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apôtre

  • Sens chrétien

    ...de l'Ancien Testament.

    Quelques mots d’un copieux ouvrage de Pierre Grelot (1917-2009), érudit catholique (professeur à l’Institut catholique de Paris), dont je reprends le titre pour cette note.

    Judaïsme et foi chrétienne sont parfois amalgamés à tort, ce qui ne vaut pas mieux que l’erreur du célèbre Marcion qui présente la foi chrétienne pour la pierre angulaire d’une religion entièrement nouvelle.

    La démarche de P. Grelot consiste à critiquer la religion juive à la suite de l’apôtre Paul. Que reste-t-il de l’Ancien Testament pour un disciple de Jésus ?

    Une telle démarche critique heurte bien sûr les Juifs, pour qui les prophéties juives ne préparent ni n’annoncent l’avènement de Jésus-Christ, et pour qui la religion juive est réservée aux seuls Juifs, à l'exclusion des païens ; non seulement la foi chrétienne est universelle, donnée à tous les hommes, mais elle leur est offerte directement, sans l'intermédiaire d'un clergé, Jésus-Christ refusant pour cette raison d'être appelé "maître" par ses apôtres.

    La démarche critique de "Sens chrétien de l'Ancien Testament" heurte également les « judéo-chrétiens », qui occultent l’aspect de perfectionnement de la Loi (juive) caractéristique de la foi chrétienne - si caractéristique qu’elle explique la haine farouche du clergé juif contemporain de Jésus pour un prédicateur dont l’enseignement prive le clergé de légitimité.

    On pourrait qualifier le « judéo-christianisme » d’erreur grossière, car elle méconnaît à la fois les exigences des Juifs et celles des disciples du Messie. Néanmoins cette hérésie est très répandue.

    Tandis que l’Apôtre résume de façon concise la Loi de Moïse à un « pédagogue » : « (…) Ainsi la Loi nous servit-elle de pédagogue jusque au Christ, pour que nous obtenions de la Foi notre justification. Mais la Foi venue, nous ne sommes plus sous un pédagogue. » (Galates 3, 23-25). P. Grelot traite la question de façon quasiment exhaustive ; il explique pourquoi et comment l’Ancien Testament est "préparation" (pédagogie) et "annonce" (prophétie de l’avènement de Jésus), mais aussi les problèmes que l’eschatologie ont posé et posent encore au « monde chrétien », ou encore la signification spirituelle de la « Jérusalem nouvelle », opposée à celle du peuple juif, encore prisonnière des griffes du temps.

    • Qu’est-ce qui empêcha les Juifs de reconnaître en Jésus le Messie que l’Ancien Testament annonçait ?

    C’est ici le chapitre qui m’a le plus intéressé, mais qui est malheureusement le moins clair, le plus intellectuel au sens péjoratif du terme. Le « manque de spiritualité » est la réponse lapidaire de l’Apôtre à cette question, face à des Ecritures saintes juives qui requièrent de comprendre l’esprit caché derrière la lettre.

    On sait que les douze ne comprenaient pas l’enseignement de Jésus pour les mêmes raisons. Ils suivaient sans comprendre, comme des enfants, notamment Simon-Pierre.

    Comme les fables, les écritures juives sont le plus souvent allégoriques. Un esprit trop terre-à-terre, efféminé, ramènera leur sens spirituel à un sens temporel. On voit d’ailleurs que le Messie est assiégé par des questions terre-à-terre - le paiement des impôts, le mariage, le divorce, illustrant le manque d’intérêt du commun des mortels pour les choses spirituelles.

    La difficulté des Juifs à comprendre le sens spirituel de la Loi et des prophéties juives se traduit par la multiplication des rituels. Les rituels, qu’ils soient religieux ou profanes, trahissent toujours un degré plus ou moins élevé de superstition (et donc d'athéisme). Ils sont synonymes dans le Nouveau Testament de la stérilité de la religion des pharisiens.

    Les chrétiens rencontrent aussi cette difficulté d’interprétation, bien que les paraboles du Messie heurtent de plein fouet l’ordre naturel des choses et que le Messie rappelle la faiblesse de la chair.

    NB : Je n’ai pas été gêné à la lecture de cet ouvrage par le « dogme catholique », c'est-à-dire par certaines interprétations du Nouveau Testament contestées par d’autres chrétiens ; cette guerre rend sans doute pour les païens la compréhension du « monde chrétien » difficile, bien que la Bible leur soit accessible directement.

