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Athéisme

Au fait, "athéisme" veut-il dire : ne pas croire en dieu, ou bien : croire en l'homme ?

Commentaires

  • Chesterton résume bien cette question : "Quand l'homme cesse de croire en Dieu, ça n'est pas pour croire en rien mais pour croire à n'importe quoi." Croire en l'homme, est-ce n'importe quoi ? Quant on y croit comme l'homme moderne y croit, avec autant d'angles morts, d'illusions et d'espoirs truqués, la réponse est naturellement oui.

  • On peut mieux dire que Chesterton : quand l'homme cesse de croire en Dieu, il croit dans l'Eglise catholique romaine, puisque celle-ci est la matrice du grand n'importe quoi moderne.
    Chesterton est l'auteur d'un mensonge semblable à celui de Nitche, qui consiste à faire croire que l'Eglise catholique est une Eglise conservatrice, alors qu'il n'en est rien : l'Eglise romaine invente en permanence son système de défense et de justification. L'Eglise romaine est essentiellement une institution décadente.

  • Bonjour,

    Coire en l'homme, c'est l'humanisme. Cet humanisme, dont se targuent tant les modernes, est déjà une dégénérescence : dans toute civilisation saine et équilibrée, c'est Dieu qui est occupe la place centrale. Placer l'homme au centre, c'est déjà effectuer un déplacement du point de concentration du centre vers la périphérie.

    Partant de là, quand on commence à perdre le centre de vue, c'est le début de la fin : cela mène dans un premier temps à l'agnosticisme, puis à l'athéisme et tout ce qui s'en suit : l'athéisme, et toutes les fantaisies qui vont avec : matérialisme, individualisme et rationalisme.

    Et cela débouche sur une civilisation monstrueuse telle que la civilisation moderne occidentale.

  • Ce n'est pas Nitche qui est un élucubrateur quand il indique que les principes que vous mentionnez -et qu'il vante également- sont des principes sataniques ; c'est vous qui l'êtes de faire passer vos principes pour chrétiens.
    Quant aux humanistes, très divers, il est probable qu'aucun n'aurait été abusé par le fait que la technocratie moderne est un totalitarisme, et la démocratie moderne un mode de surveillance et de contrôle des masses. Que la culture moderne se dise héritière de l'humanisme et des humanistes ne signifie pas qu'elle l'est. On pourrait mentionner de très nombreux principes modernes, parfaitement intolérables du point de vue "humaniste".

  • Certes, il n'y a plus grand chose d'humaniste chez la majorité de ceux qui se réclament de cette doctrine aujourd'hui, ni chez ceux qui pratiquent « l'humanitarisme », qui est un humanisme porté sur l'action et donc sur la matière, et généralement dénué d'esprit, car l'esprit ne peut être présent dans ce genre de mouvement.

    Mais c'est normal : dès lors que l'on perd le centre de vue, c'est à dire Dieu, le Christ, le Principe et l'Esprit, on est condamné à s'en éloigner indéfiniment et à voir son âme se désagréger dans le cosmos, comme cela se produit actuellement depuis quelques siècles, et cet éloignement continu et de plus en plus rapide ne semble pas près de s'arrêter.

    Dante, que vous citez souvent, est peut-être le dernier véritable grand intellectuel qu'ait connu l'Occident, en prenant cette fois-ci le mot « intellectuel » dans sa véritable et profonde signification. L'oeuvre de Dante est en quelque sorte le testament de l'Europe : elle laisse entrevoir ce qu'aurait pu être la civilisation occidentale, si la folie ne s'était pas emparée des hommes à la fin du Moyen-âge.

  • Je cite Dante Alighieri pour mentionner que sa philosophie platonicienne est démoniaque. Si l'idée s'est répandue en Occident d'un dieu traduit comme le grand architecte de l'univers, c'est largement à cause de la culture médiévale néo-platonicienne.

  • Il n'y a pas de « philosophie » chez Dante, ou du moins le côté philosophique y est secondaire et contingent : il y a au contraire chez Dante une vraie connaissance et un exposé magistral des doctrines traditionnelles (qui par nature n'ont rien de philosophique, à moins de prendre le mot « philosophique » dans un sens tellement large qu'il ne signifierait plus rien), et il fut certainement le dernier Occidental à les exprimer.

