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Deuxième tableau

« Il est impossible de concevoir quoi que ce soit de plus contraire à cet idéal que la forme qu’a prise de nos jours la civilisation moderne, au terme d’une évolution de plusieurs siècles. »

À première vue Simone Weil peut paraître “évolutionniste”. Il n’en est rien, elle ne tire pas d’une probabilité scientifique une philosophie athée calamiteuse comme les nazis ou les démocrates capitalistes s'empressent de faire, histoire d'avoir une idée neuve brandir.
Qu’on comprenne bien : l'analogie faite par Simone Weil entre l’évolution animale observée par Darwin et l’évolution des sociétés humaines est de l’ordre de la métaphore.
Simone Weil analyse et synthétise, avec prudence, inspirée par la dialectique marxiste, une évolution historique de quelques siècles, en se focalisant sur la révolution industrielle et le grand chambardement économique et moral que cette révolution sournoise a provoqué. Entre une synthèse de quelques siècles et une synthèse de quelques millénaires, la différence est comme entre sonder une mare et sonder un étang.
En tant que créationniste, bien sûr, je regrette la référence de Simone Weil à Darwin ; mais on est en 1934, Simone Weil ignore l’usage que les démocrates laïcs vont faire de la théorie de l’évolution pour propager le relativisme et la foi naïve et dangereuse dans le Hasard - dangereuse comme la foi de certains catholiques dans l’opération du Saint-Esprit et de la prière pour répandre la bonne nouvelle.
Un penseur catholique contemporain utilise cette expression de civilisation “blessée au cœur” ; c’est une expression poétique, mais parler de civilisation “garrotée”, “entravée”, décrit mieux la réalité, ou, si l’on préfère une image, celle d’Ezra Pound enfermé dans une cage par les capitalistes yankis, comme un singe.

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Dans le schéma de Simone Weil, il y a deux pôles : l’homme primitif, opprimé directement par la nature, par la nécessité de trouver sa nourriture au jour le jour. Sa condition économique l’oblige à croire en Dieu, qu’il assimile aux forces surnaturelles de la nature qui l’écrasent. Sa liberté est extrêmement réduite.
À l’opposé, il y a l’homme contemporain, opprimé par les organisations sociales humaines, dont la taille et la puissance ont cru rapidement depuis le XIXe siècle. L’homme contemporain, lui, est empêché de croire en Dieu. L’oppression émane des organisations humaines, donc de l’homme. L’homme contemporain a donc foi dans l’organisation humaine, une foi qui n’est pas moins craintive que celle de l’homme primitif dans les forces de la nature. La société, qui a accru l'interdépendance des hommes entre eux au point que les plus faibles se sentent comme des fétus de paille emporté par la crue, complètement irrresponsables et sans prise sur leur destin, la société forme un écran opaque entre l'homme et la nature.

Ici on comprend pourquoi le discours sur la choa agaçait Simone Weil. Parce qu’il n’est pas fécond à ses yeux. Pointer du doigt telle organisation étatique, tel peuple, c’est un refus de voir la vérité. Pour Simone Weil comme pour l’évêque antinazi de Munster Mgr Von Galen, les bombes yankies qui dévastent l’Europe, c’est la barbarie yankie qui prend le relai de la barbarie nazie et l’homme capitaliste, le démocrate, n’est pas plus "évolué" qu’un nazi. Qu’il cesse donc de le proclamer sans relâche pour le PROUVER, pour prouver, par exemple, que le néo-colonialisme n'est pas un colonialisme encore plus cynique.

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À partir de ces deux pôles où l’oppression pèse d’un poids excessif sur les épaules de l’homme, Simone Weil ébauche une société libre idéale. De la nature de l’oppression capitaliste qu’elle schématise - forcément - et qui tient à la “disproportion monstrueuse entre l’homme et les systèmes qui régissent la vie humaine”, Simone Weil déduit la nécessité d’un travail lucide (Baudelaire, sur la même longueur d’onde, aurait ajouté “et désintéressé”), parce que le travail est au cœur de la morale, et, dans l’ordre de l’esprit, la nécessité d’une science désintéressée. Combien les capitalistes ont-ils inventé de métiers inutiles au plan social et nuisibles au plan moral ? Combien de métiers utiles au plan social et bénéfiques au plan moral ont-ils détruit dans le même temps ?
Lorsque les capitalistes s’en prennent aux putes du Bois de Boulogne, lorsque les capitalistes consentent des reportages à la télé sur la misère des banlieues françaises, au plan moral ils se foutent du monde. L’écologie, l’hygiène des bobos, leurs droits de l’Homme : poudre aux yeux. Je te fais la charité parce qu’un jour je pourrais me retrouver dans la même situation que toi, charité nulle, même si ce n’est qu’un discours de chanteur ringard, charité qu’on fait à soi-même.

« Les jeunes qui ont grandi dans ce système capitaliste, qui y grandissent, reflètent plus que les autres à l’intérieur d’eux-mêmes le chaos qui les entoure. »

Un libéral comme Sarkozy, élu par des gens usés, nostalgiques, peut promettre une réduction des dépenses, des économies à la jeunesse, faire miroiter des salaires plus confortables, tenir un discours “optimiste”, donner l’illusion qu’il exerce des responsabilités, plus qu’un autre, la jeune génération n’en a cure ; elle n’est pas aveugle, dans l’ensemble, elle voit bien en quoi l’argent dont la génération précédente n’a pas manqué a transformé ses parents : en esclaves, en corps vils.
On entend parfois de vieux soixante-huitards regretter que la jeune génération ne soit pas plus révoltée. Ils ont vu leurs gueules ? Cohn-Bendit, il s’est regardé dans une glace ? Qui a envie de ressembler à Sartre ?
Un siècle et demi après Guizot et son “Enrichissez-vous”, Sarkozy et Fillon tiennent toujours le même discours, ils n’ont fait que couper l’épargne et la probité - pas assez libérales -, au montage. Bonjour modernité… (À suivre)

Commentaires

  • Tu sais que je n'ai pas de portable, et encore moins un 3G donc je ne peux pas t'envoyer ma démonstration en images de synthèse que je t'avais préparé pour te prouver par a plus b que tu t'es gouré sur toute la ligne et que Simone Weil n'était pas philosophe mais faisait de l'auto-fiction comme C. Angot mais bien avant elle !

  • C'est le vrai Driout, là, ou un usurpateur ?

  • Lapinos aurais-je choqué tes chastes oreilles ?

    Mais bon Dieu ne me dis pas que ta Simone est arrivée vierge devant son créateur ? C'est qui déjà l'imbécile de Normale qui l'appelait la vierge rouge ?

  • Je cite : "l’usage que les démocrates laïcs vont faire de la théorie de l’évolution pour propager le relativisme et la foi naïve et dangereuse dans le Hasard"
    C'est vrai qu'en mélangeant tout, on obtient à coup sûr une confiture de n'importe quoi - un des fruits de la passion !
    Ceci étant, les créationnistes ont l'avantage sur les évolutionnistes d'avoir un point "zéro" en deça et au delà duquel il n'y a pas de limite.
    Ils ont ainsi marqué l'espace-temps, mais ce n'est ni de la théologie, ni de la philosophie : C'est purement mathématique, géomètrique.
    Jarry avait mis Dieu en équation, c'est vrai... Mais Platon l'avait déjà résolue.
    D'ailleurs Platon avait tout fait.

  • Tout inventé, vous vouliez dire ?

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