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zucman

  • L'illusion souverainiste

    La souveraineté d'une nation n'est pas d'abord constitutionnelle ou juridique, elle est d'abord économique. Dans "Orwell et les Gilets jaunes", j'explique comment l'impératif de croissance économique l'emporte sur toutes les règles constitutionnelles. Le rôle du président du conseil constitutionnel est de faire croire à un maximum de Français que l'action du chef de l'Etat s'inscrit dans un cadre constitutionnel. Il se trouve que l'actuel président du conseil constitutionnel (Laurent Fabius) est l'un des principaux artisans du passage à la monnaie unique européenne au début du XXIe siècle, qui a opéré dans l'organisation politique un changement substantiel ; on peut ici parler de "coup d'Etat bancaire".

    Nul n'est censé ignorer la loi, mais la plupart des Français ignorent le b.a.-ba du fonctionnement économique. Tout est fait par la presse économique, largement détenue par des oligarques, pour maintenir les Français au niveau d'ignorance le plus bas, ou pour organiser de faux débats économiques "pour ou contre la taxe Zucman" qui parasitent dangereusement l'action politique.

    L'illusion souverainiste consiste à croire que l'on peut réparer par le droit ce qui a été entamé par l'économie. Il m'arrive de discuter avec des souverainsistes-gaullistes sur les réseaux sociaux ; je leur fais immédiatement observer l'inanité du Brexit des Anglais, resté lettre morte ou presque. Si l'oligarchie financière britannique n'a pas entièrement défait le Brexit, c'est seulement en raison de l'incertitude que fait peser la guerre en Ukraine sur l'avenir du consortium bancaire européen. Aux électeurs de Mélenchon qui prônent une VIe République, je fais remarquer l'annulation du résultat des élections grecques en 2015 par les instances dirigeantes de l'Union européenne - encore un "coup d'Etat bancaire", qui a eu pour conséquence de transformer la Grèce en "lānder touristique" allemand.

    Le droit consitutionnel s'oppose à l'économie capitaliste comme une charge de cavalerie polonaise à des panzers allemands. Les médias oligarchiques ne sont pas les seuls à maintenir les Français dans l'ignorance des questions économiques, les cours d'Education civiques poursuivent à peu près le même but : on continue d'enseigner des âneries la théorie utopique de l'équilibre des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, alors même que la constitution de 1958 visait à transformer le parlement en chambre d'enregistrement, suivant un dispositif bonapartiste antirépublicain.

    La division du travail à l'échelle mondiale entraîne une perte de souveraineté des nations, dont l'afflux de migrants n'est qu'un des aspects. Les nations les plus puissantes et les mieux armées - les Etats-Unis, la Chine et la Russie -, subissent les conséquences de la mondialisation. Celle-ci porte atteinte à leur souveraineté. Derrière le slogan "Make America great again" se cache une crise de la souveraineté des Etats-Unis. Que dire de l'Union européenne qui n'est rien qu'un marché unique ?

    La révolution des Gilets jaunes est la prise de conscience par les passagers de troisième classe du "Titanic" que les experts qui pilotent le navire ont été formés pour l'envoyer droit sur un iceberg. Il ne s'agit pas de boucher la voie d'eau comme le suggère l'ex-premier ministre démissionnaire sous la pression des Gilets jaunes, il s'agit d'empêcher que le "Titanic" ne reprenne sa croisière infernale comme si de rien n'était.

    L'effort des oligarques français et allemand pour consolider l'Union européenne dans la guerre n'est pas un projet économique, c'est un projet désespéré.

  • Marx contre Zucman

    J'ai fait un rêve la nuit dernière : l'intelligence artificielle avait remplacé la plupart des "experts" en tous genres, sans lesquels la télévision française ne serait pas aussi docte. Les experts stratégiques, bien sûr, mais aussi les experts constitutionnalistes, les experts économiques, les experts-psychiatres, les experts sanitaires, sans oublier les géopoliticiens.

