Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lumen fidei

  • Nietzsche et le pape

    De façon assez surprenante, F. Nietzsche est mentionné dans la dernière encyclique de l'évêque de Rome "Lumen fidei".

    F.N. est mentionné comme un simple détracteur de la foi chrétienne, et non comme l'apôtre de la "culture de vie" satanique ou antichrétienne. A cet égard, si le poème invoquant le nom de Zarathoustra peut paraître un peu obscurs aux béotiens, "L'Antichrist" ne laisse aucun doute possible quant à la volonté de Nietzsche d'éradiquer le judaïsme et le christianisme de la surface de la terre. Cette entreprise, le philosophe allemand la croit d'autant plus à la portée de l'humanité qu'il considère la bourgeoisie "judéo-chrétienne" occidentale comme une parodie de christianisme. Nietzsche, qui a lu les Evangiles dans son enfance, sait que l'on ne peut pas être bourgeois et chrétien en même temps, servir le veau d'or et dieu.

    L'originalité de Nietzsche est suffisamment grande pour qu'il mérite d'être présenté, et non introduit subrepticement dans un paragraphe. La critique marxiste, en comparaison, se contente d'accuser l'Eglise de Rome d'être une assemblée de tartuffes corrompus, au service du capital. Nietzsche va beaucoup plus loin dans sa tentative de démontrer que la théologie chrétienne est nulle et non avenue.

    Le principal mérite de Nietzsche - en quoi on peut voir la preuve d'une certaine naïveté -, est la relative franchise de son antichristianisme, contrairement à d'autres antichrists qui, comme le Français Charles Maurras, affichent leur sympathie pour l'Eglise romaine et dissimulent leur haine de Jésus-Christ et des apôtres, afin de séduire un plus grand nombre de jeunes crétins ignares dans des pays comme la France ou l'Italie, où l'on est "catholique par sa mère" - c'est-à-dire presque instinctivement.

    Une bonne raison de l'évêque de Rome d'en dire le moins possible sur Nietzsche est le jugement favorable de celui-ci vis-à-vis de l'Eglise romaine, restauratrice du paganisme et de la culture de vie selon lui, sous l'apparence de servir Jésus-Christ. La haine de Nietzsche est surtout dirigée contre les chrétiens qui témoignent d'un christianisme authentique, tels Paul de Tarse et Martin Luther.

    On peut comprendre Nietzsche comme un protestant allemand qui se convertit au catholicisme, afin de se libérer du puritanisme protestant et allemand, et désire parfaire la doctrine catholique romaine en indiquant qu'elle est un culte rendu, non pas à Dieu, mais à Satan et à la nature (à travers l'art, notamment).

    L'hommage du pape à Nietzsche est indirect, pour sa part. Il veut défendre la théologie catholique, accusée par Nietzsche de reposer sur une conception de la lumière entièrement rhétorique (contrairement au feu solaire satanique). Etant donné que l'encyclique se contente d'opposer une conception subjective de la lumière, elle ne fait que renforcer l'accusation de Nietzsche.

     

     

  • Paul, le Pape et l'Antéchrist

    Dans la dernière encyclique rédigée à quatre mains par les deux derniers évêques de Rome ("Lumen fidei"), le reproche de F. Nitche adressé à la foi chrétienne de nuire à la science est évoqué. Le pape-philosophe s'en sert pour développer un nouvel argumentaire purement rhétorique sur la foi et la raison. Un argumentaire sans fondement chrétien, car le christianisme N'EST PAS une doctrine philosophique.

    Il était une manière simple de renvoyer Nitche à ses chères études sataniques ; en effet, chez Nitche, suivant une conception romaine ou égyptienne de la science, et non spécifiquement grecque comme il le croit, art et science sont confondus. Le reproche précis fait au christianisme, en tant que cadre intellectuel principal de l'Occident moderne, est d'entraîner une perte de conscience de la réalité. Le "réalisme" de Nitche n'est pas celui de Marx, encore moins celui de Shakespeare ou Aristote. L'art, pour ces derniers, ne fonde qu'un semi-réalisme. 

    Nitche proclame nettement que l'art est supérieur à la science. Cette conception est romaine ou égyptienne, mais on peut également la dire "totalitaire", car c'est cette conception qui permet le mieux à l'élite politique de conserver la haute main sur l'art et la science. Le pape aurait pu répondre simplement : contrairement au préjugé élitiste de Nitche en faveur de l'art, le christianisme ne se préoccupe pas d'art, ni par conséquent de psychologie, seule la science consciente peut amener le chrétien à voir la vérité face à face.

