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  • Shakespeare et le Diable

    "Dans Shakespeare, le diable est extrêmement discret : c'est en eux-mêmes que Richard III, Macbeth ou Iago vont chercher leur noirceur." Georges Minois, in : "Le Diable", collection Que-Sais-Je ?

    Dans Shakespeare, la présence du diable est celle de la musique ou de l'odeur (du "Danemark").

    En marge d'un opuscule en cours de rédaction sur "Satan dans l'Eglise", quelques observations :

    - L'absence du diable dans Shakespeare est une des nombreuses preuves que le tragédien anglais est l'auteur le moins médiéval, et par conséquent le plus "antimoderne" qui soit ; les tentatives pour démontrer que Shakespeare est un auteur catholique romain sont vouées à l'échec.

    - L'obsession médiévale du diable, on la retrouve dans la société moderne contemporaine, à travers le phénomène de diabolisation systématique. Non seulement la philosophie dominante aujourd'hui est "néogothique" (Hegel), mais son éthique de la diabolisation l'est. Le cas de Hitler est frappant, mais il n'est pas isolé : toutes les idéologies totalitaires/hégéliennes du XXe siècle impliquent un tel mécanisme.

    - Shakespeare s'inscrit dans la lignée de l'apôtre Paul, qui trace la figure de l'Antéchrist et non celle du "diable", c'est-à-dire d'un "principe du mal" commun à toutes les cultures. L'Antéchrist se manifeste principalement à travers la trahison de l'Esprit-Saint. Or plusieurs personnages, rois ou ecclésiastiques catholiques, jouent ce rôle dans les pièces imaginaires comme dans pièces historiques, non seulement le personnage du Juif Shylock dans "Le Marchand de Venise".

    - A propos de la discrétion du diable, on pense à cette remarque de Baudelaire : "Le plus grande ruse du diable est de faire croire qu'il n'existe pas." On imagine la réaction d'un sataniste déclaré tel que Nietzsche lorsqu'il a lu cette remarque, qui relègue son oeuvre à un vain pamphlet.

    L'Antéchrist est en effet à la fois très puissant et discret, bien qu'aux chrétiens comme à Baudelaire, il est révélé par l'exaltation systématique de la chair, dont le puritanisme n'est pas la moindre expression.

  • Chasteté de l'Apôtre

    A chaque fois qu'un prêtre chrétien est pris en flagrant délit d'impudicité, le clergé des journalistes dont la voix porte plus loin que la voix de n'importe quel autre clergé, saute sur l'occasion pour inculper la chasteté.

    Celle-ci serait cause des abus et mauvais traitements dont certains prêtres se rendent coupables à l'encontre de personnes sans défense.

    On doit comprendre ici que dans une société gouvernée par le désir, dont l'économie est largement tributaire, la chasteté voire la sobriété sont presque présentés comme des péchés par les promoteurs de cette société.

    L'impudicité est donc une menace pour les jeunes enfants qui naissent et grandissent dans cette société, bien au-delà de la menace représentée par certains clercs.

    J'ai déjà conseillé sur ce blogue, pour la confronter à la réaction du clergé romain, de lire la réaction de l'apôtre Paul à propos d'un cas d'impudicité dans une communauté qu'il conseille. Tandis que le clergé romain s'inquiète pour son honneur, l'Apôtre s'inquiète pour la Foi. Il recommande l'exclusion "sine die" des personnes alcooliques, dont l'état trahit le désespoir et l'athéisme.

    Néanmoins les journalistes ignorent que la chasteté n'est pas la sobriété. La chasteté n'est pas une sobriété radicale, car précisément être sobre n'est pas s'abstenir de boire en toutes circonstances. Qui boit modérément est sobre.

    La chasteté n'est pas non plus un sacrifice. Dieu ne demande pas de sacrifice ; son fils Jésus l'a rappelé sans ménagement dans le Temple de Jérusalem. On ne bâtit en faisant de tels sacrifices que des temples de pierre et non le Royaume de Dieu. La chasteté de l'Apôtre est une force surnaturelle que lui confère la Foi, une force qui se superpose à la vertu naturelle, ou peut même s'y substituer.

    La règle de stricte chasteté imposée aux membres du clergé romain jusqu'à nouvel ordre est une règle justifiée par l'organisation interne de l'Eglise romaine. Compte tenu des rapports paradoxaux que le clergé romain entretient avec le monde -un pied dedans, un pied à l'extérieur- cette règle est sans doute difficile à faire observer. Les règlements absurdes constituent une menace pour la société.

  • Dieu et la Science

    Dieu existera dans l'esprit des hommes tant que se présenteront devant la science et les savants de vastes territoires à explorer, comme le cerveau humain, "terra incognita" ou presque ; ou encore comme l'univers, "terra incognita" lui aussi.

    Dieu bouche le trou de l'ignorance humaine, car ce trou est une cause de frayeur.

    Certains esprits légers ont cru pouvoir remplacer Dieu par la Science, mais cela revient au même, il n'y a pas de progrès : se prosterner devant Dieu ou la Science revient au même. Le mot "Science" finit par s'user et le mot "Dieu" revient à la mode. 

