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Un pionnier

Il serait un peu naïf, sous prétexte que Christine Angot ou Amélie Nothomb sont des écrivaines rabougries et ennuyeuses, de dénigrer l'"autofiction" en général. Car c'est presque toute la littérature moderne qui ressortit en fait au genre "autofictionnesque" ; sous le manteau du "roman", il n'y a guère que des autofictions cryptées ou parcellaires - même les romans sans chair de Robbe-Grillet en disent long sur ce cas de monomanie étrange -, autant s'abstenir complètement d'en lire, dans ce cas.

Après, la question de savoir si telle ou telle autofiction dépasse les bornes et verse dans l'obscénité gratuite ou pas, cette question-là est plus délicate. Chacun sera tenté de juger Rousseau, Balzac, Céline, Proust, Waugh, Mauriac, Bernanos, etc., en fonction de ses propres mœurs ou de son propre tempérament. On peut très bien imaginer que tel ou tel chrétien, surtout si c'est une chrétienne, se sente offusquée à la lecture de tel ou tel épisode des Confessions d'Augustin, un pionnier du genre, notamment un épisode d'avant qu'il ne se soit assagi.

Personnellement, j'aime que l'autofiction soit aussi dépourvue de grandes déclarations idéalistes que possible. Comme la tendance de chacun à "généraliser" est inscrite dans le génome humain, disons qu'il est préférable que la "philosophie" de l'auteur ne soit pas trop apparente, qu'elle soit "retenue". Ainsi, L.-F. Céline a deux ou trois idées bien arrêtées sur la vie et le monde qui l'entoure, mais il évite de nous assommer à chaque page du Voyage ou de Mort à crédit avec des sermons. C'est aussi ce qui fait qu'on lit plus volontiers les Confessions de saint Augustin qu'une encyclique de Benoît XVI ; même si saint Augustin ne peut s'empêcher de prononcer des sermons de temps en temps, on sent le chrétien palpiter encore à près de seize siècles de distance, tandis que Benoît XVI, ce n'est qu'un rappel à un ordre plus juste, une tentative de restaurer de vieilles règles. Du coup la portée n'est pas la même. La pilule passe moins bien lorsqu'elle n'est pas dissoute dans la potion.

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Ce qui est amusant, c'est que l'autofiction n'implique pas plus d'exactitude que le roman. L'exemple de Rousseau est significatif, lui qui s'aventure souvent dans des domaines, l'éducation, la politique, la musique, dont il n'a à peu près aucune expérience, et puis qui travestit allègrement la réalité de son existence, de son éducation, de ses amitiés ; il y a l'exemple de Chateaubriand aussi, qui peut passer pour un fieffé menteur, si on le confronte à une bonne biographie. C'est le jeu de compléter Bloy, Céline, Rousseau, par une bonne biographie, et de voir ce qu'il y a dans l'interstice (ou le grand écart).

Ce qui m'a poussé à lire le petit essai que L. Jerphagnon consacre à saint Augustin, c'est une interviou où il déclarait son antipathie pour sainte Monique, la mère d'Augustin. Je me montrai curieux de savoir pourquoi ? Alors même que saint Augustin fait l'éloge de sa mère, de sa soumission à son mari païen… Mais l'argument de Jerphagnon contre Monique n'est guère étoffé, c'est quasi un préjugé. Principalement il lui fait grief d'avoir chassé la maîtresse d'Augustin et son fils, afin de permettre à Augustin, dont la carrière venait de décoller, de faire un mariage plus brillant. Et puis il reproche à Monique d'être un peu trop "dévote". Qui plus est Jerpahgnon est de confession protestante, c'est étonnant lorsqu'on sait l'importance de la "carrière professionnelle" dans les milieux protestants, leur empressement à rejoindre les rangs de la laïcité et de la démocratie la plus bigote !
En outre, Jerphagnon essaie d'imiter le franc-parler d'Augustin, mais il consacre trop de temps à faire le catalogue de vieilles idées philosophiques gréco-latines qui, extraites de leur fondements historiques, n'ont pas beaucoup d'intérêt.

