Certains voient la main des services secrets américains derrière le califat (Etat islamique) qui menace l'existence sécurisée des élites européennes. Les mêmes soupçons ont été formulés naguère à propos du réseau terroriste dirigé par Ben Laden, en raison d'accointances prouvées entre le gouvernement américain et la résistance afghane à l'URSS, ainsi que par la peine de mort appliquée au chef de guerre terroriste.
A ces soupçons les élites politiques répondent par un mot : complotisme, même si la théorie de la théorie du complot semble parfois aussi superficielle que telle théorie du complot.
La première remarque à faire est que la "théorie du complot", en général, est un thème très largement en vogue dans le cinéma ou la culture de masse occidentale en général. On ne peut sérieusement opposer la science à la théorie du complot dans le cadre d'une culture reposant largement sur le divertissement.
D'une certaine façon, la théorie du complot est une réponse populaire à une culture de masse produite par les élites politiques et morales des nations occidentales. A certains égards, la théorie du complot est l'expression d'une forme de mécontentement populaire vis-à-vis des élites.
- La seconde remarque est qu'il convient d'envisager la politique aujourd'hui, non pas à l'échelle d'une nation ou d'un continent, mais du monde, c'est-à-dire d'une manière dont Marx avait prévu dès la fin du XIXe siècle la plupart des conséquences, dont les inévitables conflits meurtriers entre nations capitalistes du XXe siècle, qui font partie intégrante de l'évolution de l'économie capitaliste (quel historien ou quel économiste pourrait exclure la guerre du processus économique, hormis un propagandiste à la solde d'un régime totalitaire ?).
Or la politique est comme un jeu de poupées russes, emboîtées les unes dans les autres. Sur le plan politique, le nouveau califat édifié contre l'Occident requiert l'Occident pour se développer, et les nations occidentales requièrent le califat ou une forme d'opposition violente afin de justifier leur structure totalitaire (totalitaire parce que, comme nous l'avons démontré ailleurs, soumise à l'arbitraire d'élites actionnaires de l'Etat, disposant de moyens de propagande extraordinaires). Si l'Etat islamique n'existait pas, il faudrait que les nations occidentales l'inventent.
La question de savoir si le califat est une marionnette directement actionnée par les Etats-Unis n'est donc pas essentielle. C'est une question de cinéma. On se demandera plus utilement quelle est la plus grosse poupée, matrice de la seconde ? Et, de ce point de vue, il est assez évident que le totalitarisme est un problème plus vaste et plus profond que celui posé par l'Etat terroriste islamique. Il est assez évident que les terroristes ont appris de l'Occident leurs méthodes de combat ultra-modernes.
- La troisième remarque est pour insister sur la démarche politique moderne, qui lie le sort des peuples soumis à cette politique au hasard, et pour cette raison ne paraît pas une politique très préméditée. Si l'Etat moderne est un pachyderme, sa vue est très courte, comme l'éléphant. L'inertie de l'Etat, y compris lorsque celui-ci est paré du déguisement de "l'esprit d'initiative libéral", a tendance à faire paraître le complot peu crédible d'une manière générale. Une politique hasardeuse n'en est pas une, de même qu'un complot hasardeux n'en est pas un au sens strict ; d'où le climat de complot et de paranoïa général.
On doit ici s'interroger sur la notion d'élite intellectuelle moderne, et l'ouvrage de cette élite. En creusant la question de l'utilité de ces élites, on aboutira assez vite à cette observation de George Orwell de la convergence de l'intellectualisme et du totalitarisme, de sorte que l'on peut définir l'intellectualisme comme le contraire de l'esprit critique ; l'intellectuel est un "homme de religion" et non "un homme de science". Quelle tâche l'intellectuel accomplit-il aujourd'hui, si ce n'est empêcher d'une manière ou d'une autre que l'on dise du mal des intellectuels ? La religion de la science est la dernière chose que les intellectuels remettront en cause, alors même qu'elle est au coeur de ce qu'il est convenu d'appeler "totalitarisme". Pourtant l'esprit de la science est rebelle à celui de la culture ou de la religion.
Il y a là un mystère plus sérieux et plus profond que celui de l'impuissance de l'Etat moderne à ne pas dépendre de la démagogie et de gigantesques mouvements de foules - ou du moins peut-on dire que le coeur du mystère est sans doute là.
- On peut se demander enfin si la culture islamique et la culture occidentale moderne diffèrent aussi radicalement que les djihadistes et les tenants de la culture moderne le prétendent - et la réponse est non. D'une part parce que la religion mahométane et la religion catholique romaine sont de même nature hybride, mélangeant références bibliques et "droit naturel" platonicien (on peut lire sur le point de la convergence de l'islam et du catholicisme les essais de J. Ellul ou R. Guénon, qui la démontrent, qui pour la critiquer, qui pour s'en féliciter) ; d'autre part parce que les "valeurs laïques républicaines modernes" ne sont qu'une adaptation ou une transposition des valeurs catholiques romaines.
