Quand Alphonse Allais inaugura l’art contemporain en grandes pompes (de clown) il y a plus d’un siècle, galerie Vivienne, déjà la civilisation montrait des signes de faiblesse. Toutes les conditions étaient réunies pour commencer de désespérer.
Malgré tout Allais s’accroche à la légèreté française : avec lui les illusions valsent, au lieu de foutre le camp, comme chez Céline.
L’humour potache érigé en art, le calembour élevé au rang de science, etc., il y a tout ça chez Allais, viking futuriste tiré à quatre épingles. Il possède dans sa pharmacie l’antidote au conformisme et à l'ennui démocratique. Il y a tout un tas de fioles cocasses. Un gugusse comme Finkielkraut, par exemple, improbable encore naguère, rendu possible aujourd’hui, semble sortir tout droit d’un conte défait d’Allais.
Il ne faut pas séparer abusivement Alphonse Allais de Léon Bloy. Le génial maniement de la langue, Bloy s’en rapproche aussi. Quant à Allais, il n’a rien d’un évolutionniste béat, c’est pour le moins un athée subtil comme on n’en fait plus.
Les deux amis faisaient la paire de désespérés. Désespérés, qui, paradoxalement, redonnent espoir ; aussi isolés soient-ils au milieu de la mer des démocrates-crétins, ils brillent comme un fanal dans la nuit.
Céline a pris le relais, donc. À ce propos, on observe qu’un des effets de la démocratie, du capitalisme, a été d’anéantir ou presque la culture populaire.
Après tout un fin lettré, un “humaniste” trouvera encore y compris dans des bouquins récents de quoi satisfaire sa curiosité intellectuelle. Les sources du savoir et de l'érudition, grâce à quelques-uns, ne sont pas complètement taries. Mais que reste-t-il de la littérature, de l’art populaire, que Céline et Allais incarnaient ?
Bien sûr il y a des types louches comme Patrick Besson, quand ce ne sont pas carrément des abrutis comme Guillaume Durand, pour vous expliquer que Jean-Marie Bigard, Harry Potter, Louis de Funès ou Amélie Nothomb, c’est de la littérature populaire. Mais c’est ce qui s’appelle se moquer du peuple.
Commentaires
"Toutes les conditions étaient réunies pour désespérer." Vous désespérez, mon chou ? Allons, on croirait entendre un philosophe salarié des services publics genre Fink, justement.
J'aimerais déjà qu'on m'explique en quoi Bigard, c'est de la littérature, c'est un comique...
Comique ? Vous n'êtes pas difficile.
Comme "écrire c'est une façon de parler sans être interrompu" et qu'il ne viendrait à l'esprit de le couper, pas même par un rire, alors ça en est...de la littérature.
Bigard est quand même plus drôle que Luchini, Blind Horse, vous ne trouvez pas ?
…et puis la vulgarité de Luchini est "surjouée" ; il a été coiffeur sans doute trop longtemps et habitué à parler un langage châtré avec ses clientes. Il y a chez Luchini comme l'explosion d'une sexualité trop longtemps retenue, tandis que Bigard, lui, est plus naturel (même s'il en rajoute aussi pour faire plaisir à son public sarkozyste).
Moi je trouve qu'il n'a été bon par lui-même qu'une seule fois, Luchini, dans "Perceval Le Gallois", l'adaptation de Rohmer.
Oui, bon, je n'ai pas dit ce que je pensais de Bigard, mais on dit qu'il est comique, et des fois je le trouve marrant - je suis sur que vous aussi, Lapinos. Enfin j'espère, on peut pas être hermétique à tout aussi?
(Luchini, par contre, n'est pas un comique)
Je suis comme le pape, il en faut un peu plus que Bigard pour me dérider.
Dis donc, faudrait penser à être pape réellement, vous êtes pas mal du tout en ça.