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Shakespeare vs Etats-Unis

Barack Obama citant Shakespeare, c'est un truc aussi bizarre que Jean-Pierre Raffarin récitant le chapelet après un voyage d'affaire en Chine pour y fourguer du matériel français à la junte militaire qui dirige ce pays (en toute discrétion pour ne pas froisser un électorat dont c'est peu dire qu'il se voile la face à 100 %).

Je veux bien que les peuples heureux ou qui désirent l'être soient hostiles à l'histoire, mais dans ce cas leurs dirigeants feraient mieux de citer Marcel Proust ou Walt Disney plutôt que Shakespeare (bien que certains contes pour enfants interprétés par Disney ont un sens apocalyptique, à l'instar des pièces de Shakespeare*).

Vu que Shakespeare maîtrise le symbolisme comme peu de peintres, on peut douter qu'il aurait vu dans ces épis de maïs géants dressés vers le ciel, traduisant la "culture de vie", les symboles d'une nation chrétienne. On imagine d'ici ses plaisanteries salaces, dirigées contre ce type d'objets de culte et de dévotion. Plaisanteries qu'on ne comprend pas si on les croit gratuites, puisque Shakespeare entend par là souligner la trivialité de rituels et de formes d'art dont le sens est bien plus anthropologique que théologique.

C'est plutôt la comparaison du chef des Etats-Unis avec un pharaon qui serait venue à l'esprit de Shakespeare, d'autant plus que le mélange d'architecture et de mathématiques qui forme la base de la religion des Etats-Unis n'est pas un complot ou un secret. L'oeuvre de Shakespeare contient déjà la satire la plus poussée du moyen âge et de son architecture sociale indue.

Shakespeare souligne en outre dans plusieurs pièces le tempérament incestueux ou oedipien des rois et princes de son temps ; la mélancolie qui en découle et la chute d'autant plus rude que les chefs d'Etat ne sont que des bêtes de scène, mues d'abord par leur instinct, et donc aveugles.

Or on voit que l'impérialisme a eu pour conséquence d'étendre cet instinct et cet aveuglement à des nations entières, chaque citoyen devenant une sorte de petit Oedipe tyrannique ou capricieux, "identitaire" gobant que la quête de ses origines l'empêchera de finir en petit tas d'engrais, et incapable de comprendre que la quête identitaire recouvre une stratégie de défense de la propriété, y compris par ceux qui ne possèdent rien.

*Les contes mettant en scène une "mauvaise reine" et une "bonne reine" font référence à l'Apocalypse qui peint l'épouse du Christ, c'est-à-dire les chrétiens, tantôt sous un jour idéal et favorable, tantôt sous l'aspect d'une putain, donnant lieu à deux interprétations de la vision de St Jean, l'une morale (Dante Alighieri), l'autre historique (Shakespeare).

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