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En deuil

La bande-dessinée, je lui dois comme à Kipling ou Mark Twain, Stevenson, de m'avoir préservé du cinéma. De toute évidence, comme j'ai pu le constater très tôt en observant mes condisciples, le cinéma rend con à très grande vitesse, plus encore que l'abus de "shit" ; à peu près à égalité avec le football - spécialement les westerns et la science-fiction !

Aussi la mort de Raymond Macherot me fait-elle de la peine. Il n'y a plus beaucoup d'auteurs de bédé pour enfants comme Macherot aujourd'hui. Les séries les plus vulgaires, le genre "Astérix et Obélix", imité des "comics" yankis, écrasent le reste de la production. Il faut voir la ruée des mères de famille qui se précipitent à Noël dans les supermarchés pour acheter le dernier "Titeuf" ! Sans compter que, vu le niveau intellectuel désormais, on continue de lire des bandes-dessinées après douze ans et le public "adulte" est aussi large que le public des enfants.

Aussi médiocres soient "Titeuf" et "Astérix et Obélix", d'ailleurs, ils valent encore mieux que le cinéma dont on bourre le crâne des gosses yankis dès la maternelle et qui s'en prend directement à l'imagination. Il n'y a pas que les caméras de vidéo-surveillance qui sont le symbole du totalitarisme laïc.

Macherot, écologiste de gauche, était aussi connu dans certains milieux "réacs" madelinistes où son personnage de rat noir incarnant le mal avait été récupéré. Difficile aujourd'hui de faire plus politiquement correct que Madelin. C'est Macherot désormais le vrai paria. Comme je demandai un album pour mon neveu dans une boutique parisienne SPECIALISEE dans la bande-dessinée, le mec me répond : "Qui c'est ça Macheron ? "Chlorophylle et les Rats noirs" ? Hein ?"  : ça m'a donné envie d'acheter une batte de baseball au "Bon Campeur" et de revenir saccager sa vitrine pleine de mangas japonais.

Commentaires

  • Tous les auteurs de bandes-dessinées sont de grands cinéphiles, vous ne le saviez pas ? Et inversement, les cinéastes sont de grands consommateurs de comics. Ce qui prouve qu’entre ces deux arts, les vases sont communicants. Tiens, ça me fait penser que Spielberg, votre bête noire, s’apprête à adapter Tintin au cinéma. Je ne sais pas ce que ça va donner.

    A part ça, Macherot c’est très bien, quoiqu’il pâtisse des négligences de son éditeur. Tous les albums de Chlorophylle sont indisponibles. Dommage car l’invasion des rats noirs, c’est un sujet d’actualité. J'ai entendu dire que la gare Saint-Lazare, à Paris, est prise d'assaut par ces encombrants mammifères.

  • Les mauvais auteurs de bandes-dessinées, vous voulez dire, le genre Bilal ou Uderzo, ou encore Moebius.

    Le rapprochement entre la bédé et le cinéma est typiquement le genre de faux rapprochement qu'un esprit superficiel est tenté de faire. Fatalement le cinéma est un milieu de crétins dépourvus d'inspiration qui pillent la littérature et la culture populaire en général pour faire des films. Spielberg est loin d'être le seul exemple.
    Avec des arguments comme les vôtres, on peut aussi bien dire que la littérature et le cinéma sont proches, sous prétexte que Bégaudeau et Houellebecq font des films, ah, ah.
    Ce qui frappe chez les cinéastes, c'est la violence de leur connerie quand ce ne sont pas des escrocs rusés (Godard). Tandis qu'un type comme Macherot, même si ce n'était pas Michel-Ange, c'était un honnête artisan intelligent.
    ça peut peut-être paraître étrange à un laïc comme vous, mais du point de vue communiste il y a cent fois plus d'intelligence chez un boulanger et un charpentier que chez un cinéaste.