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Des exemples contemporains comme ceux de Modiano, Angot ou Beigbeder, montrent bien que le roman est un peu pris au piège dans "une grande démocratie comme la nôtre". Ce piège, on peut d'ailleurs dire qu'il n'entrave pas seulement le roman, mais toutes les formes de création, ce piège se présente comme un paradoxe : chacun d'entre nous ou presque est encouragé à devenir un artiste - transformé en génie par la grâce de quelque slogan le moindre patouilleur capable de justifier ses patouilles ou son bout de pellicule avec deux ou trois phrases habiles -, dans le même temps que la société de consommation prive les individus de toutes les conditions favorables à l'épanouissement de l'art, voire de l'artisanat.

Commentaires

  • Cher Monsieur Lapinos, juste un petit mot pour vous dire combien vos chroniques justes et souvent pétillantes me sont devenues chères au fil des mois.
    Très cordialement,

  • Tu l'as payé combien celui-là ?

  • Ta gueule, Henri, c'est pas toi qui me ferais un petit compliment gentil comme ça de temps en temps, même sans le penser, au nom de notre amitié !? (Merci, Guit'z.)

  • Lapinos, c'est pas bien de balancer la Nothomb et l'Angot dans la même besace. L'une est intéressante et habile - quoiqu'un peu répétitive, du genre cotée au CAC 40 -, alors que l'autre est franchement pète-roustons, et je pèse mes mots.

    Vous y allez fort avec les préjugés de Jerphagnon, arguant du fait que son protestantisme le prédispose. En matière d'idées reçues, je vois que vos leçons ne vous servent que peu. Vive Jerphagnon, esprit libre et instruit, pétillant autant que précis.

    Votre sortie sur l'artisannat, façon CIDUNATI, est un peu limite (héhéhé).

    Merci néanmoins Lapin, d'être à ce point prolyxe (sed lyxe).

  • Le Lapinisme est une version éclairée du Poujadisme !

    A la sauce marxiste-léniniste : le Poukadisme ...

  • Jerphagnon reproche à Monique d'être un peu trop "dévote"? Rien d'étonnant : le genre dévot est mal vu chez les Protestants, le salut venant par la grâce et non par les oeuvres. L'importance de la "carrière professionnelle" dans les milieux protestants? Disons tout bonnement "l'importance du travail", ce qui sera à la fois plus fidèle à la théologie des Réformateurs et moins chargé de sous-entendus... Quant à l'appétence supposée des Protestants pour la laïcité, vous datez un peu : les lois laïques ont certes été conçues par des "Protestants" sociologiques, mais ceux-ci étaient (au mieux) vaguement déistes, et on les caractériserait mieux par leur appartenance ou leurs penchants maçonniques. Aujourd'hui, l'Eglise romaine fait chorus avec les laïcards pour refuser de faire évoluer la loi de 1905, alors que la Fédération protestante de France, elle, réclame un toilettage ; et franchement, avec la montée des courants évangéliques (toujours caricaturés, souvent diabolisés), il ne restera bientôt plus guère de "bigots" de la laïcité en milieu protestant...

  • Le Salut vient pas derrière ... surtout chez les jolies femmes !

  • Le Salut vient par derrière ... surtout chez les jolies femmes !

  • Le Salut vient par derrière ... surtout chez les jolies femmes !

  • Pardon, Kalle, mais le sketche d'Angot est un de mes préférés ! J'aimais bien le sketche de Sollers ou celui de Beigbeder au début, même celui de Finkielkraut, un vrai sac de tics gestuels et intellectuels, à condition de couper le son, n'était pas mal ; mais le problème avec la littérature "situationniste" c'est qu'on s'en lasse très vite. Sauf Houellebecq, faut dire que c'est un acteur hors pair : un acteur de décomposition, bien sûr. Je le verrais bien reprenant le rôle d'Humphrey Bogart dans un polar futuriste franchouillard à petit budget, pas vous ?

