L’opinion publique française ignore tout de la Birmanie, de ses coutumes, de ses mœurs, de sa politique ; n’importe, postée devant la télévision, armée de sa zapette, elle a choisi son camp, s’est fabriquée son petit drapeau avec deux louches de philosophie, un zeste de “droit international” et une rengaine de Patrick Bruel. Et vive la démocratie !
Je suis un Français de souche. Qu’est-ce que ça signifie ? Par exemple que certains de mes ancêtres ont été spoliés de leurs terres au cours de la Révolution française. Et que d’autres ont bénéficié de ces spoliations. D’où une certaine pondération chez votre serviteur.
La révolte en Birmanie me rappelle que si ce maudit Louis XVI avait eu le courage de réprimer quelques milliers d’émeutiers, comme les généraux birmans viennent de le faire, les centaines de milliers de morts atroces que sa lâcheté et sa commisération ont entraîné auraient peut-être été évitées, ainsi que d’autres catastrophes plus spirituelles et la barbarie napoléonienne.
Mon ancêtre spolié a laissé quelques souvenirs imprimés. Il ne se plaint pas d’avoir été spolié mais se réjouit au contraire d’avoir eu, lui et ses enfants, la vie sauve.
Louis XVI est l’ancêtre de ces démocrates hypocrites qui rêvent de voir la guerre civile se propager en Birmanie. Qui méprisent le régime autoritaire birman mais font sans vergogne leurs courses en Chine de gadgets fabriqués par des esclaves chinois.
Un autre événement qui évoque des souvenirs cuisants, c’est la faillite récente de la “Northern Rocks”. Incapable de garantir la fiabilité de ses titres, cette banque britannique bien mal nommée a perdu en un instant la confiance de ses clients qui se sont précipités tels des moutons de Panurge pour retirer leurs liquidités.
En pleine crise financière, en 1716, la Régence mit sa confiance dans l’Écossais Law qui importa en France pour augmenter le volume de la monnaie en circulation le système de l’agiotage. Quatre ans plus tard, c’était la faillite, les clients de la banque de Law ayant perdu subitement toute confiance dans des actions qui spéculaient sur les trésors plus ou moins imaginaires de l’Inde et du Mississipi. Comme dit l’historien Duby, plus lucide sur les questions économiques que politiques : “La Régence a ouvert la boîte de Pandore.” Soixante-dix ans plus tard, après d’autres crises financières, notamment celle provoquée par la maudite “guerre d’Indépendance américaine”, c’était la sanglante Révolution française.
Il y a encore des idéologues comme le pseudo-économiste Michel Fitoussi ou le polytechnicien Jacques Attali pour se réjouir de l’invention de l’agiotage, ce grand bluff.
Pour eux le capitalisme, s’il n’est pas exactement le meilleur des mondes, est le meilleur des mondes POSSIBLES. Sinistres crétins ! Je m’empresse de dire que les économistes libéraux de droite sont aussi crétins, si ce n’est plus. La réalité que Fitoussi et Attali n’occultent pas dans leur discours, au moins, c’est qu’à l’origine du capitalisme, il y a une intervention décisive de l’État. Le capitalisme n’est pas tombé du ciel pour nous apporter paix et prospérité comme certains crétins libéraux de droite pensent. Si le Régent n’avait pas décidé de mettre en œuvre les méthodes de Law, celui-ci serait demeuré dans des tripots, à jouer au poker.
Pas facile de convaincre un idéologue de droite que Marx n’a rien à voir avec le communisme soviétique, qu’il est plus proche d’Aristote que de Lénine. L’idéologue de droite est une espèce plus sincère que l’idéologue de gauche, mais il n’est pas moins têtu.
Je dois admettre que les divagations de Jacques Attali, qui ose se dire marxiste, sont de nature à susciter la méfiance de n’importe quel honnête homme.
Pour corriger les défauts du capitalisme, qui pour ce Phillistin consistent seulement dans l’inégale répartition des richesses, Attali suggère de renforcer les institutions démocratiques ! Quel contresens historique et marxiste ! Primo Marx a blâmé sa propre race de s’occuper trop d’affaires d’argent, d’en faire une fin en soi. Ensuite Marx, c’est en cela qu’il est le digne héritier des Grecs, est un antidote contre l’idéologie, qu’il a combattue toute sa vie et qui ne résiste pas à son scalpel. Aussi Marx a prévu ce déferlement de gadgets promus par un "marketing" dément, tous ces gadgets qui fascinent Jacques Attali.
La démocratie - et, non pas l’égalité, la liberté et la fraternité qui la caractérisent, mais le nivellement social, scientifique et artistique, l’oppression économique et la concurrence acharnée - la démocratie est une CONSÉQUENCE du système capitaliste, sans lequel ce régime politique n’aurait pas été possible. En aucun cas pour un marxiste authentique la démocratie ne peut être un remède à l’oppression et aux carnages capitalistes du XXe siècle. Dans la démocratie en Amérique, le premier des services marchands, sans lequel la "nouvelle économie" n'aurait pas été possible, c'est la prostitution "via" internet.
Ici on voit une différence entre Sarkozy et son modèle F. Mitterrand. Si ce dernier avait pris pour bouffon ce major de l’X, Sarkozy, lui, paraît le prendre au sérieux.
Lorsque je vois la bobine du polytechnicien Attali, qui défie les probabilités, ou celle de l’économiste Fitoussi, ou encore celle du démocrate Bruel à la télé, en tant que Français de souche je pense au joueur de poker écossais Law.
Commentaires
D'accord avec vous bien entendu, toutefois gardez vous de taper trop sur Louis XVI (trop souvent c'est une mauvaise habitude dans nos rangs).
"Louis XVI est l’ancêtre de ces démocrates hypocrites qui rêvent de voir la guerre civile se propager en Birmanie." Non. Les raisons pour lesquelles Louis XVI n'a pas réagi fortement face à la Révolution, ne sont pas les mêmes que celles qui poussent les démocrates d'aujourd'hui à condamner toute "répression". Je vous renvoie pour cela à la correspondance du roi.
Les raisons de Louis XVI sont des raisons idéologiques. Il a même retardé le projet de fuite imaginé par son entourage, puis l'a fait capoter en cours de route, empêchant ainsi un rétablissement comme en Angleterre. Dans son (célèbre) testament, il a l'imbécillité de pardonner à tout le monde sauf à ceux qui ont voulu le sauver malgré lui - conception de la charité un peu bizarre.
"Baudelaire m'a appris à raisonner", et pour moi c'est toujours le chef qui est responsable. Je continue donc de penser que Louis XVI est plus coupable que Robespierre lui-même, arriviste fanatique qui ne serait pas arrivé s'il avait eu face à lui un chef tel que Louis XV.
Contrairement à ce que vous dites, Francis, nos contemporains sont assez indulgents avec Louis XVI, sa guerre d'Indépendance de l'Amérique, Lafayette, etc. Tout au plus le voient-ils comme un gros fat. C'est Louis XV qui est calomnié surtout par les démocrates, et c'est assez logique, de même que Marie-Antoinette, moins sotte que son mari et à qui David a réservé sa terrible caricature.
Les démocrates sont des bonzes, des bonzes gavés.
J'ai remarqué un truc amusant: Si il y a un type contre lequel tout le monde se ligue, bobos comme "réacs" ou marxistes (les lâches du marxisme, les trotskistes), c'est bien Robespierre.
Il y a pas meilleur signe pour moi que Robespierre est dans le vrai. La Terreur, voilà mon idéal politique.
Faudrait que je m'achète le bouquin de Zizek.