Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Impudicités dans l'Eglise

    "Ce que vous ferez aux plus petits d'entre les miens, c'est à moi que vous le ferez." (Mat. 25:40)

    Lorsque des prêtres chrétiens abusent sexuellement de jeunes enfants, ces paroles de Jésus soulignent le caractère satanique de leur impudicité. On comprend ici en effet que le Christ lui-même est visé à travers les viols et abus de confiance perpétrés par des prêtres se réclamant hypocritement de Jésus-Christ.

    Il faut espérer que le Christ vienne en aide à ces enfants à qui la communauté des chrétiens doit sembler un piège démoniaque, d'autant plus quand il est avéré que les impudiques ont reçu l'aide de complices à l'intérieur de leur communauté, dont le laxisme est une des formes.

    Disons quelques mots de ce laxisme, avant de citer l'Apôtre :

    - Le laxisme ne peut se justifier par la crainte de nuire à l'image de l'Eglise en dénonçant les impudiques ; l'argument du linge sale qui se lave en famille n'a de valeur que dans les partis crapuleux ou les associations de malfrats. L'image de la communauté des chrétiens, composée d'hommes, n'est pas sacrée. L'idolâtrie est aussi grave que l'impudicité, et la Bible illustre que ces péchés vont ensemble.

    - De même l'invocation du "secret de la confession" par certains a toute l'apparence d'une hypocrisie, puisque ce sont souvent exactement les mêmes qui prêchent la soumission aux autorités civiles ; comment peut-on se soumettre aux autorités civiles et les empêcher en même temps d'intervenir ?

    - Le péché des ministres a un retentissement plus grand ; on s'étonne de voir des prêtres chrétiens céder à l'impudicité. Mais il faut comprendre que dans ces péchés Satan triomphe particulièrement, et que la guerre qu'il mène aux chrétiens est sans trêve. Minimiser la puissance de Satan est une erreur qui ne doit pas être commise car c'est une brèche dans laquelle il ne demande qu'à s'engouffrer. 

    - Dernière remarque : certains prêtres proposent parfois de recourir à la psychanalyse pour prévenir l'impudicité au sein de l'Eglise. C'est une proposition stupéfiante dans la mesure où le caractère rationnel de la psychanalyse n'est même pas établi. Cette corporation de médecins de l'âme a elle-même souvent été en proie à des scandales sexuels. La psychanalyse ne devrait pas avoir auprès des chrétiens plus de crédit que le spiritisme, avec laquelle elle est apparentée. En soi la qualité de "psychanalyste chrétien" devrait inciter à la plus grande méfiance.

    Dans la citation qui suit de l'apôtre Paul, confronté dans son Eglise à l'impudicité, j'ai souligné les passages qui tranchent avec les réactions contemporaines de certains chrétiens (Cor. 5:1-13) :

    "On n'entend parler que d'une impudicité commise parmi vous, et d'une impudicité telle qu'il ne s'en rencontre pas de semblable même chez les païens ; c'est au point que quelqu'un a la femme de son père. Et vous êtes enflés d'orgueil ! Et vous n'avez pas été plutôt dans le deuil, afin que celui qui a commis un tel acte fut retranché du milieu de vous !

    Pour moi, absent de corps, mais présent d'esprit, j'ai déjà jugé, comme si j'étais présent, celui qui a commis un tel attentat : au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, vous tous réunis et moi en esprit au milieu de vous, avec la puissance de Notre-Seigneur Jésus, qu'un tel homme soit livré à Satan pour la mort de la chair, afin que l'esprit soit sauvé au jour du Seigneur Jésus-Christ. Vous avez tort de vous tant glorifier ! Ne savez-vous pas qu'un peu de levain fait lever toute la pâte ? Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une pâte nouvelle, comme aussi vous êtes des azymes ; car notre Pâque, le Christ, a été immolé. Célébrons donc la fête, non avec du vieux levain ni avec un levain de malice et de perversité, mais avec les azymes de la pureté et de la vérité.

    Je vous ai écrit dans ma lettre de ne pas avoir de relations avec les impudiques : non pas absolument avec les impudiques dans la société, ou avec les hommes cupides et rapaces, ou avec les idolâtres ; autrement il vous faudrait sortir de la société. J'ai simplement voulu vous dire de n'avoir point de relations avec un homme qui, portant le nom de frère, est impudique ou cupide, ou idolâtre, ou médisant, ou ivrogne, ou rapace, de ne pas même manger avec un tel homme. Car est-ce à moi de juger ceux du dehors ? N'est-ce pas ceux du dedans qu'il vous appartient de juger ? Ceux du dehors, c'est Dieu qui les juge. Retranchez le méchant du milieu de vous."

