Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 2

  • Table rase de la télé (2)

    Tombé par hasard sur l’émission littéraire tardive de PPDA, “Vol de Nuit”, j’ai l’impression de me trouver en Union soviétique. Même léthargie, même sourires conventionnels, même consensus forcé que dans la nomenklatura russe.
    PPDA cause mais je n’entends rien. À l'Est on exaltait les vertus du peuple solidaire, ici les vertus de chaque existence individuelle, qui se résume longuement à la façon de baiser ou de ne pas baiser. Bien que celle-ci préfère le faire par derrière, et celui-ci avec des travestis, les invités de PPDA se ressemblent tous.

    Le capitalisme ne cesse de parler de cul pour éviter d’aborder des questions plus profondes et, avec tout son pognon, il tue le désir des choses vraies.

    Histoire d’un jeune capitaliste : pauvre et laid, il s’efforce de devenir riche par tous les moyens, le commerce de gadgets est le meilleur ; il se branle devant internet jusqu’au jour où il touche le gros lot au loto ; il peut alors se payer quelques-unes des plus belles féministes du monde, subitement conquises par son tempérament, son esprit, son humour et son chic ; il en fait monter sept d'un coup. Mais soudain il ne bande plus.

    *

    Sinon TF1 poursuit de ses foudres morales (!) un groupe de Normands nostalgiques de la SS. “Good bye Lenin” : on a le droit d’être nostalgique de Lénine, de Trotski, de Staline ou de Mao, voire de Heidegger et de Jeanne Arendt, mais pas de la SS.
    C’est l’éthique empirique des industriels du BTP. Bouygues est antiraciste, probablement pour se faire pardonner d’avoir importé des Africains sur ses chantiers, de leur avoir fourni un travail d’esclave chinois et de les avoir entassés dans des immeubles à géométries variables mais toujours improbables. D’où Harry Roselmack en couverture.

    Cette bande de nostalgiques du régime nazi avait restauré une casemate allemande sur la côte normande. C’est le propriétaire de la casemate, bénéficiaire des travaux de rénovation, qui les dénonce à TF1, et Roselmack qui se charge d’instruire le procès. Entre les SS et la Gestapo, TF1 a fait son choix. Peut-être que les nostalgiques auraient préféré être jugés par Arte ? C'est quand même plus chic.
    La Normandie, ce n’est sans doute pas un hasard. Si on y a peu souffert des Allemands directement, en revanche les bombardements yankis qui ont fait des dizaines de milliers de morts dans la population civile ont dû marquer les esprits ; d’autant plus que les esprits sont obligés de se taire et de célébrer ce passé faste de bombes alliées.

    Cette tête de faux-cul de Franz-Olivier Giesbert, fils de soldat yanki, aime bien répéter que les paysans normands réservèrent un accueil mitigé à son paternel et à ses collègues de travail en uniforme de GIs. Sous-entendu : ces sauvages avaient été “conquis” par les méthodes Allemandes.
    Plutôt : les sauvages normands ont pris la pacotille qu’on leur tendait pour les amadouer, les chewing-gums, le cinoche et le rockn’roll, certains béjaunes ont même pu voir dans les GIs des hommes nouveaux, mais les plus madrés se sont tenus sur la réserve vis-à-vis de ces nouveaux conquistadors et de leurs slogans chromés. À d'autres.

  • Table rase de la télé

    Ravages du féminisme : Patrick Besson, pour pouvoir s’acquitter de ses pensions alimentaires et continuer de résider dans le centre de Paris, vu que la littérature eût payé mais qu’elle ne paye plus, Patrick Besson brigue un fauteuil à l’académie française ou autre ; à moins qu’un producteur veuille adapter son dernier bouquin au cinéma ? Il met tout son cœur, il fait au plus niais pour rendre son style le plus cinématographique possible.
    Autant dire qu’il a décidé de s’intégrer complètement. Fini les serberies qui faisaient son charme et des victimes mieux choisies que celles de Milosevic. Place au Besson-BHL - à moins que ce ne soit un Besson-Sollers ?
    S’il était moins grand, je verrais bien aussi Besson jouer dans des films de Houellebecq pour gagner sa croûte vu qu'il a une gueule d’informaticien (cf. Bill Gates). Quand on est trop petit, on met des talonnettes, mais quand on est trop grand ?

