L'ennui ou la mélancolie est un des symptômes les plus sûrs de possession satanique. Celle-ci peut être plus ou moins puissante. Tous les possédés n'ont pas comme Don Juan une âme à se damner sans détours et affronter le spectre en face, ni même à flanquer le feu à quelque chapelle bretonne.
Les divertissements divers et variés, à commencer par le cinéma, mensonge fascinant, fournissent autant de dérivatifs, de façons de se traîner à reculons vers le gouffre.
A propos de dérivatif, qu'on ne dise pas d'ailleurs que le morbide Pascal, pour en être réduit à carrer des quarts de cercle et bidouiller des ellipses, ne crève pas d'ennui. Le modèle de Molière pour son Don Juan fut, dit-on, un mondain tombé en dévotion sur le tard. 'Don Juan' et 'Tartuffe' sont deux pièces, mais en un seul homme peuvent être réunis.
Commentaires
Finirez-vous un jour par écrire un réquisitoire contre le cinéma ou une condamnation de la musique? De mon point de vue, on a assez de Bossuet pour trouver des arguments et ils sont assez plombant comme ça. Par ailleurs, on n'est pas chez les talibans et personne ne le souhaite: le jour où la révolution adviendra, croyez-moi, les gens iront encore au ciné et écouteront encore de la pop - la société aura changé, pas la vie en général, il faudra toujours fournir des dérivatifs qui en allègent le poids, et de toute façon, dérivatif à part, je ne vois pas pourquoi on n'aimerait plus se faire plaisir.
A part un dictateur populiste (qui offre la garantie du travail et la sécurité en échange d'une soumission totale et sans réserves, ce qui n'est pas exactement le communisme), personne n'aura le goût d'enrayer ces divertissements en Europe ni d'abolir le plaisir - dommage que vous n'ayez pas les nôtres, mais vous ne serez pas obligés plus qu'aujourd'hui d'aller au ciné ni d'avoir des écouteurs sur les oreilles.
Un dictateur populiste ? Encore ! Vous manquez sacrément d'imagination, et c'est précisément un effet du cinéma de détruire l'imagination. Vous ne pensez pas sérieusement que, comme dans '1984' les bouquins vont être interdits ?
Non, c'est beaucoup plus simple de remplacer les livres par des dévédés ou des livres complètement idiots comme Harry Potter, Charles Dantzig, Jacques Attali... (je ne vous fais pas une liste) : comme ça personne ne proteste.
Rien n'est plus nuisible à la science que la fiction. D'ailleurs vous le voyez bien, vous faites des calculs de probabilité douteux sur l'avènement prochain d'une dictature ?? Vous vous bâtissez une véritable science-fiction.
Ressaisissez-vous ou vous allez vous retrouver dans la situation de Christine Lagarde, à prévoir la fin d'événements dont vous avez été incapable de prédire le début.
Le manque d'imagination vient d'ailleurs. Je ne vais pas au cinéma. Les réalisations collectives m'ennuient toujours un peu. Là où on a besoin de tant de personnel on ne peut faire rêver de création l'homme solitaire. Vous vous trompez aussi à propos des calculs de probabilité: je ne prévois rien. Si ce n'est - par manque d'imagination peut-être - une pérennisation de la musique portative. Mais quel scénario peut-on envisager à part celui-ci? J'en évoquais un sans y croire et surtout sans le souhaiter.
La littérature existe encore et n'est pas remplacée par quoi que ce soit. Il y a tout simplement que la démocratie n'a pas atténué cette différence entre une élite éclairée et une masse de gens qui s'agglutinent autour de la médiocrité. Là non plus je ne vois pas de changement probable.
Le cinéma n'est pas que dans les salles obscures, il est partout : Darwin et Einstein, c'est encore du cinéma. Un ordinateur, c'est du cinéma. La mécanique ondulatoire et le 'Temps retrouvé' aussi.
Le cinéma, on l'apprend à l'école laïque dès le plus jeune âge, qu'est-ce que vous croyez ?
Le cinéma naît bien avant les Frères Lumière, même s'il n'exerce une emprise totale que depuis peu. Il est déjà contenu dans Pythagore ou dans Platon. Rembrandt est un exemple d'art grotesque, altéré par la photographie.
C'est seulement l'emprise totale du cinéma qui est relativement récente.
Le cinéma n'est qu'une variante plus maligne de la musique, plus suggestive encore, d'ailleurs.
A mes yeux l'art est mort, annihilé petit à petit par la musique. Le Louvre est un cimetière : en le parcourant on constate que, dès le XVIIe siècle, la musique s'attaque à la peinture, à son érotisme : composition et tonalité commencent à devenir une obsession.
Bien sûr il n'y a de réalisation QUE collective, même si le cinéma incite à penser que c'est l'Homme qui a créé le Monde et n'a même d'autre but que cette science-fiction là.
L'utopie dans laquelle vous êtes que demain sera fait de beaucoup d'aujourd'hui additionné d'une louche de probabilités m'incite à penser que vous êtes une femme plutôt qu'un homme, Rackham. Ce qui rend fou les femmes, c'est l'aporie du lendemain, n'est-ce pas ? Génial garde-fou que les probabilités inventées par cette femelle de Blaise Pascal.