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vermeer

  • Un peu d'art pour tous

    Deux idées fausses reviennent fréquemment dans la critique d'art contemporaine :

    - le lien entre la peinture de la Renaissance et le "nombre d'or" ; il est vrai que les peintres de la Renaissance sont pour la plupart de véritables savants beaucoup plus sérieux que les soi-disant scientifiques d'aujourd'hui, fonctionnaires peu indépendants, parodies d'humanistes comme Axel Kahn ; mais l'arithmétique ou les mathématiques sont secondaires pour les savants de la Renaissance. Ils concernent surtout les artisans. Cette idée amène à confondre Michel-Ange avec Kandinsky, le "bauhaus" et la peinture du XIXe siècle, qu'on peut presque qualifier de "pythagoricienne" tant elle est obsédée par les calculs.

    L'usage du nombre d'or est en architecture et en décoration, pour la composition de grands panneaux, afin d'assurer un effet d'équilibre agréable à l'oeil ; point à la ligne. Dans la partie décorative (et donc à vocation politique de son travail), c'est là que le peintre se montre le moins objectif puisqu'il lui faut réserver au spectateur des effets de clair-obscur, de relief ou d'illusion perspective, afin de le séduire. Nul n'est plus au fait de l'aspect subjectif de la perspective qu'un peintre. Or le peintre de la Renaissance est en même temps, débordant le cadre politique, celui qui est le plus préoccupé d'objectivité scientifique. C'est-à-dire que l'artiste-peintre de la Renaissance autant qu'il le peut déborde le cadre de l'architecture et de la poésie pour tenter quelque chose de plus solide. De la même manière Shakespeare n'a résisté au temps que dans la mesure où il ne fut que très secondairement poète.

     

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    On peut même dire que G.W.F. Hegel, à peine plus avisé que Diderot en matière d'art, a bâti toute une théorie de la peinture entièrement fondée sur son aspect artisanal et politique, c'est-à-dire sur les aspects séduisants de la peinture, alors que la peinture de la Renaissance plus qu'aucune autre au cours de la période moderne, sur le modèle de l'art grec tend à s'élever au-dessus du soleil de la politique et des saisons. Non pas la mesure et le calcul des proportions si on préfère, plus prosaïquement, mais l'archétype et l'histoire. La preuve en est que le dessein atteint presque à la Renaissance, bien qu'il soit d'abord plus difficile que la peinture, le statut d'art à part entière. Et le dessein ne remplit pas de rôle politique déterminé. L'art pour l'art libre, le voilà.

    Au XIXe siècle J.D. Ingres est un des derniers à se souvenir que lorsqu'un peintre ne sait pas dessiner comme Vermeer, il n'est qu'un simple décorateur, aussi émouvant soient les effets de ses vernis sur l'âme étriquée d'un bourgeois. Mieux vaut un bon artisan rempailleur de chaise qu'un intello photographe comme Vermeer (un régal pour un faussaire, soit dit en passant).

    - deuxième ineptie, parallèle à la première, c'est l'idée de beauté symétrique. Il suffit pourtant de regarder un portrait de Dürer ou de Véronèse pour constater que la beauté n'a rien de symétrique. S'il est une beauté symétrique, c'est celle du diable, comme la chirurgie esthétique le prouve encore aujourd'hui, tuant par la symétrie la vie dans les visages (cf. Carla Bruni, transformée en momie de son vivant, alors qu'elle avait encore un joli minois il y a dix ans). Dürer et Véronèse étaient bien placés pour savoir que la symétrie se rapproche plus de la laideur. Et ça c'est l'architecture moderne, "cellulaire", qui le démontre.

    L'idée de beauté symétrique venant de la musique (ou de Platon), elle conviendrait mieux à l'art baroque du XVIIe siècle si les peintres baroques, bien que décadents, n'avaient pas une idée de la peinture quand même beaucoup moins étriquée que celle de Diderot (fasciné comme tous les jansénistes par la beauté du diable : les paysages marins).

    La science laïque s'évère bel et bien dans ce domaine aussi comme l'art d'enseigner au peuple des balivernes sous couvert d'élever l'esprit de chacun.

  • American Prejudice

    David Hockney’s theory explaining that the French “neo-classicist” painter Jean-Dominique Ingres (1780-1867) was using a “camera lucida” as a guide for his work illustrates how artless the prejudices of the contemporary art-criticism are.
    No doubt that Hockney and his million-dollar “masterpieces” is one of the contemporary pop-art popes. How could not be such a successful artist trusted by a majority of art-collectors?

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    Although not only one qualified historian approved this teleological theory but mostly "art-dealers" or critics involved in the business, D. Hockney published and sold a book trying to convince of it’s seriousness. It is difficult to estimate the influence of Hockney’s opinion, but the fact is that he sold a lot of books. Secret Knowledge was even translated in French and some art teacher’s are teaching it uncarefuly.

