Commençons par dire pourquoi l'acharnement thérapeutique, dont le pape François à l'agonie est un promoteur, n'est pas évangélique : le Messie, envoyé de Dieu pour corriger le clergé juif, sachant qu'il allait être torturé et mis à mort, a réclamé à son Père d'éloigner de lui la coupe des supplices et des souffrances. Le Messie a-t-il dû subir le sadisme de son Père, ou bien celui des hommes ?
L'Amour pédérastique (Roméo & Juliette) est d'ailleurs le fils caché de ce masochisme insane.
L'Eglise romaine est-elle à l'agonie, comme son chef ; n'est-elle pas en train de mourir étouffée dans ses nombreuses contradictions ?
En Europe, le catholicisme se réduit désormais à peau de chagrin ; les guerres mondiales du XXe siècle, puis les guerres coloniales, ont assez logiquement discrédité une Eglise romaine qui s'est comportée en spectatrice passive ; je ne parle pas ici des comportements individuels parfois héroïques, mais de l'incapacité de l'Eglise à penser contre la violence totalitaire moderne (le pape J. Ratzinger est même allé jusqu'à adouber officiellement la modernité).
On aurait tort de croire que le pape François est le seul apôtre catholique d'une technologie débridée, ce qui est à la fois très soviétique et très américain ; lorsque des chrétiens, au cours du XXe siècle barbare, ont émis des réserves ou des critiques vis-à-vis de cette nouvelle technologie providentielle, ils se tenaient le plus souvent en marge de l'Eglise (je pense ici à la critique de la physique quantique ésotérique par Simone Weil).
J'observe (grâce aux réseaux sociaux) que les derniers catholiques autoproclamés ignorent à peu près ce qu'est l'Eglise catholique.
Grosso modo, ils croient que l'Eglise romaine est une doctrine, alors qu'elle est une institution millénaire. C'est en tant qu'institution, et non en tant que doctrine que l'Eglise romaine a résisté aux outrages du temps. Il est légitime de s'intéresser aux jésuites quand on s'intéresse à l'Eglise romaine, car cet ordre incarne mieux que les autres la puissance temporelle de l'Eglise, qui ne tient pas à la rigidité de sa doctrine, mais bien au contraire à sa souplesse. Les zozos catholiques européens qui reprochent au pape François de ne pas calquer ses discours sur ceux de Donald Trump ou Vladimir Poutine sont plus luthériens que Martin Luther. Si l'Eglise romaine n'avait pas aboli la doctrine médiévale des indulgences, sous la pression des Eglises réformées, elle serait probablement morte aujourd'hui.
L'Eglise catholique semble victime, au XXe siècle, de sa stratégie de conversion à la démocratie-chrétienne ; cette stratégie expose le pape à la concurrence d'un chef religieux tel que le président des Etats-Unis ou celui de la Russie. Le pape François a paru plus habile que son prédécesseur en adaptant son discours, qui n'a rien de "révolutionnaire", à l'Amérique latine sous le joug des Etats-Unis, et à l'Afrique sous le joug de l'Occident.
Ceux qui rêvent d'un pape strictement capitaliste et sioniste, comme ses prédécesseurs, n'ont pas conscience que la donne politique a changé au cours des trois dernières décennies. L'époque du capitalisme triomphant sur lequel Jean-Paul II surfait a pris fin en 2008. Le pape François pouvait-il faire autrement que de snober le petit club de vieillards blancs réunis pour célébrer la résurrection de Notre-Dame du Saint-Frusquin ? Le pape François peut-il faire autrement que de se ranger du côté de l'avenir du monde, représenté aujourd'hui par l'Amérique du Sud, l'Afrique et l'Asie, non plus par l'Europe ?
On ne le dit pas toujours assez, mais le grand schisme protestant en Europe a d'abord une cause politique ; sa cause doctrinale n'est qu'un prétexte. Le schisme anglican est caractéristique de ce phénomène, puisque le roi Henri VIII d'Angleterre était plus catholique que la plupart des monarques de son temps, mais un jeu d'alliances politiques défavorable à l'Angleterre a conduit à l'excommunication du défenseur des sacrements catholiques.
Seule la Foi sauve car les oeuvres des hommes sont le plus souvent ténébreuses, ou quand elles ne le sont pas, ne sont que la simple expression de la dignité humaine, supérieure à celle des bêtes (contrairement à ce que prétendent les barbares modernes).