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  • Malédiction de la Beauté

    Les jeunes femmes belles et intelligentes savent que la beauté est une malédiction, comme un sort qui leur aurait été jeté à la naissance, les exposant à la cupidité de leurs congénères des deux sexes. On ne courtise pas une belle femme en lui disant qu'elle est belle, on lui rappelle la malédiction qui la frappe.

    Une jeune femme belle et intelligente est une sorte de mouton à cinq pattes, car l'intelligence s'augmente de l'expérience, c'est-à-dire d'erreurs que l'on est capable de ne pas répéter, et une jeune femme est, par définition, inexpérimentée. Avec l'expérience viennent les premières rides, le premier affaissement de la chair ; de très belles femmes peuvent prendre comme une bénédiction les premiers signes d'altération de leur beauté.

    La beauté n'a d'ailleurs pas plus d'existence concrète que le zéro ou l'infini. Je me souviens encore avec amusement d'un camarade d'étude, plutôt beau garçon, qui s'était entiché d'une femme mûre, non pas positivement laide, mais très commune et déjà marquée par l'âge. Il ne cessait de s'extasier sur la beauté de son amante, ce qui faisait bien rire sous cape son entourage. Comme quoi les philtres d'amour existent bien, ou plutôt l'amour est un philtre.

    Deux mots sur les femmes qui utilisent la beauté comme une arme, afin de combler le déséquilibre entre les sexes plus efficacement que tel ou tel discours de victimisation féministe. Ces femmes qui chassent plutôt qu'elles ne sont chassées paraissent supérieures, mais, comme toutes les armes, le maniement de la beauté n'est pas sans risque.

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  • Du Bonheur totalitaire

    Aldous Huxley a montré comment le contrat social se forme, au stade totalitaire, autour de la notion de bonheur. La légitimité de la petite caste dirigeante est extra-juridique, si je puis dire, puisqu'elle tient dans son engagement à faire le bonheur du peuple ; en cas de malheur, cette légitimité disparaîtrait. A. Huxley souligne le rôle joué par la technologie dans le contrat social totalitaire.

    Le cadre juridique démocratique ne joue donc plus, au stade totalitaire, qu'un rôle anecdotique : le peuple a renoncé à son pouvoir en échange de la promesse de Bonheur. "Brave New World" est une fiction : A. Huxley croyait possible l'accomplissement de cette promesse technologique, contrairement à G. Orwell. Pour rendre sa fiction de la non-violence du totalitarisme cohérente, Huxley a dû introduire un produit stupéfiant, le Soma, qui contrairement aux drogues existantes ou au plaisir comparable de la chair, n'est pas décevante, ne conduit pas inexorablement à la mélancolie.

    Les personnages de Winston Smith et Julia sont incapables de se satisfaire de la ration de bonheur commune servie par Big Brother. De leur frustration naît leur rébellion contre Big Brother, en même temps que l'idéalisme politique de Winston Smith (Julia trouve dans la rébellion contre l'ordre établi une source de satisfaction en soi).

    Plus de trente ans avant "Mai 68", Aldous Huxley a donc mis en exergue la fonction politique de la société de consommation, que l'on peut décrire comme une fonction religieuse, horizontale par rapport à l'oppression verticale d'une petite caste décrite à la fois comme parfaitement immorale et mue par une bonne intention - faire le bonheur des castes subordonnées.

    L'élucidation de ce pseudo-contrat social, par conséquent plus psychologique que juridique (d'où l'importance du rôle joué par les psychiatres et les psychanalystes dans les régimes totalitaires), est compatible avec le sadisme des élites et le masochisme des classes subalternes, sur lequel "1984" insiste un peu plus. En effet le bonheur totalitaire est un bonheur "quantique", adapté à la société de consommation et proche d'une théorie du bonheur comme une accumulation de plaisirs - la plupart des publicitaires ne font que faire miroiter l'une ou l'autre des facettes de ce bonheur "quantique". Ce bonheur quantique, mathématique, est parfaitement immoral en comparaison du bonheur épicurien ou bouddhiste, dont la modération est le pilier central ; il est parfaitement immoral au sens où il inclut la douleur et la souffrance dans le bonheur.

  • Ce que le Wokisme nous dit...

    ... du capitalisme.