    Quand je parlais de testament de l'Europe, ce n'est pas à la Divine comédie que je pensais, mais au De Monarchia, où sont exposés les rapports et les liens idéaux qui devraient exister entre l'autorité spirituelle et le pouvoir temporel au sein d'une civilisation saine et équilibrée, comme le fut jadis l'Europe médiévale, avant que la folie des hommes ne renverse l'ordre naturel des choses au nom de l'humanisme, de l'égalitarisme, du rationalisme, et autres philosophies (car pour le coup il s'agit bien cette fois-ci de philosophies) délirantes du point de vue de la Science sacrée.

    Mais j'ai vu récemment que selon vous, la civilisation était satanique. Partant de là, effectivement, le De Monarchia de Dante lui-même serait satanique. Pouvez-vous me dire en quoi, selon vous, la civilisation est satanique ? Et de quelle civilisation parlez-vous ?

  • - C'est le principe civilisateur qui est satanique ; le principe civilisateur tel que les Egyptiens l'élevèrent au plus haut degré de pureté, au point que l'on peut penser que cette philosophie naturelle leur fut murmurée par Satan à l'oreille, tant la civilisation hyperboréenne est médiocre à côté.
    - Le satanisme des Egyptiens est officiel, il porte les marque et les symboles apparents de la culture de vie satanique ; tandis que la civilisation dite chrétienne, elle, est mue par un satanisme discret et officieux, qui ne dit pas son nom, mais que les évangiles et les apôtres désignent comme l'antichristianisme et la fornication, et dont l'apogée précède la fin du monde (cf. épîtres de Paul).

    - Vous avez raison de dire que le terme de "philosophie" est trop vague. La Béatrice de la "Divine Comédie" est la figuration d'une sagesse philosophique platonicienne/pythagoricienne. Quant au "De Monarchia", il ne fait qu'énoncer d'une autre manière les principes contenus dans la "Divine comédie" ; les deux ouvrages sont complémentaires. Un chrétien ne peut servir deux maîtres, et aucun potentat ne peut se réclamer du Christ sans commettre le péché de fornication. Nous verrons bien ce qu'il advient de la monarchie anglaise et de son simulacre de christianisme.

    - D'où tirez-vous que le moyen-âge fut une époque idéale ? En quoi ? Pourquoi ? Cette nostalgie d'un âge d'or révolu est le plus souvent le fait de ceux qui ignorent le sens de l'histoire chrétien.

  • Je crois comprendre ce que vous voulez dire. Mais dans ce cas j'aurai une autre question : si la civilisation est satanique, quel type de société ne l'est pas ?

    Car a priori il n'existe que deux types grands types de sociétés humaines : d'un côté les civilisations, de l'autre les peuples dits « primitifs » (l'adjectif « primitif » est en réalité très discutable) et/ou les peuples nomades. Or je ne crois pas que les seconds soient moins sous la coupe de Satan que les premiers.

    À moins que vous ne parliez des premières communautés chrétiennes du premier siècle, qui étaient des regroupements ne jouant aucun rôle dans la politique, n'ayant pas encore un art, une culture, etc... Et à qui Saint Paul recommandait même de ne pas se soumettre à la Loi (la Torah) mais de privilégier seulement la foi dans le Christ.

    D'un côté d'accord : dans un « monde idéal » entre guillemets, il n'y aurait pas civilisation. On imagine mal les anges, qui sont purs esprits, constituer des civilisations ou créer des oeuvres d'art, de même que si tous les hommes étaient totalement délivrés du mal, c'est à dire totalement soumis à Dieu, il n'auraient nul besoin d'être civilisés.