  • Chasteté de l'Apôtre

    A chaque fois qu'un prêtre chrétien est pris en flagrant délit d'impudicité, le clergé des journalistes dont la voix porte plus loin que la voix de n'importe quel autre clergé, saute sur l'occasion pour inculper la chasteté.

    Celle-ci serait cause des abus et mauvais traitements dont certains prêtres se rendent coupables à l'encontre de personnes sans défense.

    On doit comprendre ici que dans une société gouvernée par le désir, dont l'économie est largement tributaire, la chasteté voire la sobriété sont presque présentés comme des péchés par les promoteurs de cette société.

    L'impudicité est donc une menace pour les jeunes enfants qui naissent et grandissent dans cette société, bien au-delà de la menace représentée par certains clercs.

    J'ai déjà conseillé sur ce blogue, pour la confronter à la réaction du clergé romain, de lire la réaction de l'apôtre Paul à propos d'un cas d'impudicité dans une communauté qu'il conseille. Tandis que le clergé romain s'inquiète pour son honneur, l'Apôtre s'inquiète pour la Foi. Il recommande l'exclusion "sine die" des personnes alcooliques, dont l'état trahit le désespoir et l'athéisme.

    Néanmoins les journalistes ignorent que la chasteté n'est pas la sobriété. La chasteté n'est pas une sobriété radicale, car précisément être sobre n'est pas s'abstenir de boire en toutes circonstances. Qui boit modérément est sobre.

    La chasteté n'est pas non plus un sacrifice. Dieu ne demande pas de sacrifice ; son fils Jésus l'a rappelé sans ménagement dans le Temple de Jérusalem. On ne bâtit en faisant de tels sacrifices que des temples de pierre et non le Royaume de Dieu. La chasteté de l'Apôtre est une force surnaturelle que lui confère la Foi, une force qui se superpose à la vertu naturelle, ou peut même s'y substituer.

    La règle de stricte chasteté imposée aux membres du clergé romain jusqu'à nouvel ordre est une règle justifiée par l'organisation interne de l'Eglise romaine. Compte tenu des rapports paradoxaux que le clergé romain entretient avec le monde -un pied dedans, un pied à l'extérieur- cette règle est sans doute difficile à faire observer. Les règlements absurdes constituent une menace pour la société.

  • Chrétien dans la Cité (1)

    Le thème du "chrétien dans la cité" ou du chrétien en politique est la bouteille à l'encre. Il a donné lieu à des débats infinis au cours des siècles et à des conclusions radicalement différentes.

    Je ne vais pas essayer d'élucider cette question en quelques lignes mais je me contenterai de quelques remarques et observations.

    Les chrétiens se sont trouvés et se trouvent confrontés au cours des siècles à des régimes politiques et des gouvernements très différents, tantôt encourageant certaines formes de culte chrétien, tantôt en dissuadant par la force, ou encore les tolérant.

    "Que toute âme soit soumise aux puissances supérieures ; car il n'y a point de puissance qui n'émane de Dieu, et toutes lui sont soumises." (Rom. 13)

    Quand l'apôtre Paul, lui-même juif et citoyen romain, ordonne à ses disciples de respecter les pouvoirs publics romains, il contredit une idéologie ou une mentalité répandue en son temps parmi les juifs, les portant à croire que le messie allait libérer Israël du joug romain.

    Paul ne fait que confirmer l'avertissement de Jésus-Christ : "Mon Royaume n'est pas de ce monde."

    La manière dont Dieu veut établir son Royaume de Justice n'est pas celle dont rêvent les hommes. Ce n'est pas un procédé éthique ou politique. Il n'y a pas non plus de doctrine sociale ou politique "chrétienne" possible selon l'Apôtre, pour la même raison qu'elle revient à se substituer à la volonté de Dieu qui a été révélée aux Gentils par Jésus-Christ.

    "La sagesse de ce monde est folie devant Dieu." (1 Cor. 3:19)

  • Impudicités dans l'Eglise

    "Ce que vous ferez aux plus petits d'entre les miens, c'est à moi que vous le ferez." (Mat. 25:40)

    Lorsque des prêtres chrétiens abusent sexuellement de jeunes enfants, ces paroles de Jésus soulignent le caractère satanique de leur impudicité. On comprend ici en effet que le Christ lui-même est visé à travers les viols et abus de confiance perpétrés par des prêtres se réclamant hypocritement de Jésus-Christ.

