Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Machiavel

Le machiavélisme du régime démocratique consiste à faire croire qu'il n'est pas machiavélique.

Derrière chaque démocrate-chrétien, il n'y a pas beaucoup à creuser pour découvrir un culte rendu au Prince de ce monde ; il n'y a pas à creuser beaucoup plus loin que pour déceler la même détermination dans le "Grand Siècle", et c'est d'ailleurs pourquoi Molière n'a pas pris une ride.

Molière partage avec Shakespeare cette particularité chrétienne : on ne peut ni les prendre pour des auteurs conservateurs, ni pour des auteurs "progressistes" ; cette particularité fait qu'ils échappent au "cahier des charges" de l'art. Ils ne sont pas des artistes selon les seules définitions, anthropologiques, qui existent de l'art.

La difficulté que rencontre la scolastique moderne avec Shakespeare tient largement à ce qu'elle est incapable de le situer dans une époque ou dans un mouvement - moi-même je ne qualifie Shakespeare de "renaissant" que pour souligner que l'étiquette "baroque" ou "pré-romantique" est celle qui lui va le moins. L'artifice moderne est baroque. La modernité n'est qu'un stuc, et Shakespeare est un entrepreneur de démolition. Ce sont les mêmes universitaires qui qualifient Shakespeare de "baroque" qui disent la plupart de ses pièces "énigmatiques", sans doute pour signifier que l'étiquette baroque s'accorde avec l'indéfinissable. Si vous lisez Shakespeare correctement, et non avec une oreille de musicien, vous comprendrez que l'accusation lancée par Shakespeare à l'université et aux universitaires de l'Occident d'être les instruments afin d'étouffer l'Esprit, cette accusation-là appelait une vengeance de la part des clercs, que l'on pourrait dire "vengeance de Polonius".

Certains ont pu dire Shakespeare dans la ligne de Machiavel. Bien que Francis Bacon a sans doute lu Machiavel, il est plus juste de dire qu'il en tire parti, car l'on voit bien que le cadet des soucis de Shakespeare est d'aider les princes chrétiens à se maintenir en selle. Shakespeare montre bien plutôt les princes chrétiens victimes d'une culture médiévale truquée, un peu comme des joueurs d'échecs qui n'auraient pas conscience de la signification satanique du jeu d'échecs. Le machiavélisme démocratique consiste d'ailleurs à jouer avec les pions et sacrifier ceux-ci pour protéger les pièces majeures. Que Shakespeare soit anticlérical, à l'instar de Machiavel, ne signifie pas qu'il soit athée. Elle signifie que Shakespeare a conscience de la coïncidence du cléricalisme et du pharisaïsme.

Le propos de Machiavel, lui, est comme une "patate chaude" dans la culture occidentale, ainsi que la doctrine de Nitche ultérieurement. Machiavel et Nitche ont le don de dévoiler au nom de la raison et pour le compte des élites dirigeantes, démocratiques ou chrétiennes, afin de soigner leur folie, ce que celles-ci doivent garder secret, à savoir que la politique ne sera jamais un jeu de dames, où toutes les pièces ont la même force, mais qu'elle restera toujours un jeu d'échecs, où la transparence n'est pas de mise et les pièces sont inégales. Ce jeu, Shakespeare souligne qu'il n'est qu'un jeu de dupes et l'Occident une tournure catastrophique, non de l'histoire mais de la partie d'échecs. Plus vous prendrez au sérieux la règle du jeu, plus vous serez dupe dit Shakespeare.

 

 

Les commentaires sont fermés.