    On peut observer un phénomène de superstition scientifique : untel qui ne connaît la science évolutionniste que par ouï-dire la défendra parfois contre les critiques comme si c'était une vérité divine.

    A contrario, comme buts et non comme cache-misère, Dieu et la Science peuvent perturber la société et les femmes, dans la mesure où ils ne contribuent pas positivement au bonheur, vers quoi tendent la société et les femmes.

    En posant l'équation de Dieu et de la Science (connaissance ultime), Jésus-Christ assigne à l'humanité un terme, une conclusion, tandis que dans la religion païenne, l'humanité se prolonge dans un "au-delà" onirique, situé après la mort, "géolocalisé" parfois afin de lui donner plus de consistance.

    Après l'annonce du Jugement dernier, la civilisation n'a plus cours, suivant l'illustration de Jérôme Bosch.

  • Pour quoi sonne le glas ?

    On a fait sonner le glas dans tout Paris avant-hier à cause de l'accident de la cathédrale de Notre-Dame, dans lequel cette vieille dame froide a perdu sa couverture et son chapeau pointu.

    Cela m'a rappelé que j'ai quitté l'Eglise romaine comme on quitte une nef incendiée - pour sauver sa peau. Je n'ai pas rejoint pour l'instant une autre Eglise, même si j'ai été tenté par l'une ou l'autre où Jésus-Christ prévaut sur la "tradition" et les effets de manche. Peut-être suis-je devenu claustrophobe ?

    Dans la religion des vieilles pierres, qui a des fans dans le monde entier, remarquez comme on s'épanche facilement. La confession n'a pas disparu, elle éclipse tous les autres sacrements.

    Un curé a bien fait cette remarque que l'Eglise est faite de "pierres vivantes", histoire de dire que tout ne se ramène pas, dans le message de Jésus, à l'argent. Mais sa remarque s'est quelque peu perdue dans la cacophonie.

    Non seulement Notre-Dame de Paris, de Reims, d'Amiens et de Laon : c'est le moyen-âge tout entier que Shakespeare a fait cramer ; le moyen-âge ou l'espoir des simples d'esprits.

    Et les ruines encore visibles, toutes ces vieilles pierres entretenues avec un amour humain proche de la folie, ce n'est rien qu'un décors de cinoche.

  • Education chrétienne

    Pas plus qu'il n'y a de politique chrétienne à proprement parler, il n'y a d'éducation chrétienne à proprement parler, c'est-à-dire de programme éducatif qui puisse s'appuyer sur la parole de Dieu.

    Prenons un exemple: les jeunes gens vivant aujourd'hui dans une grande ville occidentale sont particulièrement exposés au vice, compte tenu de l'extraordinaire richesse actuelle, parfois mal acquise, de l'Occident.

    Vivre dans un pays au train de vie plus modeste expose moins au vice. Par "vice" j'entends ici surtout de "divertissement", caractéristique des moeurs occidentales contemporaines.

    Il n'est bien sûr aucun besoin d'être chrétien pour remarquer ce péril et en tirer les conséquences dans le domaine éducatif. Depuis des millénaires, les conséquences funestes de l'excès de richesse ont été soulignées par maints philosophes ou moralistes. - Malheur à une civilisation qui repose sur l'argent ! a dit un moraliste à la fin du XIXe siècle, et celui-ci n'était pas chrétien mais seulement un bon observateur de l'âme humaine.

    Prétendre qu'il y a une "éducation chrétienne" implique de définir la "morale chrétienne" ; si elle ne repose pas sur la nature, comme l'éthique des païens, sur quoi repose-t-elle donc ? Sur la Loi juive ? Celle-ci procure la connaissance du péché, dit l'Apôtre, mais ne mène pas au Salut. On doit comprendre ici que le Salut, priorité chrétienne absolue, ne consiste pas dans l'exercice de la vertu, en quoi de nombreuses religions païennes peuvent être bonnes.

    - Aimez-vous les uns les uns autres, commandement de Jésus à ses disciples qui résume tout, n'est pas un précepte éducatif. On n'enseigne pas à aimer comme on enseigne à être sobre ou à respecter ses voisins. On peut être un homme ou même une femme vertueuse, respectueuse de soi et d'autrui, tout en ignorant l'amour de Dieu.

    Comme l'interdiction de fonder le royaume de Dieu sur la terre interdit de mélanger les questions politiques et la parole de Dieu sous peine d'être damné, le salut accordé par le Christ à un criminel condamné à mort est dissuasif de prôner une quelconque "morale chrétienne", de même que la plupart des paraboles de Jésus.

    Gare, donc, à l'espèce des pédagogues ou des psychologues chrétiens : ils ne savent pas ce qu'ils disent.

  • Satan dans l'Eglise

    De tous les populismes, celui qui consiste à promettre de l'argent au peuple en échange de son suffrage est à la fois la plus typiquement démocrate-chrétien et le plus satanique.