    Il faut espérer que le Christ vienne en aide à ces enfants à qui la communauté des chrétiens doit sembler un piège démoniaque, d'autant plus quand il est avéré que les impudiques ont reçu l'aide de complices à l'intérieur de leur communauté, dont le laxisme est une des formes.

    Disons quelques mots de ce laxisme, avant de citer l'Apôtre :

    - Le laxisme ne peut se justifier par la crainte de nuire à l'image de l'Eglise en dénonçant les impudiques ; l'argument du linge sale qui se lave en famille n'a de valeur que dans les partis crapuleux ou les associations de malfrats. L'image de la communauté des chrétiens, composée d'hommes, n'est pas sacrée. L'idolâtrie est aussi grave que l'impudicité, et la Bible illustre que ces péchés vont ensemble.

    - De même l'invocation du "secret de la confession" par certains a toute l'apparence d'une hypocrisie, puisque ce sont souvent exactement les mêmes qui prêchent la soumission aux autorités civiles ; comment peut-on se soumettre aux autorités civiles et les empêcher en même temps d'intervenir ?

    - Le péché des ministres a un retentissement plus grand ; on s'étonne de voir des prêtres chrétiens céder à l'impudicité. Mais il faut comprendre que dans ces péchés Satan triomphe particulièrement, et que la guerre qu'il mène aux chrétiens est sans trêve. Minimiser la puissance de Satan est une erreur qui ne doit pas être commise car c'est une brèche dans laquelle il ne demande qu'à s'engouffrer. 

    - Dernière remarque : certains prêtres proposent parfois de recourir à la psychanalyse pour prévenir l'impudicité au sein de l'Eglise. C'est une proposition stupéfiante dans la mesure où le caractère rationnel de la psychanalyse n'est même pas établi. Cette corporation de médecins de l'âme a elle-même souvent été en proie à des scandales sexuels. La psychanalyse ne devrait pas avoir auprès des chrétiens plus de crédit que le spiritisme, avec laquelle elle est apparentée. En soi la qualité de "psychanalyste chrétien" devrait inciter à la plus grande méfiance.

    Dans la citation qui suit de l'apôtre Paul, confronté dans son Eglise à l'impudicité, j'ai souligné les passages qui tranchent avec les réactions contemporaines de certains chrétiens (Cor. 5:1-13) :

    "On n'entend parler que d'une impudicité commise parmi vous, et d'une impudicité telle qu'il ne s'en rencontre pas de semblable même chez les païens ; c'est au point que quelqu'un a la femme de son père. Et vous êtes enflés d'orgueil ! Et vous n'avez pas été plutôt dans le deuil, afin que celui qui a commis un tel acte fut retranché du milieu de vous !

    Pour moi, absent de corps, mais présent d'esprit, j'ai déjà jugé, comme si j'étais présent, celui qui a commis un tel attentat : au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, vous tous réunis et moi en esprit au milieu de vous, avec la puissance de Notre-Seigneur Jésus, qu'un tel homme soit livré à Satan pour la mort de la chair, afin que l'esprit soit sauvé au jour du Seigneur Jésus-Christ. Vous avez tort de vous tant glorifier ! Ne savez-vous pas qu'un peu de levain fait lever toute la pâte ? Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une pâte nouvelle, comme aussi vous êtes des azymes ; car notre Pâque, le Christ, a été immolé. Célébrons donc la fête, non avec du vieux levain ni avec un levain de malice et de perversité, mais avec les azymes de la pureté et de la vérité.

    Je vous ai écrit dans ma lettre de ne pas avoir de relations avec les impudiques : non pas absolument avec les impudiques dans la société, ou avec les hommes cupides et rapaces, ou avec les idolâtres ; autrement il vous faudrait sortir de la société. J'ai simplement voulu vous dire de n'avoir point de relations avec un homme qui, portant le nom de frère, est impudique ou cupide, ou idolâtre, ou médisant, ou ivrogne, ou rapace, de ne pas même manger avec un tel homme. Car est-ce à moi de juger ceux du dehors ? N'est-ce pas ceux du dedans qu'il vous appartient de juger ? Ceux du dehors, c'est Dieu qui les juge. Retranchez le méchant du milieu de vous."

