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Scholies - Page 5

  • Apocalypse 2012

    Scholie n° 4

    Possédés : C'est la loi de fer à laquelle les propriétaires ou les possédants se soumettent, d'être en dernier ressort possédés à leur tour par leurs avoirs. Contre quoi s'élève la plus grande sagesse, depuis l'Antiquité, qui recommande de ne jamais accorder sa pensée ou son intelligence à sa volonté propre, sous peine de s'aliéner à une puissance étrangère ou de se mystifier soi-même. Toute trace de religion sur le plan politique porte de la marque de cette lâcheté. Ainsi faut-il voir le portrait des rois chrétiens par Shakespeare comme des lâches et des fous, peinture qui a valu à Shakespeare la haine du "Grand Siècle", encore capable de l'entendre ainsi.

    Dernièrement, K. Marx a comparé le romantisme à l'onanisme. Suivant donc l'inspiration classique de Francis Bacon Verulam, voyant dans la fidélité exemplaire du chien à son maître, le meilleur exemple d'amour romantique qu'on puisse trouver.

    Les sentiments justifient d'ailleurs la plus grande bêtise, la cruauté ou le meurtre, sur le plan du droit ou de la société ; non pas d'abord pour le bénéfice des criminels ou des idiots, mais pour celui des publicitaires, grands gagnants de la bourse aux sentiments.

    Ce qui est parfois admiré chez le marquis de Sade est semblable à ce que les dévôts admirent dans les grandes brutes de l'histoire, Louis XIV ou Napoléon, une fois le sang séché : l'appétit féroce, à la mesure d'un Etat ou d'une nation tout entière. L'appétit nécessaire à la survie des nations, y compris les plus paisibles et sur lesquelles flottent les slogans les plus humanistes. Car on n'a jamais l'idée exacte d'un monstre tant qu'il n'est pas affamé. Et les rêves de Sade sont ceux d'un aristocrate sevré des plaisirs habituels réservés à sa caste, fondés sur une légitimation magique de la propriété, que la République n'a pas manqué d'emprunter aux anciens possédants.

    Sade incarne de la manière la plus artistique, c'est-à-dire avec le plus de naïveté et le moins d'hypocrisie, la transition de l'aristocratie à la bourgeoisie, dépossédant celle-là et substituant à dieu un nouveau moyen de berner le peuple : le désir et les bons sentiments, quand les mauvais sentiments et le viol permanent des consciences sont réservés à la seule élite bourgeoise, qui trouve en jouant avec le feu le seul moyen de vaincre son ennui.

    Dans les symptômes de n'importe quel cas de folie, comme Shakespeare le souligne à propos de la petite dinde romantique Ophélie, aïeule de toutes les Bovary ultérieures, ainsi que son frère Laërte,  pleurant sa soeur comme si elle était un bien familial, on peut discerner les stigmates de la propriété.

    Extra-lucide Shakespeare qui, rejoignant le point de vue d'Homère, voit dans la soif de reconnaissance sociale un double signe d'aliénation et de religiosité, d'une part, d'athéisme d'autre part, sapant ainsi les bases de toute forme d'architecture, à commencer par les cathédrales gothiques et le droit romain.

    (Pas étonnant que le bon docteur Freud, confesseur républicain, ne songe pas un seul instant à recommander à ses riches clientes de se déposséder de leurs biens, mais cherche seulement pour les ramener à la raison à les éloigner du bord du plan incliné et macabre des rêves.)

  • Apocalypse 2012

    Deux adolescentes plaisantant à propos de l'apocalypse dans un bus parisien m'incitent à me hâter de publier quelques nouvelles scholies sur ce sujet (à dire vrai peu féminin).

    Ces demoiselles évoquent en riant jaune les quelques mois qui leur reste à vivre, selon l'astronomie des Mayas. Une telle autodérision est permise tant qu'on n'est pas encore sur les rails de l'existence. 

    Scholie n° 1

    "Laissez venir à moi les enfants." commande le Christ. On retrouve, concernant l'apocalypse, le même obstacle des adultes entre la vérité et leurs gosses. Ceux-ci craignent beaucoup moins de rechercher la vérité que leurs parents, vivant souvent déjà comme s'ils étaient déjà morts, dans le confort intellectuel ou la musique de chambre.

    Les centres d'intérêt des adultes, pour citer seulement ces allégories pompeuses du hasard que sont le cinéma ou l'argent, prouvent assez l'intense niaiserie et la dévotion religieuse de personnes morales soi-disant "responsables".