    L'IA ne serait pas plus maligne que les comités d'experts en chair et en os, elle ne prédirait pas avec plus de précision la faillite retentissante de "Lehman Brothers" ou celle de la "Silicon Valley Bank" quinze ans plus tard, mais elle serait beaucoup plus économique que ces experts-fonctionnaires ou assimilés.

    Je crois que j'ai entendu pas moins de cinq profs de droit constitutionnel différents en 48 h commenter l'épisode de la démission du Premier ministre F. Bayrou, épisode qui n'a qu'un lointain rapport avec la constitution de la Ve République... mais il faut bien meubler les antennes. La France est un véritable lupanar d'experts !

    L'annonce de la popularité de la "taxe Zucman" parmi les Français me pousse à rédiger cette notule. On ne sait pas si ce sont les mêmes Français qui sont largement favorables à la peine de mort pour les criminels récidivistes qui apprécieraient de voir la taxe Zucman appliquée. Les instituts de sondage ont l'art de tourner les questions pour que les réponses plaisent à leurs clients. Le statisticien est encore un expert, le genre à jongler avec les chiffres comme un magicien sort un lapin de son chapeau.

    L'idée de prélever une taxe de 2% aux plus fortunés des Français, sous-imposés, paraît une bonne idée à 70 % des Français, y compris aux électeurs du parti Les Républicains, réputé pourtant pour tenir à l'argent autant que Shylock. Cette taxe permettrait de réunir 20 milliards, soit près de la moitié de la somme réclamée par les banques allemandes pour que la France continue à jouer la cigale qui ne produit pas grand-chose, mais réjouit le monde avec des spectacles de son et lumière.

    Zucman plaide qu'il n'en veut pas du tout aux riches, contrairement aux populistes, mais que ce serait l'occasion de prouver que le ruissellement, dont tout le monde parle mais que personne ne voit, existe bien. La taxe Zucman est une sorte d'ordalie. En langage de non-expert, ça s'appelle "lâcher du lest". F. Bayrou a cru pouvoir prendre les Français par les sentiments, pourquoi ne pas essayer avec de la vaseline ?

    Bien sûr la taxe Zucman n'est pas plus "marxiste" que François Hollande ou Jean-Luc Mélenchon. Le jour où on verra un marxiste à la télévision, ce sera pour annoncer la fin des programmes.

    Le néolibéralisme est au libéralisme ce que la métastase est au cancer. Donald Trump croit avoir trouvé un remède pour la métastase. Il court le risque de tuer le malade avec son remède.

    Quel rapport avec la taxe Zucman ? La taxe Zucman n'aurait, dans le meilleur des cas, qu'un effet antalgique : elle ne règle pas le problème de l'endettement, c'est-à-dire de la métastaste. Les banques allemandes exigent que le gouvernement français, après un quinquennat de folles dépenses, arrête les frais. Cette exigence se durcit d'autant plus que la fourmi allemande n'a plus les moyens de se payer une danseuse.

    En somme Zucman a inventé le fil à couper la motte de beurre capitaliste en part plus égales. F. Hollande, qui a pour ennemi le monde de la finance, ne devrait pas manquer de mettre la taxe Zucman à l'honneur dans sa campagne électorale.

    Derrière la martingale Zucman, on retrouve le préjugé social-démocrate selon lequel l'Etat serait un meilleur investisseur que les grandes banques d'investissement ou les fonds de pension, préjugé qui n'a rien de marxiste-léniniste. Donald Trump a récemment rappelé au businessman "libertarien" Elon Musk à quel point les investissements de Washington pèsent lourd dans l'activité du consortium d'Elon Musk. "L'Etat et le Capital sont solidaires." dit l'adage marxiste, à quoi on peut ajouter cette observation que l'investissement de prédilection de l'Etat est l'investissement dans la course aux armes lourdes.