    Un type exceptionnellement intelligent pour un cinéaste, mettons Rohmer, qu'est-ce qu'il fait, il cause littérature et pas cinéma.
    S'il y a un rapprochement qui peut être fait, c'est entre la musique et le cinéma, car c'est parmi les musiciens qu'on trouve les artistes les plus bêtes. D'ailleurs Hegel avait prévu, non pas le cinéma, mais qu'à terme dans le régime laïc tous les citoyens deviendraient de petits philosophes OU de petits poètes : c'est la Star Académy, et c'est beaucoup plus intéressant que le cinoche car beaucoup plus didactique.

    (Même le dessin animé et la bédé sont très différents, et ce qui "fonctionnera" en bédé ne fonctionnera pas en dessin-animé.)

  • Bédéphile , voire " phage " incorrigible , je ne comprend pas votre diatribe anti Astérix ? Quand on observe les merdes éditées depuis , ben le p'tit Gaulois était pas mal , non ? Au deuxième degré , bien sur ...

    La production actuelle est à 99% minable , meme en science-fiction , mon domaine de prédilection , je vous l ' accorde .

    Mais Tintin , Astérix , voire le Spirou des premières années : quel bonheur !

    Peut - etre ne connaissez-vous pas réellement la BD , cher Lapinos ?

    A un age qui m ' autorise presque à quémander une humble retraite , je reste bédévore ... et m ' autorise bien sur un choix en feuilletant les saloperies étalées à la Fnac , pour quelquefois tomber sur une pépite ... Hé oui , çàa existe !

    Mais svp dites moi ce qui vous énerve avec notre Gaulois mangeur de sanglier aux champignons ?

    Merci !

  • Titeuf est assez emblématique de l'horreur moderne, c'est ce que je me dis chaque fois que j'aperçois sa silhouette d'abruti dans une vitrine. On a atteint le degré Titeuf de la culture. On pourrait garder le nom pour désigner cette étape historique.

  • Je remarque pour ma part que la BD européenne se compose aujourd'hui presque exclusivement d'histoire de SF ou d'Heroic-fantasy. Comme au cinéma, du reste, tout ce qui rentre dans le domaine du féerique est apprécié du "jeune" public consommateur. Le monde réel ça ne fait pas vendre.

    Quant à Mobius que vous semblez apprécié, il se dit lui même grand amateur de manga. Manga que vous semblez mépriser avec une certaine logique pour un marxiste, puisque c'est l'apologie constante de l'individualisme. L'histoire comptant toujours moins que la psychologie et les "sentiments" du/des personnages. Le Manga est à son lecteur un manuel de "dépassement de soi". En quelque sorte...

  • Toutes mes condoléances.
    Je me demande ce que vous pensez de la série Ibicus, de Rabaté : ça se passe pendant la RRRévolution russe (enfin, au début vu qu'il paraît qu'elle n'est pas finie), et l'auteur du roman dont elle est tirée, Alexis Tolstoi, a été député au soviet suprême. Vous avez forcément un avis, si vous connaissez ?
    Je l'aime beaucoup cette bd, je ne sais pas si c'est par gaullisme ou quoi. Les dessins (je crois que c'est du lavis mais je ne connais pas les termes techniques) sont épatants pour une philistine comme moi. Un de ces quatre je lirai le roman, qui est de 1924 et n'a pas l'air sans rapport avec le voyage au bout de la nuit, en très différent et beaucoup moins bien, mais quand même.

  • - Oui, pour les mangas, c'est bien vu, c'est tout à fait Kierkegaard ou Nitche pour les moins de dix ans (d'âge mental).

    - Pour moi "Astérix et Obélix" incarne la France franchouillarde gaulliste de l'après-guerre que je déteste ; le trait est copié sur celui de Walt Disney, c'est très répétitif, pas beaucoup d'imagination là-dedans.

    - M'est avis que vous êtes un peu grande pour lire des bédés, Nadine... Quoique "L'Histoire de la Sainte Russie", par G. Doré, pour une mère de famille ex-lectrice de la Comtesse de Ségur (votre côté sado-maso doit venir de là), soit indiquée. Meilleur que les G. Doré de la gare d'Orsay ou que les illustrations hyperchiadées plus connues.

