Ancien condisciple de Joseph Ratzinger, Hans Küng a tenté dans un bouquin de persuader le pape du progrès théologique que représente Hegel (en vain).
De fait il serait temps pour l’Eglise catholique d’abandonner les ratiocinages juridiques dépassés, inspirés de Thomas d’Aquin, et à plus forte raison encore l'épistémologie inepte de Kant, de Popper, ou l’existentialisme crétin. Même le ludion Sartre a jugé plus prudent de se convertir peu avant de mourir plutôt que de tout miser sur le néant.
Si l’Eglise catholique reste paralysée sur son grabat de préjugés démocrates-chrétiens, on peut penser que les catholiques seront balayés en Occident par le fanatisme orthodoxe, allié à la raison communiste. Il ne manque plus qu’un Savonarole, un saint Paul, pour redonner aux Russes entièrement confiance en eux et dans le destin de la Russie.
Hegel anticipe notamment avec lucidité la métamorphose de l’art en une sorte de prurit philosophique qu'on ne peut éviter aujourd'hui, la moindre réclame aujourd'hui constituant un petit sophisme mesquin.
N’importe qui est un peu sensible est à même de comprendre le dynamisme spécial de Hegel. Mais les démocrates-chrétiens sont de véritables Philistins.
À la décharge de Benoît XVI, et comme Marx l’a remarqué, la pensée de Hegel reste marquée par l’idéalisme bourgeois. Hegel "marche sur la tête” et ses efforts louables pour être en prise avec la réalité historique auraient été insuffisants si Marx n’avait pas révolutionné la dialectique de Hegel. Par conséquent les propositions politiques, pratiques, de Hans Küng portent le plus souvent la marque d'un idéalisme idiot, pas très convaincant.
La vérité finit toujours par s’imposer par sa force au plus grand nombre ; ainsi le christianisme s’est imposé dans l’empire romain comme une traînée de poudre, les vieilles idoles païennes n'ont pas résisté au progrès chrétien.
D’une certaine façon le nouvel alliage entre christianisme et communisme a déjà pris en Amérique du Sud et en Russie. Quel intérêt le pape peut-il avoir à s’accrocher aux vieux fétiches de l’Occident bourgeois, la laïcité positive, les séries télévisées américaines, le cinéma français, la religion de la Choa, l’existentialisme ? Laissons ça aux abonnés du “Monde” et du “Figaro”, entrés en phase terminale.
Commentaires
"La vérité finit toujours par s’imposer par sa force au plus grand nombre ; ainsi le christianisme s’est imposé dans l’empire romain païen comme une traînée de poudre."
Vous êtes sur que vous êtes passioné d'histoire?
Vous savez, il faut arrêter de vous focaliser seulement sur Marx comme "penseur rebelle et humaniste" - il existe des penseurs beaucoup plus subversifs que lui, tellement que leur nom est honni partout (Marx est plutôt un tabou).
Je pense surtout à Auguste Comte. Le positivisme est chassé de partout, même des milieux athés, car l'unique principe qui est au centre de cette "école" est la lutte contre la bêtise, par la réhabilitation de la science. Son délirant amour de la science fait peur à tout le monde - Même Baudelaire est plus sage, la preuve, on arrive à le foutre en programme scolaire.
Le Lapin est passionné par bcp de choses... pour autant il n'en maîtrise que fort peu !
Il a avoué il y a qq mois ignorer tout de St Thomas d'Aquin et pourtant il nous affirme que sa pensée n'est que ratiocinages juridiques dépassés ! c'est à se tordre pour qui connaît un peu St Thomas et ses sources ! Mais dans le même temps, le Lapin nous dira grand bien d'Aristote, car il n'en est pas à une contradition près et ce qui le rapproche le plus d'Hegel, c'est l'art dialectique, mais sans le fond...
Quant à l'actualité... si un alliage chrétien/marxiste avait pris en Russie, ça se saurait ! Sans blague ! En réalité, c'est plutôt le laïcisme démocratique qui triomphe...
PS : Lapin, écrivez Shoah comme tout le monde, certes vous vous différencierez moins (et vous pouvez tenter de le faire sur le fond, si vous vous en pensez capable !) mais au moins tout le monde vous comprendra !
- Le mérite de saint Thomas est d'avoir introduit Aristote ; mais lorsqu'on confronte un passage d'Aristote à un passage de saint Thomas sur le même sujet, on est frappé par la clarté de l'un et par le byzantinisme de l'autre.
