à l'âge du bronze : les Achéens, qui arrivèrent par le Nord vers le XVe siècle avant J.-C. et qui furent suivis au XIIe par un peuple de même origine, les Doriens. Quoi qu'il en soit, les Grecs étaient certainement de race aryenne et apparentés aux Italiotes, comme le prouvent surtout des analogies de religion et de langue.

    Les pays grecs - Ce qui caractérise le pays occupé par les Grecs, même à ne considérer que la Grèce continentale, c'est la variété.
    On y trouve des montagnes, rocheuses ou verdoyantes, souvent couronnées de neige ; des vallées pittoresques et riantes ; des plaines d'étendue modérée, mais fertiles ; la mer découpe dans les terres des golfes profonds ; cette mer est parsemée d'îles nombreuses qui encourageaient la navigation.
    Le climat varie aussi d'une région à l'autre ; mais nulle part il ne paralyse l'activité ou l'énergie. Un ciel pur découpe partout des horizons nets qui semblent prédisposer l'esprit à la clarté.

    La race grecque - Ces conditions développèrent harmonieusement chez les Grecs le physique et le moral.
    Au physique la race grecque est élégante, souple et robuste. Ces qualités sont encore accrues par la frugalité qu'impose la médiocre fertilité de l'ensemble du pays et par la pratique constante de la gymnastique.
    Au moral, la race grecque est caractérisée d'une part par l'énergie individuelle : c'est un peuple de bergers, de cultivateurs et de marins ; d'autre part, par la variété des aptitudes : en effet, la raison, l'imagination, la sensibilité se développent parallèlement dans le plus heureux équilibre. Grâce à cette variété et à cette harmonie des facultés, le Grec, sans jamais perdre de vue le réel et le pratique, aimera à le dépasser par la curiosité désintéressée pour aller jusqu'à l'art et jusqu'à la science. Quelques défauts menaçaient cependant le tempérament des Grecs. Leur finesse pouvait dégénérer en subtilité et leur souplesse en frivolité. Mais ces défauts ne seront sensibles qu'à certaines époques et dans certaines œuvres.

    Les idées morales et religieuses - Le progrès des idées morales et politiques se constatera dans les œuvres littéraires ; faisons seulement les remarques suivantes :
    - La morale des Grecs reste caractérisée par le sens de la mesure. cette morale n'a rien d'austère ; on pourrait bien plutôt lui reprocher des complaisances excessives pour les faiblesses de la nature humaine. Son originalité lui vient aussi de son union avec le sens de l'art. Les Grecs aiment à fondre le beau et le bien dans un idéal unique.
    - Au point de vue politique, le morcellement du pays en régions différentes a gêné chez eux l'éclosion de l'idée d'une patrie unique. Aussi l'histoire grecque a surtout à raconter des luttes entre les diverses cités. Ce fut un avantage pour la variété de l'art qui revêtit des caractères différents chez les Ioniens, plus souples et plus légers, et chez les Doriens, plus graves et plus austères.

    La religion grecque
    - La religion grecque était anthropomorphique, c'est-à-dire qu'elle tendait à représenter les dieux avec la forme et la mentalité humaines. Une telle conception religieuse était favorable aux arts, puisque la nature divine apparaissait comme une forme humaine idéalisée.
    - Le naturisme : les dieux grecs personnifiaient ordinairement des forces de la nature ; aussi la littérature grecque ne s'enferme pas dans la psychologie humaine, elle s'intéresse aux spectacles de la nature extérieure.
    - La mythologie : elle constituait une source très riche d'inspiration artistique. Ce vaste cycle de traditions qui fondait ensemble les croyances religieuses et les légendes de la préhistoire n'avait rien de rigide ni d'absolu. Le sculpteur, le peintre et le philosophe pouvaient s'en inspirer en toute liberté, aussi bien que le poète.
    - Les inconvénients : mais cette religion trop humaine manquait d'élévation morale. Elle fermait les sources les plus profondes de l'inspiration : le problème de la destinée ne se pose jamais pour les écrivains grecs païens avec cette acuité profonde et cette profondeur qui donnent un caractère si sublime à la littérature issue du christianisme.

    La famille et l'éducation
    - La famille grecque fut longtemps caractérisée par l'effacement du rôle de la femme, qui restait le plus souvent enfermée dans le gynécée. Cela a pu priver la littérature d'une certaine délicatesse, surtout dans l'expression des sentiments tendres.
    - En revanche, l'éducation de l'enfant était très favorable à la culture littéraire. La musique et la gymnastique donnaient de bonne heure au jeune grec le sens de la mesure, de la justesse et de l'harmonie. Il apprenait par cœur de longs passages des poètes, d'Homère surtout, ce qui constituait pour lui une formation à la fois intellectuelle et morale. Cette éducation se continuait par des conversations avec des personnes âgées.
    Aussi jamais peuple n'eut, dans son ensemble, un goût plus sûr.