  • L'Apôtre diffamé

    Paul de Tarse, "l'apôtre des Gentils", est de nos jours très souvent publiquement diffamé. J'ai déjà mentionné dans ce blogue l'exemple de "La Dernière Tentation du Christ" production filmée qui ne vise pas tant la figure de Jésus-Christ qu'elle ne s'efforce de diffamer Paul de Tarse et à opposer cet exégète fidèle à Jésus.

    Il ne s'agit pas ici de multiplier les exemples de diffamation que d'en donner la raison : les épîtres de Paul constituent une menace pour le nouveau pharisaïsme démocrate-chrétien.

    En effet la démocratie-chrétienne repose sur le "salut par les oeuvres" -c'est ce qui se cache derrière le vocable de "christianisme social". Or Paul conteste catégoriquement que les oeuvres puissent constituer une voie de salut ; c'est là un des points-clefs de son exégèse.

    Foi, espérance et charité diffèrent des "oeuvres de la Loi" ; celle-ci n'était qu'un tuteur.

    Le "christianisme social", d'après Paul, est une parodie de christianisme. Il mène à l'idée que "tout le monde ira au paradis", perspective qui demeure implicite car les idéologues démocrates-chrétiens ne peuvent l'indiquer sans faire l'aveu de leur athéisme.

    Parmi les moyens de diffamation, il est parfois suggéré que Paul de Tarse serait "antisémite" ou qu'il se serait approprié la religion juive. Cette dernière assertion est ridicule puisque Paul définit justement la religion de Jésus-Christ comme une religion véritablement parfaite et universelle, distincte de la religion juive telle que les prêtres juifs l'enseignaient. Jésus accomplit la prophétie juive et désavoue le clergé juif. "La Foi nous a affranchi de la tutelle de la Loi, dont par conséquent le temps est passé."

    La Loi procure seulement la connaissance du péché, ignoré des païens. Mais la Loi ne libère pas du péché contrairement à la Charité.

    Par conséquent, bien mieux que de nombreux théologiens chrétiens, Paul de Tarse explique pourquoi le message évangélique n'est pas superposable à la loi de Moïse, régissant le peuple hébreu.

    Vis-à-vis des Juifs, Paul de Tarse recommande à ses disciples parmi les Gentils de ne pas se montrer orgueilleux et se prendre à leur tour pour "le peuple élu", quand bien même l'incrédulité des Juifs à entraîné leur chute et leur retranchement. Paul lui-même était Juif, ennemi des disciples de Jésus, et Dieu lui a fait la grâce de s'adresser à lui. Tout Israël sera sauvé à la fin des temps, non seulement l'"olivier sauvage" auquel Paul compare les Gentils.

    On doit s'attendre des faux docteurs chrétiens, qui prônent Satan sous couvert de prôner l'Evangile, qu'ils s'efforcent de réhabiliter la "chair". Cette réhabilitation est le corollaire du "christianisme social". L'un n'est pas possible sans l'autre. Or la "chair" représente pour Jésus comme pour Paul la voie contraire au Salut chrétien et à la vie éternelle, car l'homme de chair est faible, et le christianisme social est la religion des hommes soumis à la mort.

  • Imitation de Jésus-Christ

    Faut-il pousser l'imitation de Jésus-Christ jusqu'à traiter de suppôt de Satan les soi-disant apôtres qui confondent leur désir avec la volonté de Dieu ?

  • Lettre à Flora

    J'ai recopié ci-dessous (éd. Gallimard-Pléiade) une leçon de théologie d'un certain Ptolémée, adressée à sa "soeur" Flora (au sens chrétien du terme) et rédigée dans la première moitié du IIe siècle.

    Ptolémée fournit à Flora des explications sur la Loi de Moïse, compte tenu du bouleversement dans la compréhension des écritures saintes dû à l'avènement de Jésus-Christ.

    - Deux petites remarques sur cette édition (2016) ; d'abord son titre générique "Premiers écrits chrétiens" n'est pas exact, car le volume englobe quelques écrits païens et juifs antichrétiens.

    - Secundo, le qualificatif de "gnostique" appliqué par l'auteur de la note à ce Ptolémée est récusable, puisque l'adjectif "gnostique" n'a plus ou n'a pas de signification précise. Son usage polémique par l'Eglise romaine a fait que la signification de "fausse science" du terme "gnose" est devenu son sens courant. Mais on pourrait considérer comme "gnostiques" des ouvrages réputés catholiques, de moines ou de poètes, mélangeant les références chrétiennes et la philosophie païenne de Platon (Dante Alighieri est un exemple célèbre de ce syncrétisme "gnostique").