  • L'Esprit de Jézabel

    Cette note sur l'esprit de la femme Jézabel prolonge ma note précédente sur la "Cité du Chaos" ou Babylone, qui préfigure le règne de l'Antéchrist avant le Jugement dernier.

    Mais voyons d'abord ce qui relie la prophétie de Daniel à celle de l'apôtre Jean...

    A Babylone au début du règne de Nabuchodonosor, Daniel est appelé afin de traduire un songe qui trouble le roi de Babylone et dans lequel une statue "immense", "d'une splendeur extraordinaire" et "d'un aspect terrible" se dresse devant Nabuchodonosor. Avec l'aide de Dieu, Daniel élucide le songe de la statue, composée de métaux et de matériaux différents en partant de la tête jusqu'aux pieds. Il l'élucide comme une succession de cinq royaumes ou empires défiant le Ciel, qui s'écrouleront les uns après les autres pour laisser place au Royaume indestructible du Dieu de Daniel.

    La tête d'or représente Babylone, les jambes de fer représentent l'Empire romain ; entre les deux, la poitrine et les bras d'argent représentent l'empire grec d'Alexandre et le ventre et les cuisses d'airain l'empire médo-persique.

    Mais c'est l'ultime Empire qui concerne les Gentils, puisqu'il s'agit de l'Empire de la fin des Temps, qui coïncide avec l'avènement de l'Antéchrist. Les pieds de la statue représentant cet empire ont des orteils "en partie d'argile de potier et en partie de fer". Et Daniel d'interpréter ce mauvais alliage : "Mais comme les orteils des pieds étaient en partie de fer et en partie d'argile, ce royaume sera en partie fort, et il sera en partie fragile." (Dan. II:42) "Ils seront mêlés de semence d'homme.", ajoute Daniel. Remarquons que le fer, qui représente l'Empire romain, persiste au-delà de la ruine de l'Empire (quel royaume, quel empire, quelle nation ne s'est pas réclamée de l'Empire romain au cours des derniers millénaires ?)

    C'est ici que la prophétie de l'apôtre Jean prend le relais.

    Au premier chapitre de l'Apocalypse, l'apôtre est commis par la force du Saint-Esprit d'écrire une lettre aux jézabel,babylone,vénus,ishtar,jézabel,naboth,achab,baal,église,jean,apocalypse,pergame,éphèse,smyrne,philadelphie,laodicée,thyatire,sardes,daniel,nabuchodonosorSept Eglises d'Asie -Ephèse, Smyrne, Pergame, Thyatire, Sardes, Philadelphie et Laodicée.

    Ces lettres, dont l'auteur est Jésus-Christ, reconnaissable à sept définitions différentes (par exemple : "Le Premier et le Dernier, Celui qui était mort et qui a repris vie" pour Smyrne) comportent toutes des félicitations ou récompenses pour les fidèles et des reproches ou admonestations pour les infidèles.

    La sentence unique qui conclut ces lettres : "Que celui qui a des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux Eglises !", confère à ces encouragements et admonestations adressées en particulier à ces sept Eglises une portée plus grande.

    Certains exégètes chrétiens arguent que ces Sept Eglises, situées en Asie mineure (actuelle Turquie) non loin de Patmos, sont des Eglises "juives messianiques" (comme Jean Le Baptiste), et non des Eglises chrétiennes au sens strict (relevant du ministère de Paul, témoin du Christ auprès des Gentils). Je rejoins cette position qui s'appuie notamment sur le fait que Jésus-Christ se présente de façon à être reconnu par des juifs familiers des prophéties juives messianiques (par exemple : "Voici ce que dit Celui qui tient les sept étoiles dans la main droite, Celui qui marche au milieu de sept chandeliers d'or." -Ephèse).

    Quoi qu'il en soit, les Gentils que nous sommes peuvent tirer profit des lettres adressées aux Sept Eglises en attendant la parousie ou le second avènement de Jésus-Christ (qui sera précédé de l'avènement de l'Antéchrist). Ces lettres sont pleines d'enseignements sur les dérives des Eglises et sur la ruse de Satan, Maître du monde (et qui entend bien le rester indéfiniment).