  • Denis, je ne vois pas d'opposition entre la grâce et la dévotion. Ensuite il y a certainement dans la mentalité protestante l'idée que le travail rend libre, idée qu'on retrouve aussi chez Sarkozy ou Zola, tandis que Baudelaire ou S. Weil soutiendraient plutôt que toutes les tâches n'ont pas la même valeur. Mais il y a aussi de grandes familles de banquiers protestants, et le prêt à intérêt, je pense que vous en conviendrez, n'est pas un "travail" ordinaire.

    Sinon je me rappelle Jospin, ce n'est pas si loin, qui avait tout du fanatique de la laïcité démocratique, bien qu'il fût un temps trotskiste, dans sa jeunesse reniée. Mais vous avez raison, la différence entre protestants et catholiques n'est plus si grande qu'avant, j'en veux pour preuve François Bayrou, pourtant adhérent naguère au cercle du penseur réactionnaire Pierre Debray, qui se présente aujourd'hui aux électeurs comme un dévôt de la laïcité ; il faut dire qu'entre ce que pense un candidat et ce qu'il dit, il y a parfois une religion, car "l'Élysée vaut bien une messe laïque."

  • Ah non!!!! Si vous employez le mot "écrivaine", je me fâche, tout rouge!!!!
    Et vous vous dites anti-moderne et anti-féministe????


    Je suis déçue, déçue, déçue.... et furieuse!

  • Je dis "écrivaine" pour Angot mais pas pour Colette, Mlle. La critique implique le sens de la nuance.

  • Quand on commence à employer le vocabulaire de l'ennemi...



    Si vous consentez à reconnaître que Madame de Sévigné est un grand écrivain (c'est celui qui écrit ses souvenirs dans sa chambre qui a contribué à sa fortune littéraire au XXe siècle), je ravalerai ma colère.

  • Ravalez ! Ravalez ! Il en restera toujours quelque chose !!!

  • Eh, c'est que vous accordez une importance quasi-religieuse au vocabulaire, Mlle, ce qui n'est pas le cas d'un catholique marxiste comme moi.
    Vous ne vous en sortirez pas de cette façon absurde : vous foncez dans les mots et les idées comme certain dans les moulins à vent ! Ce qui importe, c'est de changer la réalité sociale, qui déborde largement les mots. Moi je n'ai rien contre un bon néologisme ironique comme "écrivaine", à condition de ne pas commettre d'anachronisme en l'utilisant.

  • Psycho-rigide, Don Quichotte, moi qui pensais que le Carême était fini ! Ou alors c'est la Sainte **** aujourd'hui, mais je n'ai probablement pas le même calendrier que vous.


    Vu le métier que j'exerce (avec passion, c'est vrai), il serait mal venu que je n'accordasse point d'importance aux mots.


    Changer la réalité sociale, c'est de l'utopie, mais j'oubliais que vous êtes marxiste ; sous un autre pontife, vous auriez probablement été excommunié latae sententiae mais comme disait l'autre, "o tempora, o mores"
    "Des pauvres, vous en aurez toujours parmi vous..."

  • Avec passion, vous voulez dire que vous subissez, Fraülein ?

    Pas d'ac avec Kalle : Angot est beaucoup beaucoup plus amusante à la radio ou la télé que Nothomb. (Qui parle de lire leur blabla ?) Comme elle est réellement cinglée (alors que l'autre ne fait que semblant) et surtout très malhonnête (l'autre est une brave et laborieuse pondeuse de papier noirci), elle nous surprend toujours un peu.

    Bayrou a voté la loi Veil, non ? son laïcisme béarnais (qu'est-ce qui vaut bien une messe ?) n'est pas d'hier.

  • Chère Nadine,

    Lorsque j'enseigne, ce sont plutôt mes élèves qui subissent....

    Je sais, j'ai beaucoup de chance !