  • C'est amusant ce que vous dites là, car si les messieurs lisent plus de bd que les dames, c'est sans doute que le petit garçon vit toujours dans l'homme fait (surtout de nos jours évidemment avec cette sorte de retour du matriarcat auquel nous assistons). En revanche le côté sado-maso comme vous dites, chez une femme je le vois comme la presque seule survivance de l'enfance. Excusez ma psychologie de bazar.

    Enfin tout ça pour dire que vous ne connaissez pas mon truc. Vu que vous-même ne vous jugez pas trop grand pour ces lectures, un jour où vous repasserez dans le magasin, jetez-y un coup d'oeil et dites-moi.

    Et vous vous trompez, je n'ai jamais été très intéressée par la Comtesse de Ségur ; contrairement à la plupart de mes amies non illettrées, je ne les ai même pas "tous lus" et encore moins relus. Je préférais les trois mousquetaires, le seul livre que j'aie lu de nombreuses fois (et qui contient beaucoup de scènes d'un sado-masochisme grossier d'ailleurs), et pour le reste, tout ce qui me tombait sous la main. Pour les illustrés, Tintin, Hansi et l'histoire de France pour les enfants de Bainville dont vous trouverez les dessins sulpiciens ou quelque chose comme ça mais que j'aimais beaucoup. Et puis un peu Blake et Mortimer puis Pratt mais surtout à cause de Corto Maltese qui a pris la relève d'Albator dans mon imaginaire de midinette en jupe-culotte.

    Mais je retiens votre conseil, ce livre va me plaire beaucoup, pour d'autres raisons que vous ne soupçonnez pas.

  • Parce que vous sortez avec Julien Doré, peut-être ?

    A part ça la psychologie ne me gêne pas si elle n'est pas freudienne mais scientifique. Le terme de matriarcat sert plutôt à qualifier les régimes primitifs dans lesquels la femme dispose d'un pouvoir légal plus important que l'homme.
    Nous sommes dans une société patriarcale fondée sur le code civil et la morale du bon père de famille. La tendance récente serait plutôt à lire des mangas débiles ou Harry Potter, sans distinction de sexe ; il y a presque autant de gonzesses que de gonzes sur la moquette des rayons bédé désormais.

    (Le sado-masochisme comme l'anorexie-boulimie est une conséquence du capitalisme ; les couples qui tiennent le plus longtemps sont ceux où il y en a un qui fait sado, et l'autre maso, un qui capitalise, l'autre qui consomme, c'est plus facile de trouver l'harmonie ainsi. Vous êtes peut-être trop maso pour apprécier vraiment la Comtesse de Ségur ?)

  • Non, ne me confondez pas avec Driout, Julien Doré, comment dire, n'est pas mon type (et quelquechose me dit qu'il me le rendrait bien s'il me connaissait). J'ai entendu une sorte de yaourt porno-mallarméen extrait de son album, sans prétendre être experte je trouve cela à chier. Non, c'est pour la guerre de Crimée, je commence ces temps-ci à m'intéresser fort à l'empire ottoman (en dilettante, comme d'habitude).

    Vous avez raison pour les mangas, je pensais plutôt aux gens de notre génération, je ne connais pas beaucoup de filles nées avant 1980 qui s'intéressent réellement à la bd, en possèdent beaucoup, etc. Ou alors des garçons manqués assumés. Ce serait bien d'avoir l'avis de Pimpeleu, qui est une de ces exceptions mais elle a l'air introuvable ces temps-ci ?

    (je ne comprends rien à votre parenthèse, comme toujours quand vous commencez à parler de capitalisme, mais c'est pas grave ; la Comtesse elle me rase, je ne sais pas pourquoi, peut-être que je ne voulais pas faire partie du troupeau des adoratrices, voilà, je ne voulais pas être une fillasse ça doit être aussi bête que ça, ça m'a refait le coup avec George Sand qui est pourtant très différente)

  • "L'Histoire de la Sainte-Russie" est à peu près aussi "historique" que Lucky-Luke, Nadine.

