...n'est pas là où on croit.
La fiche Wikipédia sur le "Grand Orient de France", loge maçonnique française la plus ancienne, créée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, dissout assez sobrement et efficacement la théorie selon laquelle la franc-maçonnerie aurait joué un rôle actif dans la Grande révolution de 1789. L'encyclopédie en ligne explique "qu'il y avait des francs-maçons dans tous les camps", parmi les républicains (Mirabeau), mais aussi parmi les aristocrates qui durent prendre la fuite, et aussi dans le clergé.
Ultérieurement le franc-maçonnerie contribuera elle-même à cette rumeur flatteuse, laissant croire qu'elle avait contribué à la Révolution.
Dans un article magistral, K. Marx explique pourquoi les mêmes causes produisirent en France les mêmes effets qu'au Royaume-Uni un siècle plus tôt ; il explique aussi pourquoi la révolution française fut beaucoup plus violente. C'est aussi une spécificité de la franc-maçonnerie française d'avoir évolué ultérieurement vers un athéisme militant.
A en croire Lénine, la franc-maçonnerie a surtout comploté contre le régime (branlant) des Romanov.
Napoléon Ier a fait la force de la franc-maçonnerie, qu'il a utilisée, c'est un point historique intéressant, comme le pouvoir monarchique français avait utilisé les jésuites jusqu'au règne de Louis XV (expulsés en 1773). La franc-maçonnerie est donc une officine politique comparable aux jésuites, par-delà ses rituels ésotériques. La franc-maçonnerie britannique a elle-même été suscitée avant la révolution des Têtes rondes afin de contrer l'officine jésuite infiltrée en Angleterre avec l'aide du parti catholique.
L'influence de la franc-maçonnerie s'est étiolée progressivement ; 1940 sonne le glas de l'influence de la franc-maçonnerie, non pas tant parce qu'elle fut dissoute sous l'Occupation qu'en raison de l'émergence de lobbys beaucoup plus puissants. La monarchie républicaine instaurée par de Gaulle en 1958 n'est guère favorable à la franc-maçonnerie, dont le pouvoir était lié au pouvoir des parlementaires, assignés sous la Ve Rép. à un rôle décoratif.
Un complot qui semble pouvoir en revanche être imputé à la franc-maçonnerie est le retournement de la classe ouvrière, plutôt méfiante, si ce n'est hostile, à l'entrée en guerre (1914) - guerre que certains chefs socialistes ou syndicaux s'époumonaient à présenter comme une guerre impérialiste des cartels allemand, français et anglais. La CGT fut pacifiste jusqu'en 1913, avant qu'un dirigeant belliciste n'en prenne la tête. Bien sûr la question du nationalisme de la classe ouvrière est une question difficile à trancher - Lénine qualifiait ce sentiment de "social-chauvinisme", opposé à la lutte du prolétariat contre l'impérialisme.
Quoi qu'il en soit, la franc-maçonnerie, organisation bourgeoise, était contre-révolutionnaire. La plupart des dirigeants socialistes partisans de "l'Union sacrée" (Marcel Sembat, Pierre Renaudel...) étaient maçons.