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Un malentendu à propos de Karl Marx

Il est un malentendu persistant à propos de Karl Marx, entretenu par le régime communiste, puis par les intellectuels communistes en France, un malentendu tel que l'on peut dire que la critique marxiste n'a pas pénétré en France*. Ce malentendu consiste à prendre Karl Marx pour un "utopiste". Le projet clairement affiché de Marx et Engels était de vacciner le prolétariat contre le romantisme révolutionnaire, c'est-à-dire l'utopie. Lénine, qui n'était pas illettré, savait très bien qu'il inventait quelque chose qui n'avait pas grand-chose à voir avec la critique marxiste.

Si on prend la peine de lire Marx, on verra qu'il ne démolit pas seulement l'utopie du ruissellement libéral, avant que l'Histoire n'ait illustré la puissance génocidaire de cette utopie -cousine germaine du communisme-, dont l'égalitarisme n'est autre que la réflexion sur un plan juridique ; Marx démolit aussi l'utopie des "droits de l'homme" virtuels : dès la fin du XIXe siècle, bien avant G. Orwell, Marx a défini la démocratie-chrétienne comme un Etat de non-droit (anarchique).

Marx démolit encore l'utopie de l'Etat totalitaire hégélienne ; l'Etat soviétique omnipotent est, en réalité, une architecture hégélienne. Le clergé communiste s'est employé, pour cette raison, à réhabiliter la philosophie de G. W. F Hegel. On peut ici parler de "clergé" car l'Etat hégélien est une institution analogue à l'Eglise romaine. Le tour de passe-passe de Hegel consiste à intégrer le processus historique à l'Etat, tandis que l'Eglise romaine était structurée autour du "droit naturel". Dans les deux cas, "sens de l'Histoire" hégélien et "droit naturel", il s'agit de PURE RHETORIQUE. L'Etat totalitaire hégélien repose donc sur une théorie de la providence, la plus destructrice du progrès véritable ; la liberté et la démocratie brillent au fronton des régimes totalitaires comme des idoles.

George Orwell prolonge bien K. Marx dans la mesure où il décrit Big Brother comme une idole, réclamant l'amour des citoyens et non seulement le respect et la crainte comme un Léviathan ordinaire (tel que Hobbes l'a théorisé et qui n'a jamais existé dans l'Histoire). Orwell prolonge encore Marx puisque "1984" est une anti-utopie. La religion des régimes totalitaires est l'utopie, qu'elle soit nationale-socialiste (utopie biologique), communiste (hégélienne), ou libérale (ruissellement de la richesse).

Si la critique du capitalisme apparaît moins nettement dans "1984" que dans la satire d'Huxley (Brave New World), la raison en est que ce sont les ruines du capitalisme qui servent de décors à Orwell. Mais décrire le capitalisme à l'état de ruine et non à l'état de croissance rapide, c'est décrire de façon réaliste où le cycle capitaliste conduit systématiquement.

Marx n'est pas un philosophe utopiste : il croyait à la capacité de l'humanité de s'extraire de la logique autodestructrice de l'économie capitaliste, quoi que ce ne soit pas dans l'intérêt des élites politiques de s'extraire d'une telle logique providentielle.

*Si la critique marxiste avait exercé une influence en France, il n'y aurait pas autant de Français à croire que le suffrage universel est un "instrument démocratique".

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