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Caritas in veritate

Tâchons de ne pas perdre trop de temps avec la vaine encyclique de Joseph Ratzinger. Soulignons seulement que :

- Le Nouveau Testament ne permet de fonder aucun "socialisme" ni "constitution sociale" d'aucune sorte. Jésus n'est pas Jaurès. Au demeurant l'histoire permet de constater les échecs répétés des réformes sociales. Contre les journalistes inféodés aux pouvoirs publics, certains historiens ont même démontré que la plus sérieuse concrétisation d'une politique sociale étatique fut celle accomplie par le régime nazi entre 1935 et 1940 ; afin d'équilibrer le propos, on peut citer aussi les efforts dans le même sens de la RDA après la guerre. Ceux qui objectent que les politiques sociales nazies ou soviétiques n'ont pu se passer de contreparties sanglantes "oublient" que les miettes distribuées aujourd'hui aux pauvres par les capitalistes dans les social-démocraties occidentales trouvent aussi leur contrepoids dans des guerres impérialistes, économiques ou conventionnelles, qui font des millions de morts.

- Le socialisme, chrétien ou pas, n'est en réalité que la métastase de la "théocratie chrétienne" telle que Joseph de Maistre la définit par exemple, faisant fi de l'histoire comme des Evangiles qui proscrivent absolument l'édification d'un Royaume de Dieu sur la terre. Les pharisiens sont peut-être adeptes du droit canonique et nostalgiques du temps où la Palestine n'était pas soumises à Rome. Le Messie ne fait, lui, que dire et redire son mépris des institutions religieuses, politiques ou morales juives, du début à la fin de sa vie publique. Même Gustave Flaubert, qui n'est pourtant pas docteur de l'Eglise, est capable de remarquer le caractère profondément antisocial du christianisme, que seul un sentiment de peur conduit à "accommoder" en "judéo-christianisme".

La théocratie chrétienne de Joseph de Maistre, étonnant horloger suisse dont le pendule s'est arrêté au XVIIe siècle, exactement comme le socialisme exige de mettre les faits historiques entre parenthèses. Comme Joseph de Maistre "fantasme" la Révolution française de 1789 sur le mode "C'est la faute à Voltaire !", les leaders socialistes actuels sont obligés de fantasmer l'histoire de la deuxième guerre mondiale sur le mode "C'est la faute à Hitler/Staline !", occultant autant que possible la raison capitalistique des guerres industrielles, quand ce n'est jusqu'à l'évidence que sans l'appui mécanique de l'industrie, ces guerres n'auraient jamais fait autant de victimes.

- Dernier point qui réjouira les adversaires du marxisme. En aucun cas cette doctrine ne peut être dite "socialiste" ou "théocratique". On ne peut pas bâtir de pont entre l'encyclique de Benoît XVI et Karl Marx ; celui-ci sait parfaitement l'apport indispensable du Capital à l'Etat et vice-versa ; l'histoire de la constitution du grand capital tel que nous le connaissons progresse parallèlement à l'histoire de la centralisation du pouvoir étatique. Marx est en outre parfaitement lucide sur le fait que les "Droits de l'homme" républicains fondent une religion et une liturgie bourgeoises.

Lorsque Luther produit une critique du mercantilisme, il s'efforce de la fonder sur les Ecritures saintes. Benoît XVI n'est fondé que sur une mauvaise philosophie allemande qui n'a jamais donné aucun fruit.

 

Commentaires

  • "Marx est en outre parfaitement lucide sur le fait que les "Droits de l'homme" républicains fondent une religion et une liturgie bourgeoises."

    Vous pourriez élaborer, Lapinôsse ?? Ou fournir des références de lecture qui en font la démonstration ?

  • Deux citations de deux Gustaves:
    Flaubert: " La magie croit aux transformations immédiates par la vertu des formules, exactement comme le socialisme."

    et Le bon: "Si la jalousie, l'envie et la haine pouvaient être éliminées de l'univers, le socialisme disparaîtrait le même jour."

    La critique de Luther me semble plutôt fondée sur le péché d'envie. La vente des indulgences marchait trop bien en ce temps-là, qui donna lieu au sac de Rome en 1527, historiquement noyé dans une querelle de princes. Le pape Clément VII étant un Médicis, d'aucuns y voient un lien avec la Saint Barthélémy, quarante cinq ans plus tard. Des protestants sans doute!