    Vous ne pigez pas ce que je dis à propos de Marx ? Alors je réexplique : il y a dans l'économie capitaliste une contradiction profonde entre la tendance à épargner (capitaliser) et la tendance à consommer. Jusque-là c'est clair ? On pourrait prendre pour illustrer ce propos l'exemple (assez répandu) de la femme pour qui un sou est un sou (la fourmi est une femme et la cigale un homme), mais qui est néanmoins prise sporadiquement de l'envie de dépenser son pécule en gadgets futiles.

    Bien. Ensuite Marx explique que cette tendance économique et politique (rigueur-augmentation de la dépense publique-rigueur-etc.) ne peut manquer d'avoir des conséquences morales. Vous comprenez que dans un Etat laïc, le mariage chrétien est appelé à disparaître et à être remplacé complètement (c'est déjà le cas à 90 %) par le mariage laïc ? Je veux dire par cet exemple que les lois morales et les moeurs découlent de la superstructure politique.

    Cette profonde contradiction, on la retrouve par conséquent dans les moeurs : l'anorexie-boulimie, le sado-masochisme, etc. Marx ne dit pas que le capitalisme a inventé l'anorexie-boulimie, le sado-masochisme, ni même l'usure, mais qu'il constitue un terreau fertile pour ces vices. La plus belle page de Marx à mes yeux, et qui en fait un grand théologien catholique, c'est celle où il démontre que l'essence de la bourgeoisie laïque, c'est la contradiction. Si l'Eglise catholique l'était restée, elle aurait flanqué Blaise Pascal puis Jean Guitton sur un bûcher, après G. Bruno, question d'économiser des vies.

    Puisque vous aimez la littérature, Nadine, je rappelle qu'avec la luxure on n'en est qu'au premier cercle de l'Enfer de Dante, en-deçà de la frontière du Styx, tandis que la simonie, l'hypocrisie, le mensonge, la trahison entraînent au fin fond, au huitième ou neuvième cercle.

    Vous conviendrez je pense que seul un régime laïc capitaliste pouvait porter le morne Sade aux nues et tous les soliloques débiles de petits garçons luthériens triturés par leurs mères qu'on appelle "existentialisme".

    (Pimpeleu était le même genre de gonzesse que vous, en moins maso et en plus sado, ce qui explique qu'elle soit allée se faire voir ailleurs.
    Quand vous dites que vous vous intéressez à la guerre de Crimée, ah, ah, c'te blague ! Vous me prenez pour un pâté de lièvre ou quoi ?)

  • Je ne vous prends pas du tout pour un pâté de lièvre (vous êtes devenu bien trop indigeste en devenant marxiste), c'est vrai. Je passe le plus clair de mon temps à combiner comment nous pourrions déménager nos pénates à Constantinople, figurez-vous. Et si on ne le confond pas avec un catéchisme, un livre fantaisiste qui évoque des faits historiques n'est pas à mépriser. Si vous lisez "Bons baisers de Russie", un bon tiers se déroule en Turquie à la fin des années 50, c'est très marrant et pas dénué d'intérêt.

    Merci de vos explications, j'ai bien compris votre propos et je crois que vous avez raison, surtout pour Sade, les soliloques existentialistes auxquels on peut ajouter la psychanalyse si on veut être exhaustif et enfoncer les portes ouvertes.

  • J'essaie pourtant de faire de plus en plus effilé ! Ce que je veux au bout du compte c'est que la lame soit si fine que - couic - le barbarin soit coupé en deux avant d'avoir eu le temps de dire "ouf".

    Bon voyage au bout des mille et une nuits. Après avoir essayé de soustraire du temps au temps, est-ce que vous ne songeriez pas à procéder par addition, maintenant. La quadrature du cercle vous résiste au moins autant que moi.

  • Et non pas autant qu'à toi! On saura jamais si la nuance a échappé à Nadine.

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