    L'esprit de la femme Jézabel a gagné l'Eglise de Thyatire. Avant de mieux définir quel est cet "esprit", rappelons brièvement qui est cette mauvaise reine. Elle apparaît dans le "Livre des Rois" aux temps où Israël n'est plus gouverné par des rois juifs mais païens. De par la volonté de Jézabel, qui s'impose sur celle de son époux le roi Achab et dirige un clergé nombreux, les cultes de Baal (dieu de l'orage et de la fertilité) et Astarté (= Ishtar/Vénus/Lucifer) sont devenus la religion officielle d'Israël -le prophète Elie mettra fin à ce culte satanique.

    La volonté inflexible de Jézabel est décrite à travers l'épisode de la vigne de Naboth (Rois, 21) qui avait reçu une vigne en héritage et résista à la demande du roi Achab de la lui céder. Pour obtenir la vigne de Naboth, Jézabel le fit lapider.

    La lettre à l'Eglise de Thyatire (Ap. 2:18) fait mention du rôle de prophétesse de Jézabel et de l'impudicité qu'elle répand au sein de cette Eglise.

    En résumé, l'esprit de la mauvaise reine Jézabel est un esprit religieux qui tend par la ruse à se substituer à la foi authentique dans Jésus-Christ. La ruse est primordiale dans ce satanisme. Les femmes n'ont certes pas le monopole de la vanité, mais c'est un défaut qui est spécifiquement relié au sexe féminin depuis l'Antiquité. Les femmes qui suivent Jésus sont singulièrement dépourvues de ce défaut.

    La vanité entraîne une soif de puissance, sans doute très commune chez l'homme en général, mais particulièrement développée chez la femme. Le satanisme de Jézabel est très proche de celui représenté par Babylone.

    On peut en outre rapprocher Jézabel de la femme assise sur une bête écarlate de la prophétie (chap. 17), femme richement parée, tenant à la main une coupe d'or, remplie d'abominations et des souillures de sa prostitution. Sur son front est écrit un nom mystérieux qui signifie : "Babylone la grande, la mère des impudiques et des abominations de la terre."

    L'apôtre Jean précise qu'il fut saisi en voyant cette femme d'un "grand étonnement", ce qui laisse supposer que cette femme siège là où les fidèles du vrai Dieu ne s'attendraient pas que siège une prostituée semant le mensonge et l'impudicité.

    Ceux qui tiendront ferme contre Satan et sa doctrine ne seront pas éprouvés davantage par le Messie annoncé par les prophètes juifs et qui sauve gratuitement les gentils, étendant le règne de Dieu à toute la terre.

  • La Cité du Chaos

    Avant de mentionner quelques éléments "babyloniens" saillants de la culture contemporaine, rappelons les sources bibliques de la Tour de Babel et de Babylone, surnommée "Cité du chaos" ou "Cité de la Confusion" par le prophète Isaïe.

    L'épisode de la Tour de Babel apparaît dans le livre de la Genèse (chap. XI), attribué à Moïse. Les ruines de la Tour de Babel, c'est-à-dire le ziggourat de Babylone, sise au Sud de l'actuelle Bagdad, ont été redécouvertes en 1913, mais la Tour de Babel est d'abord une allégorie.

    La Tour de Babel représente en effet l'orgueil humain, plus exactement la prétention de l'homme à faire son salut sans l'aide de Dieu puisque la tour monte au ciel.

    Il s'agit-là d'une riche métaphore, car l'architecture est en tous temps et en tous lieux représentative de la volonté humaine, qui atteint parfois des sommets de vanité -que l'on songe par exemple aux châteaux construits par Louis II de Bavière, ou encore à la cathédrale de Beauvais, dont la nef fut conçue pour dépasser toutes les autres, et qui ne tarda pas à s'effondrer; les nombreux gratte-ciel de New York pourraient valoir à cette cité le surnom de "nouvelle Babylone"... si la plupart des mégapoles ne songeaient à se doter à leur tour de vertigineux "buildings".

    Tous les édifices somptuaires ou vaniteux, non seulement le ziggourat de Babylone, sont des édifices que l'on peut dire "religieux", car ils tendent vers l'infini - signe d'une forme d'espoir mystique. Ce n'est donc pas la science qui est condamnée à travers le symbole de la destruction de Babylone, mais bien une forme de religion, d'espoir insensé et voué à l'échec, car fondé sur la seule volonté humaine.

