Pour la première fois dans l'histoire, l'Eglise romaine a mis en place une religion dont le dieu est à l'intérieur de l'homme ; il a part à l'âme, trou noir insondable. Les païens ne pouvaient en faire autant avec la nature.
De cette façon, dieu finit peu à peu par épouser les contours de la volonté. Un homme doté d'une forte volonté n'éprouvera pas la nécessité de dieu, tandis qu'un enfant y aura plus volontiers recours. Le manque de volonté sera la preuve que dieu existe ; la ferme volonté prouvera au contraire que dieu n'existe pas. Il arrive que, lorsque la volonté de certains hommes forts chancelle, ils fassent appel à dieu et n'hésitent pas ainsi à se renier.
L'Etat moderne doit beaucoup à l'Eglise romaine, car il est une forme de dieu intériorisé, auquel le citoyen lambda d'une nation moderne consent à se soumettre. L'Etat moderne est une interface entre l'homme et quelque chose d'assez confus ; l'Etat est une sorte de miroir ; sa consistance est psychologique, ce qui explique que psychiatres et psychologues soient devenus ses prêtres.
Mais, cette religion étrange, l'Eglise romaine l'a instaurée de façon sacrilège, contre l'esprit des écritures saintes, suivant un dessein mystérieux. Dieu le Père de Jésus-Christ n'est pas le dieu des païens ; mais il ne siège pas non plus dans le corps impur de l'homme - il ne fait pas partie de ses rêves.