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  • Leader charismatique

    Le charisme, chez un homme, est aussi ce qu'on peut appeler sa "part de féminité". Les apôtres chrétiens se privent volontairement de cette forme d'ascendant mystique sur autrui, dont la valeur est exclusivement sociale, et d'où les personnes morales tirent une bonne partie de leur puissance.

    Si un saint, par décret du droit catholique romain, est un personnage charismatique, l'imposture est avérée. Le cas de Jeanne d'Arc est assez flagrant, mais il en existe bien d'autres. Le christ Jésus est le plus dissuasif de se fier à quelqu'un, pour le seul prétexte qu'il invoque son nom. "Prudence du serpent, simplicité de la colombe." est un des plus belles devises chrétiennes. Comment un coeur pur ne se méfierait-il pas du marécage des questions sociales et de leurs solutions ? Jean-Jacques Rousseau a tort de se méfier seulement de l'argent et de son effet corrupteur sur la société. Il n'y a pas d'institution pure, elles sont toutes corruptibles. Seul l'individu peut accéder à la pureté : c'est ce qui explique que la porte vers le salut, dans le christianisme, est étroite, et non un large portail. C'est une extraordinaire perte de temps que le combat pour tenter de réformer la société ; un combat aussi dépourvu de spiritualité que l'exercice de la médecine. Il ne faut avoir de cesse, lorsqu'on croise un homme ou une femme doté d'une certaine force et de la volonté d'aimer, de les dissuader d'user cette force dans un combat inutile et perdu d'avance. Ici se situe selon moi l'amertume de Simone Weil : d'avoir cru que l'amour peut se situer sur le plan social, en même temps que le discernement suffisant pour comprendre que la pourriture sociale est irrémédiable. Elle s'est condamnée ainsi à exposer son effort spirituel à des hommes et des femmes d'élite -l'hypocrite Gustave Thibon-, qui n'en ont cure, et qui sont dotés de l'instinct que l'amour est destructeur des plans de l'élite. Sauf Judas il n'y a pas d'homme d'élite parmi les apôtres chrétiens. Ni aucune personnalité charismatique. La société trahit son ignominie par son culte systématique des assassins, des grands fauves politiques, dont le charisme est indiscutable. L'ignoble éthique des connards allemands dispense même l'élite de l'honnêteté.

    En dehors du christianisme, certains penseurs sont même parfois contraints d'admettre, par esprit de logique, que la confiance persistante dans le charisme, constitue le déni de démocratie le plus radical. Si on pousse la logique un peu plus loin, on verra même qu'en démocratie, tout est affaire de magnétisme, plus encore que dans des régimes politiques plus structurés. Le néant est sous les pieds des hommes d'élite qui ont fabriqué pour eux et leur descendance ce piège de cristal. Satan est mort, n'en déplaise à ceux qui ont cru bon de s'inspirer de lui. Mitres, crosses, au tapis.