    L'Apocalypse d'Isaïe évoque la destruction de Babylone à la fin des Temps (Is. 24) : "Elle est renversée, la ville de confusion ; toute maison est fermée, on ne peut y entrer. On pousse des clameurs dans les rues, faute de vin ; toute allégresse a disparu, la joie est bannie de la terre. Il ne reste de la ville que décombres, et les portes brisées sont en ruines."

    Et la vision prophétique de l'apôtre Jean relaye la prophétie d'Isaïe. Aux yeux des chrétiens, Babylone est encore le symbole de l'orgueil humain qui scinde l'homme de Dieu.

    On peut remarquer l'analogie entre le mythe de Babylone et celui de Prométhée, considéré à juste titre comme le symbole de l'émancipation funeste du dieu suprême ; comme dans le récit de la Tour de Babel, la technique rend l'homme ivre d'orgueil. Il s'agit-là d'une ivresse que l'homme a éprouvée au cours des derniers siècles, compte tenu des ravages extraordinaires causés par le progrès technique au cours des XIXe et XXe siècle, au nombre desquels il faut compter la "shoah".

    Les grands massacres du XXe siècle nous renseignent sur la nature du châtiment divin prédit par les prophètes.

    Derrière l'apparente émancipation de la Nature et le "progrès scientifique" se cache en réalité un culte rendu à la Nature.

    - A bien des égards le monde et la culture contemporains évoquent la Babylone des prophètes et son effort insensé pour affranchir l'humanité de ses chaînes.

    En premier lieu il faut mentionner l'architecture. Dans le monde contemporain, l'architecture est partout. Non seulement en raison de l'urbanisation sans cesse croissante, mais aussi de la planification technocratique qui s'est imposée comme le mode de gouvernement le plus sophistiqué ; il y a même des normes juridiques "somptuaires", dénuées d'utilité pratique et qui n'ont -à l'instar de certains édifices religieux- qu'une fonction ornementale.

    L'importance de l'enseignement de la géométrie algébrique dans le cursus scolaire des nations privilégiées signale encore l'importance de l'architecture.

    Certains technocrates font valoir comme une qualité la "complexité du monde moderne" : il s'agit là d'un point de vue architectural et urbain - quasiment d'une illusion d'optique.

    - On peut encore citer la partie du mythe qui a trait au langage. Le langage fait l'objet d'un véritable culte aujourd'hui. La position avantageuse qu'occupent les intellectuels dans l'organigramme social a trait à leur aptitude à manier les mots.

    La dimension mystique du langage (qui du point de vue scientifique n'est qu'un simple outil) est une incitation à promouvoir un langage unique afin de pouvoir décréter l'universalité du langage. Cet effort a pour l'instant échoué -à l'exception notable du langage algébrique qui est de plus en plus fréquemment promu comme un "langage universel".

    La culture babylonienne présente un aspect de monothéisme ou de religion unique, centrée sur l'homme (l'architecture et la géométrie algébrique sont l'expression de la volonté humaine), que l'on retrouve aussi bien dans le mythe que dans la culture occidentale contemporaine dominante, qui tend par la force de son organisation technocratique à s'imposer au monde entier.

    On remarque qu'après la Pentecôte, quand les premiers apôtres de Jésus ont reçu l'appui de l'Esprit, ils se montrent capables de s'exprimer dans chacune des différentes langues parlées par leurs auditeurs. La différence entre les langues et la division entre les nations n'est pas abolies, cependant l'Esprit accomplit l'unité là où la volonté humaine orgueilleuse échoue.

     

  • Shakespeare contre Dante

    "Aucun serviteur ne peut servir deux maîtres. Ou bien il haïra l'un et aimera l'autre, ou bien il s'attachera à l'un et méprisera l'autre (...)" (Luc : 16,13).

    La portée de Shakespeare reste grande car l'idéologie démocratie-chrétienne est fille (plus ou moins cachée) de l'ancienne "monarchie de droit divin", en théorie comme en pratique.

    Sans doute le passage de témoin entre l'ancien machiavélisme politique et le nouveau est-il plus facile à observer dans le Royaume-Uni, où la mue s'est opérée de façon moins brutale et sanglante. Le récit légendaire de la Révolution française, tel qu'il est enseigné en France, souligne l'opposition entre l'ancien et le nouveau régime, opposition beaucoup plus superficielle en fait qu'elle n'est en droit (à bien des égards, Napoléon ne fait que répéter Louis XIV).

    Les Etats-Unis, nation qui représente mieux qu'une autre la formule démocratique, reposent plus encore sur la fiction que la France et son récit légendaire de la Révolution française. Les Etats-Unis contribuent ainsi à faire passer la démocratie-chrétienne pour une idée neuve, ce qui n'est pas le cas.