    Choosing Ingres as an example proves that Hockney is not realy aware of what he is promoting. This example is particularly bad because the Master of Montauban is well known to have tried to imitate Raphael’s method, the less "photographic painting" ever painted.
    In this way, Ingres is fighting especially against the Dutch painting which uses the “chiaroscuro” as a dramatic effect -too much in his mind.
    In the old philosophic dispute between “drawers” and “colourists”, starting from the Renaissance until the XIXth century, which can be translated in the XIXth as the fight between “classicism” (the drawing) and “romantism” (the colour), Ingres takes place in the camp of “drawers”.
    The choice of Ingres is to defend the drawing as the “honesty of art”, to use the colour as anything else than “one way of”, not as a “goal”.
    Thus, the master from Montauban misprizes the impression of light and shade, on which the mechanical process of a “camera lucida” or a Daguerreotype is based on.
    More than that, Ingres indicated to his pupils not to compose their workings like some famous Dutch painter (as Rubens or Vermeer) did. In this respect, Rembrandt is viewed by Ingres as a good little master, not more, compared to the classical Italians, Raphael or Michelangelo, who are in the Pinnacle.
    J. Vermeer was probably using a lens to help him to create the depth of focus which caracterizes most of his pieces. Its a non-sense for Ingres, an inversion in a method which is promoting the beautiful shape, the beautiful body and the balance, inspired by the Greek sculpture.
    Because of the triumph of romantism over classicism, the criticism of Rubens work by Ingres is difficult to admit and even understand now. But this is a key of art history far more intersting than Hockney's ridiculous speculations upon old master's using of a camera lucida. The shame on the european University to let this kind of theory swell.

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    At this point, it is important to understand that Hockney’s “photographic point of view” on old masters is not especially his own.
    It would be too simple to think that D. Hockney was only envious of Ingres’ talent so that he deduced that Ingres was benefiting of a miraculous mechanical process (“Genious ex Machina”).
    The prejudice of D. Hockney is obviously determinated by G.W.F. Hegel famous and thick treatise on Aesthetic (1827-1830) too. This is the more complete romantic system. None of the self-styled “post-modern” philosophers comes out of the orbit of Hegel.
    Even if Hegel understand that there is more in old master’s painting than a raw standard-measure of shape based on light and shade, he is conferring an autonomous power to light in his ambiguous romantic language. In Hegel’s explanation, the light becomes a subject, the light is seen as a “Spirit”.
    It is rather interesting to observe that Hegel, who studied modern politics and right too, is doing exactly the same in these subjects, idealizing the State, seing the State as God! The German thinking from which the US thinking comes.
    The more curious result of this Hegel’s aesthetic principle is that, starting from the Idea, Hegel is conjuring the abstract thinking of the painting away in the end! Taking the highway of History the wrong way, Hegel is discovering the Progress.
    Of course Hegel’s theory is more balanced than Hockney's one, because he is not seeing the nature only as a "shape drawed by the light and shadows". But no doubt that Hegel has a big influence on contemporary art philosophy.

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    Is it just a tempest in a glass of water? The best way to appreciate it is to ask the question differently, as following: “Would have the art of Hockney been different without such prejudices on the art history?”
    In my opinion, there is no doubt that great painters “paint as they think” that is to say that they are influenced by new ideas and new scientific discoveries after a while. Philosophy and Science are part of the principles of the European Renaissance movement to which Ingres refers constantly. It is the reason of the interest of great masters like Leonardo or Albert Durer for humanist philosophy.

    A few signs coming from Russia are indicating that there is a political willing in the Eastern part of Europe to do it new. On different basis.
    Russian painters and collectors seem to be attracted like Ingres was, after his revolutionary master Jacques-Louis David (1748-1825) by the Italian Renaissance. As the Italian classicism is characterized by a scientific bias, in this perspective Russian artists should go beyond naives theories on art and be more confident in historians to give them a better and faster progress.

  • Aimer Rembrandt

    “ Je vous le dis, sans aucun doute, si Rembrandt vivait aujourd’hui il ne serait pas peintre… il choisirait plutôt de faire du cinéma ! ” Le peintre Charles Marron avait attendu qu’on soit rendu entre la poire et le fromage pour essayer ce trait d’esprit provocant sur ses convives.

    Un ange passa, avant que les réactions ne fusent :

    “ - Ah oui ? c’est ce que tu penses vraiment, Charles ?