- Auguste Comte bénéficie d'un grand crédit en Amérique du Sud ; même si c'est pour partie injuste, Comte est associé en France au scientisme, qui n'est pas un excès de science comme dit Benoît XVI, mais la négation de la science humaniste. Les néo-darwiniens sont un bon exemple, qui veulent faire taire tous ceux qui proposent des hypothèses différentes.
En ce qui me concerne, j'ai plutôt de l'estime pour Comte, mais il ne me paraît pas révolutionnaire comme Marx, qui a pressenti la faillite de la science, des arts et de la politique (indissociables pour un communiste), comme Baudelaire.
- A propos de la Russie, je crois qu'on ne peut pas nier, même si Dostoïevski et Marx n'ont pas encore gagné, qu'il y a une résistance et un dégoût des Russes pour le matérialisme américain et le libéralisme tant vanté par les démocrates-chrétiens en France. Je n'ai pas vu Poutine à Disneyland ni en train de se prélasser avec une poule sur le yacht d'un sponsor millionnaire. La politique passe par les symboles aussi.
Avant d'aller en Amérique latine, vous devriez vous rappeler combien Comte a inspiré Maurras...
Et vous devriez éviter de vous faire une idée de la Russie en lisant Voici...
Connectez-vous sur les sites de rencontre, par exemple, ça vous fera du bien tout d'abord et puis ça vous donnera une juste idée de la situation des femmes de l'Est en ce qui concerne la société de consommation occidentale ! Elles adorent Chanel, Vuitton, Prada, D&G, etc ! On est bien loin de Dostoïevski, sans parler de Marx !!!
Lapinos, je vous parcours de temps en temps, et plus je vous lis, plus je suis frappé par votre absence totale de clairvoyance et de cohérence. Et ça ne s'arrange pas. Vous finissez par ne plus avoir de personnalité à force de vous laisser dicter votre agenda par les médias. Lisez moins et vivez plus, vous êtes en train de devenir un genre Télérama hors-sol pour élite extra-terrestre.
Gloups, pourriez-vous nous donner votre blog ? merci !
Euh, je n'en ai pas, en fait.
C'est bien dommage car vous avez dit des choses fort bien vues et vos analyses du galimatias du Lapin sont très pertinentes à mon goût !
Oui, pourquoi n'ouvrez-vous pas un blogue à l'usage des démocrates-crétins, Gloups, il y a un public conquis d'avance pour vos slogans.
Il n'a pas dû vous échapper, Antoine, que Maurras s'approche de Marx lorsqu'il critique la démocratie et son lien avec le capitalisme ; de même Comte, par son amour de la science, s'approche de Marx aussi.
Mais ni Maurras ni Comte ne sont révolutionnaires. Ce sont des sortes de poètes païens nostalgiques et perclus de philosophie.
Il ne devrait pas vous échapper non plus qu'il y a une Russie des villes (celle qu'on voit dans les médias), et une Russie des campagnes (moins montrée, sauf par Arte qui cherche à effrayer le bourgeois capitaliste avec des images de prêtres orthodoxes fanatiques détestant la bourgeoisie occidentale).
Oui, Marx est un héros qui a amené transcendance et morale dans l'économie et les ukrainiens, les chinois, les vietnamiens, les cubains, les coréens, etc... l'en remercient encore et à jamais !
Et bravo pour votre vision manichéenne de la Russie du XXIème siècle : les salauds à la ville, les bons à la campagne ! Et pas de lien entre les deux, hein ! Après tout l'exode rural n'existe pas là-bas !
Eh ben, si les ruraux sont si bien, pourquoi moi qui vis dans une commune de moins de 120 hab n'ai pas droit à autre chose que des insultes de votre part ? !
Je ne dis pas que le combat des Russes contre la révolution libérale orange est gagné d'avance, je dis qu'il y a en Russie des forces de nouveau prêtes à s'opposer à la ploutocratie yankie.
Poutine n'a pas le même rapport de servilité avec les cartels que Sarkozy, qui profite ostensiblement du yacht de Bolloré et se laisse tancer sans rien dire par la mégère du MEDEF.
Vous devriez faire confiance à BHL comme moi : sa haine de Poutine et des Russes est significative ; s'il y a bien un type qui a fait de ses intérêts matériels une philosophie, c'est lui. "Arte", c'est l'instinct de BHL qui s'exprime.
De plus les séminaires orthodoxes se sont remplis et on n'y enseigne pas les niaiseries existentialistes démocrates-chrétiennes, ni que la neutralité politique est inscrite dans les Evangiles.
