Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

sofres

  • God Save The Queen

    Il est de bon ton dans la France républicaine de railler le carrosse de la Reine d’Angleterre, le faste désuet de sa cour, et de fustiger avec véhémence le gaspillage de son indécente “liste civile”, qui lui permet de se payer sur le dos de ses sujets les tailleurs les plus stricts dans les tissus les plus chair (chair fraîche, chair décomposée, chair ressuscitée, chair bronzée, chair à motifs).
    Cette liste civile, elle ferait presque frémir de rage les descendants des illustres “Sans-culottes” qui ont refait la France de comble en fond et réclament aujourd’hui un Smic à mille cinq cents euros (minimum) : « Alors quoi, on aurait aboli la monarchie et le droit de cuissage en France pour des prunes !? Pour se faire narguer par les salaires des Anglais et les logements sociaux en pierre de taille du Prince Charles ? ».
    (En réalité, la famille royale est l’atout touristique majeur d’un royaume sans attraits, plongé sous la pluie et captivé par des matchs de football d’un ennui mortel quand on les regarde à jeun.)

    Si on prend un peu de recul, l’élection au suffrage universel direct du Président de la République française n’est pas moins futile ni coûteuse que la flotte de carrosses de la Reine d’Angleterre, franchement. Prendre ce scrutin au sérieux ça serait, mettons, comme prendre un type de la trempe de Jean-Pierre Elkabbach au sérieux : une grossière erreur d’appréciation. On aurait donc tort de se priver de rigoler un peu. « Je suis un féru d’Histoire comme vous. », disait ce matin Julien Dray à Jean-Pierre Elkabbach : vous connaissez des façons de commencer la journée de façon plus divertissante ?

    *


    Lorsqu’on se penche sur les statistiques de la Sofres après le premier tour pour faire un peu de sociologie amusante, on peut tirer les conclusions suivantes :
    • L’électeur-type de Sarkozy est une vieille mamie, celui de Ségolène une jeune étudiante. Sarkozy n’est donc pas exactement “le gendre idéal”, mais plutôt “le petit-fils idéal” ; et Ségolène, elle, “la prof idéale” - une prof de maths, vu qu’en littérature elle ne semble guère connaître autre chose qu’Olympe de Gouges et Victor Hugo. Elle conseillait Mitterrand, mais sûrement pas sur le choix de ses lectures.
    On peut trouver ironique que le troisième âge soit tenté par les économies drastiques promises par Sarkozy, étant donné que les vieillards sont la principale source d’endettement en France à tel point que seul un réchauffement climatique brutal permettrait d’assainir vraiment nos finances publiques. Il est logique en revanche que l’incitation de Sarkozy à travailler plus n’effraie guère les mamies ;

    • L’électeur-type de Le Pen est un ouvrier trentenaire au chômedu. Le Pen fait donc figure de leader syndical idéal. De mon point de vue, c’est une évidence que si Le Pen avait choisi le syndicalisme ouvrier plutôt que la politique, il aurait fait une carrière encore plus tonitruante et les ministres et les médias lui auraient mangé dans la main ;

    • Je peux dire que jusque-là ces observations ne me surprennent pas, elles correspondent à mes propres observations empiriques, même si je connais aussi quelques jeunes types candides qui pensent que Sarkozy aura un effet courant d’air et qu’on respirera mieux. Mais le cas Bayrou me surprend plus ; l’électeur-type de Bayrou est un homme, assez nettement, plutôt jeune, au chômage lui aussi, mais plutôt un cadre au chômage, ou un travailleur indépendant, en second lieu ? Difficile de savoir si Bayrou lui-même est à la retraite ou au chômage… disons que si Ségolène l’emporte il conserve une chance d’être ministre de l’Agriculture (biologique) vers 2009-2010 ; on constate que les retraités et les chômeurs jouent un rôle décisif dans cette élection ; probablement parce qu’ils n’ont rien d’autre à foutre que d’aller voter ;

    • Schivardi, lui, alors qu’il n’est plutôt pas mal bâti et qu’il a l’air sympathique, n’a quasiment recueilli aucune voix féminine ; forcément, ce sont les tapettes qui ont le vent en poupe et font la loi, en ce moment ;

    • Parmi les bizarreries, il y a le score de P. de Villiers chez les ouvriers, 5 %, un peu moins ridicule par conséquent que dans les autres catégories socio-professionnelles ; à moins que les palefreniers du Puy-du-Fou soient classés dans la catégorie “ouvriers agricoles” et que leur patron leur ait promis une augmentation ?

    • Pour ceux qui ont parié une bouteille de champagne sur tel ou telle candidat au second tour, un chiffre intéressant : Bayrou a fait un score plus important parmi les électeurs qui avaient voté à gauche en 2002 que parmi ceux qui avaient voté à droite ;

    • Significatif, enfin, le nombre d’abstentionnistes que Bayrou et Ségolène ont réussi à convaincre d’aller voter ce coup-ci ; un des “grands enseignements” de ce scrutin, comme dirait PPDA ou Pujadas, c’est que le casting était beaucoup plus séduisant que la dernière fois, comme quoi entre la Star Academy et les élections présidentielles, il n’y a que les paroliers qui changent.

    Enfin j’ai scruté les graphiques pour tâcher de voir où le lapin mâle dans la force de l’âge déterminé par son aversion pour les médias se situait… en vain !
    J’avoue que lorsque Ségolène me regarde dans les yeux et qu’elle bat doucement des paupières en disant : « Je vous promets une presse et des médias pluralistes », j’ai beau savoir que tout ça n’est qu’une plaisanterie, ça me fait quand même un petit quelque chose… Le politiquement correct de Philippe Val ou de Siné, moi je commence à en avoir plein le râble !