... et à motards, puisque le ministre Christian Estrosi a déclaré récemment qu'un débat sur l'identité nationale dans l'Allemagne des années trente aurait peut-être évité aux Juifs d'être victimes des nazis, quelque chose dans ce goût-là.
Seul problème, il faut soi-même être nazi pour accepter de participer à un tel débat. Un communiste ne peut pas croire à l'"identité", pure figure rhétorique du domaine de la religion. Karl Marx ne s'est pas décarcassé pour rien à démanteler l'architecture vectorielle nationale-socialiste (Hegel) et à dénoncer son ésotérisme ("Sein-dasein"), n'en déplaise aux staliniens d'hier et d'aujourd'hui (C'est indubitablement le culte de la politique qui a poussé des fonctionnaires de l'université française, Althusser en tête, à accommoder la dialectique marxiste avec une idéologie temporelle, répétant la trahison janséniste d'une manière que Marx et Lénine avaient prévue.)
A cet égard les Allemands semblent mieux renseignés que les Français eux-mêmes sur l'appartenance de Heidegger au parti nazi (la philosophie de sa maîtresse H. Arendt n'est d'ailleurs pas moins typiquement nationale-socialiste que celle de son mentor) ; aussi sur le fait que Heidegger ne fait qu'ajouter à Hegel une dose de byzantinisme supplémentaire, susceptible seulement de méduser un peu mieux les crétins dans le genre du frère prêcheur Enthoven ou de son confrère Onfray, armés de leurs petites fiches de philosophie pour tenter de donner au service de la propagande télévisée une coloration kulturelle. La dernière chose qu'un Français qui a lu Molière ou Rabelais fera, c'est gober l'idée de "culture", essentiellement romaine ou germanique.
Pour un catholique, de la même façon, l'identité n'est qu'un fantôme néo-païen et le Messie ne se distingue guère par son patriotisme ou son goût de la généalogie. A tel point que c'est le manque d'ambition temporelle de son Maître, qui va pousser Judas Iscariote à le vendre pour trente deniers aux autorités religieuses juives. Judas Iscariote est le saint patron des nationalistes chrétiens dont la trahison s'accompagne systématiquement d'une subversion des Evangiles à base de droit (J. de Maistre) et de mathématiques (B. Pascal, Galilée).
Il n'est pas inintéressant d'observer que c'est le courant janséniste où s'est élaborée une doctrine théocratique incompatible avec les avertissements solennels du Christ, et dont dérive l'existentialisme, religion de la bourgeoisie capitaliste, ce courant qui est le plus hostile à l'islam alors même qu'il s'y apparente nettement par sa dérive théocratique nette (gallicanisme). On pense ici à l'appropriation de la théorie de la race élue par les nazis, évoquée par Mircéa Eliade après Léon Bloy* (La théorie raciste de Darwin qui a servi aux nazis est elle-même imprégnées de préjugés judéo-chrétiens et d'un goût -bien peu "naturel" de la part d'un naturaliste- pour la généalogie et les mathématiques.), théorie de la "race élue" qui survit dans l'idéologie libérale. Afin de souligner que les conflits les plus violents ont souvent lieu entre tenants d'idées semblables, le parti minoritaire ou le moins bien armé faisant les frais de la concurrence.
L'Eglise catholique est désormais à peu près exsangue, mais les partis démocrates-chrétiens ont joué naguère un rôle non négligeable dans une manipulation "identitaire" d'ampleur, cousue de fil blanc capitaliste : le "nationalisme européen" ; cette manipulation ne s'est pas faite sans l'occultation de larges pans du Nouveau Testament, dont une ligne vaut mieux que les cinquante encycliques bavardes des dix derniers papes et au-delà. L'indignation de François Bacon à propos de l'enfouissement des Evangiles sous des tonnes de spéculations théologiques est plus que jamais valable, même si l'Eglise n'est plus qu'un vaisseau dérivant au fil du vague depuis longtemps.
