Le christianisme regorge de symboles et de signes avant l'avènement du curé en costard-cravate, fonctionnaire de Dieu le portable vissé à l'oreille, frais émoulu de Sup. de Com. Issy-les-Moulineaux. Heureusement Balzac ou Villiers-de-l'Isle-Adam traînent encore au fond des bibliothèques.
La religion laïque privilégie la "richesse intérieure" aux symboles et aux reliques, soigneusement étiquettés, relégués par Chateaubriand, Proust ou Malraux dans les vitrines du musée (prononcez "morgue"). D'où le parfum de taxidermie et de naphtaline qui s'exhale de Proust, plutôt que de gâterie. Non pas la littérature "à l'estomac", mais la littérature à l'amidon ou au formol. Proust était déjà ringard pour ses contemporains, d'où vient qu'il est aussi branché aujourd'hui.
Mais du symbolisme, le peuple en réclame encore, il lui faut son lot de 14 Juillet emmerdants, de Marseillaises sanguinolentes et de matchs au "Stade de France".
Mais je ne connais pas de plus beau symbole laïc que la croix gammée. Une vraie trouvaille à mon avis, faite de bric et de broc sur fond rouge et noir.
Hegel contient toute l'idéologie laïque et la croix gammée contient tout Hegel. La croix subsiste, qui rappelle l'origine chrétienne des principes laïcs. Et puis cette sorte d'ébauche de roue carrée dont on ne sait pas bien si elle entraîne vers l'avant ou vers l'arrière. Les jeunes fanatiques laïcs qui en recouvrent les vieux symboles religieux se trompent d'ailleurs souvent de sens. Même les notables laïcs, à commencer par Hegel, on les sent parfois hésitants. Le cas du néo-darwinien Pascal Picq, ou de Jacques Attali, Michel Houellebecq, convaincus de l'avènement proche de l'homme biotechnologique, plus optimistes encore qu'Hitler, sont finalement des cas assez isolés. Peut-être même des espèces en voie de disparition. Chassez le surnaturel et il revient au galop.
Commentaires
Je me dis parfois que vous devriez écrire un roman. Vous êtes un énergumène sur le net, cela dit en toute sympathie.
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Difficile pour un catholique d'écrire un roman, Al Zeituni, étant donné que le roman repose sur le dédoublement de la personnalité. Un romancier qui n'est pas "double" ne fera que de mauvais romans comme la plupart de ceux qui paraissent aujourd'hui.
Prenons un exemple "extrême", Mauriac : par-devant c'est un lèche-cul du gaullisme comme pas possible, un démocrate-chrétien tiédasse à faire vomir les saints et les anges, qui passe son temps à ne pas se révolter contre des principes laïcs odieux.
Par-derrière il va pourtant dans ses romans brosser un tableau de la bourgeoisie démocrate-chrétienne bordelaise à donner des frissons dans le dos, un portrait que Karl Marx aurait peut-être trouvé exagérément noir. Personnellement je serais incapable de vous citer un exemple de littérature plus terrifiante que le "Noeud de vipères" ou "Thérèse D.", "Le Sagouin".
Pour écrire ça, Mauriac a dû oublier tout ce qu'il était et est resté jusqu'à sa mort par-devant : un immonde renégat démocrate-chrétien.
Idem pour Baudelaire, il est à la fois possédé par Satan et par Dieu.
Tout l'intérêt vient donc du dédoublement, et en même temps, le dualisme, pour un catholique, c'est le style de Satan.
Ici s'insère la remarque de T. Gautier, puis celle de Céline, sur le fait que Balzac n'a pas de style. Ils auraient aussi bien pu dire que Balzac n'était pas romancier, car de fait il ne l'est pas.