    L'intérêt du propos de Ptolémée tient dans la manière rigoureuse, analogue à celle de l'apôtre Paul, dont il s'appuie sur les écritures saintes pour étayer sa démonstration. Avec Paul ce Ptolémée a aussi en commun d'expliquer pourquoi le nouveau testament est plus lumineux que l'ancienne loi de Moïse.

    (J'introduirai ultérieurement des commentaires en gras dans cette longue missive qui provoque la réflexion)

    Ptolémée à Flora

    La loi instituée par Moïse, belle Flora, ma soeur, n'a pas été comprise jusqu'ici par beaucoup de gens, car ils ne connaissent avec précision ni son auteur ni ses prescriptions : tu le verras bien, je pense, quand tu sauras quels avis divergents sont émis à son propos.

    I-LA LOI EST L'OEUVRE D'UN DIEU JUSTE

    Selon les uns, la Loi a été instituée par Dieu le Père ; les autres, au contraire, affirment qu'elle l'a été par l'Adversaire, le diable corrupteur, à qui, de même, ils attribuent la création du monde et qu'ils appellent "le père et le créateur de cet univers".

    Ils se trompent : les uns comme les autres, se contredisant réciproquement, sont passés à côté de la vérité sur ce sujet.

    Car, à ce qu'il semble, la Loi n'a pas été instituée par Dieu le Père, qui est parfait (elle est, de fait, postérieure), puisqu'elle est imparfaite et a besoin d'être achevée par un autre et qu'elle comporte des prescriptions inadaptées à la nature et au dessein d'un tel Dieu. A l'inverse, on ne peut non plus lier la Loi à l'injustice de l'Adversaire, puisqu'elle interdit l'injustice. Et au vu de ce qui suit, cette idée et celles de gens qui n'ont pas bien entendu les paroles de Sauveur : "Une maison ou une ville divisée contre elle-même ne peut rester debout", a déclaré en effet notre Sauveur.

    En outre, en disant que la création du monde est son oeuvre - puisque par lui tout a été fait et que sans lui rien n'a été fait -, l'Apôtre réduit d'avance à néant la sagesse creuse de ces menteurs : la création n'est pas celle d'un dieu corrupteur, mais celle d'un dieu qui est juste et qui hait le mal. C'est là l'idée d'hommes imprudents, qui ne tiennent pas compte de la providence du démiurge et dont l'oeil, non seulement de l'âme, mais aussi du corps, est aveuglé.

    Qu'ils sont passés du côté de la vérité, ce que je dis là te le montre. Chacun des deux partis le fait à sa manière : les uns par ignorance du Dieu de justice, les autres par ignorance du Père de toutes choses, que seul a révélé lors de sa venue celui qui seul le connaît.

    Il nous reste, à nous qui avons été jugés dignes de la connaissance de l'un et de l'autre, à t'exposer avec précision la Loi elle-même, sa provenance et celui par qui elle a été instituée - son législateur. Ce que nous allons dire, nous en fournirons la preuve par les paroles de notre Sauveur, les seules qui permettent de conduire sans faux pas à la compréhension de ce qui est.

    PREMIERE TRIPARTITION DE LA LOI : DIEU, MOïSE, LES ANCIENS

     Il faut donc savoir, en premier lieu, que l'ensemble de cette Loi, contenue dans le Pentateuque de Moïse, n'a pas été institué par un seul, je veux dire par Dieu seul, mais que certaines de ses prescriptions l'ont été par des hommes. Et cette Loi, les paroles du Sauveur nous apprennent qu'elle se divise en trois.

    En effet elle se divise selon qu'elle se rapporte à Dieu lui-même et à son institution de la Loi, puis à Moïse (non en ce que Dieu a institué par son intermédiaire, mais en ce que Moïse a institué sous l'impulsion de sa propre pensée), et enfin aux anciens du peuple, puisqu'il se trouve que ce sont eux d'abord qui ont introduit des préceptes venant d'eux-mêmes.

