Petit traité d'art contemporain (2)
Dans le mince "traité objectif d'histoire de l'art contemporain" qui reste à écrire, celui qui s'y collera pour les générations futures ne devra pas omettre de mentionner la bande-dessinée francophone.
Bien sûr, le premier réflexe lorsqu'on évoque l'art moderne capitaliste, c'est de penser au cinématographe qui coïncide avec l'épisode de croissance industrielle accéléré que l'Occident vient de subir. C'est aller un peu vite en besogne… La création artistique déborde parfois le principe un peu romantique de la solitude et du silence absolus sans lesquels la concentration des forces spirituelles de l'individu n'est pas possible, certes, il ne faut pas être trop "puriste"… mais on ne peut pas prétendre produire quelque chose de vraiment cohérent dans le brouhaha d'un plateau de tournage, le vrombissement sourd des moteurs et des machines et le jacassement aigü des starlettes… sans compter l'impératif de profit…
L'expression de "Septième art" est donc abusive, pour ne pas dire publicitaire. Le cinéma a très tôt été empêché de s'élever au-dessus d'un niveau qu'on peut qualifier, en faisant preuve de tolérance, d'"infra-littéraire".
Que reste-t-il des ballets muets filmés, et même des "belles américaines" d'antan, lorsque le capitalisme prenait son élan et n'occupait pas encore tous les recoins de liberté ?
La bande-dessinée mérite plus d'égards. On se situe-là plutôt au niveau de la "para-littérature", un cran au-dessus, grâce à des conditions de production et d'exploitation beaucoup moins lourdes. Même si la bande-dessinée a perdu elle aussi petit à petit beaucoup de son esprit d'indépendance.
Sinon le métier des dessinateurs de bande-dessinée est très inférieur à celui des peintres baroques, ça tombe sous le sens, mais il faut s'empresser d'ajouter que ça n'en est pas moins un vrai métier quand même, ce qui n'est déjà pas si mal quand l'amateurisme fait la loi un peu partout.
Comme le cinéma, la bédé cède souvent à l'adaptation de "classiques" de la littérature, faute d'esprit d'aventure aujourd'hui. Je me rappelle avoir été initié à Homère dans mon enfance par une bédé qui mettait habilement en images la guerre de Troie et m'avait fourni ainsi quelques points de repères précis. Et un auteur nord-américain a entrepris récemment de raconter toute l'Odyssée, en tentant de combler les incohérences du récit.
Le destin de la bande-dessinée est de toucher les enfants (de 7 à 17 ans) vu que c'est un mode d'expression bâtard dont la puissance suggestive est par conséquent limitée. Il emprunte beaucoup à la narration et un peu au dessin. Les tentatives de produire de la bande-dessinée pour adulte se sont d'ailleurs peu ou prou soldées par des échecs, en dehors de l'humour et de la caricature.
L'autobiographie en bédé, un genre très couru en ce moment car il plaît beaucoup aux bobos, est consternante lorsqu'elle est le fait d'auteurs qui se prennent au sérieux et se piquent de philosophie.
(Au plan artistique, le marché des adolescents attardés n'a quoi qu'il en soit pas beaucoup d'intérêt puisque c'est justement le créneau où l'influence de l'économie capitaliste est la plus nette.)
Pour illustrer mon propos sur le destin et la bâtardise de la bédé, je cite cet exemple récent d'adaptation d'un roman de Brautigan, Le Monstre des Hawklines, par un dénommé Nicolas Dumontheuil.
Il est typique en effet de l'erreur qui consiste pour un artiste à ignorer, par vanité le plus souvent, le cadre de sa discipline (Sur le même thème on parlera dans un autre chapitre du cas de Picasso).
Du trait de Dumontheuil, rien à dire, il a du métier, mais le choix de Brautigan est inepte. Les enfants ne peuvent pas s'intéresser à Brautigan ! Certains adultes non plus au demeurant, les ficelles de Brautigan sont un peu trop grosses.
Adapter Brautigan c'est peut-être l'assurance d'une bonne critique dans Libération, le quotidien des snobs en faillite, mais ça revient pour Dumontheuil à priver son ouvrage de jeunes lecteurs sincères et concernés.
Vu le niveau intellectuel des metteurs en scène français, on peut comprendre qu'ils souhaitent se lancer dans l'adaptation du Voyage au bout de la nuit, dès que le tabou sera écarté, pour essayer de faire du pognon sur le dos de Bardamu, mais de la part d'un artisan qui fabrique de la bande-dessinée, c'est un manque d'imagination un peu décevant.