  • - Dans le même esprit que Flaubert, Marx note que la religion de l'Etat telle que le grand architecte Hegel la programme, repose aussi sur des formules magiques.
    Pour être plus précis, j'ajoute que toutes ces formules du Léviathan "exigent" des formules magiques afin de dissimuler qu'elles sont des formules "statiques" et non dynamiques. La doctrine de G.W.F. Hegel est une sorte d'eschatologie de l'Etat.

    Avec le national-socialisme, le capitalisme est la doctrine qui dissimule le mieux son absence de dynamisme, c'est sans doute pourquoi ils s'accordent si bien.

    - J'évoquais la critique de Luther de pratiques mercantiles courantes dans son pays, pratiques que Benoît XVI est bien trop lâche pour condamner. Luther ne va pas comme Marx jusqu'à révéler le caractère diabolique du capitalisme, mais il condamne la spéculation comme un principe contraire au message évangélique. On imagine la tronche que feraient les démocrates-chrétiens et les cartels qui financent ce parti si Benoît XVI condamnait la spéculation dans les mêmes termes que Luther. Au lieu de ça Ratzinger préfère préciser, au cas où on le prendrait au sérieux : "Je n'ai aucun conseil à donner aux Etats." D'où diable vient ce respect pour les Etats et la politique qu'ils mènent ? Où les démocrates-chrétiens ont-ils pris ça ?

  • - Divers ouvrages de Marx traitent de la question du droit bourgeois dans lequel les Droits de l'Homme tient un rôle essentiel ; celui où il critique le droit de Hegel notamment.
    - Le décalage entre l'idéal républicain révolutionnaire et l'esclavage industriel sur lequel le pouvoir politique est fondé au XIXe siècle est assez frappant pour peu qu'on possède un minimum d'honnêteté. Marx montre pourquoi il est plus difficile encore dans la religion laïque de se révolter contre l'Etat qu'il n'était dans la religion chrétienne de se révolter contre les autorités religieuses.
    - D'une manière générale, la doctrine marxiste est antijuridique, antiromaine, contrairement à la doctrine républicaine ; c'est précisément ce qui fait de Marx un militant chrétien ; on peut remarquer que toutes les tentatives virtuelles ou concrètes de bâtir le royaume de Dieu sur la terre - et la divine sociale-démocratie n'est pas éloignée de ce projet - passent par la constitution ou l'architecture juridique, ce que les "judéo-chrétiens" appellent "loi naturelle" sans être capables de préciser exactement ce qu'ils veulent dire par là.

  • la vente d'indulgence, quelle divine spéculation! Luther est qu'un envieux, il voulait être pape, et Freud voulait être Dieu. L'un a mieux réussi que l'autre...

  • J'entraperçois un peu mieux ce à quoi vous référez, et je suppose que ce qui a trait aux Droits de l'Homme ne se donne pas à comprendre en quelques lignes, mais merci pour la matière qui donne à contempler.

    Quant à votre étonnement quant au fait que Benoît XVI considère n'avoir rien à redire à propos de la spéculation et des Etats, Fodio y répond par ricochet, mais voilà, c'est bien du fait que l'Église n'est pas sans communier à cette grande messe de la marchandisation qu'elle se trouve sans légitimité de s'insurger voire de tout juste critiquer.

  • "Marx est en outre parfaitement lucide sur le fait que les "Droits de l'homme" républicains fondent une religion et une liturgie bourgeoises."

    Vous pouvez remplacer Marx par Soljenitsyne.

    "Le socialisme, chrétien ou pas, n'est en réalité que la métastase de la "théocratie chrétienne" telle que Joseph de Maistre la définit par exemple, faisant fi de l'histoire comme des Evangiles qui proscrivent absolument l'édification d'un Royaume de Dieu sur la terre."

    Ce qui entend une société guidée par la main de Dieu et exemple de tout clerc. Les théocraties et les clercs sont pré-apocalyptiques.

  • - Le judéo-christianisme, faisant fi des paroles contre le figuier stérile qui ne donne plus de fruits et qu'il faut couper (la morale, ou la religion fondée sur un code moral), a forgé le concept inepte de "loi naturelle", conception qui n'est ni juive ni chrétienne mais découle bien d'un amalgame douteux : les "Droits de l'Homme" ne sont que la métastase de ce concept dans leur principe ; Marx signale leur hypocrisie en indiquant qu'un droit qui n'est pas assorti de sanctions n'en est pas un.