    Hélas, du point de vue scolastique et philosophique du pape, cette réponse était impossible à faire, car le reproche adressé au judéo-christianisme d'être le ferment de la décadence artistique moderne est bel et bien fondé. L'origine de l'existentialisme et de l'art existentialiste moderne, réduits par K. Marx au niveau de l'onanisme, voire traduisant une tendance nécrophile (S. Dali), est bien dans les spéculations philosophiques médiévales, à peu près équivalentes sur le plan scientifique du sabir de la psychanalyse moderne, dont on voit qu'elle fait la plus forte impression dans les peuples ou les groupes sociaux les plus aliénés mentalement.

    Les philosophes des Lumières furent à la fois moins cohérents que Nitche, et en même temps plus pragmatiques, n'hésitant pas à confronter la doctrine chrétienne officielle avec ses propres fondements scripturaires afin de souligner l'inconséquence de la doctrine officielle.

    Mais l'encyclique évite de se pencher sur des aspects beaucoup plus vertigineux de l'attaque violente de Nitche contre la morale judéo-chrétienne, que Nitche n'hésite pas à accuser de crime contre l'humanité. C'est un avocat de Satan sauveur du monde, contre les judéo-chrétiens qui complotent son anéantissement, auquel le pape à affaire. Pratiquement, c'est du retour de Judas Iscariote parmi les apôtres dont il s'agit. Sans doute Nitche n'est pas le premier à renier le Messie, mais aucun ne l'a fait avec autant de conviction religieuse, sauf peut-être certains personnages des pièces de Molière, Shakespeare ou Marlowe.

    Il faut barboter dans la mauvaise bière philosophique allemande jusqu'au cou pour ne pas se rendre compte de la valeur de Nitche et de sa profondeur morale.

    - Le point où l'antéchrist et l'évêque de Rome sont "à égalité" est important, c'est celui de l'histoire, que le pape, de son trône, ne peut pas voir, exposant ses ouailles à être les cocus de l'histoire, ainsi que le sont toujours, à travers les âges, les âmes militaires ou militantes, qui essuient ainsi les plâtres de politiques menées par des chefs cyniques ou imbéciles. Quant à Nietzsche, sa conception physique de l'histoire, fondée sur la culture de vie païenne, et comprenant la culture de mort comme la décadence, cette conception le conduit à ignorer la vision historique de l'antéchrist selon l'apôtre Paul. Nitche, à l'instar de Judas, est disposé à affronter le destin et la mort - mais il n'est pas disposé à accepter la défaite de Satan prédite par les prophètes.

    Je renvoie ici à un petit opuscule anonyme (1838), disponible via google, qui traite de l'élucidation de l'antéchrist par l'apôtre Paul. Il est difficile de dire si elle est directement inspirée par Nitche, mais je constate un redoublement de la haine de l'apôtre des gentils, soigneusement organisé, y compris et surtout par des milieux dissimulés derrière le masque judéo-chrétien ; cette haine n'est d'ailleurs pas sans rappeler la pourriture maurrassienne, par sa manière pédérastique d'abuser de jeunes esprits en détournant du christianisme par des méthodes qui ne valent guère mieux que les trente deniers offerts par le sanhédrin à l'Iscariote. La clef de cette haine est facile à comprendre : les épîtres de Paul sont les plus dissuasives de forger un "judéo-christianisme" et, par exemple, de fabriquer une théocratie d'Etat comme celle en vigueur aujourd'hui aux Etats-Unis. Si le pape s'occupait de prolonger l'exégèse de Paul au lieu de vaticiner dans les déserts de la philosophie, il serait logiquement entraîné à excommunier tous les dirigeants des cartels industriels bancaires occidentaux "démocrate-chrétiens", au lieu de distribuer des sourires et des poignées de mains claudéliennes aux quatre coins de la terre.

  • L'évêque de Rome et Lucifer

    L'actuel évêque de Rome tente dans sa dernière encyclique (Lumen fidei) d'opposer à la lumière solaire des cultes païens sataniques (et de nombreux tyrans modernes, faisant valoir au service d'un culte de la personnalité cet ordre naturel), la lumière chrétienne. Il prétend renverser ici le discours de l'antichrist Nitche, qui dit en substance : l'ordre naturel, et en particulier le soleil, c'est tout : la culture de vie, la création, l'art, la source du savoir ; et la lumière chrétienne, elle, n'est rien qu'une théorie.