Dumontheuil, à l'instar de son confrère Daniel Casanave, aurait mieux fait d'adapter Shakespeare pour inciter "nos chères têtes blondes" à faire l'effort supplémentaire de lire son théâtre… Avec Shakespeare, il n'y a pas de risque de se planter.
Commentaires
Pas d'accord pour reléguer la BD au rayon "enfants" !
C'est sûr, la BD n'est pas un art en soi, plutôt un mode d'expression dont on peut faire plusieurs choses, exactement comme l'écriture.
Pourtant, certains auteurs sont vraiment des artistes et la puissance évocatrice de ce qu'ils créeent dépassent la juxtaposition texte+image (je pense à Rabaté, Baudoin, David B., entre autres, mais le choix est évidemment subjectif et contestable). D'autres utilisent autrement la BD, par exemple pour faire des narrations/enquêtes, pas du tout destinées aux enfants non plus (celles de Joe Sacco, d'Etienne Davodeau, de Martin Vidberg par ex.) et d'autres encore, en effet, servent en effet un but strictement commercial.
Il y a de l'écho, dans la garenne...
Pas d'accord pour reléguer le cinéma dans "l'infra-littéraire !
C'est sûr, le cinéma est un art en soi, mieux qu'un mode d'expression dont on peut faire plusieurs choses, différent de l'écriture.
Certains cinéastes sont vraiment des artistes (malgré le brouhaha qui les environne pendant qu'il crée...en sachant qu'un film se crée véritablement au montage, seul ou en très petit comité) et la puissance évocatrice de ce qu'ils montrent dépasse la juxaposition image+son (je pense à Bresson, Blain, Bergman entre autres). D'autres utilisent autrement le cinéma, par exemple pour faire des documentaires-fiction (Peter Watkins, et je vous recommande très sérieusement et chaudement, vous Lapinos le féru de peinture, son exceptionnel "Munch" qui n'a rien à voir avec le Van Gogh de Pialat) et d'autres encore, en effet, servent en effet un but strictement commercial (Beson, Desplechin, Gans, Klapisch, Ozon)
Je n'ai pas parlé de juxtaposition, mais d'une dynamique dans laquelle le procédé narratif a une part essentielle. Une bonne bande dessinée, c'est avant tout un bon scénario qui imprime un bon rythme. La bande-dessinée n'est pas si visuelle que le pensent les béotiens.
On touche là à un des problèmes cruciaux que j'appelle la "bâtardise" de la bédé, qui permet de comprendre pourquoi c'est un moyen d'expression limité, bien qu'il échappe plus aisément que le cinéma à la condition de "produit soumis à un impératif de rentabilité".
Pour convaincre un public et atteindre son but naturellement, c'est-à-dire sans l'artifice d'une critique fort peu indépendante et passablement snobinarde - critique dont les auteurs que vous prenez la responsabilité d'applaudir ne pourraient se passer à peine de devoir se reconvertir dans la publicité ou le "story board" -, il est nécessaire que le scénariste forme avec le dessinateur un attelage intelligent. Autrement dit que la dynamique entre l'intrigue et l'image sur le papier soit précédée d'une compréhension entre les deux artisans, d'un partenariat inégal, le scénariste devant être capable d'assumer le rôle de maître-d'œuvre.
Et c'est très délicat, une vraie gageure ! Il peut se produire que ces deux talents différents se retrouvent chez le même homme, mais ça aussi c'est rare.
Cet obstacle assez élevé que vous retrouvez à l'échelle d'un binôme dans la bande-dessinée, il est démultiplié dans le cinéma.
Pour un Occidental comme moi, l'art est une activité éminement individuelle, singulière, même si elle s'appuie sur la tradition et qu'il ne lui est pas interdit d'en appeler à une puissance spirituelle extérieure. Les autres produits de l'activité humaine collective, plus communs, relèvent de l'industrie, de l'artisanat, même s'il y a des passages entre ces catégories, ce n'est pas un marxiste comme moi qui vous dira le contraire.
Une pensée ordonnée et non spéculative doit situer les phénomènes avec le plus de précision possible. Dans cette perspective, je dirais que le cinéma est une production industrielle à connotation littéraire (Je mets à part le dessin-animé qui présente un intérêt artistique un peu plus grand.)