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Le débat ne peut avoir lieu qu'entre partisans et adversaires du nationalisme et ce débat opposera immanquablement les païens à ceux qui ne le sont pas. Ce seul critère (sérieux) a suffi aux théologiens pour condamner les doctrines nationalistes par le passé, celle de Maurras notamment. Le débat n'a donc d'intérêt (outre qu'il sert au gouvernement à jeter de la poudre aux yeux, comme Chirac auparavant avec le débat sur le voile islamique) que de permettre de mesurer à quel point la France ressemble à l'Allemagne désormais. Etant donné que la chaîne bobo "Arte" est le symbole du pacte monétaire franco-boche, on peut prendre le goût de la pornographie et du cadavre attisé par cette chaîne comme la marque de la nouvelle identité française.
Le débat sur l'"identité" a quand même le mérite de rappeler le lien étroit entre la musique/mathématiques et le totalitarisme, qui ne peut s'empêcher ici de s'exprimer dans le vocabulaire albégrique, ainsi que, comme Marx l'a démontré, le caractère profondément religieux du raisonnement mathématique et de la passion musicale. Non loin d'Homère et de Shakespeare, Marx est bien l'auteur d'une véritable démonologie. Accessoirement ça permet d'observer que Marx est le tenant d'un aristotélisme véritable puisque l'ontologie matérialiste permet de déceler le caractère luciférien de la "loi naturelle" (sous-jacente dans le droit républicain moderne) ; "luciférien" s'entend en termes plus laïcs de la façon suivante comme la projection sur la "Nature" du rapport humain anthropologique. Les tenants de la "loi naturelle" (le clergé républicain est l'artisan du maintien de cette architecture juridique qui constitue un élément essentiel de la religion libérale après la religion nazie, et ce n'est qu'à titre de fétichistes et d'ignares que des chrétiens défendent le sophisme du droit naturel) peuvent se réclamer de Platon, et surtout de Pythagore : ils ne peuvent se réclamer d'Aristote comme Marx.
C'est le fait d'appartenir lui-même à une famille d'ingénieurs biologistes proche de la théorie raciale transformiste qui a sans doute empêché Aldous Huxley en revanche dans son essai (raté) "Brave New World" sur le totalitarisme d'en relever l'ingrédient mathématique et musicale essentiel. Le totalitarisme repose sur la foi et la raison. Le capitalisme/écologisme parie sur l'avenir comme Pascal parie sur Dieu ; la grâce janséniste, son providentialisme assassin de l'Esprit : le satané hasard capitaliste n'en est que le produit dérivé.
Commentaires
Le débat sur l'identité nationale est très intéressant. Ce dangereux gadget païen, placé entre les mains de nos petits ministres, pourrait bien leur péter à la figure, car ces ploutocrates de carrefour n'ont pas lu le manuel. M. Estrosi ne sait donc pas que ce débat a bien eu lieu en Bochie, au moins depuis Fichte.
Passons sur la culture : il y a des maisons pour ça.
Mais où tout cela peut-il bien mener ? Si l'on s'interroge sur l'identité nationale, il faut aussi considérer celle des autres nations. Si nos braves citoyens s'entêtent à vouloir donner une forme concrète à cette abstraction, il y a une réponse avec les Traités de Westphalie, comme alternative viable au rêve de monarchie universelle. Ainsi que le suggère aujourd'hui, comme alternative à la démocratie universelle US militaire et mondiale, un certain Vladimir Poutine. Comment transmettre à nos voisins cette perfide interrogation existentielle de l'identité nationale ? On peut rêver : les Etats-Unis connaitraient alors le sort des Habsbourg...
Le débat sur l'identité a bien un rapport avec l'existentialisme dont le raisonnement est mathématique, fonctionnel. Certains ont fait le rapprochement entre la philosophie nazie d'Heidegger et la scolastique médiévale (on pourrait appeler ça "l'impasse Ratzinger") : ce n'est pas faux, mais encore faut-il voir que c'est au XVIIe siècle que cette "régression mathématique" a eu lieu.
Plus son niveau scientifique est bas, plus une société pourra s'interroger sur l'"identité nationale" sans voir le caractère parfaitement rhétorique, purement médiatique, de cette question.
Le culte des mots mène au suicide, un suicide qui n'est pas sans rapport avec celui de Judas Iscariote (patriotisme et honneur mal placé, miroir aux alouettes, deniers contre salut).