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jean-luc delarue

  • Télépathie

    Difficile de savoir si ce sont les flicailleries de Christophe Hondelatte, ou la philosophie gaulliste d'Eric Zemmour, la psychanalyse de Mireille Dumas et Jean-Luc Delarue, les calembours de Laurent Ruquier... à moins que ce ne soit la pornographie mémorielle d'Arte, qui rendent la télévision publique si fière de ses états de service ? Allez, je m'en voudrais d'oublier les cucultissimes adaptations de Josée Dayan ou les chiantissimes documentaires de Patrick de Carolis, propres à dégoûter n'importe quel ado de l'histoire-géo.

    Le plus intéressant dans un procédé quel qu'il soit, la télévision en l'occurrence, c'est ce qu'il fabrique de plus original : clips vidéos, spots publicitaires ou télé-réalité. J'aime beaucoup "L'Ile de la Tentation", diffusé sur TF1. Comment ne pas y voir une fable sur le mariage laïc ou démocrate-chrétien ? Rien que le titre, déjà... Ca pourrait aussi bien s'appeler "Au Jardin d'Eden". Même si saint Augustin lui-même ne pousse pas le bouchon aussi loin, certain exégète chrétien vit dans la pomme tendue à Adam par Eve le symbole de leur union charnelle.

    Cette interprétation était tombée en désuétude depuis longtemps, mais le puritanisme laïc l'a remise au goût du jour. Bien sûr, dans ce feuilleton, on guette la Chute fatale. N'allez pas croire que le péché consiste à copuler avec une autre que sa fiancée ; non, même TF1 a le sens des convenances et du service public. Embrasser ou peloter suffira amplement pour que les portes de l'Enfer s'ouvrent sur le fautif ou la fautive.

    Les candidats à l'Ile de la Tentation prennent ainsi le risque de s'exposer à l'opprobre des honnêtes gens. Quel grand sentimental qui envisage de contracter avec son partenaire un crédit sur vingt ans ne prendrait pas un minimum de garanties ? Certes, le divorce parachève le mariage, mais il ne règle quand même pas tous les problèmes concrets. Que ceux qui n'ont jamais fait appel à l'usure jettent la première pierre à tous ces couples d'amoureux qui prennent leur affaire au sérieux !

    Même la possibilité de se pardonner n'est pas exclue. L'influence du "Jour du Seigneur", sans doute. Mais on sent bien que celui qui passera l'éponge sur la première incartade repartira non seulement avec une réputation de cocu, mais en outre d'imbécile inapte à mener sa barque à travers les écueils de la vie. Car "Qui vole un oeuf vole un boeuf".

    Il semble qu'au paradis d'Allah et de ses septs vierges promises aux martyrs, la religion laïque ultramoderne n'ait guère mieux à opposer que l'"Ile de la Tentation" et ses sept putains. D'où vient le sentiment de supériorité du fidèle laïc sur le fidèle musulman.

     

     

     

     

     

     

  • Question dignité

    Il semble que par “mourir dans la dignité”, le bourgeois entende “mourir sur un plateau de télé, interviouvé par Jean-Luc Delarue, Frédéric Taddéi ou Marc-Olivier Fogiel”, un désir dans ce goût-là.

    Si l’on a une idée plus classieuse de la dignité, plus “cadre sup. de la République”, on se tournera plutôt vers la sœur de Lionel Jospin : le physique spectral de Noëlle Châtelet la prédispose en effet à réciter des vers républicains sur la dépouille des héros ou des martyrs de la laïcité.
    On peut s’amuser à imaginer ce que serait la liturgie laïque si les bourgeois étaient moins guindés et plus imaginatifs, s’ils lisaient un peu plus Homère et un peu moins Harry Potter.

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    Il faut dire que tout ça n’est qu’un pis-aller. La mort pour le bourgeois est une extrémité regrettable, voire un “extrémisme”. Que les extrémistes de droite meurent, ou les communistes révolutionnaires, ce n’est que justice, mais le bourgeois, lui qui est si raisonnable, si modéré dans ses propos et ses institutions, qui ne fait jamais la guerre sans avoir une bonne raison de la faire, lue, approuvée et tamponnée ?
    Non, en principe le bourgeois ne veut pas mourir, et on aurait tort de croire que l’inaction lui pèse. Au contraire, il ne se lasse pas de se contempler, de se remémorer les détails les plus insignifiants de son enfance. « Le 19 mars, je me suis branlé… », il met une croix dans son calepin pour se souvenir, au cas où il ne lui adviendrait rien d’autre.

    Même la mort de ceux qu’il condamne finit par indisposer le bourgeois. Car elle lui fait penser à la sienne propre, de mort. « Tuez Saddam puisque la Cause l’exige, puisque c'est un extrémiste, mais avec doigté, euthanasiez-le - la technique c’est pas fait pour les chiens, bordel de Dieu ! »
    Puisque Dieu n'existe pas, le bourgeois a décidé de prendre son destin en main. Et le moins qu'on puisse dire c'est que le monde entier lui envie ses rites funéraires.

    Ou alors c’est, à l’autre bout, la larve humaine immonde qui pousse le bourgeois vers la sortie (en déformant odieusement sa bourgeoise au passage). « Etouffez-moi ça aussi, et en silence, de grâce ! ». Lorsqu’on aura trouvé un meilleur moyen de régler définitivement la question du patrimoine et de sa transmission par des voies moins barbares, alors il sera temps d’abolir la naissance, principale cause d'inégalité comme chacun sait, la chose se démontre aisément par l'algèbre.