De la part d'un cinéphile je comprends parfaitement la difficulté de prendre un peu de recul…
Il existe des films dont le scénario, la mise en scène (et même la tenue en main de la caméra), la musique, le montage et jusqu'au doublage, sont entre les mains du cinéaste-démiurge lui-même, tout seul, je ne suis pas certain que cela soit un préalable à ce qu'ils soient des oeuvres d'art pour autant, mais cela existe. Il existe des films tournés sans chef-opérateur sans décorateur, sans script, avec une camera-video numérique, voilà une activité individuelle et solitaire. Je reconnais qu'il s'agit là d'exceptions mais le brouhaha dont vous parlez n'est pas systématique, et un certain nombre de peintres, ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, créaient entourés d'une escouade d'apprentis et d'artisans, en plein tumulte.
Mais quelque chose me dit que je ne vous convaincrai pas. Haïssez-vous le cinéma après l'avoir trop aimé, ou bien n'en avez-vous jamais vu que l'écume, qui s'efforce de tout recouvrir ? Je ne vais pas, pour ma part, enterrer la philosophie occidentale à cause d'Onfray ou de Comte-Sponville, la littérature française à cause d'Orsenna ou de Zeller, ne jetez pas l'art cinématographique avec l'eau sale des zauteurs.
Ce que vous dites est amusant : si je cherche des artistes, je ne tombe presque que sur des auteurs de BD qui travaillent seuls, alors que si je cherche des auteurs commerciaux, des tas de duos (ou des gens qui travaillent à l’occasion en duo, ou des gens qui travaillent seuls mais feraient mieux de trouver un coauteur parce que l’un des deux talents leur fait manifestement défaut) me viennent à l’esprit.
A part ça, vous dites qu’en BD, le scénario joue toujours un rôle essentiel ? Peut-être. A moins que…la BD est encore jeune, il reste sans doute des formes à inventer, peut-être plus détachées de la narration, justement ?
Quoi qu’il en soit, même si vous avez raison, c'est vrai aussi de bien des oeuvres littéraires (je sens, là, que vous allez me citer Céline et le désintérêt total qu’il affichait pour le fond, mais ce n'est quand même pas le cas de tous les auteurs).
Au fond, en suivant votre raisonnement, on pourrait presque parler de "bâtardise" de la littérature, du fait de la double importance du récit d'une part et de la façon de raconter d'autre part. Et ce sans même entrer dans le débat de la contribution relative de l’un et de l’autre au souffle d’une œuvre.
(Quant au fait que c’est seulement à la condition d’avoir bonne presse que les artistes, sauf fortune exceptionnelle, peuvent exercer leur art plutôt qu’une activité commerciale rémunératrice qui en dérive, ce n’est pas le cas pour les écrivains ? Ni pour les peintres ?)
(Pardon pour les fautes honteuses dans mon premier commentaire, au passage.)
Moteur .
Tout à fait mon Lapinos ! Seul Andy Warhol est un véritable artiste inspiré par la caméra avec Sleep, Empire, Four stars etc;
Clap de fin .
Je vois bien que vous cherchez à me faire passer pour quelqu'un de pas très objectif, Maubreuil.
En réalité mon regard sur le cinéma est assez dépassionné, très loin de l'emphase disproportionnée de tel ou tel cinéphile, compression d'adjectifs rares à la César pour épater le bobo. Je ne tente pour ma part que de remettre les choses à leur place et d'expliquer en quoi le cinéma est une expression artistique typiquement capitaliste et démocratique.
Quand vous parlez d'un cinéma de démiurge, Maubreuil, vous faites allusion à "Bouge pas, meurs et ressuscite" ou à une de vos propres œuvres tournée au caméscope ?
Non, je pensais à Vincent Dieutre ou aux Straub (tiens, des marxistes !).
Sinon, il ne m'est jamais venu à l'idée de filmer quoi que ce soit pour en faire une oeuvre, je n'en ai ni le talent ni même l'envie, d'autant qu'en voilà un de beau travers de la modernité, se vouloir écrivain après avoir lu un roman émoustillant, s'imaginer artiste en empilant des cagettes ou des tubes à essai comme ce qu'on a découvert ébloui à la FIAC etc...
Que le cinéma soit aux mains des bourgeois, c'est un fait, mais aux marges, il ya des créateurs qui ne sont salis ni par le "capitalisme" ni par la "démocratie", et c'est bien pour cela qu'ils peinent à se faire produire, à se faire distribuer, même à se faire critiquer.
Bien sûr que vous n'êtes pas objectif ! C'est votre qualité première, c'est pour ça qu'on vous lit, pour rager !
Je veux bien évoquer le déclin actuel de la bande-dessinée parce qu'encore une fois ce métier est exercé par des gens qui ont un minimum de sérieux et de métier, et pas par des fumistes complets.