Commentaires
Bien sûr que ledit « complotisme » est un leurre inhérent à la « culture de masse » – ce truc de cinoche amerloque contaminant l'Islam aussi inéluctablement qu’il a contaminé la France ou le Japon, qu’il contamine à présent la Libye et qu’il contaminera le Zimbabwe ou la Terre Adélie… tout ce qui se targue à présent de modernisme sémillant ; soit le monde entier. Mais comme tout scénario affère à une ambiance (on voit mal Gabin dans un film bobo), nos gaz musicaux ne tombent pas du ciel... Y a-t-il un pilote dans l’avion ? Oui. A fortiori dans notre B52 déboussolé – puisque se bombardant lui-même. C’est la réciproque de l’incarnation – à laquelle Satan ne fait que feindre d’échapper.
Aussi Lapin, quelque pertinentes que soient tes observations, il me semble que, s'agissant de cet attentat comme des autres, il faut y voir ce qui paraît si manifestement : et donc – en vertu même de sa résonance avec l'essence satanique tapie sous l'Histoire –, l'action concertée d'officines entre toutes intéressées au chaos, c'est-à-dire à la perpétuation du plan social tel qu’il se propose hic et nunc. Pas de société sans élite, pas d'Histoire sans Satan. Pas de politique sans prêtres ni fidèles. Or les prêtres aujourd'hui sont à l'OTAN ; aussi les fidèles confessent-ils à la culture de masse amplement propagée par lui et ses homologues dissimulés.
Donc, quoique insuffisant à cerner notre moment historique apocalyptique (le voile du Temple capitaliste se déchirant de plus en plus : sur ce point je trouve Jovanovic tout à fait éclairant), la métaphore (plutôt que la théorie) du complot s'impose comme une évidence politique, je veux dire une nécessité logique. Il est, surtout pour un chrétien, incontestable et même, en l'occurrence, flagrant que, derrière ces dealers ratés que le démonisme démago appelle « djihadistes », se tiennent des forces plus organisées : de plus rigoureux tortionnaires de l’Esprit. Qui peut prendre au sérieux ces gros cons d’Arabes de chez nous, sinon ceux qui peinent à se voir si laids en notre miroir ?
C’est pourquoi j’ai beau partager ta vision, au contraire de toi je ne crains pas d’affirmer que cette affaire – comme toutes celles qui s’égrènent depuis, avec une régularité si enchanteresse que programmatique – pue le coup tordu de A à Z, l’intox foireuse et l’enfumage total ; et pour tout dire, le sanglant dernier acte – le coup d’état fasciste en France ; et d’autant plus à supposer, comme je le suppose contre nos maîtres, que besoins n’était plus depuis des lustres.
Alors oui : parce qu’il n’y aurait pas de Daesch sans la politique US – sans la France ni surtout sans Israël -, les totos flingueurs de l’EI sont bien les idiots utiles de l’Empire.
Oups, errata :
Bien sûr que ledit « complotisme » est un leurre inhérent à la « culture de masse » – ce truc de cinoche amerloque contaminant l'Islam aussi inéluctablement qu’il a contaminé la France ou le Japon, qu’il contamine à présent la Libye et qu’il contaminera le Zimbabwe ou la Terre Adélie… tout ce qui se targue à présent de modernisme sémillant ; soit le monde entier. Mais comme tout scénario affère à une ambiance (on voit mal Gabin dans un film bobo), nos gaz musicaux ne tombent pas du ciel... Y a-t-il un pilote dans l’avion ? Oui. A fortiori dans notre B52 déboussolé – puisque se bombardant lui-même. C’est la contrepartie de l’incarnation – à laquelle cet aigri de Satan ne fait que feindre d’échapper.
Aussi Lapin, quelque pertinentes que soient tes observations, il me semble que, s'agissant de cet attentat comme des autres, il faut y voir ce qui paraît si manifestement : et donc – en vertu même de sa résonance avec l'essence satanique tapie sous l'Histoire –, l'action concertée d'officines entre toutes intéressées au chaos, c'est-à-dire à la perpétuation du plan social tel qu’il se propose hic et nunc. Pas de société sans « élites », pas d'Histoire sans Satan. Pas de politique sans prêtres ni fidèles. Or les prêtres aujourd'hui sont à l'OTAN ; aussi les fidèles confessent-ils à la culture de masse amplement propagée par lui et ses homologues dissimulés.