    Comment donc les paroles du Sauveur montrent-elles qu'il en est ainsi ? Tu vas l'apprendre dès à présent. Alors que le Sauveur discutait avec ceux qui l'interrogeaient au sujet du divorce qui était permis par la Loi, il leur dit : "C'est à cause de la dureté de votre coeur que Moïse vous a autorisés à répudier vos femmes ; car au commencement, il n'en était pas ainsi." Car c'est Dieu, dit-il, qui a joint cette union conjugale, et "ce que le Seigneur a joint, que l'homme, dit-il, ne le sépare pas."

    Il montre ici qu'une loi, celle de Dieu, défend à la femme d'être séparée de son mari, et qu'une autre, celle de Moïse, a autorisé à séparer, à cause de la dureté du coeur, ce qui était uni par le lien conjugal.

    A cet égard, la Loi instituée par Moïse est contraire à celle de Dieu ; en effet, maintenir le lien conjugal est le contraire de ne pas maintenir le lien conjugal. Mais si nous examinons le dessein de Moïse qui lui a fait légiférer ainsi, on trouvera qu'il ne l'a pas fait selon sa volonté propre, mais selon la nécessité, à cause de la faiblesse des personnes soumises à la Loi.

    En effet, ceux-là ne pouvaient garder le dessein de Dieu leur interdisant de chasser leurs femmes, avec lesquelles il était désagréable à certains de vivre, et, pour cette raison, ils risquaient de passer davantage du côté de l'injustice et, par là, d'aller à leur perte. Moïse voulut donc leur épargner ce désagrément, à cause duquel ils risquaient d'aller à leur perte, et préférant, en la circonstance, un moindre mal, leur donna de lui-même une seconde loi, celle du divorce : de la sorte, s'ils ne pouvaient garder la première, ils garderaient du moins la seconde et ne passeraient pas du côté de l'injustice et du mal, ce qui aurait entraîné leur perte complète.

    Voilà dans quel dessein Moïse s'est trouvé instituer une loi contraire à Dieu. Au reste, que la Loi de Moïse lui-même est autre que celle qui vient de Dieu, nous l'avons démontré ici de façon incontestable, bien que nous ne l'ayons fait pour l'instant que par un seul argument.

    Il y a aussi des traditions des anciens qui ont été mêlées à la Loi. Cela aussi, le Sauveur le rend évident quand il déclare : "Car Dieu a dit : "Honore ton père et ta mère, afin d'être heureux." Mais vous, dit-il en s'adressant aux anciens, vous avez dit : "Il est à Dieu, le don que tu aurais reçu de moi", et vous avez invalidé la Loi de Dieu par la traditions de vos anciens. Isaïe l'avait clamé haut et fort : "Ce peuple m'honore des lèvres, mais leur coeur est loin de moi. En vain ils me révèrent, car leurs préceptes sont enseignements d'hommes."

    Il a donc été clairement démontré que l'ensemble de la Loi se divise en trois : nous y trouvons, en effet, une législation de Moïse lui-même, une des anciens et une de Dieu lui-même. Ainsi établie par nous, la division de l'ensemble de cette Loi a donc dévoilé ce qu'il y a de vrai en elle.

    [Comme l'apôtre des Gentils en ses épîtres, ledit Ptolémée (IIe siècle) explique pourquoi et comment le Messie Jésus est venu remplacer les lois instituées par Moïse afin de mener le peuple hors d'Egypte.

    - Comment : en abolissant ce qui n'était pas pur dans la loi de Moïse.

    - Pourquoi : afin de préparer l'entrée dans la Jérusalem céleste/Terre promise (figuration symbolique de la réunion de l'homme avec Dieu, le père du Sauveur Jésus).

    Ptolémée souligne, citant le prophète Isaïe, que l'impureté des lois juives résulte de ce qu'elles sont, pour partie, des solutions humaines.

    Le lecteur moderne sera surpris par la théologie de Ptolémée tant l'époque moderne est marquée par des catégories philosophiques (monothéisme/polythéisme) impropres à rendre compte de l'esprit des écritures saintes juives et chrétiennes ; la philosophie est elle aussi un "enseignement d'homme", à l'instar de ceux fustigés par le prophète Isaïe.]