Pourquoi n'y a-t-il plus aujourd'hui aucun auteur actuellement capable de hausser ce moyen d'expression au niveau de ce que firent Hergé, Morris, Jijé, Jacques Martin, ou, dans une moindre mesure, Jean-Michel Charlier, Pratt, etc. ? (Je mets de côté les humoristes comme Reiser, Cabu, Sempé, qui travaillent dans un genre très particulier, satirique, de tradition plus ancienne et destiné aux adultes.)
Ce déclin explique en partie le succès des mangas japonais, dont le niveau moyen est pourtant très mauvais, sur le plan du dessin ça "saute aux yeux" (On note ici que les mangas sont précisément fabriqués suivant un processus quasiment industriel).
La raison est essentiellement économique. Au plan économique la bande-dessinée est devenue un "secteur très rentable" et la production est orientée par conséquent vers des produits très juteux, comme la suite des aventures de "Blake et Mortimer" et Cie, ce genre de choses pas très créatives, ou des séries raccoleuses comme Titeuf qui sont conçues en fonction des goût du plus grand nombre (Cette dernière conception de la production est quasiment généralisée dans le cinéma, typique de l'économie capitaliste).
D'autre part on discerne dans ce domaine comme dans les autres une tendance du capitalisme à s'auto-justifier. Dans le domaine de la bande-dessinée, un certain nombre de ce qu'il convient d'appeler des "suppôts du capitalisme", pour appeler un chat un chat, jouent un rôle influent et néfaste dans la bande-dessinée. J. Sfar est l'exemple typique, qui reproduit à la lettre la stratégie en vigueur dans le marché de l'art contemporain. En l'absence d'art, on décrète l'art, c'est un procédé facile. Tout le "talent" de Sfar, qui dans la bande-dessinée n'en a pas beaucoup, c'est de donner une légitimité artistique à la bédé, des "lettres de noblesse". Estampillées de ce label, les bédés intellos "fonctionnent" auprès des bobos, le marché est créé, et même s'il est restreint, il conforte le système libéral.
Sfar est un "philosophe", et ce n'est pas un hasard. Dans un régime capitaliste où il incombe à l'intelligentsia de faire passer les vessies pour des lanternes, le rôle du philosophe est crucial. Maubreuil m'a mal compris, j'observe au contraire la prolifération de la philosophie et des philosophes au détriment des scientifiques, des artistes, des historiens. De Finkielkraut à Stiegler en passant par Attali, Steiner, BHL, Philippe Val, Onfray, Comte-Sponville, Ferry, Sorman, la liste est longue et ils sont partout.
Tiens, la censure est en place ? C'est quoi "philosophe" avec des guillemets ? Et l'art, si ça ne se décrète pas, comment on sait que c'en est?
SI JE DEVAIS SUPPORTER L'INERTIE DE TOUS LES TYPES DANS VOTRE GENRE, SLOTHORP, JE NE POURRAIS PLUS AVANCER. FAITES UN STAGE D'ATTACHÉ DE PRESSE OU DE SECRÉTAIRE CHEZ JULDÉ, C'EST UN AUTHENTIQUE MARXISTE, SA PROSE EST ANTI-IDÉOLOGIQUE, IL VOUS GUÉRIRA PEUT-ÊTRE ?
Vous avez deux heures:
http://www.chez.com/exercicesfrancais/Dossiers/Devoirs/43.htm
S'il suffisait de se dire marxiste pour l'être, Maubreuil. Je ne vais pas vous apprendre l'importance des marques, signatures et estampilles dans le système actuel.
Il n'est pas difficile de comprendre en quoi des (dé)penseurs comme Attali, ex-directeur de la BERD, ou B. Stiegler, haut fonctionnaire au musée Pompidou, sont assez peu marxistes, mais avant tout des propagandistes du système démocratique et libéral qui les nourrit.
Les communistes français, bien entendu, sont encore moins marxistes, ils ne retiennent que la partie de la pensée de Marx la plus subjective et la moins étayée, la lutte des classes et le manifeste. Marx, supérieur à Hegel, n'est d'ailleurs pas dupe de cet aspect des choses, de l'impossibilité de la pensée à expliquer complètement la réalité et l'histoire passée comme à venir. Il y a une partie périssable dans la pensée de Marx, et il le sait très bien. Le sens de l'Histoire n'est pas une notion marxiste mais hégélienne ; Marx, lui, se borne à émettre un souhait, à spéculer sur une solution.