    Mais dans les conditions d'existence de l'état humain, l'immense majorité des hommes sont faibles, et leurs facultés sont inégalement réparties : certains sont doués d'un grande intelligence, certains ont la conscience ferme et innée de Dieu, etc... L'artiste, de part ses facultés et son apprentissage, pourra créer des oeuvres qui élèveront l'esprit de tous ceux qui les contempleront. Le sage pourra guider les moins sages, etc... Et ainsi, par la répartition des savoirs et des compétences, naît la civilisation, qui est peut-être un mal d'un point de vue absolu, mais qui est un bien relativement à l'état d'existence de l'être humain, à condition que Dieu y occupe la place centrale, ce qui n'est malheureusement plus le cas dans la monstrueuse civilisation moderne (contrairement au Moyen-âge européen justement).

    Si le christianisme n'est pas civilisateur, alors c'est peut-être une religion pour les anges et les hommes délivrés du mal, mais certainement pas pour l'ensemble de l'humanité...

  • Y a des aveuglements d'une innocence ou d'une hypocrisie si confondante qu'on se laisserait aller à préférer la petite musique du diable de l'antéchrist lui-même si on était pas dieu merci déjà prévenu.

  • Traduction sommaire de Fodio : "Il y'a des lecteurs du Lapin qui ne sont pas assez orthodoxes de la théologie-à-père-lapin et je suis trop paresseux pour expliquer en quoi ils ne le sont pas assez, et pour ne serait-ce qu'esquisser en quoi ce lapinisme moelleux a une quelconque supériorité sur leurs hérésies. Ces chiens ont même l'outrecuidance de développer leurs inepties non-lapinosiennes dans le terrier du maître. Tiens, je vais aller faire une sieste moi".

    Quel esprit évangélique, quelle bonne volonté chrétienne, quel amour du prochain criant ! Vous avez raison Fodio, allez vous rincer dans les mélopées diaboliques, vous êtes de toutes façon "prévenu", Dieu merci, vous êtes du bon côté de la barrière du salut, ça crève les yeux.

  • La civilisation est relativement utile, Bosnica, mais vous pouvez constater en lisant les évangiles que le Messie se désintéresse complètement des choses relatives : mariage, impôts, démocratie ou monarchie, rituels religieux, bref toutes les questions économiques. Sa rencontre avec Marthe et Marie est édifiante de ce point de vue : Marthe ne parvient pas à se détacher des questions sociales, et par conséquent Jésus est obligé de lui expliquer une deuxième fois que le principe social est un principe macabre.

    - Ce sont bien sûr les élites qui sont les plus attachées à la société, et celui qui ne tient pas un discours civilisateur AU NOM D'UNE CASTE SUPERIEURE, comme fait Nitche, n'est qu'un hypocrite et un menteur. Telles sont les marques de la civilisation occidentale judéo-chrétienne : l'hypocrisie et le mensonge AU NOM DU CHRIST. Cette civilisation n'est donc pas une civilisation ordinaire, mais un piège redoutable. Shakespeare nous montre que le ressort de ce piège est la doctrine sociale des Eglises dites chrétiennes.
    Le principe civilisateur était un principe de conservation - l'Eglise romaine en a fait un principe d'évolution, livrant l'humanité aux griffes du temps ; la seule logique de l'Eglise romaine est l'évolution sociale et l'adaptation au temps.

    - On ne peut suivre deux maîtres, et entre le Christ et Satan il faut choisir. En choisissant le camp de la civilisation ou de la doctrine sociale, qu'un chrétien baptisera doctrine mondaine, on choisit indubitablement le camp de Satan, consciemment comme Nitche, perfidement ou inconsciemment comme d'autres.

  • Disons le autrement : si vous êtes vous si bien pénétré des vérités du Lapin, et que tout le reste vous apparais d'évidence comme "innocence ou hypocrisie", alors, au boulot ! Illuminez les innocent, pourfendez les hypocrites ! Parce que l'apôtre-des-déjà-convaincus, c'est un peu facile je trouve.

  • Télescopage malheureux, c'est à Fodio que je parlais.

  • Lapinos > je suis bien d'accord, mais pouvait-il en être autrement ? Au premier siècle on a :
    - des civilisations déjà très stables et très anciennes.
    - la volonté de prêcher l'Évangile au plus grand nombre.

    Partant de là, les apôtres n'avaient pas d'autre solution que d'insérer le christianisme dans les civilisations et même, pour le faire triompher sur terre, de faire en sorte que le christianisme devienne l'autorité spirituelle des civilisations.