     DEUXIEME TRIPARTITION : LOI PURE/MÊLEE AU MAL/SYMBOLIQUE

    A son tour, la première partie -la Loi de Dieu même- se divise en trois : la législation pure, sans mélange avec le mal - celle que l'on appelle Loi au sens propre et que le Sauveur n'est pas venu abolir mais accomplir (car il n'était pas étranger à celle qu'il a accomplie ; et celle-ci avait besoin d'être accomplie) ; puis celle qui est mêlée au mal et à l'injustice et que le Sauveur a supprimée parce qu'elle était inappropriée à sa propre nature. La dernière division concerne ce qui est figuré et symbolique, institué à l'image des réalités spirituelles et transcendantes : c'est ce que le Sauveur a fait passer du sensible et de l'apparent au spirituel et à l'invisible.

    La Loi de Dieu, pure et sans mélange avec le mal, c'est le décalogue, ces dix paroles divisées en deux tables, qui visent à proscrire ce qu'il faut éviter et à ordonner ce qu'il faut faire ; bien que leur législation fût pure, comme il leur manquait la perfection, elles avaient besoin de leur accomplissement par le Sauveur.

    La Loi mêlée à l'injustice, c'est celle du talion et de la compensation des injustices déjà commises, qui ordonne d'arracher "oeil pour oeil et dent pour dent", et de rendre meurtre pour meurtre. Car il ne commet pas moins l'injustice, celui qui la commet en second : l'ordre seul change, l'acte et le même.

    Cette prescription était et est juste par ailleurs ; c'est en raison de la faiblesse des personnes soumises à la Loi qu'elle a été instituée en transgression de la Loi pure, mais elle est inappropriée à la nature et à la bonté du Père de toutes choses. Elle était peut-être adaptée mais, plus encore, elle était le jouet de la nécessité ; car celui qui ne veut pas qu'il y ait un seul meurtre lorsqu'il dit : "Tu ne tueras pas", dès lors qu'il commande de punir le meurtrier par le meurtre, en instituant une seconde loi et en présidant à deux meurtres alors qu'il y en ait un seul, sans s'en apercevoir a été joué par la nécessité.

    Voilà pourquoi le Fils, venu de sa part, a supprimé contre partie de la Loi, tout en reconnaissant qu'elle aussi était de Dieu. Il est en accord avec l'ancienne observance, notamment quand il dit : "Dieu dit : "Celui qui maudit son père ou sa mère est passible de mort."

    Enfin, il y a la partie figurative, qui est à l'image des réalités spirituelles et transcendantes, j'entends par là la législation sur les offrandes, la circoncision, le sabbat, le jeûne, la Pâque, les pains sans levain, etc. Toutes ces prescriptions en tant qu'images et symboles, ont été modifiées depuis que la Vérité a été révélée : ce qu'elles ont de spirituel a été élevé ; les noms sont restés les mêmes, mais les réalités ont changé. Par exemple, le Sauveur nous a commandé de présenter des offrandes, non pas en sacrifiant des animaux ou des victimes, mais par des louanges, des glorifications, des actions de grâces spirituelles et par le partage avec nos prochains et la bienfaisance à leur égard. Quant à la circoncision, il veut que nous ayons non celle du prépuce de notre corps, mais celle, spirituelle, du coeur. De même l'observance du sabbat : il veut en effet que nous cessions de faire des oeuvres mauvaises.

    Le jeûne aussi : il veut que le trône soit non pas corporel, mais spirituel, dans l'abstinence de tout ce qui est mal. Cependant, le jeûne visible est observé chez nous également, puisque, pratiqué avec raison, il peut profiter à l'âme quand il n'est fait ni pour imiter certains, ni par habitude, ni parce que c'est le jour fixé pour le faire.

    Aussi bien on le pratique pour rappeler le jeûne véritable, afin que le jeûne visible rappelle ce jeûne-là à ceux qui ne veulent pas encore le pratiquer.

    De même pour la Pâque et les pains sans levain, l'apôtre Paul montre que c'étaient des images : "Notre Pâque, dit-il, a été immolée : le Christ" et "pour que vous soyez, ajoute-t-il, des pains sans levain, ne vous mêlez pas au levain (par "levain" en réalité il veut dire le mal), mais soyez une nouvelle pâte."

