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Exit la Morale

- Pour comprendre l'immoralité chrétienne (cf. Lettres aux Hébreux), et pourquoi Jésus-Christ s'abstient de condamner les blasphémateurs juifs, romains, ou le criminel crucifié en même temps que lui, il faut comprendre que Jésus envisage l'homme dans son atavique faiblesse de condamné à mort. Tandis que la société, elle, sort renforcée de l'abnégation aveugle de ses membres les plus faibles, exige de chacun le consentement à la douleur.

- Rien n'est plus étranger au christianisme que le dolorisme ou l'esprit de sacrifice aveugle. La morale est le moyen social ou païen de combler la faiblesse humaine. Il n'est pas chrétien ; il n'est même pas juif.

On n'observe une telle religion chrétienne puritaine ou masochiste que dans des sociétés chrétiennes où le christianisme, c'est-à-dire l'amour, a été détourné de son but, pour le soumettre aux calculs de l'élite.

Il faut dire que le détournement est si manifeste et grossier, ou le christianisme de Richelieu, si on préfère, si nettement satanique, que ce type de subversion est constamment dénoncé dans l'Occident chrétien depuis qu'il est né ; je pourrais citer cinquante exemples marquants, mais Shakespeare est certainement celui dont le tranchant est le mieux aiguisé, le plus dissuasif de toute tentative de fonder sur le christianisme un ordre social quelconque, avec une force dont la violence sociale satanique a eu lieu de s'inquiéter (notamment le sinistre XVIIe siècle baroque de la superstition mathématico-juridique.)

- Shakespeare illustre ainsi ("Roméo et Juliette") que le romantisme sentimental est la formule de subversion satanique de l'amour chrétien par l'élite aristocratique et le clergé.

- Les institutions morales ou politiques constituent donc pour le chrétien un entraînement à la faiblesse, quand le Christ cherche à procurer à l'homme la force suffisante pour briser la chaîne de la vie et de la mort ; non pas comme l'anarchiste Ben Laden à se venger de la société, mais à la rendre inutile aux yeux de l'individu, affranchi de toute menace sociale par dieu.

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"Blanchir le sépulcre" : nulle expression ne traduit sans doute mieux le secret de l'anthropologie, qui est la religion la plus moderne, c'est-à-dire la plus moisie. On dirait aujourd'hui : "voir la vie en rose".

Religion et anthropologie sont donc deux notions qui se recoupent parfaitement, s'opposant à l'amour et à la parole divine chrétienne, la moins anthropologique. Probablement l'artiste le plus désintéressé est-il à même de comprendre l'esprit du christianisme, et qu'il n'y a rien de plus vain que le vernis macabre de la morale, pas de personnes plus confites dans l'éthique que les aliénés, et donc pas de personnes plus affaiblies ni vouées au charbon social.

Toutes les valeurs humaines passées ou présentes, soumises comme les sociétés à la métamorphose sont renversées par le Christ, illustrant constamment dans ses paraboles que le lien spirituel unissant dieu à l'homme, est à l'opposé du lien par lequel les hommes s'unissent entre eux, à commencer par celui, le plus primaire, du calcul, qui caractérise les lâches et les banquiers, et explique la proscription de l'argent dans toutes les pratiques ayant une prétention spirituelle. 

La morale plonge l'homme dans le coma et l'inconscience des réalités. A commencer par la première réalité de la grande faiblesse de l'homme. Le Christ ne tient pas de discours moral, car il veut sauver l'homme, et non lui maintenir la tête sous l'eau.

Ainsi Louis-Ferdinand Céline rend un hommage d'artiste au christianisme, quand il le loue pour son absence de bons sentiments, et donc son réalisme.

Cent recoupements peuvent être faits pour vérifier que, comme je l'affirme, il n'y a pas d'anthropologie chrétienne possible. Cette doctrine est celle de la synagogue de Satan. Et le tort des pharisiens déjà fut celui-ci, de donner le tour anthropologique et non spirituel à la loi juive.


Commentaires

  • Grave erreur : l'homme n'est pas un condamné à mort. Je compte bien m'en tirer autrement !