Par ailleurs, même sur le plan de la lutte des classes, étant donné que les gaullistes et les communistes se sont partagé le pouvoir après la Libération, c'est parfaitement ridicule. La "lutte des classes", dans la bouche d'un cheminot de la SNCF ou d'un facteur de Neuilly, qui revendiquent des augmentations de salaire pour pouvoir consommer plus, ça a de quoi faire marrer l'immigré clandestin qui travaille dans le bâtiment. Les communistes en France ont même intérêt à ne pas être trop marxistes.
Objectivement, le cinéma que vous décrivez n'a plus d'existence concrète, vous êtes obligé de l'admettre vous-même, Maubreuil. En outre, je le répète, la création d'un véritable moyen d'expression artistique, avec sa syntaxe propre, requiert une singularité et des moyens assez resserrés. C'est pour ça que je dis que la bande-dessinée est forcément limitée. Le cinéma s'éloigne encore plus des conditions requises pour une production artistique.
Je crois que vous feriez bien de vous concentrer sur l'évolution du dessin-animé, qui permet d'évacuer le problème des plateaux et des multiples divisions du travail de mise en scène, le dessin-animé qui se fabrique en quelque sorte en atelier, vous pigerez mieux les conséquences spécifiques de l'économie démocratique et libérale sur le cinéma. Ou alors je peux vous dessiner une courbe avec des pôles pour mieux vous aider à comprendre, mais je répugne un peu à ce procédé.
Déphilosopher, Maubreuil, c'est aussi perdre une partie de ses illusions, mais ça peut valoir la peine d'essayer. Je vous dis ça parce qu'il n'est pas exclu que vous ne compreniez même pas que je veux éviter de causer "dans l'absolu". Car c'est dans l'absolu qu'on peut faire d'une pissotière une œuvre d'art.
Votre pote Slothorp n'arrive même pas à piger ça, par exemple, et je suis obligé de l'empêcher de laisser des commentaires sur mon blogue car ils ne font que faire reculer le débat.
Pour moi il n'y a que les publicitaires auteurs de réclames pour la télévision et le cinéma qui soient d'authentiques créatifs ! C'est comme cela d'ailleurs que nous les appelons nous les professionnels de la profession.
Mais de quel débat parlez-vous? Il faudrait déjà répondre aux arguments que vos commentateurs vous opposent sans aller consulter votre fiche bristol sur le que sais-je à propos de Marx. (sur le dessin animé, vous faites une fois de plus la démonstration de votre totale ignorance, la division du travail y est encore plus élevée que pour des prises de vue réelles).
Merci docteur Perlimpinpin mais votre provocation, là, est trop grosse.
Si, si Lapinos, même un cinéphile peut vous comprendre, bien entendu en plissant le front, en suant à grosses gouttes et en reniflant, mais il peut y parvenir. Plutôt que de discourir sur ce qui fait que le cinéma n'est pas de l'art, au vu de ses moyens de productions pas assez resserrés, si nous nous intéressions aux oeuvres, au résultat final. Je me contrefous de savoir s'il y avait du bruit, d'incessants coups de téléphone de la production et des cohortes d'assistants aux ordres contradictoires sur le plateau du "Silence" quand je vois ce que Bergman en a fait, isolé dans son for intérieur quand il concevait son découpage et ses plans, isolé dans la cohue pendant qu'il filmait, isolé avec ses monteurs pendant qu'il montait. Le résulat est là, l'oeuvre d'art est là, tangible, ne souffrant pas discussion, même si elle est, ce qu'elles sont toutes bien entendu, le résultat d'un compromis. L'art c'est du compromis entre l'époque et un individu. S'il n'y a pas de compromis, l'art est peut-être là...mais personne ne le sait et donc personne ne le nomme.
Sinon, en BD, j'apprécie beaucoup Fred, cela aggrave-t-il mon cas ?
Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec vous, Driout, la pub c'est du cinéma qui a l'avantage d'être court.
Les acteurs qui jouent dans les pubs sont d'ailleurs souvent bien meilleurs que les acteurs de cinéma. C'est flagrant comme les géants du cinéma français, Deneuve, Bardot, Delon, Depardieu, sont complètement inexpressifs, au contraire des acteurs de cinéma. Ça vient sans doute de l'idée idiote que le cinéma est fait pour parler de la vraie vie. 95 % de la production cinématographique est influencée par des idées idiotes comme celle-ci, Driout. Des crétins comme Godard ou des enclumes comme Pialat, ils vont piquer des idées à la littérature, au théâtre, à la peinture, et forcément ça ne marche pas. Dans les 5 % restant il y a Buster Keaton, Walt Disney, mais les cartels ont rasé tout ça.
