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Correspondances

Le service de presse d'un pote me permet de feuilleter la correspondance de Céline parue en "Pléiade" récemment. Je déconseille de l'acheter. C'est assez comme ça que le contribuable subventionne les maisons d'éditions françaises par l'intermédiaire des achats des bibliothèques municipales, s'il faut en plus donner des thunes personnels à Gallimard !

Dans la grande chienlit française, sociale-démocrate et gaulliste, les maisons d'éditions qui auraient pu jouer un rôle de résistance sont gravement impliquées. Autrement dit, si j'ai plus de mal à trouver telle ou telle pièce de Shakespeare dans ma bibliothèque que la dernière merde signée Dominique de Villepin en hommage aux nains de la poésie française ou aux boucheries de Napoléon, c'est la faute aux éditeurs.

D'ailleurs quand d'aventure je me promène au Quartier latin, avec ses petites bourgeoises féministes déguisées en putes, j'ai l'impression de me promener dans Berlin. Céline lui-même était sans doute plus près de vouloir foutre le feu au Quartier latin, de botter le cul à tous les vieillards décatis du Quai Conti qui donnent l'impression de n'avoir jamais ouvert un vrai livre. Dans un sabir extrêmement compliqué à piger -plus slave que français-, la Carrère-d'Encausse met bien un peu d'ordre dans les causes et effets de la révolution bolchevique, pour mieux dire ensuite à la télé le contraire de ce qu'elle dit dans ses bouquins et lécher le cul du tsar Nicolas, personnage aussi inutile que Pie XII, et beaucoup plus dangereux.

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Retour à la correspondance de Céline : la correspondance est un genre de littérature plutôt barbant qui plaît surtout aux collectionneurs (il faut que je redise à mon pote que les collectionneurs vont en enfer directement, ils retournent à la poussière sans passer par la case du purgatoire qui n'existe pas). Bonnes ou mauvaises, les intentions sont nulles pour un artiste comme pour un chrétien, et c'est surtout de ça dont une correspondance est faite, de chatteries et de voeux. Le chrétien qui croit que ses prières vont le sauver croit que Dieu qui a envoyé son fils pour sauver l'humanité attend un hommage ou un coup de chapeau. D'ici que les démocrates-chrétiens décident de canoniser Dieu pour le remercier, il n'y a pas loin. Et encore faudrait-il justifier pourquoi le Dieu des chrétiens n'a RIEN fait pour sauver les Juifs des camps nazis.

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Tiens, profitons-en pour soupeser l'antisémitisme de Céline... Curieusement, d'une certaine façon on peut dire que l'antisémitisme de Céline est plus chrétien que celui de Bloy. L'idée de Bloy que les Juifs incarneront l'archaïsme jusqu'à l'éclatement du Temps n'est pas très cohérente ; disons plus nettement qu'elle épargne trop la calotte chrétienne, bien que ce ne soit pas le travers principal de Bloy d'épargner les cochons, y compris les cochons portant soutane. "Synagogue de Satan" écrit l'apôtre, et synagogue se traduit par "Eglise" au sens large.

Céline est plus proche de l'anticléricalisme de Voltaire, pour qui le personnel politique comme le personnel religieux font obstacle au progrès. Voltaire est tellement en décalage avec l'époque que nous vivons que c'est aux "Témoins de Jéhovah" que le christianisme de Voltaire fait le plus penser, c'est-à-dire une sorte de protestantisme honnête parfaitement démodé aujourd'hui. Un truc bizarre cependant chez Céline : il semble détester les Juifs tout d'abord à cause de leur faiblesse, puis change d'avis après la victoire des anglo-saxons, et se met à mépriser surtout les chrétiens allemands et français. Céline a lui-même un côté juif et féminin, moins marqué que Nitche, mais n'empêche.

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Incroyable la façon dont Céline, pourtant cent fois moins misogyne que moi, excite les femmes à s'embourgeoiser (c'est-à-dire à se prostituer encore plus), à se jeter dans le filet de la famille, des gosses, bref de la grande truanderie sociale, dans tout ce qu'il craint pour lui-même comme une lèpre. Ici Céline est plus près du tchador que de Voltaire.

En fait Céline veut sauver les autres malgré eux, et ça n'est pas chrétien. Le Christ, lui, n'a jamais contraint personne à le suivre. Pas la moindre séduction dans le Christ. C'est la raison pour laquelle toute propagande signale le diable. Ce cornard de Pie XII qui a osé faire l'apologie de la télévision est parfaitement scandaleux ! La mare dans laquelle cette petite salope puritaine d'Ophélie va se jeter n'est autre que le néant ou l'enfer.



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