    - macp, ce que tu exprimes recoupe la fracture entre Dante Alighieri - le moyen âge - et Bacon-Shakespeare - la Renaissance. Dante n'est pas apocalyptique ou il est "pré-apocalyptique" (Bloy est un peu dans le même cas), tandis que Shakespeare renoue avec l'apocalypse. R. Girard nie bien sûr que Shakespeare soit "apocalyptique" : avant même de feuilleter son bouquin, j'aurais pu le parier tant les démocrates-chrétiens s'acharnent contre l'apocalypse :
    - en lui faisant dire n'importe quoi ;
    - en niant qu'elle soit authentique malgré son évidente cohérence ;
    - en niant qu'elle soit de saint Jean, "fils du tonnerre".
    Très logiquement on retrouve la même hostilité vis-à-vis de l'Apocalypse, le contraire d'une menace pour un chrétien -, de la part du clergé laïc.
    L'opposition entre le vieux Léviathan judéo-chrétien et le nouveau n'est qu'une feinte, un peu comme ces couples de commerçants qui s'engueulent devant la clientèle mais s'entendent pour diriger le fonds.

  • Je voulais dire "exempte".

    "Très logiquement on retrouve la même hostilité vis-à-vis de l'Apocalypse, le contraire d'une menace pour un chrétien -, de la part du clergé laïc.
    L'opposition entre le vieux Léviathan judéo-chrétien et le nouveau n'est qu'une feinte, un peu comme ces couples de commerçants qui s'engueulent devant la clientèle mais s'entendent pour diriger le fonds."

    Absolument. Babylone est tout sauf crevée.
    On peut difficilement se dire Chrétien pour soutenir marché et onu. La nation n'est pas en reste, elle permet aux capitalistes de se refaire une petite santé tandis que les hommes vont se faire défourailler de leur plein gré. Quoique pour rendre le tout acceptable, on est revenu à la bonne conception romaine de la chose. Si je devais être soldat, je ne regarderais pas un Kubrick pour me glacer d'effroi mais lirais Bernanos. Le sentiment d'être con a toujours plus dissuadé les hommes que la trouille d'être estropié.

  • - Dernière remarque très juste. D'ailleurs si les officiers de l'armée française qui commandent les troupes au feu sont très jeunes, ce n'est pas tant à cause de la bonne condition physique requise que de la relative stupidité exigible pour faire un officier subalterne convenable.
    Un peu trop intelligent, un officier aura du mal à avaler cette galéjade médiatique de la "lutte contre le terrorisme", tant il est évident que l'invasion par des troupes étrangères de l'Afghanistan ou de l'Irak suscite les vocations terroristes plutôt qu'elle ne les tempère, comme naguère en Algérie.
    Sans doute le mobile de ces officiers subalternes est-il beaucoup plus lié qu'en 14-18 à l'argent, au versement de primes de risque substantielles. C'est un "patriotisme" largement subventionné.

    - Le chômage élevé est aussi la clef de la transformation des objectifs capitalistes industriels en objectifs capitalistes militaires. On peut traduire les conflits armés du XIXe siècle jusqu'à aujourd'hui comme des crises de l'appareil productif capitaliste ; il ne s'agit pas seulement de s'approprier les ressources naturelles des pays voisins, mais d'exporter la menace qu'un chômage élevé fait peser sur l'oligarchie en place.
    Déjà au XIIe siècle Georges Duby souligne que les croisades ont pour but d'évacuer des bandes de jeunes chevaliers désoeuvrés qui ravagent les terres agricoles. "Politique d'abord !", dit le païen, et le chrétien de lui répondre que la politique est fondée sur le sable, de par la révélation du Messie même que le figuier sec doit être coupé.

  • Non. "L'appareil productif capitaliste" n'a pas de crise. Il marche très bien. Les crises sont orchestrées."L'oligarchie en place" s'accommode très bien d'un chômage élevé. Je dirais même que ça ne lui suffit plus, et qu'elle cherche d'autre solutions : derrière Friedman et Ricardo, il y a Malthus, en embuscade !

  • Ayant entendu ce matin un politologue affirmer qu'il ne croyait pas aux chants des sirènes voulant que l'on soit sur la voie de sortie de crise, puis lisant ces deux derniers commentaires ici, je me dis qu'il pourrait bien ne pas avoir tout à fait tort en disant que l'accroissement du nombre des SDFs est à prévoir. Saloperies.

  • @Porteur : l'oligarchie ne doit sa survie qu'à la bienveillance des classes sociales constituées des cadres sups'. De leur hédonisme Onfrayien constamment rasasié en pompes, montres, restau et sapes de luxes, dépend le maintien à flot du capitalisme. Et je ne fais aucun sectarisme politique : bourgeois de gauche, de droite, urbains libéraux et autres lecteurs de Libération et du Meilleur des Mondes.
    Ils ne sont pourtant que la strate très intermédiaire de la société occidentale. Leur sympathie pour le système économique actuel ne vient que du seul fait qu'ils en jouissent.
    Le clodo c'est l'épouvantail du salariat moyen dépressif qui est, lui-même, le faire-valoir de ces légions de consultants et autres engineers.