    Le prophète Job fit remontrance à Iavhé de demeurer invisible et de ne pas se manifester, tandis que les dieux païens, eux, occupaient en quelque sorte "tout le terrain".

    - L'évêque de Rome répond que la lumière est divine, et l'assimile à la foi. Première remarque : même s'il indique que la foi n'est pas à l'intérieur de l'homme (comme peut l'être parfois une conviction religieuse intime), mais à l'extérieur, le pape traduit ici la lumière par un vocable humain abstrait, la "foi" ou "l'amour". Chacun conçoit en revanche aisément ce qu'il y a derrière le mot soleil et en quoi consistent ses effets, notamment en termes de vitalité. On ne peut pas dire que l'objection de Nitche soit combattue autrement que par des mots. D'ailleurs Nitche reproche au christianisme de se retrancher derrière des abstractions et des idéaux qui n'ont, pas plus que les postulats mathématiques, de réalité physique.

    - Suit cette tentative d'élucidation du pape : "D'une part, elle [la lumière] procède du passé, elle est la lumière d'une mémoire de fondation, celle de la vie de Jésus, où s'est manifesté son amour pleinement fiable, capable de vaincre la mort. En même temps, cependant, puisque le Christ est ressuscité et nous attire au-delà de la mort, la foi est lumière qui vient de l'avenir, qui entrouvre devant nous de grands horizons et nous conduit au-delà de notre "moi" isolé vers l'ampleur de la communion." Deuxième remarque : la lumière-foi, selon le pape, semble fonction du temps : on ne voit pas en quoi elle diffère du rayonnement solaire, sur lequel les théories physiques modernes s'appuient ? D'ailleurs l'histoire chrétienne, selon l'apocalypse, n'est pas un continuum de temps, mais l'affrontement des forces spirituelles et des puissances sataniques appuyées sur la puissance naturelle. Vaincre la mort, c'est d'ailleurs triompher du temps et de la nature. C'est le b.a.-ba du christianisme : ce n'est pas un message temporel. L'évêque de Rome ne fait que rééditer le coup de la vieille rhétorique hégélienne et son postulat d'une lumière chrétienne providentielle qui anime l'histoire de l'Occident.

    Ou bien la morale et les institutions politiques se réfèrent directement à l'ordre solaire, comme ce fut le cas dans l'Egypte antique, ou bien elles n'ont d'appui que dans la pure rhétorique humaine, c'est-à-dire qu'elles n'ont aucun appui. Il convient de le rappeler, puisque la stratégie de Hegel consiste à légitimer à l'aide de grandes phrases un ordre institutionnel judéo-chrétien allemand. La lumière divine est "extérieure" à l'homme dit le pape, avant de s'empresser d'en donner une explication la plus subjective et indéfinie possible.

    - Par ailleurs l'évêque de Rome cherche à démontrer le principe du monopole de l'Eglise romaine sur la foi, c'est-à-dire que la lumière passe nécessairement par son intermédiaire. Cependant, non seulement l'Eglise romaine est la matrice des nations occidentales modernes, dont la puissance est largement technocratique, mais elle encore actuellement sous la tutelle de ces nations. Quant à l'unité de l'institution ecclésiastique, dont l'histoire montre qu'elle n'a existé que le temps de l'usage par cette institution de moyens juridiques coercitifs, cette unité est celle de la Jérusalem céleste. Il n'y a aucun moyen de fonder une citoyenneté chrétienne sur les évangiles. Seul un imbécile peut avoir oublié l'effrontement sanglant des nations chrétiennes, ou tout miser sur la démocratie pour y remédier. Le pape ferait mieux ici de chercher à l'élucider le sens apocalyptique de ces affrontements entre judéo-chrétiens. Au monopole institutionnel, on peut opposer le sacerdoce selon saint Paul, et : "Car un seul est dieu ; un seul aussi est médiateur entre dieu et les hommes, le Christ Jésus homme, qui s'est donné lui-même en rançon pour tous : le témoignage en est rendu au temps voulu, et c'est à cette fin que moi j'ai été établi prédicateur et apôtre, - je dis la vérité, je ne mens pas, - docteur des gentils dans la foi et la vérité." (1re épître à Thimothée, II, 5). L'unité de l'Eglise ou du camp des saints résulte donc de la médiation directe du Christ Jésus.

    - Au petit éloge final de la procréation dans le cadre chrétien, un païen nitchéen opposera sans peine que l'intervention du soleil et de la nature dans le mouvement créatif est scientifiquement la plus certaine, outre l'action de l'homme.