    Comment les choses auraient-elles pu se passer autrement ? À moins d'abolir la civilisation ? Mais dans les conditions d'existence de l'être humain, qui par suite du péché originel en est tombé à un degré extrême de dégénérescence (et aujourd'hui plus que jamais, car la Chute n'est pas terminée et s'accélère chaque jour), la civilisation est un mal nécessaire...

  • Si vous pouvez pas comprendre ce que dit Lapinos, Captain Angry, prenez au moins exemple sur lui, ne me jugez pas.
    Vous ne voulez pas choisir, et il m'apparait à la longue que Bosnica non plus, du coup je suggère qu'il est soit innocent soit hypocrite, soit perfide soit inconscient pour reprendre les termes de Lapinos.

    Maintenant que Lapinos soit plus patient et charitable que moi, c'est ce qu'il ne m'a pas semblé nécessaire de prouver après avoir passer une bonne heure à m'y essayer (d'accord je suis paresseux mais en l'occurence vous verrez que j'ai été plus que laborieux. Il se trouve que je l'ai même gardé cette réponse écrite hier et si ça vous intéresse je peux vous l'envoyer en privé, ça vous permettra de constater que un, je dis en gros la même chose que Lapin qui, je vous le rappelle, n'a jamais cru, au contraire de vous, qu'il tenait ces vérités de lui-même. Et en deux vous pourrez aussi constater qu'il le dit beaucoup mieux que moi. Mais voyez le résultat: la civilisation un mal nécessaire! et nécessaire à qui? ai-je besoin de vous le demander?

  • Qu'est ce que je viens faire là-dedans ? Je ne veux pas choisir quoi ? Je ne sais pas de quoi vous parlez.

  • "Si le christianisme n'est pas civilisateur, alors c'est peut-être une religion pour les anges et les hommes délivrés du mal, mais certainement pas pour l'ensemble de l'humanité..."

    Je vous avais dit un jour, Lapin, que vous me sembliez "prêcher aux saints". Je ne suis manifestement pas le seul à avoir cette impression, qui ne se dissipe que mal avec le temps. Cet élitisme vaut bien celui que vous prétendez pourfendre, par certains aspects. C'est aussi dans ce sens que je comprend la critique de Bosnica.


    "En choisissant le camp de la civilisation ou de la doctrine sociale, qu'un chrétien baptisera doctrine mondaine, on choisit indubitablement le camp de Satan, consciemment comme Nitche, perfidement ou inconsciemment comme d'autres."

    Je soumet à votre analyse un extrait de Simone Weil. Vous me direz si elle est selon vous consciemment dans le "camp de Satan", ou perfidement, ou inconsciemment.

    '[...]Ce monde est la porte fermée. C'est une barrière. Et, en même temps, c'est le passage.
    Deux prisonniers, dans des cachots voisins, qui communiquent par des coups frappés contre le mur. Le mur est ce qui les sépare, mais aussi ce qui leur permet de communiquer. Ainsi nous et Dieu. Toute séparation est un lien.

    En mettant tout notre désir de bien dans une chose, nous faisons de cette chose une condition de notre existence. Mais nous n'en faisons pas pour autant un bien. Nous voulons toujours autre chose qu'exister.
    Les choses créées ont pour essence d'être des intermédiaires. Elles sont des intermédiaires les unes vers les autres, et cela n'a pas de fin. Elles sont des intermédiaires vers Dieu. Les éprouver comme telles.
    [165]
    Les ponts des Grecs. - Nous en avons hérité. Mais nous n'en connaissons plus l'usage. Nous avons cru que c'était fait pour y bâtir des maisons. Nous y avons élevé des gratte-ciel où sans cesse nous ajoutons des étages. Nous ne savons plus que ce sont des ponts, des choses faites pour qu'on y passe, et que par là on va à Dieu.
    Seul celui qui aime Dieu d'un amour surnaturel peut regarder les moyens seulement comme des moyens.
    La puissance (et l'argent, ce passe-partout de la puissance) est le moyen pur. Par là même, c'est la fin suprême pour tous ceux qui n'ont pas compris.
    Ce monde, domaine de la nécessité, ne nous offre absolument rien sinon des moyens. Notre vouloir est sans cesse renvoyé d'un moyen à un autre comme une bille de billard.
    Tous les désirs sont contradictoires comme celui de la nourriture. [...]
    Le désir est mauvais et mensonger, mais pourtant sans le désir on ne rechercherait pas le véritable absolu, le véritable illimité. Il faut être passé par là. Malheur des êtres à qui la fatigue ôte cette énergie supplémentaire qui est la source du désir.
    Malheur aussi de ceux que le désir aveugle.
    Il faut accrocher son désir à l'axe des pôles.


