"L'athéisme n'est point. Les grands, qui en sont les plus soupçonnés, sont trop paresseux pour décider en leur esprit que Dieu n'est pas ; leur indolence va jusqu'à les rendre froids et indifférents sur cet article si capital, comme sur la nature de leur âme, et sur les conséquences d'une vraie religion ; ils ne nient ces choses ni ne les accordent : ils n'y pensent point."
La Bruyère
Il est vrai que l'élitisme est une des principales causes de l'athéisme. Pour les hommes d'élite qui ont la foi, Dieu n'est le plus souvent qu'un simple principe, ce qui revient au même que l'athéisme (Pascal : "Dieu est un point." ; Napoléon : "Et l'hypothèse de dieu ?").
Le pouvoir ou la quête de puissance, à quoi les hommes d'élites sont occupés, est une fuite qui ne leur laisse pas de répit pour des choses moins vaines. Dans le peuple, l'athéisme est souvent lié à l'esclavagisme, c'est-à-dire la contribution du peuple à la gloire des élites (y compris cléricales). L'athéisme est aussi dans "la science sans conscience", c'est-à-dire la technique, assujettie elle aussi à la quête de puissance.
A la thèse classique (dieu est un principe ordonnateur) succède la prothèse moderne (l'outil technique), car si dieu n'est pas indispensable dans le régime technocratique, celui-ci ne peut pas se passer de la transcendance du pouvoir et de l'éthique. La science technocratique ne recule devant aucun paradoxe pour la fournir, aussi dogmatique que l'est le cinéma. C'est pourquoi il n'y a pas de différence essentielle entre une théocratie et une technocratie. Dès que vous entendez parler d'éthique juive ou d'éthique chrétienne, vous pouvez être sûr d'être en présence d'un de ces bricoleurs sournois de la technocratie moderne, habiles à forger des idoles pour méduser le peuple.