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Ça sent la crème !

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À l’heure où je vous parle, des jeunes gens photographient en gros plan, au zoom, comme si de rien n'était, des crèmes brûlées et des ampoules dans leurs appartements en ville, et ils se couchent le soir contents d'eux.

À part moi, qui songerait à les punir pour ça ? Comment voulez-vous que quelques adolescents excités qui s'amusent au gendarme et au voleur et font flamber tires et chignoles, sans distinction de couleur ni de marque, en comparaison, ça m'émeuve ? Et puis le feu, c'est très beau :

« Les beurs ont mis la flamme à la banlieue miteuse,
Écoutez chanter l'âme qui palpite en eux !
REFRAIN : Monte flamme légère, feu de ferraille si chaud si bon,
À Clichy ou à Montfermeil, monte encore et monte donc ! »


Malheureusement, on n'a pas appris à ces pauvres enfants à chanter, on a préféré leur raconter des petits contes moraux à se droguer toute la journée.

Je crois qu'on trouve dans Gombrowicz une ébauche d'explication didactique au drame des jeunes qui photographient des crèmes brûlées, lisez-plutôt :

« J’avais pris le train à Cmielow et à Bodzechow, la gare suivante, monta un de mes oncles, un homme déjà âgé, propriétaire terrien de la région de Sandomierz. Il se rendait à Varsovie et s’assit à côté de moi dans un compartiment de première classe bondé, car à l’époque on voyageait comme on pouvait et personne ne prenait garde aux classes. Mon oncle était un excellent tireur et nous parlâmes de chasse, un sujet sur lequel je n’avais guère de notions. Subitement, mon oncle regarda autour de lui et dit, sans trop élever la voix mais distinctement :
- Sortez s’il-vous-plaît.
Nos compagnons de voyage le regardèrent d’un air surpris. Alors mon oncle mit la main dans sa poche, en ressortit un pistolet, l’arma et répéta, toujours sans hausser le ton :
- Sortez, s’il-vous-plaît.
Cette fois, le compartiment se vida en un clin d’œil. Un brouhaha s’éleva dans le couloir, on appela le conducteur, des femmes se mirent à pleurer. Mon oncle referma la porte du compartiment et dit avec un clin d’œil espiègle :
- Enfin un peu de place. Il y avait une telle cohue que je ne savais pas ce que je disais. Ça ne va pas trop bien…, mes nerfs…, je n’arrive plus à dormir, je vais justement à Varsovie pour que ça s’améliore, car si ça continue mon état ne peut qu’empirer…
Je compris : il était devenu fou. Il était devenu fou et il allait tirer si on le provoquait… J’étais inondé de sueur.

À mon avis les gens simples ont sur nous cette supériorité qu’ils vivent une vie naturelle. Ils ont des besoins élémentaires, qui font que leurs valeurs sont simples, vraies, honnêtes. Par exemple : un homme simple a faim, donc le pain sera pour lui une valeur.
Tandis que pour un homme riche le pain n’est plus une valeur puisqu’il en a à satiété. Nous vivons une vie trop facile, artificielle. Nous n’avons pas besoin de lutter pour survivre, et inventons donc des besoins artificiels. Ainsi les cigarettes peuvent-elles devenir une valeur - ou la généalogie, ou les lévriers… Cet artifice des besoins provoque l’artifice de la forme - c’est pour cela que nous sommes si extravagants et qu’il nous est difficile de trouver le ton juste…

(…) c’était grâce à un pistolet chargé que j’avais conçu cette dialectique des besoins et des valeurs - comme auraient dit les marxistes (…).


In : Souvenirs de Pologne, 1984.

Commentaires

  • Parce que vous avez encore l'air de mourir de faim, une petite recette vraiment vraiment de France pour vous Lapinos (mais sans photo...): la crème brûlée au camembert avec un peu d'andouille.

  • Un collègue journaliste qui couvrait une conf sur le sujet à Matignon, hier, me confie qu'il ne faut surtout pas s'inquiéter pour les gens "simples" comme vous dites. "La République va s'unir, la république va se réveiller, il va y avoir un sursaut républicain, la république est interpellé mais elle va réagir, la république..."

    Très intéressant de voir comment les médias étrangers se font l'écho de cet évènement, Fox news en tête.

  • Vous, Ève, je crois que vous venez de comprendre qu'on n'attrape pas les lapins en leur causant de Lucien Leuwen !

    Vous sauriez l'appliquer cette recette, pour le goûter ? Les femmes qui savent faire de la cuisine pour hommes sont rares…

  • Effectivement - je garde précieusement Leuwen pour mon cher Uhlan...

    Et pour tout vous dire Lapin, j'ai les ramequins qu'il faut, saurais dans l'absolue cuisiner ce met fin, si les ingrédients n'en étaient denrée rare en ma Hanse... par contre ne comptez pas sur moi pour sauver les blanc qui restent pour vous faire des meringues : je sais bien monter les oeufs en neige à la force du poignet mais il se passe toujours une chose étrange ensuite dans le four, et tout retombe... !