(Si vous croyez qu'il suffit de vivre dans une commune de 100 habitants pour être un paysan !)
(Si vous croyez qu'il suffit de vivre dans une commune de 100 habitants pour être un paysan !)
comme d'hab vous mélangez tout ! je vous parle de "rural" et vous me répondez "paysan" !
Quant à votre philosophie basée sur les amitiés de BHL ou les lieux de vacances de Sarko, en argumentation politique, on fait mieux !...
Je comprends - j'avais cru que vous détestiez Comte. Encore raté, donc.
Hegel et Marx célèbrent la science et le progrès, mais contrairement à Comte ils ont compris qu'elle est en grand danger. C'est là que se situe l'hérésie de Benoît XVI, qui lui vient de son idéalisme allemand, des crétins de l'"école de Francfort". Benoît XVI fait l'amalgame entre le positivisme de Comte et l'esprit critique de Hegel, à la satisfaction des libéraux démocrates ennemis de l'esprit critique. La haine des libéraux vis-à-vis de la critique, dans tous les domaines, c'est la haine de l'escroc à l'encontre de l'honnête homme.
Article intéressant. La lecture des Leçons sur les preuves de l'existence de Dieu m'a conforté dans l'idée de la rationalité de la foi, alors que je me laissait aller à la logique du pire de Clément Rosset. Le problème des officiels de l'église, c'est qu'ils sont les représentants officiels de Dieu, et donc ne sont plus des chrétiens, ou des honnêtes hommes en recherche. Ils ONT la foi. Ils disent que la grâce de l'esprit leur a été accordé officiellement. Moi, je cherche dans mon coin, et j'ai du respect pour un philosophe tel que Hegel, même si bourgeois. Sénèque aussi l'était en son temps et confiait que toutes comptes faits mieux valait prendre la richesse donnée, même si elle peut nous être retirée du jour au lendemain. Ne pas respecter les Leçons que Hegel a écrit deux ans avant de quitter ce monde, c'est insulter l'Esprit, et dans l'Evangile, le Christ a dit que c'était le pire des blasphèmes. Ceci étant, si le papisme ne vous plait pas, vous pouvez aller voir chez les réformés... Ils sont plus près du texte, et ont souvent l'esprit plus ouvert qu'on ne le pense.
J'ai mieux compris depuis en lisant "L'Esprit de la philosophie médiévale" d'Etienne Gilson, que Marx comme Hegel ne sortent pas du projet chrétien. C'est-à-dire qu'on ne peut concevoir Hegel ni Marx sans Augustin, les scolastiques, etc.
C'est le cas de penseurs comme Nitche, Heidegger ou Feuerbach également, mais je les tiens pour nuls et secondaire par rapport à Hegel et Marx. Et je ne parle même pas des philosophes post-marxistes français, Althusser, Derrida ou Balibar, dont tout l'effort consiste à rendre la pensée marxiste incompréhensible ou à la marier avec des pensées radicalement opposées comme celles de Nitche ou Freud.
A propos de Benoît XVI, c'est une tradition très récente chez les catholiques pour un pape de produire des oeuvres théologiques. Comment ne pas y voir l'influence du protestantisme ? Pour ma part je trouve ça regrettable. En ce qui me concerne, je suis radicalement opposé à l'augustinisme de J. Ratzinger, et mon opposition peut apparaître comme une remise en question de sa légitimité, ce qui n'est pas le cas.
Vous comprendrez que je n'ai pas besoin de sortir de l'Eglise catholique pour découvrir la théologie protestante, avec un pape comme Benoît XVI.
Je crois que ce qui constitue un obstacle à la conversion ouverte de Benoît XVI à la philosophie de Hegel à laquelle l'invite son camarade Küng, c'est qu'il est assez évident qu'entre Hegel et le nazisme, il n'y a pas égalité mais presque. La doctrine de l'Etat-Dieu servi par un homme providentiel n'évoque pas que Napoléon.