    Qu'est-ce qu'il est sacrilège de détruire ? Non pas ce qui est bas, car cela n'a pas d'importance. Non pas ce qui est haut, car, le voudrait-on, on ne peut pas y toucher. Les metaxu. Les metaxu sont la région du bien et du mal.
    Ne priver aucun être humain de ses metaxu, c'est-à-dire de ces biens relatifs et mélangés (foyer, patrie, traditions, culture, etc.) qui réchauffent et nourrissent l'âme et sans lesquels, en dehors de la sainteté, une vie humaine n'est pas possible.
    Les vrais biens terrestres sont des metaxu. On ne peut respecter ceux d'autrui que dans la mesure où l'on regarde ceux qu'on possède seulement comme des metaxu, ce qui implique qu'on est déjà en route vers le point où l'on peut s'en passer. Pour respecter par exemple les patries étrangères, il faut faire de sa propre patrie, non pas une idole, mais un échelon vers Dieu.
    Toutes les facultés jouant librement et sans se mélanger à partir d'un principe un. C'est le microcosme, l'imitation du monde. Le Christ selon saint Thomas. Le Juste de la République. Quand Platon parle de la spécialisation, il parle de la spécialisation [167] des facultés dans l'homme et non pas de la spécialisation des hommes ; de même pour la hiérarchie. - Le temporel n'ayant de sens que par et pour le spirituel, mais n'étant pas mélangé au spirituel. Y menant par nostalgie, par dé-passement. C'est le temporel comme pont, comme metaxu. C'est la vocation grecque et provençale.
    Civilisation des Grecs. Aucune adoration de la force. Le temporel n'était qu'un pont."

    Simone Weil résume beaucoup mieux que je ne le saurais faire cette question, et je ne crois pas que c'est par sorcellerie satanique, ou rhétorique, que je la trouve plus convaincante que vous sur ce point précis.

    Soyons prosaïque :


    - Connaissez vous un moyen plus universel de chercher la vérité que par la fréquentation critique de l'erreur, fût elle civilisationnelle ? Vous n'avez pas une ligne directe vers l'esprit de vérité, n'est-ce pas ? Sans le dépôt culturel de l'occident chrétien, de la civilisation occidentale, comment auriez vous rencontré Shakespeare, Bacon, Marx même ?

    - Comprenez vous "Rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu" dans le sens "tout reprendre à César, et tout rendre à Dieu" ?

    - Si je trouve vos chers Bacon et Shakespeare dans une bibliothèque publique, édifice si typique du paradoxe civilisationnel, puis-je quand même les lire ?

    - En somme, ne peux t-on pas trier dans le principe civilisateur, dans la culture même, entre ce qui est proprement un mal, un mensonge ou une iniquité nécessaire à la société et aux élites, en effet, et ce qui est en puissance un "pont", pont qui, s'y l'on ne l'idolâtre pas, peut concourir à disposer l'esprit à la vérité, au salut ?

    - Enfin : Qu'est-ce qui d'après vous favorise le plus chez l'homme la liberté et l'esprit critique : qu'il soit laissé à lui même, laissé à la merci de tout les vents menteurs de l'air ambiant, à la merci de tout les lieux communs de caniveau qui font l'esprit du temps, à la merci de tout les paradoxes modernes, à la merci de ses appétits si bien sollicités par la publicité ? Ou bien qu'il soit aux prises à un principe plus proprement civilisateur, culturel, traditionnel éventuellement, qui aussi menteur et déformateur soit-il, mettra tout de même l'homme de bonne volonté en contact avec ses propres facultés d'intelligence, quitte à ce qu'il s'attache à "tuer la mère" par la suite ?

