La République des livres, c’est le nom du blogue de Pierre Assouline. Qui se fend d’un hommage appuyé à ADG. C’est devenu tellement rare, un homme du Monde qui sort des beaux quartiers et traverse la ligne de démarcation pour aller s’encanailler dans les faubourgs du polar réac, au risque de se mettre dans de beaux draps, que j’émets un petit sifflement d’admiration…
Je ne sais trop quoi en penser, que la moustache d’Assouline cache un Tintin de gauche ? En moins naïf, tout de même, car quelques messages compromettants ont été effacés du blogue par ses soins (à moins qu’Assouline ait une secrétaire particulière ?).
Pour parer à une éventuelle censure, donc, je prends la liberté de reproduire ici de larges extraits de l’hommage d’Assouline.
Pierre Assouline : « ADG a passé l'arme à gauche. À 56 ans, des suites d'une longue maladie. L'écrivain était déjà un peu mort depuis son exil de dix ans en Nouvelle-Calédonie. Son retour n'avait pas vraiment convaincu. L'éloignement, le divorce, la dépression lui avaient fait perdre la main.
Nul doute qu'on va voir fleurir l'épithète “facho” dans les nécrologies. C'est vrai qu'il était bien vu du côté du Front National [à ne pas confondre avec le côté de chez Swann] et qu'il avait publié nombre d'articles dans Minute et Rivarol. Mais pour être tout à fait sincère, quand je lis ses livres, je m'en tape. Avec Jean-Patrick Manchette, il incarnait le néo-polar des années 70 made in Série Noire estampillé Gallimard (…).
ADG [pour Alain Dreux Galloux], qui adorait le pastiche, la parodie, la provocation et l'autodérision, se considérait plutôt comme un anarchiste de droite, y compris dans ses romans [?]. La divine surprise, La nuit des grands chiens malades, Juste un rigolo, La marche truque, Je suis un roman noir se relisent avec la même saveur qu'au premier jour (…).
Son héros étant affublé d'un nom imprononçable pour un tourangeau, il l'appelait “Machin”. Fournier était son vrai nom à lui. Ses parents lui ayant fait le sale coup de le prénommer Alain, il prit très tôt en grippe Le grand Meaulnes et son auteur. D'où ADG. Et son discret chef-d’œuvre au rythme, à l'atmosphère et à l'humour indécalquables : Le grand môme... »
Assouline oublie dans sa biblio express d’Alain Fournier ce qui est sans doute son meilleur polar, à conseiller à ceux qui ignorent tout d'Alain Camille (un autre pseudo) : Pour venger pépère. ADG a raté la gloire de peu, avec Quelques Messieurs trop tranquilles, adapté par Lautner de La nuit des grands chiens malades, avec une belle brochette d'acteurs, mais qui fut un bide.
Il oublie aussi de dire qu'ADG a travaillé à Pilote, comme Cabu, Fred, etc. Je dis ça pour souligner l'évolution rapide des mœurs. Car aujourd'hui, ce mélange des genres au sein d'une même rédaction ferait scandale.
Autre motif de soulagement pour les adjudants de la pensée : ADG a payé pour ses fréquentations inconvenantes. La Série Noire, à qui il avait fait gagner beaucoup d'oseille pourtant, à ses débuts, s'est abstenue consciencieusement de rééditer ses polars pendant près de trente ans, malgré la demande. Il s’en plaignait car il ne roulait pas sur l’or.
Commentaires
Cher Lapinos : Assouline ne s'est pas foulé, comme je l'explique dans mon dernier billet puisqu'il a repris, sur ADG, les termes mêmes de la dépêche d'AFP...
Du grand journalisme en effet...
S'il n'y avait que cela mais... le sieur, comme je l'explique, a caviardé plusieurs fois mes interventions (polies mais fermes comme on dit) avant tout simplement de me bannir de son blog...
Je passe aussi sur la suppression de son ridicule papier sur Nothomb, sur le cirage continuel des pompes à 2 000 euros de Sollers, etc.
Bref, la bande à Josyane et Philippe, rien de plus...
Excellente continuation pour ton excellent blog...
Salut lapinos,
une anecdote qui est peu connue en métropole, le gars ADG fût durant quelques années, sous le pseudo de l'"affreux jojo " un éditorialiste un peu particulier du seul quotidien local ( les nouvelles calédoniennes ). Il commençait invariablement son billet journalier par Monsieur le Directeur....Il disait ce que tout le monde faisait semblant de penser tout bas...
Voilà voilà
Cher Fou de Bassan, c'est plus de fleurs lancées dans ma garenne de la hauteur du phare du Paon que je n'en mérite (des hortensias, bien sûr).
Moi, les foucades d'Assouline m'amusent, je l'avoue, cette façon de mettre les pieds dans le plat, tout doucement, de peur d'éclabousser… Jusqu'à quand ce petit jeu va-t-il durer ?
Je ne perds pas de vue non plus qu'Assouline a plus à perdre que vous ou moi (ou même Dantec) : "Il est plus difficile à un riche…"