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simone saintu

  • Art et vérité

    De nouveau dans une lettre adressée à son amie d'enfance Simone Saintu (en 1916), L.-F. Céline signale que l'homme est enclin à prendre pour la réalité et proclamer tel ce qui n'est qu'illusion. Les hommes réagissent différemment face à la catharsis qui pourrait leur faire perdre leurs illusions, ajoute Céline, évoquant le cas des artistes et le sien.

    Si la question de la catharsis chrétienne n'est pas abordée par Céline directement, celle de la vérité l'est. Cela revient au même. L'hiatus entre la vérité et l'art existe bien, d'où la prohibition juive de l'art, ou l'entreprise de démolition de la culture occidentale par le tragédien chrétien W. Shakespeare. Le christianisme ôte les illusions, notamment l'illusion païenne ou sociale de "l'au-delà" ; c'est ce qui explique la subversion courante du christianisme. Bien qu'athée, Céline avait compris et le loue pour cette raison, que le christianisme est peu propice au socialisme, moyen pour les élites rusées d'entraîner avec elles le peuple vers le néant. Car les élites sont nécessairement orientées vers le néant, et tout ce qui, en matière de philosophie naturelle, conforte l'hypothèse du néant (comme l'improbable "boson de Higgs").

    Céline est du reste plus juif que de nombreux juifs qui ne se méfient pas de l'art, comme M. Proust ou J.-P. Sartre.

    Céline cite quelques vers d'Alfred de Musset dans sa lettre :

    "Quand j'ai connu la Vérité

    J'ai cru que c'était une amie

    Quand je l'ai comprise et sentie

    J'en étais déjà dégoûté -

    Et pourtant elle est éternelle

    Et ceux qui se sont passés d'elle

    Ici-bas ont tout ignoré -"

    Et Céline ajoute ceci : "Les hommes célèbres n'ont point jugé bon de poursuivre ce dangereux sentier qui fait perdre les illusions nécessaires aux enfantements - artistiques. Les cancres dans mon genre n'ont rien à y perdre, c'est pourquoi je ne saurais vous conseiller ma méthode - à vous qui êtes vierge d'abord, ce que je ne suis plus depuis presque autant que vous l'êtes, qui êtes femmes, ce que je regrette de ne point être, et qui êtes artiste surtout, ce que je ne serai jamais..."

    Il y aurait quelques commentaires à faire sur le féminisme de Céline, et celui des hommes en général, qu'on ne peut guère qualifier autrement que de "galanterie".