  • Dialogue avec l'Antéchrist

    La fortune critique de Nitche est étonnante. Le "pape François" le cite curieusement dans sa récente encyclique ("Lumen fidei").

    L'incohérence de la pensée de Nitche sur de nombreux points, en particulier sur le point de son incapacité à démêler clairement ce qui relève de l'évangile et ce qui relève de la tradition chrétienne, cette incohérence s'explique du fait que cette pensée est un volontarisme, et que comme toute volonté ou vitalité, elle a des hauts et des bas. En quelque sorte, Nitche n'écrit que pour lui-même. Et on peut le dire de tout artiste moderne "nitchéen".

    Il ne fait aucun doute que la principale cause de la fortune critique de Nietzsche, en quoi son satanisme antimoderne est adoubé par les parangons de la moraline post-moderne de gauche ou de droite, est la mise en valeur par Nietzsche de l'instinct bestial. Voilà qui est propre à satisfaire le goût de la chair humaine, aussi bien du Shylock démocrate-chrétien que de l'athée rationaliste blasé, revenu de tout sauf des rentes de son capital.

    Le problème qui nous occupe est celui de la récupération de Nitche par des chiens démocrates-chrétiens. Les francs suppôts de Satan ne me tiendront pas rancune de dire de Nitche qu'il est satanique, ainsi qu'il l'écrit noir sur blanc. Il est un passage où Nitche écrit que les chrétiens, du fait de leur dieu, n'aiment pas la science ; j'aimerais leur prouver le contraire, en mettant Nitche et Hitler dans le même panier, celui des suppôts de Satan de 2nde classe. 

    "(...) cela impliquerait, en effet, un jugement net sur Jésus lui-même ; or, à cet égard, les jugements de Nietzsche demeurant ambigus malgré une sympathie évidente (entretenue, de plus, par une identification inconsciente qui éclatera à l'occasion de la crise de folie, où Nietzsche signera ses billets du nom, très révélateur, du "crucifié").

    Jean Granier, Nietzsche, PUF.

    Donc dans les presses universitaires de France, on peut écrire que l'antéchrist a de la sympathie pour Jésus-Christ. Et c'est de la science.

    "Ce saint anarchiste, qui appelait le bas peuple, les réprouvés et les "pécheurs", bref les tchandala à l'intérieur du judaïsme, à se soulever contre l'ordre établi - et ce, s'il faut en croire l'Evangile, dans un langage qui, aujourd'hui encore, vous conduirait tout droit en Sibérie - c'était un criminel politique -, dans la mesure où le crime politique était possible dans une société apolitique jusqu'à l'absurde.

    C'est cela qui le mena à la Croix : à preuve, l'inscription sur la Croix. Il est mort pour sa propre faute. Aussi souvent que l'on ait pu affirmer le contraire, rien n'indique qu'il soit mort pour les fautes des autres." (F. Nietzsche ; in : L'Antéchrist)

    Donc, en substance, Jésus de Nazareth était un agitateur politique qui, à ce titre, méritait la mort. Ce faux-cul de Claudel a tenté la théorie non moins probable de la sympathie de Ponce-Pilate pour Jésus-Christ. Le motif du diplomate Claudel (la bassesse humaine est résumée dans le terme de "diplomatie") est clair : il s'agit d'atténuer le machiavélisme du procurateur romain. Nietzsche exprime qu'il n'aurait pas éprouvé le besoin de "s'en laver les mains", mais qu'il se les serait salies volontiers. Pour ce qui est de la sympathie, ledit Granier met sans doute sous ce terme ce qu'il entend lui-même par là.

    Nietzsche reprend à son compte le soupçon que font peser les juifs sur le Christ. Les évangiles ne sont pas anarchistes au sens de Ravachol, Lénine ou Ben Laden. Ni les apôtres, ni Paul ne font d'effort pour instaurer un régime communiste ou une démocratie pour ceux que Nitche qualifie avec mépris de "ratés de la vie". Le nihilisme ou la culture de mort démocratique n'ont rien de chrétien.

    Le délire de persécution signalé n'a rien à voir avec la crucifixion ; pas même dans les termes où Nietzsche la conçoit. Plus probablement Nietzsche souffrait comme les misanthropes du manque de reconnaissance sociale. Et la nature ou la vie, qui est la cause la plus évidente de persécution, n'est pas forcément tendre, y compris avec ceux qui chantent ses louanges.