Au coeur de la foi et de la raison "illuminati" se trouve un culte de la lumière solaire, érigé en science fondamentale. La méconnaissance généralisée de l'histoire de la science occidentale contraint l'Eglise catholique à se défendre de l'accusation de représenter un obstacle à la science, alors même que de nombreux savants catholiques romains ont contribué à faire de la lumière solaire un principe universel, notamment aux XVIe et XVIIe siècles. Cette science - en réalité une "philosophie naturelle" païenne - est assortie d'un propos abscons sur la Genèse. Rien n'indique dans la Genèse que Satan n'a pas créé l'homme, puisque tout indique au contraire selon cette mythologie qu'il est cause du cycle naturel de la vie (Satan est représenté comme un serpent, symbole de vie).
On peut citer la gnose (fausse science) de Dante Alighieri, comme l'exemple le plus fameux de ce culte illuminati, mélange de christianisme et de philosophie païenne. La cosmologie à laquelle Dante fait référence dans sa "Divine comédie" est celle de Platon, influencé par Pythagore, à laquelle les chrétiens n'accordent pas le caractère de science universelle. La théologie poétique de Dante ouvre droit à un volet politique, en quoi on reconnaît aisément qu'elle n'est pas chrétienne, car les évangiles ne permettent pas un usage politique de la parole divine. Celle-ci ne peut appuyer une théocratie quelconque, pas plus la monarchie idéale rêvée par Dante que la démocratie, régime théocratique hypocrite.
Quelques extraits d'un discours du pape Benoît XVI (2006) :
- Le grand Galilée a dit que Dieu a écrit le livre de la nature sous la forme du langage mathématique. Il était convaincu que Dieu nous a donné deux livres : celui de l'Ecriture sainte et celui de la nature. Et le langage de la nature - telle était sa conviction - sont les mathématiques, celles-ci sont donc un langage de Dieu, du Créateur.
Qui a dit que Galilée était "grand" en dehors de quelques truqueurs, qui ont inventé de toutes pièces la figure d'un Galilée émancipé de la censure de l'Eglise, héraut d'une science moderne "indépendante" ? Qui peut croire à la fable d'une science moderne "indépendante", c'est-à-dire émancipée du financement des gouvernements ? Le principal défaut de Galilée fut d'être arrogant et excessivement confiant dans ses appuis au sein de l'Eglise. Les mathématiques (au sens de la géométrie algébrique) sont plus sûrement le langage du "grand architecte de l'univers". Au contraire de Leibnitz, les chrétiens n'estiment pas vivre dans le "meilleur des mondes possibles" : à cela s'oppose l'exégèse de saint Paul, selon laquelle la mort est la somme des péchés, c'est-à-dire que l'homme est soumis à Satan comme il l'est à la mort.
L'Eglise romaine a jadis canonisé Robert Bellarmin pour le remercier de s'être opposé à Galilée. Elle est sans doute capable de canoniser un autre homme, qui se ferait aujourd'hui l'artisan de l'apologie du même homme. "Souvent femme varie, bien fol est qui s'y fie", dit un proverbe utile en cette espèce.
"Réfléchissons à présent sur ce que sont les mathématiques : en soi, il s'agit d'un système abstrait, d'une invention de l'esprit humain, qui comme tel, dans sa pureté, n'existe pas. Il est toujours réalisé de manière approximative, mais - comme tel - c'est un système intellectuel, c'est une grande, géniale invention de l'esprit humain.
La chose surprenante est que cette invention de notre esprit humain, est vraiment la clef pour comprendre la nature, que la nature est réellement structurée de façon mathématique et que nos mathématiques, inventées par notre esprit, sont réellement l'instrument pour pouvoir travailler avec la nature, pour la mettre à notre service, pour l'instrumentaliser à travers la technique."
Benoît XVI fait ici la démonstration du lien entre l'anthropologie moderne et le raisonnement mathématique, afin de justifier ensuite la technique comme une activité chrétienne. Mais un philosophe païen observerait plus justement, à propos du même art mathématique, que les nombres sont dans la nature avant d'être dans l'homme. Par conséquent, en fait de "géniale invention de l'esprit humain" (toute l'anthropologie moderne est contenue dans ce dithyrambe), il n'y a dans la géométrie qu'imitation de la nature. Le néant et l'infini sont représentatifs de l'apport humain à la nature, et cet apport est purement rhétorique ; on peut s'en servir surtout, ainsi que du hasard, pour étalonner l'ignorance humaine.
Le discours de Benoît XVI est d'ailleurs assez confus pour justifier aussi bien l'invention de la roue, que celle de la bombe atomique ou des balles enrichies à l'uranium. Le discours de Benoît XVI n'explique pas non plus cette étrange variation dans la philosophie naturelle au cours des siècles, jusqu'au point où l'Occident est rendu, non plus de maîtrise des éléments naturels, mais d'exploitation sans limite et irresponsable, persuadé sans doute par son "génie" qu'il est capable de tout.
Quoi qu'il en soit, un chrétien observera que J. Ratzinger s'exprime à propos de "philosophie naturelle", c'est-à-dire d'un domaine qui forme le socle des religions païennes, et auquel le monde moderne n'a donné qu'un tour de clef rhétorique supplémentaire.
Un chrétien observera que la vérité chrétienne - dieu -, est métaphysique, et non d'ordre physique, et s'étonnera que les mathématiques, langage de la physique, puisse concurrencer la théologie, alors même que l'on peut déduire de celle-ci la relativité des vérités d'ordre physique et leur subordination à une vérité universelle supérieure. L'homme n'a pas accès à cette vérité universelle par la grâce de son propre esprit. Affirmer que "les mathématiques sont un langage de dieu", c'est parler comme un prêtre égyptien et avouer que Satan est le dieu qui préside au destin de l'Eglise romaine.
Les artisans du culte illuminati ont pour vocation d'instaurer un culte solaire à l'échelle de la planète (les mathématiques peuvent passer aussi pour le seul "langage universel", alors qu'elles sont mondaines avant tout), sous couvert du christianisme.
(A SUIVRE)