    Entre l’impertinence et la franchise d’une part, et Jean d’Ormesson ou Éric Orsenna d’autre part, lorsqu’on n’a pas de pensions alimentaires excessives à verser, le choix n’est pas difficile à faire ; alors j’ai décidé de remplacer Besson et son “Plateau télé”, d’essayer de tuer la télé à sa place, Don Quichotte moderne (Bien sûr je refuse par avance toute offre de collaboration au Point - déontologiquement, c’est impossible.)

    *

    Un phénomène qui m’interpelle à la télé depuis quelques mois, c’est le phénomène Éric Zemmour. On laisse Éric Zemmour, bien qu’il ne soit spécialiste de rien en dehors de l’honneur perdu de Jacques Chirac, disserter longuement sur tout et n’importe quoi dans l’émission de Ruquier le samedi soir.
    Contrairement à Le Pen, Zemmour peut tenir tous les propos politiquement incorrects qu’il veut sans être inquiété par le syndicat de la magistrature, et dire à Harry Roselmack - en face, mesdames et messieurs, mesurez le luxe ! - que c’est parce qu’il est noir qu’il fait de la télé, et que c’est parce qu’il est animateur de télé qu’on publie son bouquin.
    Ou alors que le divorce généralisé fait grimper les prix des loyers à Paris.
    Il pourrait même suggérer à Laurent Ruquier de virer sa cuti et de fonder une famille nombreuse pour se sentir mieux que dans sa peau de pédé stakanoviste, ça passerait comme un suppo. bien graissé, avec un gloussement de l’intéressé. Comme si la censure n'existait pas !
    Bien sûr, il y a quelques huées parfois, venant du tas de beaufs volontaires massés dans des gradins derrière pour faire un public “vivant”, mais rien de bien méchant, pas de cailloux ni de lynchage en direct.
    Si Zemmour ne touche pas aux supers tabous démocratiques, il est quand même trop bien élevé pour ça, reste qu’il bénéficie d’un privilège exorbitant. D’où lui vient ce privilège ? Dire que Ruquier est moins servile que Guillaume Durand ou Jean-Pierre Elkabbach, c’est évident, mais c’est une explication insuffisante. Je vois deux autres raisons.

    En France aujourd’hui, ça remplace les quartiers de noblesse, si tu peux justifier d’un parent voire d’un vague cousin déporté à Büchenwald ou à Dachau, y compris via l’Algérie ou la Tunisie, t’es immunisé, tu peux raconter à peu près tout ce que tu veux sur l’histoire, la politique et l’économie, même si, dans le cas de Zemmour, l’histoire, l’économie, la politique, les religions, sans parler de la littérature, ne sont que de vagues notions apprises au Figaro.
    La deuxième raison, c’est que Zemmour défend peu ou prou la même idéologie que Sarkozy, mais en plus petit et en plus laid, avec plus de tics, ce qui est assez rare pour être souligné à la télé.

  • Factotums de Neuilly

    L’opinion publique française ignore tout de la Birmanie, de ses coutumes, de ses mœurs, de sa politique ; n’importe, postée devant la télévision, armée de sa zapette, elle a choisi son camp, s’est fabriquée son petit drapeau avec deux louches de philosophie, un zeste de “droit international” et une rengaine de Patrick Bruel. Et vive la démocratie !

    Je suis un Français de souche. Qu’est-ce que ça signifie ? Par exemple que certains de mes ancêtres ont été spoliés de leurs terres au cours de la Révolution française. Et que d’autres ont bénéficié de ces spoliations. D’où une certaine pondération chez votre serviteur.
    La révolte en Birmanie me rappelle que si ce maudit Louis XVI avait eu le courage de réprimer quelques milliers d’émeutiers, comme les généraux birmans viennent de le faire, les centaines de milliers de morts atroces que sa lâcheté et sa commisération ont entraîné auraient peut-être été évitées, ainsi que d’autres catastrophes plus spirituelles et la barbarie napoléonienne.
    Mon ancêtre spolié a laissé quelques souvenirs imprimés. Il ne se plaint pas d’avoir été spolié mais se réjouit au contraire d’avoir eu, lui et ses enfants, la vie sauve.
    Louis XVI est l’ancêtre de ces démocrates hypocrites qui rêvent de voir la guerre civile se propager en Birmanie. Qui méprisent le régime autoritaire birman mais font sans vergogne leurs courses en Chine de gadgets fabriqués par des esclaves chinois.