    Le wokisme traduit le besoin des élites capitalistes d'un discours éthique qui sublime la société de consommation. Rien de bien nouveau, en somme, puisque Lénine parlait déjà il y a un siècle de "métaphysique bourgeoise" pour qualifier la religion des élites dominantes ; il est assez évident que l'Amour est au centre de cette "métaphysique", et l'on peut parler du mariage homosexuel comme d'un droit "métaphysique" ; parler d'union "contre-nature" n'a, pour cette raison, aucun sens.

    Grâce à Shakespeare ("Roméo & Juliette", "La Nuit des Rois") on sait que cette métaphysique n'est pas juive ou chrétienne à proprement parler, mais platonicienne, le produit d'un syncrétisme médiéval dont Shakespeare souligne les contradictions, pour ne pas dire l'absurdité.

    Le wokisme est donc une religion d'Etat introduite officiellement par le parti démocrate des Etats-Unis au cours du mandat de Bill Clinton. Elle remplit à la fois une fonction clientéliste, tout comme l'éthique antiraciste, tout en jouant un rôle religieux comparable à celui de la culture de masse. Le wokisme est un puritanisme : les prêcheurs wokistes ne prêchent pas la débauche, mais au contraire le mariage monogame. On se situe avec le wokisme aux antipodes du propos sadien, ce qui souligne la dimension métaphysique et religieuse du wokisme. Le paradoxe de l'éthique égalitariste en général, dont le wokisme n'est qu'un aspect, est qu'elle coïncide avec un régime capitaliste d'inégalités accrues. Autrement dit, il serait illusoire de croire que le wokisme contribue à l'amélioration de la condition des "gays" : tout au plus facilite-t-il les démarches administratives des plus riches d'entre eux. Le wokisme fait des "gays" les actionnaires du régime capitaliste.

    La religion d'Etat wokiste correspond à deux évolutions de la société américaine, incarnées par le parti démocrate : la première est le besoin d'une structure étatique pour conduire la politique impérialiste des Etats-Unis, qui a pris consistance à la faveur de la Seconde guerre mondiale et du développement monopolistique de l'économie capitaliste. Pour des raisons historiques et culturelles, le parti démocrate est le parti de l'étatisme, à l'instar de la religion catholique en Europe jusqu'au milieu du XVIIIe siècle.

    La seconde évolution que représente le wokisme, dans le prolongement de l'antiracisme ou du féminisme, est la tendance consumériste de l'économie des Etats-Unis. L'économie capitaliste façonne le droit capitaliste ; K. Marx faisait déjà la remarque à la fin du XIXe siècle que le code napoléon réactionnaire était déjà démodé par le capitalisme lors de sa promulgation. Pourquoi la minorité "gay", qui dispose d'un pouvoir d'achat équivalent, ne disposerait-elle pas de droits équivalents ? Le pouvoir d'achat est reconnu par tous les partis capitalistes comme un moyen d'égalisation, en dépit de la réalité économique sur laquelle repose l'impérialisme et la division du travail à l'échelle mondiale.

    Le wokisme permet de faire le constat que la lutte des classes au XXe siècle a surtout été menée au profit de la bourgeoisie dominante par des partis soi-disant "socialistes". Bien plus efficacement que les partis libéraux ou réactionnaires ils ont su persuader les classes laborieuses que l'Etat capitaliste conduit à une égalité et une justice plus grandes. Lénine vitupérait déjà au début du XXe siècle ces sociaux-démocrates soumis aux calculs impérialistes de la classe bourgeoise dominante.

    L'anti-wokisme est la doctrine du parti MAGA, car le wokisme est une religion d'Etat ; or le noyau dur de l'électorat MAGA est hostile à la formule de l'étatisme "à l'européenne". Il faut préciser ici que, depuis la fin du XXe siècle, le pacte de stabilité monétaire européen imite la formule de la souveraineté des Etats-Unis, qui repose largement sur le dollar.

    Le capitalisme de Donald Trump est un capitalisme réactionnaire, ce qui est aussi étrange que de dissocier le bananier de son fruit, et de prétendre que la banane vient du pommier. D'une certaine façon le capitalisme rétrograde de D. Trump est le strict équivalent du wokisme, car la prospérité capitaliste est aussi illusoire que l'Amour : l'histoire du capitalisme est celle d'une succession de crises