Je laisse à l'appréciation de la communauté philosophique le dernier paragraphe que vous avez écrit, je ne suis pas assez expert pour en apprécier la validité. Mais je pense que vous allez trop loin. Un peu naïvement, j'oserais dire que la problématique hégelienne, outre "la raison dans l'histoire" (que j'ai lu il y a longtemps), n'est absolument pas historiciste au sens philosophique du terme. Celà peut paraître paradoxal, mais bon à réfléchir. En ce qui concerne Etienne Gilson, j'en suis demeuré à "l'être et l'essence", qui avait été plus ou moins une réaction à la mode de l'existentialisme. Sa présentation de Hegel n'est pas d'une grande honnêteté intellectuelle, à mon sens, et sa préférence pour Kant ne fait aucun doute. En revanche, il a remis à l'honneur la pensée de Wolff (à propos duquel vous pourriez faire les mêmes réflexions que Hegel), et que l'on redécouvre depuis quelques années. Dans la theologia naturalis, il y a, semble-t-il, matière à argumenter sur les aquinistes, concernant l'acceptation de la possibilité d'une contradiction interne ontologique absolue. Curieusement, LEG Brouwer, mathématicien des fondements, reprendra le même topo en début de XX ème siècle, contre Hilbert et le formalisme... Si Dieu me prête vie et monnaie, je tâcherai de lire Küng, depuis le temps qu'on en parle. Quant à la théologie protestante, elle est très dispersée, c'est le moins que l'on puisse observer... Bonnes recherches à vous. Salutations.
La "communauté" philosophique comme vous dites n'a de cesse de rendre Hegel encore plus incompréhensible qu'il ne l'est sur certains points, lorsqu'elle penche en faveur de Hegel. Célébration du cancre Heidegger et de la plate Arendt dont le flirt avec le parti nazi, bizarrement, ne gêne plus personne tout d'un coup.
J'ai entendu récemment le fils de Martin Heidegger dire que lorsque son père s'exprimait oralement il disait des choses intelligibles. Comme quoi les ânes ne donnent pas des pur-sang.
Quant à ceux qui penchent pour Marx... Il paraît qu'Althusser et Balibar sont marxistes... mais je vous garantis que c'est une blague.
Oui, le Gilson dont nous parlons aime Kant, beaucoup trop à mon goût. Mais il dit cinquante ans avant Küng ce qui est assez évident, à savoir que la dialectique de Hegel et sa philosophie historique viennent indirectement de la scolastique. Le refus de l'athéologie laïque athée d'admettre que Hegel est un penseur chrétien me paraît aussi inepte que la volonté de Benoît XVI de repartir de saint Augustin et de contourner Hegel.
Vous avez peut-être compris que pour moi Marx remet utilement la dialectique de Hegel dans le bon sens et je cherche aussi comme vous une physique qui opère le même désillusionnement que Marx a opéré dans le domaine historique. Une physique qui ne soit pas dualiste, un physicien "holiste" qui clame comme Marx l'"unité du but".
Arendt a eu comme premier compagnon Gunther Anders, qui n'était pas totalement stupide, il aura fallu attendre 2002 pour qu'on édite "l'obsolescence de l'homme" paru en 1956 en Allemagne, qui préfigurait "l'homme unidimensionnel" de Marcuse. Pour le reste, d'accord avec vous concernant la polarisation sur les extrémismes que sont l'athéologisme et la théologie sacramentelle. Je crois savoir que certains profs de philo de lycée n'ont pas été enchantés d'avoir Mme Arendt au programme, et l'ont déléguée aux profs d'histoire... C'est vrai que la ritournelle de Heidegger "ce qui donne le plus à penser à notre époque qui donne à penser est que nous ne pensons pas encore" dans QAP sonne creux et que la justification par la révérence étymologique de notre langage au grec ancien n'est pas une preuve de pensée. L'humilité de Husserl dans son introduction à la logique de la pensée pure me convient davantage, car elle accepte "le phénomène" que nous pensons, quoi qu'il en soit, du moins nous le croyons, mais que notre pensée n'est pas nécessairement notre propriété, et qu'elle puisse provenir d'un Autre (non lacanien), que l'on nomme Divin pour éviter l'indétermination du hasard, mais qui, comme le Tao, pourrait être l'innommable. Les idées sont de libre parcours, admettent les juristes, parfois, lorsque ça les dépasse, là où l'oxygène se fait rare... Dans des zones de la métanoia, pour parler comme les évêques de base...
Vous faites preuve pour un protestant d'un réalisme extraordinaire ! Car voyez-vous pour moi le déni de réalité protestant (je tiens Pascal et Descartes pour des iconoclastes calvinistes) amène psychologiquement le protestant à entasser et entasser des phrases, exactement comme si cette pensée pure à force de s'accumuler comme le limon au fond de la rivière allait finir par former un dépôt de foi.
C'est probablement parce qu'elle a des choses à dire qu'on préfère éluder Simone Veil aujourd'hui et porter aux nues la petite dinde Arendt.