  • La civilisation progresse vers la néant sans s'en douter. Elle a foi en elle. Pas le Christ.
    Le stade de la modernité, déjà traduit la nostalgie du vieillard pour ses jeunes années. Les technocrates ont ripoliné la modernité et aseptisé comme il faut, mais les poètes qui l'ont conçue étaient beaucoup plus lucides sur son odeur.

  • Je suis d'accord avec l'esprit de votre billet Lapin, à ceci près que la société est avant tout faite d'hommes. Faire une distinction de responsabilité entre la société d'une part, et l'homme de l'autre, revient à rejoindre les économistes lorsqu'ils affirment que l'exploitation capitaliste est le fait du "marché" (fait, pensé, entretenu par des hommes).

  • J'ignore si mon précédent message est vraiment clair mais, l'endroit où je voulais venir est le terrain de la conscience collective occidentale, telle que pourrait la théoriser Orwell (ou même Malebranche, retournons au lycée). Bien que les hommes ne soient que les maillons d'une immense chaine à laquelle le diable tente d'adjoindre le plus d'éléments, des déterminants religieux et moraux (pas au sens avec lequel vous théorisez la morale Lapin) créent ce contradicteur mental avec lequel tout le monde se débat, et représenté dans les dessins-animés sous la forme de l'ange et du démon. Preuve en est la sociale-démocratie qui tente toujours d'expliquer par la puissance dialectique d'une part, et le hold-up de la raison de l'autre (comme le constatent Habermas et Adorno), les pires saloperies possibles. Si vous prenez un hindou ou un chinois, ces saloperies n'ont à souffrir d'une quelconque explication. Elles entrent naturellement dans l'espace sociétal, il ne songera pas même à donner un alibi, puisqu'il n'y a pas crime à ses yeux.

  • - Les religions orientales ont une conception divine de la nature, c'est-à-dire purifiée ou harmonique, point de vue insupportable pour un chrétien ou un juif, puisqu'il entérine la mort et le péché.

    - La philosophie morale allemande du XIXe a largement contribué à répandre ce culte dans l'Occident moderne, et pas toujours franchement "au nom de l'antéchrist" comme Nitche ou Hitler.

    - Cette philosophie fait les affaires de l'élite bourgeoise capitaliste. En effet, l'idéal d'une société parfaite, ou du "progrès social" afin de mettre entre parenthèses l'évidence des sévices sociaux actuels, partout dans le monde, y compris dans les nations les plus favorisées, cette idée n'est que le décalque de la nature purifiée. Une société parfaite fonctionnerait comme la nature, automatiquement, suivant un processus architectural ou mathématique.

    - Ainsi il est normal que le Dalaï Lama gobe la théorie de l'évolution biologique, bien qu'elle aboutit sur le plan de l'espèce humaine à des absurdités, et incite à voir dans l'homme un animal inférieur, moins bien armé que les autres espèces pour s'adapter, et donc "évoluer" (d'où les thèses pseudo-scientifiques d'amélioration raciale nazies).

    - Au sens où la responsabilité est le terme juridique pour faire croire que le monde est mené par des élites qui savent où elles vont et ce qu'elles font, vous avez raison, il n'y a aucun responsabilité, mais un entraînement démentiel vers des illusions, entretenues par de faux savants qui sont en fait des technocrates. Dont les conceptions scientifiques sont en réalité technocratiques, et qui conçoivent le cosmos comme un outil. La plupart des théories scientifiques modernes, souvent inspirées par des hommes d'Eglise, sont des conceptions du monde comme un langage ou un code. Des sciences-fiction. Déjà dans la science de Descartes, abusivement dite "rationnelle", il y a des "trous noirs", dus au problème qui consiste à intégrer la matière dans le langage humain. Les mathématiques créent le vide spatio-temporel comme le droit crée le vide juridique. Au moins depuis Aristote, les savants matérialistes mettent en garde contre l'abus de langage. Mais rien n'y fait, la religion a toujours le dessus sur le commun des mortels, car elle est beaucoup plus séduisante.

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