  • J'aime les femmes soumises, Nadine, c'est vrai, ça ne veut pas dire que vous devez répéter ce que je dis… (Une petite nuance rien que pour vous contredire : Angot n'est pas cinglée, elle est maladroite, c'est la manière dont elle récite par cœur sa leçon qui est touchante ; elle a tellement peur de se planter qu'elle sort les griffes lorsqu'on essaie de la déstabiliser. Tout le monde n'a pas le don inné de l'autopromotion comme BHL.)

    La mue de Bayrou en bon païen béarnais vaguement panthéiste est plus récente que vous ne croyez, Nadine. Ah, les femmes et le calcul…

  • Mouaif si elle n'est pas cinglée elle fait bien semblant alors (ce qui prouve qu'elle est très très malhonnête).

    Soumise peut-être mais butée aussi parfois : Bayrou a-t-il oui ou non voté la loi Veil ? je vous parie un bon livre que oui.

  • Nadine,

    Dans "Fräulein", le Umlaut porte sur le "a", non le "u".

    Bayrou aurait eu du mal à voter la loi Veil, puisqu'il n'est devenu député que plus de dix ans après son adoption. Mais quelle importance ? S'il avait été député à l'époque, soit il aurait lâchement voté pour, soit il se serait lâchement abstenu, soit encore il aurait voté contre... avant, quelques années ou décennies plus tard, de lâchement quémander l'absolution des féministes, probablement sous forme d'un entretien avec la rédaction de "Elle" ("j'étais jeune, j'étais influençable, j'étais mal informé, mais depuis j'ai ouvert les yeux, etc").

    Sur Nothomb, mille fois d'accord avec vous : elle fait semblant d'être cinglée (prétend préférer les fruits blets, porte des chapeaux à la con). La réalité est bien entendu qu'elle est une femme d'affaires sans scrupule, mentant notamment sur son parcours japonais. Sa vocation est de devenir une institution, suivant ainsi la tradition familiale, tout en confortant au passage la fortune elle aussi familiale (signalons ici, quitte à surprendre, que la classe politique la plus corrompue d'Europe n'est ni l'italienne ni la française mais la belge). Si elle était réellement cinglée, les fruits blets, elle les mangerait pour de bon. Et ce ne serait pas des chapeaux à la con qu'elle porterait (après tout, la femme la plus terre-à-terre de la planète, S.M. Elizabeth II, fait de même), mais des socquettes - je ne sais plus quel écrivain anglais avait noté (avec raison) que le plus sûr signe de pathologie mentale chez une femme, était le port de socquettes ("ankle socks").

  • Non, ce n'est pas du jeu, Nadine, les femmes sont par trop ignorantes des questions politiques pour que vous puissiez parier contre moi de façon équilibrée dans ce domaine. Essayez autre chose.

  • Vous avez deux fois raison Denis denis. En fait je me rappelais avoir lu il y a une dizaine d'année une interview de lui où il expliquait qu'il était contre l'avortement mais qu'en tant que député il l'aurait votée. Ma mémoire qui flanche a changé le conditionnel en indicatif, voilà tout. Trop jeune pour penser que Bayrou n'a pas pu la voter, trop vieille pour avoir un cerveau qui fonctionne convenablement, on dirait que je balance entre deux âges.

    Parier de façon équilibrée ? Quand je suis sûre je donne ma parole d'honneur, quand je suis certaine je parie (bon, là j'ai largement merdé mais vous aurez du mal à m'y reprendre, vous venez de manquer votre chance de gagner un pari contre moi, on s'en remet vous me direz, oui je sais).

  • S'il faut en croire le nom de ce blogue, le Lapinos est une espèce en voie d'extinction. Pas tout à fait la créature qu'on prendrait comme référence en matière d'économie... On rappellera, patiemment et pédagogiquement, que le prêt à intérêt est 1° un vrai travail et même un métier, égal en dignité à bien d'autres, et même parfois supérieur par la prise de risque qu'il implique 2° une activité aucunement condamnée par l'Evangile 3° un des piliers les plus anciens, et même littéralement antique, de l'économie occidentale (invention de même importance que, disons, la comptabilité en partie double au Moyen Âge). Quant aux "grandes familles de banquiers protestants", une fois de plus vous datez un peu : elles ont cessé d'exister depuis belle lurette (comme la plupart des dynasties juives), et les établissements par elles fondés, ont été absorbés par des entités dépourvues de toute identité familiale et a fortiori confessionnelle.