    - Je crois moi que le principe civilisateur antique, hétéronome, a plus de mérites, est plus formateur pour l'esprit (le plus souvent collatéralement peut être d'ailleurs), que le principe d'autonomie individualiste piégeur de notre temps. Pour être prosaïque, la plupart de mes amis musulmans, hindou, ou plus généralement traditionalistes, me semblent bien plus disposés à comprendre votre critique, et à comprendre quoi que ce soit de spirituel à vrai dire, que certains de mes amis "individualistes", qui se défient "libertairement" des choses de la tradition, en en comprenant pas les trois quart en général.

    - Le principe individualiste dominant donc, disons américain, est un détour plus long que ne l'est la culture, un détour plus long pour se défaire du prestige qu'exerce la culture y compris. Je sais naturellement que ce principe individualiste n'est qu'une basse parodie de individualisme qui a vos faveurs, mais il est aussi bien plus courant que votre individualisme "français" idéal.

  • Pour préciser l'esprit de ma réponse, dans un effort un peu synthétique :

    - Je me fais ici naturellement un peu une fois de plus l'avocat du diable, si j'ose dire (c'est une mauvaise boutade). Je crois avoir à peu près saisi en quoi la civilisation est généralement un mobile macabre, et en quoi le christianisme est l'un des plus solide révélateur de cet état de fait. Je vous dois cette compréhension, pour tout dire, à vous et a quelques autres. C'est une dète certaine, même si je n'ai pas encore prévu de me faire tatouer votre nom sur la fesse droite comme l'ami Fodio.

    - Il y a ensuite que je suis peut être encore trop "grec", probablement pas assez chrétien selon votre gout. J'essaye donc, non pas d'acoquiner l'esprit chrétien avec le naufrage de la civilisation, mon gout de la dialectique ne va pas jusque là. J'essaye simplement d'avoir la juste et claire conscience de ce qui peut dans le principe civilisationnel, ou traditionnel, mener à la vérité, parfois même "accidentellement", sur le plan des dispositions d'esprit notamment, et mener à la liberté. Ne pas s'y intéresser, et jeter ainsi le bébé avec l'eau du bain, me semble condamner de fait les neufs dixièmes de mes prochains à mourir dans le ventre de la civilisation. Je soupçonne que, "là ou croît le péril, croît aussi ce qui sauve", pour citer le poète allemand, Hölderlin. Je le soupçonne et l'espère, même si l'espérance est parfois elle aussi une maîtresse dévoreuse. "Ce qui fait de l'Etat un enfer, c'est que l'homme essaie d'en faire un paradis."




    - Ne faut-il pas, avant d'être éventuellement "surhumainement" disposé à la vérité, avant d'être sur les rails de l'effort spirituels, être sois-même humain ? "Mais celui qui est un homme ne peut-il pas plus que cent qui sont seulement des tronçons d'hommes?". Hölderlin, toujours. La déshumanisation qui accompagne souvent le rejet strict des héritages civilisationnels, ou traditionnels et qui fait de l'homme moins qu'un porc, me semble être un risque presque aussi élevé que celui que fait courir la trahison civilisationnelle de la parole, de la sagesse et de la science au salut des hommes, pour le dire vite.

  • Bosnica, dans le fond vous m'opposez l'inéluctable corruption humaine, alors que l'esprit de la parole divine est de fournir les armes pour s'y opposer, et ne pas céder à la tentation de la civilisation, tentation exactement semblable à celle que subissent Adam et Eve dans la fable.