    *

    Un autre événement qui évoque des souvenirs cuisants, c’est la faillite récente de la “Northern Rocks”. Incapable de garantir la fiabilité de ses titres, cette banque britannique bien mal nommée a perdu en un instant la confiance de ses clients qui se sont précipités tels des moutons de Panurge pour retirer leurs liquidités.
    En pleine crise financière, en 1716, la Régence mit sa confiance dans l’Écossais Law qui importa en France pour augmenter le volume de la monnaie en circulation le système de l’agiotage. Quatre ans plus tard, c’était la faillite, les clients de la banque de Law ayant perdu subitement toute confiance dans des actions qui spéculaient sur les trésors plus ou moins imaginaires de l’Inde et du Mississipi. Comme dit l’historien Duby, plus lucide sur les questions économiques que politiques : “La Régence a ouvert la boîte de Pandore.” Soixante-dix ans plus tard, après d’autres crises financières, notamment celle provoquée par la maudite “guerre d’Indépendance américaine”, c’était la sanglante Révolution française.

    Il y a encore des idéologues comme le pseudo-économiste Michel Fitoussi ou le polytechnicien Jacques Attali pour se réjouir de l’invention de l’agiotage, ce grand bluff.
    Pour eux le capitalisme, s’il n’est pas exactement le meilleur des mondes, est le meilleur des mondes POSSIBLES. Sinistres crétins ! Je m’empresse de dire que les économistes libéraux de droite sont aussi crétins, si ce n’est plus. La réalité que Fitoussi et Attali n’occultent pas dans leur discours, au moins, c’est qu’à l’origine du capitalisme, il y a une intervention décisive de l’État. Le capitalisme n’est pas tombé du ciel pour nous apporter paix et prospérité comme certains crétins libéraux de droite pensent. Si le Régent n’avait pas décidé de mettre en œuvre les méthodes de Law, celui-ci serait demeuré dans des tripots, à jouer au poker.

    *

    Pas facile de convaincre un idéologue de droite que Marx n’a rien à voir avec le communisme soviétique, qu’il est plus proche d’Aristote que de Lénine. L’idéologue de droite est une espèce plus sincère que l’idéologue de gauche, mais il n’est pas moins têtu.
    Je dois admettre que les divagations de Jacques Attali, qui ose se dire marxiste, sont de nature à susciter la méfiance de n’importe quel honnête homme.
    Pour corriger les défauts du capitalisme, qui pour ce Phillistin consistent seulement dans l’inégale répartition des richesses, Attali suggère de renforcer les institutions démocratiques ! Quel contresens historique et marxiste ! Primo Marx a blâmé sa propre race de s’occuper trop d’affaires d’argent, d’en faire une fin en soi. Ensuite Marx, c’est en cela qu’il est le digne héritier des Grecs, est un antidote contre l’idéologie, qu’il a combattue toute sa vie et qui ne résiste pas à son scalpel. Aussi Marx a prévu ce déferlement de gadgets promus par un "marketing" dément, tous ces gadgets qui fascinent Jacques Attali.
    La démocratie - et, non pas l’égalité, la liberté et la fraternité qui la caractérisent, mais le nivellement social, scientifique et artistique, l’oppression économique et la concurrence acharnée - la démocratie est une CONSÉQUENCE du système capitaliste, sans lequel ce régime politique n’aurait pas été possible. En aucun cas pour un marxiste authentique la démocratie ne peut être un remède à l’oppression et aux carnages capitalistes du XXe siècle. Dans la démocratie en Amérique, le premier des services marchands, sans lequel la "nouvelle économie" n'aurait pas été possible, c'est la prostitution "via" internet.

    *

    Ici on voit une différence entre Sarkozy et son modèle F. Mitterrand. Si ce dernier avait pris pour bouffon ce major de l’X, Sarkozy, lui, paraît le prendre au sérieux.
    Lorsque je vois la bobine du polytechnicien Attali, qui défie les probabilités, ou celle de l’économiste Fitoussi, ou encore celle du démocrate Bruel à la télé, en tant que Français de souche je pense au joueur de poker écossais Law.