    Vous avez en revanche raison de ne pas voir d'opposition entre grâce et dévotion. Seulement, d'autres en voient une. Les Catholiques ont largement surmonté cet aspect des querelles théologiques du XVIe siècle, mais pas toujours les Protestants, loin de là. Lorsque je me laisse aller à confier que j'aime aller au Culte, que je pratique la communion fréquente, ou que (je suis luthérien) je ne fais pas de blocage de principe sur la pratique du signe de croix, des sourcils se froncent et des mines s'allongent, croyez-moi... Pour l'analyse intellectuelle de ce phénomène, voir Pierre Chaunu et son concept de "religion du non-geste". Pour ma part, je crois être un Protestant autrement orthodoxe que ces faces de carême, en disant que le fait même de me savoir sauvé par grâce seule, entraîne une gratitude et génère une joie telles que la dévotion est une réaction comme naturelle.

    Mais laissons là les trivialités théologiques ou économiques et venons-en à l'essentiel : François Bayrou. Sa biographie sur Wikipedia, il est vrai clairement rédigée par des contributeurs enamourés, ne mentionne pas d'appartenance politiquement incorrecte - le seul engagement ancien qui soit mentionné est celui-ci : "Jeune, François Bayrou est proche des mouvements non-violents, notamment de la communauté de Lanza del Vasto." Dites-nous en plus, Lapinos, sur les liens entre Pierre Debray et François Bayrou...

  • Sur quel(s) passage(s) de l'Évangile vous appuyez-vous pour dire que le prêt à intérêt est un travail moralement acceptable, Denis ? Sur la parabole des talents ? Plus sérieusement, je ne vois pas en quoi la prise de risque fait du métier de banquier un métier honorable ? À jouer au PMU on prend des risques aussi. Bien entendu, les "agioteurs" auxquels Delacroix et Baudelaire s'en prennent, par exemple, n'ont rien de "bibliques", car leurs critères d'investissement n'ont rien d'éthique ni d'esthétique ; je parle du XIXe siècle ; depuis il semblerait que le veau d'or soit astiqué avec toujours plus de soin et de bêtise.

    Je vais vous dire ce qui me gêne particulièrement dans le protestantisme, Denis, ce qui ne m'empêche pas d'admirer la haute figure de Luther (sans les princes allemands, qu'est-ce que la doctrine de Luther serait devenue ?), c'est que bien souvent le protestantisme a débouché sur un "Sauve-toi toi-même" bien pratique et qui détruit les liens sociaux (Cf. le séjour de L. Bloy au Danemark). Chaunu ne manque pas de courage non plus, mais c'est l'arbre qui cache la forêt.

    (La mauvaise foi de Nadine est telle que je ne devrais pas lui répondre, mais je suis "bonne pâte". trois choses : d'abord c'est pas à une gaulliste déclarée que je vais apprendre qu'on ne peut déduire l'action d'un homme politique de ses déclarations d'intention ; et puis le rappel que la loi Weil se présentait fourbement comme une loi qui allait restreindre l'avortement, le contraire de l'effet qu'elle a eu ; enfin, à en croire Mme Weil, c'est Bayrou qui serait le plus éloigné de sa sensibilité politique de tous les candidats politiquement corrects de droite et du centre-droit ; je dois avouer que cela me le rend un peu plus sympathique, bien que Bayrou se soit dépouillé de la doctrine de Pierre Debray à laquelle il adhéra, pour un costume plus présentable aux crétins qui iront rituellement sacrifier au sacro-saint suffrage universel le 22 avril prochain ; a-t-on vu des enfants de chœur plus graves que les assesseurs préposés aux urnes dans les bureaux de vote ?)