Les cartels ont rasé Walt Disney ?
Vous écrivez depuis votre chambre capitonnée ou ILS vous laissent sortir?
Bergman ? De la merde inodore et sans saveur pour les bobos. Soyez certain que je suis persuadé de tenir des propos plus modérés que les vôtres en disant ça, Maubreuil. Vous auriez pu au moins me citer un bon western avec John Wayne, mais non, il faut que vous répétiez ce que tout le monde dit.
Slothorp, vous êtes un vrai butor, je parlais précisément de s'intéresser à L'ÉVOLUTION du dessin-animé parce qu'elle se caractérise par la division accrue du travail et la soumission accrue à la rentabilité. Au début, des petites équipes restreintes autour de Disney, doté de moyens de production relativement indépendants.
Aujourd'hui, une division extrême du travail (le dessin animé a même failli disparaître aux États-Unis à cause des coûts de production, et il reste menacé), des projets bâtis en fonction des profits, ont entraîné l'effondrement de la qualité. On pourrait même imaginer une délocalisation de la production en Inde. L'histoire du dessin animé est justement celle d'une destruction assez rapide d'un mode d'expression para-artistique par le système économique américain.
(Gloups, je vous vire aussi, vous êtes globalement négatif, jamais vous n'apportez votre pierre, ne serait-ce qu'un gravillon, je ne vous demande pas beaucoup.)
Je ne connaissais pas ce passage de Georges Duhamel, Tlön. Je préfère la description ironique de Waugh dans "Vile Bodies", où on peut dire qu'il pose véritablement un regard d'aristocrate sur le cinéma, même si Waugh n'est pas un authentique aristocrate, comme vous savez. Waugh aussi voit bien en quoi Disney (et Chaplin, dit-il) émergent au-dessus de la production industrielle.
Duhamel fait deux observations, l'une que le produit est médiocre, et le discours des propagandistes de l'art contemporain sera toujours proportionnel à la nullité du produit, pour pouvoir berner Pinault et Arnault qui sont quand même des types qui ont du bon sens et ne débourseraient pas spontanément des millions pour des gadgets aussi laids qu'encombrants. Le critique d'art contemporain s'adresse au statut social de son client.
La deuxième observation, c'est que le cinéma ne demande pas d'effort à celui à qui il s'adresse. D. a raison, sauf qu'il ne pouvait pas prévoir un petit malin comme David Lynch qui s'emploie à casser la tête du spectateur avec des énigmes insolubles ; c'est complexe donc c'est sérieux, le cinéma sait parfaitement jouer là-dessus aussi désormais, le jeu du sudoku ou du casse-tête chinois.
Vous voyez bien la particularité de mon point de vue par rapport à Duhamel, Tlön. D. appartient à une époque où on pouvait se contenter d'observations. Aujourd'hui les observations ne suffisent plus, il faut des explications, il faudrait même pouvoir mettre aux critiques le nez dans leur merde sentencieuse. Pourquoi Domecq reste-t-il muet sur les plateaux de télé ? Mystère.
(J'aime bien la dernière question tendancieuse de votre devoir d'explication de texte, qui sous-tend que Duhamel a forcément tort et constitue un véritable casse-tête pour l'élève?)
Je dois avouer ne pas très bien comprendre les termes du débat.
Que le cinéma soit un art impur c'est un des lieux communs qui courent dpuis sa naissance (objet forain, art et industrie (Malraux), les thèses de Bazin etc...) donc rien de neuf...
Me semble plus interessant d'esayer de voir comment la cinéphilie (invention européenne il faut le préciser) a à voir avec une certaine forme de démocratie. Comment le cinéphile procède à un perpétuel travail de réévaluation et ce des le début de l'histoire du cinéma (Epstein et Chaplin ; la nouvelle vague avec Hitch et hawks; la nouvelle cinéphilie et la télévision..par ex)...Comment la cinéphilie s'est constitué contre l'approche littéraire du sujet (il suffit de se reporter aux premiers n° de La revue du Cinéma dans les années 20) en privilégiant l'aspect formel...
Mais bon est-ce vraiment l'endroit ?
Mais les bobos adorent les westerns avec John Wayne ! Ils ne manquent pas de préciser qu'ils n'adhèrent pas à ses idées politiques, mais ils se font une joie de s'entendre crier à la cantonnade qu'il n'y a rien de tel qu'un "bon vieux western !".