    CE QUI A ETE ACCOMPLI, SUPPRIME OU MODIFIE

    Ainsi donc la Loi reconnue comme divine se divise elle-même en trois. D'abord, ce qui a été accompli par le Sauveur : "Tu ne tueras pas, tu  ne commettras pas d'adultère, tu ne feras pas de parjure" se comprennent, en effet, comme l'abstention de la colère, de la convoitise ou du jurement. Ensuite, ce qui a été complètement supprimé : "oeil pour oeil et dent pour dent", dans la mesure où cela se mêlait à l'injustice et constituait en soi un acte d'injustice, a été supprimé par le Sauveur qui a commandé le contraire ; or deux éléments contraires s'annulent : "Car moi je vous dis de ne pas vous opposer du tout à qui vous fait du mal, mais si quelqu'un te frappe, tends-lui l'autre joue." Enfin, une partie allégorique a trait à ce qui a été modifié et changé du corporel au spirituel : c'est la Loi symbolique, instituée à l'image des réalités transcendantes. Car les images et les symboles, qui représentent d'autres réalités, étaient valables avant que ne paraisse la Vérité ; mais depuis que la Vérité est apparue, il faut agir selon la Vérité, non selon l'image.

    Ces trois parties, ses disciples les ont évoquées, de même que l'apôtre Paul : celle des images, ainsi que nous l'avons déjà dit, à travers la Pâque immolée pour nous et les pains sans levain ; la Loi mêlée à l'injustice, quand Paul dit : "La Loi des commandements a été invalidée dans les enseignements" ; celle sans mélange avec le mal, quand il dit : "La Loi est sainte, le commandement est saint, juste et bon."

    TROISIEME TRIPARTITION : LE PERE, LE DEMIURGE ET SATAN

    Pour résumer -s'il est possible-, je pense t'avoir suffisamment montré qu'une partie de la loi vient des hommes et que la loi même de Dieu se divise en trois.

    Il nous reste à dire quel est ce Dieu qui a institué la Loi ; mais je crois te l'avoir montré par ce que j'ai déjà dit, si tu as bien écouté. Car si cette Loi, comme nous l'avons enseigné, n'a été instituée ni par le Dieu parfait, ni par le diable, ce qu'il n'est même pas permis de dire, c'est donc un autre qui a institué la Loi, et celui-là est le démiurge et le créateur de cet univers et de ce qui est en lui ; comme il est différent des autres par la substance et qu'il se situe entre les deux, on pourrait à juste titre lui donner le nom d'Intermédiaire. Si le Dieu parfait est bon par sa propre nature - et il l'est (car il n'y a qu'un Dieu bon : notre Sauveur a affirmé que c'est son Père, qu'il a lui-même révélé) -, et si l'Adversaire est par nature mauvais et méchant et se caractérise par l'injustice, celui qui se situe entre les deux, sans être bon, ni vraiment mauvais, ni injuste, pourrait plus spécifiquement être appelé juste, puisqu'il préside à la justice, qui se fait selon lui.

    Ce Dieu sera au-dessous du Dieu parfait et inférieur à sa justice, parce qu'il est engendré et non pas inengendré (car seul le Père est inengendré, lui de qui vient toute chose et de qui dépend toute chose spécifiquement), mais il sera plus grand et plus fort que l'Adversaire, son essence et sa nature étant différentes de l'essence de deux autres. En effet, l'essence de l'Adversaire est corruption et ténèbres (car il est matériel et divisé en maintes parties), et l'essence de l'Inengendré, Père de toutes choses, est incorruptibilité et lumière en soi, simple et de forme unique, tandis que l'essence du Démiurge a produit une double puissance - mais il est lui-même une image du Dieu supérieur.

    Ne va pas, à présent, te soucier de savoir comment l'unique principe de toutes choses -celui que notre foi reconnaît pour tel, celui qui est inengendré, incorruptible et bon-, se sont constituées ces natures, celle de la corruption et celle de l'intermédiaire, qui ne sont pas consubstantielles, alors que par nature ce qui est bon engendre et produit des êtres qui lui sont semblables et consubstantiels. Car tu apprendras par la suite, si Dieu le veut, leur principe et leur origine, lorsque tu seras jugée digne de la tradition apostolique que nous avons reçue nous aussi par succession, et cela, une fois que nous aurons étayé tous ces propos par l'enseignement de notre Sauveur.

    Voilà, ma soeur Flora, ce que je n'ai pas eu de peine à te dire en quelques mots. J'ai écrit là de façon résumée et, en même temps, j'ai suffisamment développé le sujet.

    Par la suite, cela te sera très utile, si, comme une belle et bonne terre qui a reçu de fécondes semences, tu fais pousser le fruit qui vient d'elles.