  • Qu'est-ce qui te chagrine tant dans cette histoire d'avortement, tes copines se sont fait avorter clandestinement de la prochaine génération des Lapinos ?

  • Et l'instinct de reproduction, vous en faites quoi, Driout ?

  • Prêt à intérêt. Je m'appuie tout bonnement sur le fait qu'il n'est pas condamné lorsqu'il est mentionné... Il est étonnant que vous présumiez que quelque chose est interdit, alors qu'un Chrétien étant libre, il devrait plutôt présumer que quelque chose est autorisé. Nul n'est plus éloigné du monde des banques, que votre serviteur (je n'ai ni placement ni emprunt bancaire, juste un compte courant non rémunéré), mais je crois profondément que l'estimation des risques est une tâche souvent délicate, qui nécessite une connaissance des activités humaines et surtout de la nature humaine, au-dessus de la moyenne ; de même que fournir à des personnes ou des institutions qui en sont dépourvues, les moyens de réaliser leurs projets ou leurs missions, me semble plus qu'honorable.

    Lien social. Au passage, merci pour Luther et Chaunu, qui tous deux méritent votre respect comme Léon Bloy mérite le mien. Mais je doute fort que le lien social soit moins distendu en Italie ou en Pologne (pour ne pas parler de la France), qu'en Scandinavie ou même aux Etats-Unis ; en fait, je pense le contraire.

    Simone, Pierre et François. D'abord, pardonnez mon côté secrétaire de rédaction refoulé, mais l'auteure (oui, avec un "e" ici justifié puisqu'on est en terra feminista), j'allais paradoxalement dire la "mère" de la loi sur l'avortement, est mariée à un homme dont le patronyme commence par "V", non "W" : pitié pour sa presque homonyme philosophe et catholique ! Ensuite, une précision, je vous prie : le Pierre Debray dont vous parlez est-il P. Debray-Ritzen ? Et enfin - désolé d'insister - quel lien l'Adour de la pensée avait-il donc avec lui ?

    J'allais oublier : j'ai été jeune assesseur dans les années 80 à Strasbourg, et puis vous certifier que l'on s'y amusait bien...

  • Moi je ne fais pas la différence entre les différentes races de lapin du moment qu'ils sont bien mijotés aux petits oignons et aux lardons !

    Mais au fait Lapin instinctif, tu as la fibre paternelle à ce point développée ?

  • Vous ne croyez pas au déterminisme social ? C'est une façon de voir bien protestante !
    Vous avez raison de sous-entendre que c'est plutôt l'usure qui est condamnée, comme un vol et que les Évangiles encouragent plutôt à faire fructifier la charité. Que pensez-vous de l'achat à crédit d'une maison pour deux ou trois fois son coût ? Et trente ans de remboursement, n'est-ce pas un déterminisme, une soumission excessive à l'argent qui entrave la liberté ? Le savetier a désormais le même sommeil que le financier…

    Encore que… ça se discute. Vous causez des risques, mais dans la période moderne, à partir de Law disons, les banquiers ont maintes fois prouvé qu'ils ne savaient pas calculer les risques, d'une part, et d'autre part qu'ils ne les assumaient pas toujours - quand on songe que la banqueroute du Crédit lyonnais n'a même pas été effective !

    Difficile à part ça de comparer l'ambiance entre les différents pays européens ; mais aux États-Unis, que je connais un peu, l'hypocrisie sociale est presque palpable ; le dollar cimente la société civile, mais le dialogue entre les communautés est très superficiel, stéréotypé. L'organisation juridique des États-Unis me paraît assez "protestante d'inspiration" ; elle fait un peu penser à l'organisation de l'Allemagne de Bismarck.

    (Bayrou a fait partie d'un cercle de réflexion animé par Pierre Debray - loin de moi l'idée de reprocher ça à Bayrou puisque moi-même, j'étais assez jeune mais néanmoins attentif, je trouvais Pierre Debray très pertinent.)

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