    - Eh, eh, pas mal observé…

    - Oh oui, joli “travelling”, Charles ! ”

    La dernière répartie était de Flora, qui avait posé pour Marron autrefois dans sa période figurative. Il y avait en sus autour de la table dressée dans la courette du peintre, d’où on pouvait voir le quart Sud-Est du Sacré-Cœur : Anne-Elisabeth, une galeriste réputée l’amie intime de Flora, quai Voltaire ; Patrick, un voisin sans profession fixe avec qui Charles jouait souvent à la pétanque dans le quartier ; Axel, neveu unique de l’artiste accompagné de sa petite amie Ophélie ; enfin Me Bonneteau - dont Marron attendait surtout l’avis. Nicolas Bonneteau comptait en effet beaucoup pour l’artiste. Il était son agent et ami depuis plus de trente ans, l’avait toujours conseillé intelligemment. Mieux : si la peinture de Marron avait triplé sa cote et franchi un cap, c’était pour une part aux conseils de son meilleur ami que Marron le devait. Si Bonneteau acquiescait, alors Marron n’hésiterait plus, il relancerait sa formule sur Rembrandt et le cinéma lors de son prochain passage dans “Cultures en fusion”, l’émission du compositeur-animateur Frédérick Peticouly-Decaille.

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    Bonneteau, un peu en retard sur les autres, fit descendre en force la bouchée de pain Poilâne et de fourme de Montbrison qui lui restait en travers, vu que tous les regards après celui du “maestro” s’étaient tournés vers lui :

    “ - Eh, bien, comment dirais-je, Charles… ta métaphore est on ne peut plus “hégélienne”… et, même si Heidegger ou Houellebecq sont plus à la mode aujourd’hui, au niveau du concept, étant donné que tu vas précisément faire la promo d’un film, je trouve ça plutôt subtil… d’ailleurs Houellebecq et Heidegger sont déjà un peu “out”, donc… ”

    Là-dessus Bonneteau attaqua le tiramisu “fait maison”, dépassant ainsi les autres. Le peintre avait en effet décidé de se diversifier, de se consacrer au Septième art à son tour, tout en gardant un pied dans la peinture. Consacrer un long métrage à Rembrandt constituait une bonne transition. Il faudrait être fou en 2008 pour ne pas aimer Rembrandt ! Même les cons qui votent Le Pen ou Sarkozy aiment Rembrandt.

    Si l’on examine en détail l’œuvre de R., ce que Marron n’avait pas manqué de faire avant le tournage du film, on se rend compte du soin particulier qu’il apporte à la mise en scène et à l’éclairage, un peu comme Fritz Lang, le grand cinéaste juif chassé d’Allemagne par les nazis… Si Vermeer préfigure les grands photographes actuels qui savent mettre la vie quotidienne en abyme, Brassayas, J. Meese, ou même Ronald W. Stuart, on peut se permettre de faire le parallèle entre Rembrandt et le cinéma expressionniste allemand, David Flynch compris évidemment…

    “ - Mais, mon Oncle, fit le neveu de Marron, pris d’une inspiration subite et court-circuitant la méditation qui prolongeait la réponse de Bonneteau, mon Oncle comment peux-tu être aussi sûr que Rembrandt eût pu s’habituer à tenir une caméra après avoir fait usage auparavant d’un pinceau et d’une palette de couleurs une partie de sa vie durant ? Ça fait quand même un grand changement, non ?! En fait t’es bien placé pour le savoir ! ”

    Le “mon Oncle”, autant que la naïveté du propos, fit sourire le reste des convives sauf Ophélie qui ne souriait pratiquement jamais. Marron ne pouvait pas avoir d’enfants, étant donné sa vocation de peintre, mais sa sœur lui avait confié avant de mourir son fils Axel, qui rêvait de percer dans les arts plastiques lui aussi après avoir mis fin à ses études de commerce. Mais ce pauvre Axel était d’un terre-à-terre !

    “ - Cher Neveu, Marron imitait le style de son émule, j’espère que tu n’attends tout de même pas sérieusement que je réponde à cette question ? Le métier de peintre, vois-tu, tout le monde ou presque peut l’apprendre, avec un minimum d’entêtement, et je sais que tu en as un maximum ; mais pour ce qui est du concept… là c’est autre chose le concept… quasiment de l’ordre de… de l’inné ! Il n’y pas un seul génie dans l’histoire de l’art qui n’ait peint avec un concept puissant par-derrière… Léonardo ? On ne peut pas faire plus conceptuel ! Et Dürer, l’abstraction de Dürer !! Dürer est tellement abstrait qu’il a besoin de savoir à quoi ressemble un corps à l'intérieur avant d'en dessiner l’extérieur ; je ne parle même pas de Pottock, qui pense plus qu’il ne peint, Pottock qui est tout “intériorité” !… ”

    Mais Axel n’écoutait même plus, il s’était jeté sur la dernière part de tiramisu qui restait et semblait trouver un intérêt plus grand à la mastication de son dessert italien, les yeux levés au ciel en signe d’extase, qu’aux explications de son oncle, confirmant le mauvais pressentiment du tuteur quant aux chances de son pupille de se faire un nom dans l’art contemporain de demain.