La contre-culture est toujours un phénomène prométhéen et viril. La contre-culture viole la culture, qui se protège à l'aide du mariage, et la fertilise ainsi de nouveau.
Je ne vois pas d'exemple de contre-culture féminine. Même la contre-culture féministe de Mai68 est à l'instigation de violeurs subtils, ayant trouvé dans le féminisme un moyen de faire céder les femmes plus facilement, pas très éloigné de l'ancienne méthode des confesseurs. La feinte de la religion est déjà celle de Don Juan pour approcher les femmes.
La culture est une vulve, la contre-culture un phallus - on retrouve ces deux symboles dans les cathédrales gothiques.
Un autre changement majeur, qui semble avoir une signification différente du viol de la religion passive par la nouvelle contre-culture active, événement qui reste au niveau de la morale ou de la biologie, c'est l'émasculation de l'ancien dieu par le nouveau, Chronos émasculé par Jupiter, qui fonde ainsi un nouvel ordre divin moins cruel. Sans l'intervention extérieure divine, l'homme demeurerait au stade païen féminin de la culture, dont le vase de Pandora fournit un symbole parfait (le corps de la femme est l'objet le plus sacré dans la culture païenne), ou au stade viril prométhéen de la contre-culture.
La guerre du sexe, entre les sexes, est par conséquent une manière de rendre compte de la civilisation païenne, et l'hermaphrodisme, c'est-à-dire la fusion des sexes opposés, une façon de rendre compte de l'utopie dans le paganisme - la démocratie par exemple. Cet aspect érotique est aussi sous-jacent dans le national-socialisme de Hegel, qui n'est historique qu'en apparence. Le nazisme tente d'adapter Platon au monde moderne, mais il est comme lui un négationnisme de l'histoire ou du progrès typiquement féminin. Le progrès implique un renversement de la nature féminine, dans toutes les doctrines métaphysiques qui conçoivent le progrès, niant que le déterminisme de la mort qui frappe l'espèce humaine soit inéluctable et même scientifique. Cela peut paraître bizarre, mais il faut pratiquement être "féministe" pour adhérer au transformisme biologique, qui heurte en revanche l'induction masculine, pour la raison énoncée précédemment : parce qu'il n'y aucune trace, en dehors de l'espèce humaine de "contre-culture" (on pourrait dire que les espèces animales, dans leur comportement, expriment unanimement la dévotion religieuse, s'accommodant volontiers du totalitarisme, tandis que l'homme ne le peut, à moins d'être sado-masochiste). Le régime de concurrence libéral, qui dissimule un érotisme prédateur (attribué à Diane dans l'Antiquité) ignore la contre-culture, et le mouvement typiquement masculin de destruction du droit naturel (le suicide, par exemple, selon Léopardi), c'est-à-dire la conscience plus exacerbée chez l'homme du péché originel, ou, pour employer le vocabulaire humain, de l'atrocité de la condition humaine.
Jésus-Christ ne perd pas une seconde de vue l'atrocité de la condition humaine. C'est ce qui empêche les femmes de le suivre. On relève d'ailleurs chez Nitche ce paradoxe que, tout en traitant Jésus et les apôtres de "lâches", il avoue par ailleurs avoir renoncé au christianisme, faute de courage.
La pitié de Jésus est comparable à celle qu'un homme normal peut éprouver vis-à-vis d'un alcoolique à demi-mort dans la rue. Sauf qu'elle sera tempérée chez cet homme normal par la croyance qu'il a dans le caractère inéluctable de la mort. Le Christ Jésus sait, lui, que la mort n'est qu'une obligation sociale ; c'est-à-dire qu'il a d'abord pitié de notre bêtise, qui est un panurgisme, avant d'avoir pitié de nos souffrances physiques ou morales.
C'est aussi la raison pour laquelle le combat des chrétiens contre l'Antéchrist se situe au niveau de la science ou de la sagesse. Le Christ est le seul, je dis bien le SEUL homme à pouvoir justifier la science ou la sagesse. Si vous le pouvez, vous serez "christ", non seulement comme Jésus, mais aussi comme Hamlet, maudits par la société pour la raison que vous savez et proclamez qu'elle n'est qu'un tombeau, scellé par l'ignorance, et sans issue. Le tartuffe qui s'avance, appuyé sur la crosse de l'éthique, ne peut qu'affirmer l'hypothèse comme la vérité ou la démarche scientifique, c'est-à-dire abaisser la sagesse au niveau de la religion.
Si vous ne comprenez pas comment on peut concilier la morale et la science, concevez que le tour de passe-passe des mathématiques rend cet alignement possible, et que cet assemblage est nécessaire à la théocratie. Voilà pourquoi il était nécessaire que Hamlet-Bacon fasse la peau de Polonius-Copernic sans hésiter : parce que Hamlet sait parfaitement l'usage du paradoxe copernicien afin d'étouffer la conscience historique de l'homme. Le faux juif Freud, même s'il reconnaît Bacon dans Hamlet, ne saisit pas que celui-ci est en train de faire voler la conscience démoniaque de l'homme en éclats.