Si vous traitez Godard de crétin et Bergman de merde, je pense que nous n'arriverons nulle part. Donnez-moi une séquence ou un plan crétin chez Godard, pointez la merde chez Bergman, mais n'en restez pas aux insultes. C'est comme-ci vous me disiez que Courbet c'est pourri et Wagner trop nul, je ne peux pas vous prendre au sérieux dans ce type de débat (même si je sais pertinemment que vous êtes un provocateur de la pire espèce...comme un certain P.D d'ailleurs, qui donne sur son blog de touchantes preuves d'un amour pour un certain cinéma d'autrefois alors qu'il semble les passer ici par pertes et profits).
Histoire d'apporter mon grain de cailloux, le cinéma n'est pas un art parce qu'il n'a pas eu à affronter son pendant sacré, trop jeune pour ça, au contraire de la littérature, de la peinture, etc.
(L'allusion au baroque me semble pertinente alors que j'en suis à réfléchir sur Les Ménuines de Velasquez...)
En bref, je crois qu'il ne peut pas y avoir d'art, en théorie, donc qu'il ne peut y en avoir que théoriquement, sans la vision du sacré. La pub en ce sens est bien plus proche de l'art que le cinéma parce qu'elle ne peut pas faire l'économie de ce qui est sacré quand bien même elle ne l'identifie pas tout à fait comme tel.
C'est la même chose, Tlön, sauf que vous ne raisonnez pas en marxiste. Il est évident que la "cinéphilie" a un rapport direct, non pas avec "une certaine forme de démocratie", comme vous dites vaguement, mais avec le système démago-capitaliste dans lequel le cinéma s'est développé. C'est la différence entre l'art populaire et l'art démocratique, en quelque sorte.
En ce qui concerne la cinéphilie d'élite, ah, ah, dont vous vous revendiquez en quelque sorte, le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle a été tenue à l'écart du cinéma français car tous les cinéastes hexagonaux ont ce tic idiot de vouloir imiter la littérature, d'essayer de se donner un style en secouant leur caméra dans tous les sens - ou au contraire en faisant la sieste derrière -, et ils ne font ainsi qu'exprimer leur pédantisme et la faiblesse de leurs moyens artistiques (Où sont les films de Weyergans ?)
En ce qui concerne la bédéphilie, puisque vous aimez bien aborder le problème par le petit bout de la lorgnette, eu égard notamment aux budgets minimes de la bédé et à sa diffusion relativement restreinte, elle est restée dans le domaine de la ferveur populaire pendant longtemps. Vous cherchiez les termes du débat, les voilà. Pourquoi j'ai cette impression de jouer sur les mots avec vous, Tlön ?
Il vaut mieux aborder les choses par le grand côté, comme Baudelaire, que la contemplation de l'art d'une part, et de la technique industrielle d'autre part, assortie d'une vision morale élevée, inclinent à assigner à un moyen technique comme la photographie un rôle social pratique et technique. L'attitude d'hostilité de Baudelaire ou de Ingres vis-à-vis de la photographie n'en fait pas des "antimodernes", bien entendu, Baudelaire et Ingres ne sont pas assez cons pour attaquer une simple technique ; c'est contre un usage aberrant de la technique que s'élèvent ces deux modernes d'élite.
(Je reviendrai une autre fois sur Malraux, Tlön, et ses vanités empoisonnées ; s'il y a quelques faiblesses chez Baudelaire que certains se sont empressés d'exploiter à fond, Baudelaire a une valeur positive, tandis que je ne vois pas bien ce que Malraux a de positif et quand il dépasse l'évidence ?)
Nonon Slothorp, pas de bug. Faut que tu saches, tout de même, qu'en privé le lapin se vante de t’avoir fait fuir comme tous ses adversaires. J’ai bien essayé de lui expliquer que ce sont ses adversaires qui sont partis faute de pouvoir discuter sérieusement, et que je suis bien brave d’être restée aussi longtemps malgré son extrême condescendance, mais il n’a rien voulu savoir, ça n’arrangeait pas ses affaires. Car vois-tu, toi, Tlön, moi-même, aujourd’hui Gloups et demain d'autres encore, sommes des esprits négatifs. Or les esprits négatifs ne sont pas positifs, donc ils ne peuvent pas être scientifiques. Ceci est SCIENTIFIQUEMENT PROUVE par le maître Lapin.
Je n'ai pas eu l’honneur d’une censure jusque là car j'avais promis de respecter la volonté de Lapinos en ne revenant plus discuter sur son site. Je me permet d'enfreindre la règle une toute dernière fois, car il m'apparaît maintenant clairement ce que je n'avais pas voulu admettre: il a raison. Impossible de discuter, il se voit en provocateur, en pourfendeur du règne moderne et pousse ses raisonnements jusque dans des recoins totalement absurdes, incohérents, tout en les revendiquant à l'opposé de ce qu'ils sont : concrets.