  • Non, je ne crois pas. L'étude des "crises orchestrées", comme la première guerre mondiale ou le choc pétrolier de 1974, montre que l'oligarchie se fout complètement des états d'âmes onfrayens des "hédonistes cool" modernes, de leurs tocantes, godasses, diététique et autres vanités périssables. Je ne suis pas loin de penser que M. Onfray est un avatar attardé du flower power qui fournit à bon marché comme philosophie une galerie de gadgets intellectuels qu'on agite, quand on s'emmerde pendant les crises. De la transcendance "low cost".

  • - Le développement cyclique est soumis comme dit Aristote au régime "de la génération et de la corruption", qui s'achève inéluctablement par la mort de la bête. Nul mode de pensée ne restitue mieux l'idée du destin (fatum) romain, idée elle-même gouvernée par la mort. Il n'y a aucun système moral, cyclique, dissociable du principe de mort ; en mathématiques, c'est le retour au point de départ, ce qui revient au même, à moins de croire à la métempsycose.

    - Sur le plan de l'histoire récente, aucune des politiques keynésiennes menées (c.-à-d. "antimarxistes", je le précise vu qu'il y a des crétins qui font semblant de croire que Marx et Keynes ne sont pas opposés), que ce soit par Hitler en Allemagne ou aux Etats-Unis après la crise de 1929, n'ont permis de tirer réellement ces nations de la crise ; c'est bel et bien la guerre qui a relancé complètement l'industrie allemande puis yankie. D'ailleurs distinguer la guerre économique de la guerre conventionnelle est illusoire. Le Mur de Berlin s'est effondré à la suite d'une bataille économique perdue par les Soviétiques dans laquelle, précisément, la course aux armements a joué un rôle décisif.

  • Ce n'est pas la peine de déranger Aristote et le développement cyclique. Pas davantage Keynes ou Marx, qui n'inspirent qu'un haussement d'épaule à "l'oligarchie en place" qu'évoque macp. Ils servent éventuellement de prétexte ou de masques dans la comédie économique. Malthus, que Kissinger (rapport Kissinger NSSM200) a pris très au sérieux les a probablement inspirés davantage.
    Ce n'est pas la guerre qui a relancé l'économie allemande. C'est le contraire qui est vrai. L'Angleterre d'avant 1914, obsédée par sa boutique et par le pétrole mésopotamien, avait mis la nation au bord de la faillite (famines, crise de la pomme de terre, etc.). Elle ne pouvait tolérer l'éclatant succès industriel de l'Allemagne (d'ailleurs protectionniste) ni surtout les prétentions de cette dernière en Mésopotamie (chemin de fer Berlin-Bagdad). Il fallait donc provoquer la guerre pour sortir de là, ainsi qu'en témoignent, par exemple, les accord Sykes-Picot (prudemment signés dès 1916).
    Le scénario n'était pas très différent pour la guerre de 1940, les Etats-Unis ayant reproduit, en plus grand, les erreurs de l'Angleterre.
    Et cela continue aujoud'hui. La boîte à outil des banquiers a évolué un peu.

  • - Il n'y a que des gens pas très sérieux qui prennent au sérieux Malthus qui doit au moins autant aux partis écologistes qu'à Kissinger le maintien de son statut de savant. Ici on est obligé de signaler que Darwin "emprunte" à Malthus son modèle statistique, et que Darwin est aussi décisif dans la justification du capitalisme qu'il le fut dans la justification du nazisme auparavant.
    - La tactique la plus rusée de la part de l'oligarchie est celle d'Alain Minc qui consiste à se dire lui-même marxiste dans les médiats. Brouiller les cartes est la meilleure chose que les représentants des cartels peuvent faire. Vous serez d'accord sans doute pour admettre qu'une rumeur peut faire chuter la cote d'une valeur boursière aussi bien qu'elle peut la faire remonter. Eh bien le meilleur conducteur de la rumeur, c'est l'ignorance et la bêtise. Le capitalisme a laissé s'installer la bêtise, qui a favorisé sa prospérité ; c'est la même atmosphère qui le tuera.
    - Les Etats-Unis sont sortis renforcés de la 2nde guerre -économiquement et politiquement -, guerre dans laquelle ils ont joué un rôle d'armuriers de premier plan, à défaut de remporter des batailles décisives.

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