    La bêtise des élites politiques soi-disant chrétiennes est le personnage principal des tragédies de Shakespeare, ce qui a pu faire dire à certains exégètes superficiels que Shakespeare est un auteur "athée".

    Cette bêtise, tantôt innocente, tantôt méchante, est jouée par le conseiller ecclésiastique du prince, qui occupe une position (intellectuelle) supérieure à celle du prince (Th. Wolsey, Th. More, Polonius...). Shakespeare prédit ici une réalité dont nous sommes les contemporains, à savoir l'enlisement de la politique et des politiciens dans la rhétorique politique, la "science politique" osent dire certains pour parler de cet art qui consiste essentiellement à "faire miroiter".

    Or, à l'origine de cette démagogie se trouve l'effort pour légitimer l'action des pouvoirs publics à l'aide des Evangiles. C'est en cela que la démocratie contemporaine hérite de la monarchie de droit divin, et c'est encore en cela que Shakespeare conserve toute son actualité -car le mensonge sur lequel repose l'Occident demeure essentiellement le même à travers les siècles.

    Lorsqu'un mensonge est éventé, il est nécessaire de lui donner une nouvelle forme. La démocratie-chrétienne remplace pour cette raison la monarchie de droit divin. La thèse politico-religieuse de Dante Alighieri, sous-jacente à la "Divine comédie", ne pouvait résister longtemps à la confrontation à la lettre et l'esprit évangéliques. 

    Shakespeare envisage même les différents mobiles de la trahison des évangiles et leur défense expresse de fonder sur la terre (et donc la chair) le Royaume de Dieu.

    De tous ces conseillers du prince sataniques, réels ou fictifs, mis en scène par Shakespeare, le cardinal Th. Wolsey, éminence grise d'Henri VIII, est le plus machiavélique et le plus conscient qu'il trahit la foi chrétienne en l'assujettissant au plan monarchique : c'est aussi le seul qui, en définitive, est capable de s'amender et de reconnaître son erreur. Shakespeare est plus sévère avec Thomas More, persévérant jusqu'à la mort dans sa thèse, dont le tragédien montre qu'elle conduit à un dilemme sans issue (suivant l'avertissement de Luc : 16,13).

    La fable ou le mythe d'Hamlet confère aux péripéties politiques du règne d'Henri VIII une portée générale et apocalyptique.

    Dans la logique des Evangiles, la vision prophétique de l'apôtre Jean nous montre l'affrontement entre le camp des serviteurs de Dieu et celui des serviteurs du Monde, en apparence débarrassé de Satan (la rhétorique démocrate-chrétienne est un christianisme qui élude le satanisme).

    La constance de Shakespeare (on pourrait citer une bonne dizaine de pièces) à dénoncer le mensonge sur lequel repose la culture occidentale (sans jamais condamner personne) est telle qu'il n'est pas difficile, en plus de certains éléments objectifs, de reconnaître Dante Alighieri dans le poète visé par les Sonnets de Shakespeare. Comment pourrait-il en être autrement ? Comment un auteur qui s'est employé à dénigrer la culture médiévale avec la force que même ses détracteurs reconnaissent à Shakespeare... comment un tel auteur aurait-il pu épargner Dante, l'auteur du plus beau des mensonges ?

    Sonnet 21

    Il n'en va pas de moi comme de tel poète

    Dont une beauté peinte a stimulé la Muse,

    Qui prend pour ornement le ciel même et compare

    Son bel objet d'amour à toutes choses belles,

    L'unissant fièrement au soleil, à la lune,

    Aux joyaux de la terre et de la mer, aux fleurs

    Premières-nées d'avril, à toutes les merveilles

    Qu'en cette vaste sphère enclôt tout l'air du ciel.

    Ah ! de mon amour vrai laissez-moi parler vrai (...)

    Il est reproché à Dante dans ce sonnet de transformer la prophétie évangélique en objet d'art à caractère érotique, alors même que le Messie dissuade de bâtir sur le sable. Du "grand mystère" chrétien évoqué par Paul de Tarse, Dante se contente de tirer un beau poème apparemment chrétien (mais en réalité teinté d'animisme, voire de pédérastie platonicienne) ; Shakespeare se propose au contraire "de parler vrai d'amour vrai", déboutant par avance tous les exégètes plus ou moins freudiens acharnés à voir dans les sonnets force connotations érotiques.