Boucler Le Cinéma, La Bédé, La Science, Le Progrès et Ses Opposants dans le même panier, remplis à dégueuler de suppôts du méchant Kapital, c'est tellement vaste et éthéré comme logique… C’est l'irrationnel élevé au rang de Science, un concept tout nouveau, qui cela dit en passant est quand même bien pratique pour se la jouer chevalier sans peur.
Sur ce, je ne sais pas combien de temps ce commentaire hors sujet va rester lisible, alors chers lecteurs de Lapinos, bon vent.
(Je garde Maubreuil et Tlön, parce qu'ils m'excitent [le coup de Malraux n'est pas mal vu, par exemple] ; je vire Gloups et Slothorp parce qu'ils pourraient bien causer de tout autre chose, ça serait la même chose.)
Ce que vous me dites Maubreuil sur les bobos et John Wayne, c'est un peu ce que dit Renaud sur Bigard et les bobos, ça me laisse sceptique. Vraiment ? Les bobos de droite, alors, avec tout le paradoxe que cette expression contient…
Vous démontrer la faiblesse de Manet par rapport à Velasquez, en entrant dans la syntaxe de la peinture, ça pourrait être intéressant. Je veux bien causer bédé aussi si vous voulez, mais la nullité de Godard est tellement flagrante, le dilettantisme se lit sur le visage de ce gugusse, probablement assez malin pour ne pas être dupe de la valeur de sa propre activité, sur ce qu'il lui en coûte et sur ce que ça lui rapporte.
Ce que dit Pim est assez vrai, sauf que je ne me suis pas vanté d'avoir fait fuir Slothorp, je suis conscient que c'est presque impossible, je me suis vanté de l'avoir chassé, censuré, pour les raisons qu'elle dit. J'ai même regretté de ne pas l'avoir fait plus tôt, car la sélection a de grandes vertus.
(J'aime bien le paragraphe où le fantôme de Pim s'adresse à mes lecteurs pour leur tirer sa révérence. Si tous les spectres étaient aussi courtois, certes les pièces de Shakespeare n'auraient pas la même tournure.)
"Vous démontrer la faiblesse de Manet par rapport à Velasquez, en entrant dans la syntaxe de la peinture, ça pourrait être intéressant."
Ceci ne veut strictement rien dire !
J'ai connu un type qui était persuadé que l'homme n'était jamais allé sur la lune, que tout était truqué et je me suis rendu compte que tout dialogue était impossible puisque en dernière instance l'homme n'était jamais allé sur la lune, et que tous éléments contraires à ses dires ne faisaient que le conforter dans sa thése. C'est un peu l'impression que l'on a ici. Ne reste effectivement qu'une seule solution : le retrait
Tchao.
Oui, c'est un peu ténébreux, j'en conviens, l'idée de syntaxe de la peinture n'est guère parlante pour qui ne peint pas soi-même un peu. Cette question du langage pictural, je l'aborde de façon concrète depuis un moment, c'est pour ça que le propos de Hockney m'a touché, pourtant j'avoue que je ne maîtrise encore qu'imparfaitement la grammaire du clair-obscur moi-même. Bon film !
(Effectivement si de votre côté vous attendez le débarquement des Martiens, Tlön, ce dont on peut parfois vous soupçonner, l'amitié avec votre pote qui ne veut pas admettre qu'on a marché sur la lune était vouée à l'échec.)
Tout ce que je puis tirer de ce fatras abscons , pardon
mais je déteste le cinéma , sauf le dessin animé , c est
que Ludovic apprécie Fred ; ouf , enfin quelqu ' un
un peu humain ...merci !
J ' ai failli oublier : le fantome de Pim n ' a rien d ' excitant ...
Qu ' elle revienne en chair et en os , c ' est bien plus
parlant , et je ne crois pas que l ' occupant de la garenne s ' autorise à la virer . Me trompe-je ?
Bon , j ' men vais ...
Ils ont même ressuscité Corto Maltese :
http://www.lefigaro.fr/culture/20070124.WWW000000488_corto_maltese_est_de_retour_.html
Beaucoup de spectres hantent ces lieux.
Vous avez supprimé Slothorp et Gloups uniquement parce qu'ils vous ont remis à votre place, voilà tout. Et de quelle manière.
Pourquoi ne pas signer "Le Capitaine Dreyfus", tant que vous y êtes ?
Parce que.