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Le sexe des moines

A peine trois jours que je suis de retour à Paris et déjà je ne peux m'empêcher d'aborder un sujet trivial : la sexualité des moines.

J'aime bien l'ombre douce des monastères, mais je ne suis pas dupe, je sais que j'ai un tempérament trop... disons belliqueux, pour m'accommoder de vivre en communauté.

L'aptitude aussi des moines à se passer complètement des femmes ne peut que fasciner un misogyne comme moi, imparfait. Bien sûr, il y a parmi ces moines un certain nombre de pédés qui doivent sublimer leur goût sexuel en amitié virile, mais ce n'est pas le cas de tous, évidemment, j'ai pu entrevoir des personnalités plus rabelaisiennes.

Je m'en veux un peu, je le répète, de me poser une question aussi saugrenue sous une voûte romane. Je crois y échapper en me réfugiant dans la lecture au pied d'un chêne-liège. Craignant de ne ne trouver dans la bibliothèque des moines que des ouvrages trop compliqués pour moi, j'ai emporté quelques bouquins persos, les Ecrits sur l'art de Baudelaire, comme je veux réfuter sa distinction par trop arbitraire entre "coloristes" et "dessinateurs", Une Guerre au couteau de J.-P. Angelleli, et Le Siècle de 1914, un essai de D. Venner, le fameux historien-poète-guerrier-autodidacte.

Mais dans l'ébauche de portrait de Delacroix que trace Baudelaire, ce petit extrait me ramène à mes sottes réflexions - quasi-anachroniques :

"Sans doute il [Delacroix] avait beaucoup aimé la femme aux heures agitées de sa jeunesse. Qui n'a pas trop sacrifié à cette idole redoutable ? Et qui ne sait que ce sont justement ceux qui l'ont la mieux servie qui s'en plaignent le plus ? Mais longtemps déjà avant sa fin, il avait exclu la femme de sa vie. Musulman, il ne l'eût peut-être pas chassée de sa mosquée, mais il se fût étonné de l'y voir entrer, ne comprenant pas bien quelle sorte de conversation elle peut tenir avec Allah.

En cette question, comme en beaucoup d'autres, l'idée orientale prenait en lui vivement et despotiquement le dessus. Il considérait la femme comme un objet d'art, délicieux et propre à exciter l'esprit, mais un objet d'art désobéissant et troublant, si on lui livre le seuil du coeur, et dévorant gloutonnement le temps et les forces."

Commentaires

  • C'est drôle, je relisais hier soir le "Salon de 1845".


    Bon. Voilà.

  • C'est pas évident d'être catho, vraiment

    (Tu vas ecrire une note sur le Liban, Lapin ?)

  • C'est surtout pas évident pour les chrétiens libanais, Gretel.

  • Pour les autres non plus, Lapin.

  • Et vous ne l'avez jamais posée à un moine, cette question, Lapin ? Vous êtes impardonnable ! Ca fait des années que je me la pose mais quand on est une femme, impossible d'en parler avec les intéressés. J'ai un ami très rabelaisien, comme vous dites, qui vit depuis longtemps dans un monastère semblable au vôtre, au sens qu'on y cause plus latin que français, mais pas bénédictin (et pas clôturé). Et je meurs d'envie de savoir, bien sûr. Si j'étais un homme, je pourrais ; mais si j'étais un homme, je serais moins curieuse sans doute.

  • ça me rappelle un roman qui m'a profondement marqué.."Ambrosio, le moine" de Gregory Lewis. Une merveille!!

  • Le problème du désir charnel pour l'homme ou pour la femme est d'un autre ordre que celui que vous semblez mentionner. Certes, certains monastères ont probablement toléré certaines pratiques déviantes mais je pense que la plupart fondent leur ordre sur une vraie libération de l'homme de "la femme et l'or" comme disait Râmakrishna, soit une vraie abstinence sexuelle (ainsi qu'un vrai détachement des choses matérielles), remplacée par un désir d'ivresse divine, par l'extase divine.

    Cela doit vous sembler assez difficile à imaginer et c'est sans doute pour cette raison que Mohammed prônait l'absence de monachisme en islam, parce que la spiritualité ne va pas forcément selon lui avec l'abstinence (ou n'implique pas forcément l'abstinence).

    Cependant, dans nombre de traditions (christianisme, bouddhisme, indouisme), cette implication est vraie et il est exact que l'extase divine terrasse toute vélléité purement charnelle.

    AZ

  • Al Zeituni, vous avez répondu à Nadine, il me semble. Moi-même je n'ai pas dit que mes moines bénédictins n'étaient pas abstinents. Le témoignage de Baudelaire sur Delacroix ne contient-il pas lui aussi la réponse ? D'ailleurs les moines n'hésitent pas à aller au devant de cette question quand ils le jugent utile - encore une fois le détachement des contingences matérielles est une force.
    Sans doute le problème se pose-t-il de façon plus cruciale pour le clergé séculier, plus isolé, et dans ce cas le père de La Morandais est une source intarissable de réponses à ces questions triviales...

    Est-ce un dominicain que vous fréquentez, vous, Nadine ? Hélas ceux-ci ne font pas de fromages mais de grands discours.

  • Non, c'est (appréciez le petit côté désuet du mot, sinon de la chose) un chanoine, pas de fromage non plus, hélas, beaucoup de grands discours et (pouark) d'études de philosophie thomiste... j'aimerais mieux qu'il étudie les secrets de la tomme mais non.

    Rien à voir avec la choucroute, ni avec la meule : avez-vous lu Raymond Guérin ?

  • Un chanoine régulier de Lagrasse ? Non, pas lu Raymond Guérin.

  • Yes, sir.

    Pour Guérin, vous devriez ; je suis dans les Poulpes et quelquechose me dit que ça ne vous déplairait pas.

  • Superbe, Lagrasse, j'aime beaucoup, jolie petite rivière où j'ai pataugé (Paraît qu'on ne se le procure pas facilement, Guérin. C'est à cause des scènes de masturbation que vous pensez que ça me plairait ?)

  • J'en suis autour de la page 200 et pas l'ombre d'une scène de ce type pour l'instant. Non, c'est l'écriture qui devrait vous plaire.

    J'ai trouvé le mien à la première tentative dans la librairie de la rue du poteau, ils l'avaient en rayon. En revanche c'est un peu cher (150 balles, ben oui, édition de 83 c'est en francs mais ça les vaut, surtout que c'est gros). Mais si vous voulez je vous le prêterai héhé.

  • L'ouvrage léger que je vous destine est sur ma table de chevet. Un peu de patience !
    (Entre une île perdue de la Méditerranée, l'abbaye de Lagrasse et l'"Humeur vagabonde", j'avoue que j'ai un peu de mal à vous situer, hi, hi.)

  • C'est l'inconvénient avec les ectoplasmes... Ne venez pas vous en plaindre !

  • Je ne me plains pas, Nadine. Je vous aime comme vous êtes, pleine de mystère.

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