  • Ce sont les Uhlan que l'on attrape ainsi (rire)

    Quand les politiques se mettent à conjuguer la République à tous les temps c'est que l'heure est grââââââââve ! (rire aussi)

    [pfffff]

  • post scriptum : pour les Uhlan, je ne parlais pas de la cuisine (quoique) mais de Lucien... cela va sans dire.

  • Pour réussir la meringue, il faut la bonne dose de sucre et que la pate soit très ferme. La cuisson se fait à four très bas pendant un temps variable entre 45mn et 60 mn ...

    Une meringue plus légère sur une tarte au citron, c'est un délice.

    [Madame de*** aime cuisiner en certaines heures]

  • Hum. Je reste un peu "coite" voire dubitative devant vos conseils, jolie Philaminte. Très ferme ? "Pate" ? Pour les meringues ? Vous parles des oeufs montés en neige ?
    Je dois avoir un four trop chaud...

  • Oui ma chère, des oeufs peuvent être battus "ferme". Quand vous retournez le bol, les oeufs ne doivent pas bouger ...
    "Pate" à meringue = oeuf battus en neige + sucre. On dit aussi "l'appareil" en langage culinaire.

    J'arrête là car sous peu le Lapin va me débaptiser en "Maïté"

  • Encore de la crème d'entre-jambes battue , ça me sature pour le dessert !

  • Oh oui ! encore ! Les bas aux jambes, l'entre-deux nu, coups de spatules...

    - crème ?

    Tu te sers !

  • Bof, chacun ses goûts .... pour ma part je n'aime que le salé et les plats qui collent au corps

  • Suzette a du bon sens. Une bonne poire en lavement de bouche contentera des papilles viriles. La tarte au citron, c'est un dessert de femme savante !

    Si on ne trouve pas d'andouille de Vire sur l'île de Gotland, c'est un séjour bien triste que le vôtre et je vous plains, Ève.

  • 6 escargots, un coq au vin, une conversation, un bon bourgogne et un vieux marc....

  • Vous receviez ce soir Garenne ? Ou bien est-ce là votre ordinaire ?
    Qui sait ? Peut-être un jour vous en dirais-je des nouvelles effectivement si le Ulhan m'y autorise....

  • Chère Eve,

    Voila que votre exacerbée sensibilité vous joue encore quelque méchant tour. Votre four vous sembla trop chaud. Vous vous méprenâtes, ma chère, la cause d'un tel échauffement est bien connue, parole d'expert culinaire à la langue bien pendue : c'est la dévotion aux saucisses hanséatiques qui vous encrassa le four. Pour y remédier, il suffit de se laisser pénétrer par le doux fumet des saucisses bavaroises, qui, dès lors qu'on les introduit délicatement dans un four qu'on aura pris soin de légèrement humidifier au préalable, font acte de pyrolise.
    Si vous le désirez, je puis bien entendu vous faire parvenir un exemplaire de taille respectable.

  • Oh Big ! Vous ici ? Cela fait bien longtemps que je ne vous aie croisé... Je vous croyais jouant les prolongations de l'Oktoberfest en quelques Stube bien de chez vous ! Et puis avouez que vos conseils culinaires ont des sous-entendus de troisième mi-temps, cher voisin... Vous n'avez toutefois pas vraiment tort question Wurst : celles d'ici sont exotiquement "curry-Wurstchen", et vous savez que le "chen" est le secret mot de passe d'Alice pour se minusculiser...

    Me faire parvenir un exemplaire ? Vous parlez donc de transport au beau milieu de vos métaphores ? Dommage... C'est comme la crème et le sucre, trop de barbapapa filées, trop bien trop de Levenkuchen en hors-saison, et l'écoeurement est assuré !

  • Je dois vous avouer Lapin que moi aussi, je doute un tout petit peu de votre talent fantastique à manier les queues de casseroles dont vous nous faites part... Quant à l'assimilation des langues, vous me flater d'autant plus que je n'ai aucun mérite : depuis quelque temps, l'on apprend chaque jour un nouveau mot français dans le FAZ du matin... Il y eut "cité", puis "racaille", puis "voyou" et à la vitesse à laquelle vont les choses, je serais capable dans fort peu de temps d'écrire presque presque du Dantec !

  • La barbe à papa ou l'apprentissage de la frustration palatine..

  • Vous voulez la photo de mes œufs au plat, c'est ça ?

    Quoi qu'il en soit vous faites bien de parler de Dantec car je vous soupçonnais justement d'être sa négresse, à un ou deux barbarismes québécois (c'est un pléonasme) traînant ici ou là.

  • Oui mais vat il etre manger en entier ce truc flambé ou vat il simplement etre gaspillé car ça aussi c'est important.

  • Une photo teintée d'ovalbumine ne prouverait pas vos prouesses - mais la mention plus haut d'une possible modestie, (si elle étonne un peu venant de vous Lapin!) suffit pour que je cesse mes roueries de diablesse - du moins pour aujourd'hui !

  • Oh pardon mana, mes mots sont arrivés sans que je n'aie lu les votres...

    Ce "truc flambé", c'est la crème ou autre chose ?

  • C'est le bouillon qui te devisage avec ses petits yeux suppliants !

  • Je vous ai répondu (sur ADG) au billet "interlude"
    à bientôt!

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