Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Droits de l'Homme égoïste

Dès le XIXe siècle, l'idéologie des droits de l'homme a été dénoncée comme une imposture ou un attrape-couillons. Il ne faut pas s'étonner de retrouver parmi les poètes ou les savants peu crédules vis-à-vis de l'utopie égalitaire, plusieurs chrétiens, en raison du fondement juridique de celle-ci.

- Pour Karl Marx, l'égalitarisme républicain est tout simplement impossible, et la morale pure des droits de l'homme qui en découle n'est autre que l'opium du peuple. Cela explique la censure efficace par l'éducation civique républicaine de l'histoire marxiste, opposée aux spéculations juridiques. Le recul du temps n'a fait que confirmer que les droits de l'homme occupent dans le système juridique républicain la place qu'occupait l'idéologie de la monarchie de droit divin dans l'ancien régime.

L'effort de Marx peut largement se résumer à un effort de destruction de la morale pure et de ses effets pervers. Le point de vue antagoniste de Nitche, qui veut au contraire restaurer la morale pure dans ses droits, s'appuie sur le négationnisme historique ; s'il y a bien un aspect qu'il est facile d'invalider dans la pensée de Nitche, c'est l'aspect historique. Ce moraliste allemand raisonne uniquement en termes de civilisation, or pour Marx la civilisation n'est qu'un masque, destiné à protéger la culture de vie païenne.

Dans le christianisme, la destruction de la morale pure est une condition "sine qua non" pour accéder à la spiritualité. L'épisode de l'évacuation brutale des marchands du Temple par Jésus est dans cette logique. Cet épisode a trop souvent été réduit à un mouvement de colère contre le mercantilisme, afin parfois d'en occulter le caractère anticlérical. Pour traduire l'accès de colère de Jésus, plutôt que de "commerce", il vaudrait mieux parler de "publicité", puisque celle-ci réunit les dimensions religieuses et commerciales. On peut parler du fanatisme religieux de l'Occident moderne, précisément à cause de son repli économique de plus en plus grand dans les limites du discours publicitaire. Des sociologues ou des thérapeutes s'étonnent parfois hypocritement du penchant des jeunes générations pour l'alcool ou la drogue, alors que la conscience de ces générations baigne le plus souvent dès le plus jeune âge dans la morale pure, c'est-à-dire la religion la plus aliénante.

- Révolté contre l'odeur de magasin des républiques modernes, à commencer par les Etats-Unis, d'une manière moins radicale que Marx, un autre Charles, Baudelaire, stigmatise aussi la débilité des droits de l'homme en démontrant de façon ironique que, si droits de l'homme il y avait, compte tenu de l'iniquité sans remède de la société, le droit au suicide devrait figurer au premier rang de ces droits. De fait il n'y a pas d'ignominie plus grande que, pour une nation, faire la guerre "au nom des droits de l'homme" et d'une liberté que ceux-ci n'ont jamais procuré qu'à quelques possédants égoïstes. Quels exemples et quel sentiment de supériorité les élites dirigeantes occidentales peuvent-elles retirer du sinistre fanion de la démocratie, quand la preuve est faite et visible par le monde, qu'elle n'a engendré que des esclaves du veau d'or ? Afin de compléter Marx et Baudelaire on peut dire que plus une société s'honore de ses bonnes intentions, plus elle se rapproche de l'enfer.

Les commentaires sont fermés.