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Péché de jeunesse

Il y a un péché que j'ai commis dans ma jeunesse -lié à ma jeunesse et à mon éducation catholique- et ce péché est une erreur d'appréciation.

Je suis donc bien placé pour rectifier cette erreur chez les catholiques persuadés que la rectitude du jugement est catholique.

Mon erreur fut de croire le catholicisme en lutte contre la pensée "mondaine".

Un autre élément peut contribuer à le faire croire à un jeune Français ; les catholiques sont en effet la cible de brimades (légères) de la part des élites républicaines laïques, qui prétendent ainsi perpétuer l'esprit des Lumières (en réalité les cours d'éducation civique républicains sont éloignés de la critique argumentée produite par certains philosophes des Lumières).

Contrairement à d'autres nations occidentales, la France ne clame pas haut et fort ses "racines chrétiennes". Tant mieux ; mais c'est une erreur d'en déduire que le catholicisme s'oppose à la pensée mondaine.

Ma conviction croisa en chemin Bernanos et Léon Bloy (surtout ce dernier), ce qui eût pour effet de la renforcer et de l'affaiblir en même temps, ce que l'on comprendra en lisant le paragraphe suivant. 

Bernanos et Bloy sont loin d'être des catholiques typiques, c'est-à-dire d'indiquer le sens du catholicisme. Pour ainsi dire, ils ne sont pas loin de faire au clergé les mêmes reproches que les jansénistes firent aux jésuites auparavant, d'avoir compliqué l'enseignement du Messie et de s'être compromis en fréquentant la haute société.

Bernanos et Bloy ne sont pas typiques, mais ils ne sont pas exemplaires non plus, car leur critique les entraîne à un paradoxe, une sorte d'impasse ; ils prônent la fidélité à l'Eglise romaine, tout en accumulant les preuves de l'imperfection de son clergé ; ils ne sont pas loin de former ici le rêve d'une Eglise parfaite, abandonnant au clergé catholique le soin de gérer une réalité beaucoup plus triviale.

N'entend-on pas plutôt Jésus-Christ dire que, lorsqu'un arbre ne donne pas de fruits, il ne faut pas hésiter à le couper, stigmatisant de cette façon l'échec du clergé juif ?

Ces catholiques atypiques m'ont conduit à creuser la question de la doctrine catholique, jusqu'à découvrir en quoi elle joue un rôle déterminant dans la formation de la "pensée mondaine", c'est-à-dire de la culture occidentale dominante qui cherche à s'imposer au monde entier, à travers l'idée démocratique, les "droits de l'homme", mais aussi le capitalisme (formule économique mystique) ou le progrès technocratique.

Prenons un exemple ; lorsque Bernanos énonce que "le hasard est le dieu des imbéciles", il souligne un aspect saillant de la culture contemporaine et de la détermination de l'homme moderne.

Comme Bernanos a décelé aussi un effet affligeant de la technocratie, qui consiste à réduire l'homme à une bête ou à un robot, on pourrait ajouter ceci que, pour l'homme moderne, la liberté n'est que le fruit du hasard. Pire que la dictature, qui nie la liberté positivement mais ne peut empêcher certains d'y croire, les régimes totalitaires propagent une idée de la liberté, sur le modèle du hasard, qui tend à anéantir l'aspiration à la liberté véritable, c'est-à-dire à l'affranchissement de la condition humaine.

Cette observation est juste de l'entraînement de l'homme moderne à une liberté qui ne signifie RIEN ; mais ce que Bernanos ne voit pas, c'est à quel point l'Eglise romaine a joué un rôle décisif dans l'élaboration de cette sorte de néant spiritualisé ou d'existentialisme hasardeux.

La contribution de l'Eglise romaine à l'imbécillité moderne sera visible si l'on fait le rapprochement de la culture médiévale et de la culture ultra-moderne, par exemple, où l'on verra que cette dernière n'est que le développement de l'autre - en philosophie, en art, en science, et dans bien des domaines. Le moyen-âge et les temps modernes ultimes se ressemblent dans la mesure où ce sont deux époques dont les cultures ploient sous le poids de l'idéologie. L'obsession médiévale antichrétienne de la "cité idéale" se retrouve aujourd'hui dans l'obsession de la "vraie démocratie".

L'arbitraire de la culture occidentale moderne découle de l'arbitraire de la doctrine catholique romaine. Qui cultive la rectitude du jugement à l'intérieur de l'Eglise romaine est amené à sortir de cette cathédrale entièrement rhétorique pour revenir à la simplicité du message évangélique et des apôtres. - Heureux les amoureux de la simplicité, ils seront tenus à l'écart des raisonnements philosophiques.

Commentaires

  • En vérité, la cité idéale de Platon s'est très grandement inspirée de la rigidité, de la rigueur de Sparte qui était à cette époque la puissance dominante du monde grec. Platon était au final un spartiate déguisé en athénien, un de ses oncles (ou cousin) n'était rien de plus que Critias, un des Trente Tyrans installés par Sparte après la défaite d’Athènes. Critias était d'ailleurs parmi les plus sanguinaires en prime.

  • Ah et aussi, on peut se demander si même vérolée, cadenassée de toutes part, le catholique et son église ne reste pas dangereux pour toute notre société actuelle, tant le (vrai) message du christ est et reste brûlant, ce qui expliquerait (au moins en partie) les constantes attaques contre.

  • Quand on creuse la question de l'art moderne ou de la science moderne, on découvre à quel point ils sont essentiellement catholiques romains. L'idée que l'Eglise romaine serait "conservatrice" est complètement fausse, bien qu'assez répandue.
    - Shakespeare permet de le comprendre en montrant que derrière la conception moderne de "l'amour", dissolvant extrêmement puissant des civilisations, se cache le clergé catholique romain (cf. "Roméo & Juliette" ou "Mesure pour Mesure").

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