    - Et je vous réponds : Hamlet s'oppose à la civilisation - il trucide symboliquement mais sans pitié ses acteurs ; quiconque fait avancer la liberté ou l'amour fait de même, car il n'y a pas de place pour l'amour ou pour la liberté dans la civilisation. Vous êtes persuadé de la décadence du monde moderne ? Eh bien cette décadence est indissociable du mensonge chrétien de la civilisation d'amour, que l'on nomme démocratie, et qui a déjà servi d'argument à des chefs de guerre pour trucider des centaines de millions d'hommes. Je vous oppose que le combat est inéluctable, jusqu'à la fin des temps. "Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre : je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive." dit le Messie, mettant ainsi un terme définitif dans l'esprit de ses fidèles à la croyance dans un monde idéal civilisé, ou ne serait-ce qu'équilibré.

  • Tout simplement, AngryRobot, dans la vertu dont les religions païennes font un but, le chrétien voit seulement un moyen. Je n'ai jamais dit que le Messie est suicidaire ou qu'il s'autoflagelle -ça c'est Nitche qui le dit afin de le diffamer- j'ai dit qu'il a été assassiné par les représentants de la civilisation, parce que ceux-ci ne peuvent pas se permettre de laisser s'exprimer quiconque prétend que la civilisation n'a pas de véritable logique, ou que la culture est opium pour les faibles.
    - Je n'ai pas tenu un discours puritain : le puritanisme n'est autre que la fausse vertu chrétienne moderne.
    - "On ne triomphe de la nature qu'en s'y soumettant." est la réponse de Bacon à votre questionnement.

  • "On ne triomphe de la nature qu'en s'y soumettant."

    Je pige que couac à ce paradoxe là. Ca me rappelle le mot de Wilde : "Le seul moyen de se délivrer de la tentation, c'est d'y céder".

    Sur Bacon : triompher de la matière par la soumission à la matière ? Une exégèse s'impose.

  • Savoir que Francis Bacon a conçu une théologie renversant les principes de la théologie scolastique médiévale peut aider à le comprendre (je vous recommande la lecture de "Du progrès et de la promotion des savoirs"). C'est une théologie "paulinienne", c'est-à-dire synthétique et la plus explicite possible. Cet aspect de rejet de la culture chrétienne médiévale est d'ailleurs un axe essentiel pour comprendre Shakespeare.
    - Bacon combat la science juridico-mathématique abstraite, qui trouve selon lui son origine dans la tentative scolastique subversive de concilier la théologie chrétienne avec la morale et le droit. D'une manière drastique, disons que votre comportement moral ou immoral passé ne vous rapprochera ni ne vous éloignera de l'essentiel, c'est-à-dire de la vérité divine. La vertu est, selon la Genèse, un but satanique, le fruit de la connaissance du bien et du mal promis par le Tentateur, sous la forme d'un serpent dont les cultures païennes prenaient pour le symbole de la culture de vie. Les péchés chrétiens ne sont pas contre la vertu (péchant contre la vertu, l'homme pèche contre lui-même ou la nature, mais non contre le dieu des chrétiens). Partant de là, Bacon s'accorde avec vous sur le fait de penser qu'un comportement immoral, c'est-à-dire contre-nature, n'est pas une fin en soi. Mais c'est là précisément le problème de la morale chrétienne, cible de Nitche, et qu'il assimile abusivement au message évangélique, comme si le Messie s'était suicidé ou qu'il avait fait l'éloge de la faiblesse. L'interdiction absolue de tuer de la loi de Moïse est certainement une faiblesse sur le plan social où elle est quasiment inconcevable. Mais la loi de Moïse ne trace pas une perspective sociale et politique. Contrairement aux Egyptiens, juifs et chrétiens pensent l'universalisme contre l'anthropologie.
    Bacon reproche donc au clergé chrétien et aux élites occidentales d'avoir conçu une morale inepte, à la fois scindée de la logique du droit naturel païen et de la spiritualité chrétienne, nuisant à la vertu comme à l'esprit et à la science.
    - C'est ce que j'essaie de dire avec la musique : reprochera-t-on à quelqu'un d'écouter de la musique ? Non, ce serait stupide. En revanche il est nuisible pour l'esprit de lui attribuer une vocation spirituelle, comme c'est très largement le cas, bien plus dans l'ère chrétienne moderne que dans les religions païennes antiques. Le problème de la mystique musicale et des mathématiques (géométrie algébrique), prises comme une science fondamentale, sont d'ailleurs une seule et même illusion.

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