Donc, quoique insuffisant à cerner notre moment historique apocalyptique (le voile du Temple capitaliste se déchirant de plus en plus : sur ce point je trouve Jovanovic tout à fait éclairant), la métaphore (plutôt que la théorie) du complot s'impose comme une évidence politique, je veux dire une nécessité logique. Il est (surtout pour un chrétien) incontestable et même, en l'occurrence, flagrant que, derrière ces dealers ratés que le démonisme démago appelle « djihadistes », se tiennent des forces plus organisées : de plus rigoureux tortionnaires de l’Esprit. Qui peut prendre au sérieux ces gros cons d’Arabes bien de chez nous, sinon ceux qui peinent à se voir si laids en leur miroir ?
C’est pourquoi j’ai beau partager ta vision, au contraire de toi je ne crains pas d’affirmer que cette affaire – comme toutes celles qui s’égrènent depuis le 11/9, avec une régularité si enchanteresse que lumineusement programmatique – pue le coup tordu de A à Z, l’intox foireuse et l’enfumage total ; et pour tout dire, le sanglant dernier acte : le coup d’état fasciste en France ; et ce même à supposer, comme je le suppose contre nos maîtres, que besoin n’était plus depuis des lustres.
Alors oui : parce qu’il n’y aurait pas de Daesch – ce pseudo-Daesch-là – sans la politique US – sans la France ni bien sûr Israël -, les totos flingueurs de l’EI sont bien les idiots utiles de l’Empire.
En ce qui me concerne je crois qu'il est nécessaire de prendre le maximum de recul avec la guerre et la culture modernes, pour pouvoir faire le lien avec la mythologie. Si l'on regarde la modernité avec un regard moderne, on ne voit rien. On retrouve dans le terrorisme islamiste comme chez les défenseurs de l'Etat policier totalitaire une représentation idéalisée de la femme : la vierge promise aux martyrs, d'une part, et de l'autre la figure de Marianne en pleurs chez les laïcs naïfs et dévots, au niveau de la chaisière catholique, ou encore de la "travailleuse du sexe", symbolisant la société de consommation libre-échangiste.
La violence demeure associée à la femme. En termes d'élucidation de l'homme et du monde, aucun progrès n'a été fait depuis Homère ou Moïse - la bêtise humaine est demeurée inchangée, du moins sur le plan social.
- La culture moderne peut se résumer au refoulement de la mythologie, Guit'z, à son éradication par la culture bourgeoise suivant une tendance cléricale et élitiste. Ainsi Shakespeare n'est pas moderne parce qu'il est mythologique, et il est incompréhensible pour un esprit moderne parce qu'il est mythologique.
Qui sont les anticonspirationnistes ? Les ouvriers spécialisés du léviathan : faux rebelles d'appareils intellectuels institutionnalisés, zélotes du capitalisme, personnels des professions scientifiques, enseignangnants, militants de la zététique, exaltés idiots utiles (Nabe étant assez symptomatique de cette confusion des genres). Qui sont les conspirationnistes ? Les méfiants et opposants aux premiers. Si de complots réels il y en a autant que de complots fantasmés, la sphère d'affrontement entre complotistes et anti-complotiste demeure dans la défense ou la défiance envers la société.
Simone Weil disait que les considérations sur l'importance des puissances économiques quant au déclenchement des guerres étaient du fait de "l'imagination populaire", la "nature humaine" étant leur seul moteur de déclenchement. Le problème de ce raisonnement, c'est qu'il exclut de l'humanité le besoin même de se rassembler en conjurés pour faire progresser ses vues au détriment d'un autre groupe de conjurés. Le mode opératoire de la conjuration importe peu, la simple compréhension mutuelle ou unilatérale de l'intérêt bien compris de chacun, et si cet intérêt
Car tout le ressort de la société capitaliste est d'assurer le service après-vente de la révolution industrielle appuyée sur le productivisme, permis par le scientisme et la technicisation, eux-mêmes, respectivement, petits-enfants de la renaissance et enfants des lumières.
Oubli du second paragraphe :
*et si cet intérêt converge, la conspiration au sens utilitaire du terme n'a pas lieu. Le crime parfait.
Bonjour,
j'ai cru comprendre que vous êtes plutôt hermétique à la musique
néanmoins je serais curieux de savoir si vous distinguez d'une quelconque manière, sur la base de je ne sais quel critères, ceci : https://www.youtube.com/watch?v=MZrctLnsF4M
de cela : https://www.youtube.com/watch?v=CsRSWuwhWZ0&index=2&list=PL0Yz-P1uQT4qFq0xtOvGJYGClW8RNR_Ly
Cordialement.
(pardon pour la faute de conjugaison : il fallait lire j'ai cru comprendre que vous êtiez, etc.)
C'est le silence qui est éternel du point de vue chrétien, non l'art ou la musique.
Bonsoir,
et merci pour votre réponse. Mais en fait ce n'était pas vraiment le sens de ma question...
j'étais juste curieux d'avoir votre ressenti sur une question qui passionne le mélomane que je suis.
Cordialement.