    Le premier commandement irresponsable des adultes aux enfants est de se tourner vers leur avenir, rêve chimérique et totalitaire, dont le Christ détourne en montrant que même les serins n'ont pas cette bêtise.

    Il y a dans la religion, comme dans la politique, sous couvert d'humanisme, un mouvement de pédérastie violent et lâche. On le remarque d'autant plus dans les civilisations usées, qui croient trouver dans la quête de l'origine une ressource à leurs forces déclinantes. Ainsi dans la philosophie morale nazie (Hegel, Nitche), que les milieux bourgeois affectionnent tant, en raison de son ésotérisme. Elle revient à appliquer aux hommes le régime des légumes.

    Les violeurs et assassins cloués au pilori par les autorités judiciaires ne le sont que pour dissimuler l'intense collaboration des autorités judiciaires à la violence et au crime, pour légitimer coûte que coûte la propriété.

    Scholie n° 2

    L'apocalypse de Jean est un des textes évangliques où on peut le mieux constater l'immoralité et le pacifisme du christianisme, la logique qui lie l'immoralité au pacifisme. Il n'y a pas de position sociale supérieure à une autre au regard du Christ, qui le prouve en accordant l'immortalité à un assassin. Ce sont bien, a contrario, les efforts pour ordonner ou organiser la société qui sont la principale cause des guerres.

    Il est intéressant de constater que les textes prophétiques ont une concordance logique entre eux, contrairement à la morale ou l'éthique, ferment de division entre les hommes. Bien avant le Christ et l'apocalypse, Homère s'emploie ainsi à démontrer qu'il n'y a rien de plus moral que la guerre et la violence (Hormis Sade, Nitche, Hitler ou Ben Laden, rares sont les moralistes dans l'ère moderne à s'enorgueillir d'une telle violence ; ce sont là des crétins qui n'ont pas compris que le Tartuffe est un type de moraliste beaucoup plus puissant et efficace qu'eux.)

     

    Scholie n° 3

    Le chrétien n'attend pas l'apocalypse (qui signifie en grec "révélation"), mais applique toute la force dont il dispose individuellement à son avènement, cherchant à percer à travers le voile du verbe ou du langage ("Ce qui sort de la bouche de l'homme, voilà ce qui souille l'homme.", dit le Christ, dissuadant ainsi de voir dans les conventions ou les codes humains autre chose que le reflet de l'absurdité du monde.)

    L'apocalypse n'est donc pas "programmée" à l'avance, puisque c'est dans le domaine de la politique que chacun se fait roi, reine, fou, cavalier ou pion, obéissant ainsi à une stratégie ou un ordre collectif. La programmation reflète un processus de raisonnement humain. Si l'homme n'était capable que d'hypothèses religieuses, sans logique scientifique ou imagination, il serait un ordinateur aveugle, n'ayant de la réalité qu'une conception numérique ou mathématique, proche de celle d'un animal sauvage, tirant toute sa force de son conditionnement extrême.

    Est "démoniaque" au sens chrétien ce qui contribue à la meilleure organisation possible, en fonction des données écologiques ou élémentaires. La mondialisation ou la promesse d'ordre à l'échelle planétaire n'est donc pas sans rapport avec l'apocalypse.

    N'est donc prévisible (par les statistiques ou l'astronomie), que l'affrontement des puissances démoniaques entre elles, leur anéantissement, souhaitable du point de vue chrétien, redoutable dans l'optique des Mayas et de leur culte du dieu soleil, emblématique des régimes païens théocratiques, prcédédant ou suivant la civilisation maya. La pyramide est un instrument astronomique, en même temps qu'elle signifie l'ordre théocratique idéal, dans lequel le souverain, appuyé sur la masse de ses sujets, est tangent au ciel. Cette théorie, entièrement hypothétique et non scientifique, traduit le volontarisme et l'acceptation de l'inconscient de ses adeptes.

    La meilleure conservation de la propriété possible est le fondement véritable de ce culte Le culte identitaire contemporain s'y rattache. C'est contre les vestiges d'une telle théocratie que les efforts de Marx et Engels tendent, ayant reconnu en elle la mécanique de l'aliénation moderne.

    C'est donc la fin du monde, prévue par les Mayas, qui est de l'ordre des choses prévisibles. Tandis que l'apocalypse, effort de libération individuel, ne l'est pas. Une autre comparaison est possible : - "L'Iliade" raconte la fin du monde, l'affrontement inévitables de personnes aveuglées par la croyance dans le destin et toutes les idéologies politiques.

    "L'Odyssée" décrit les efforts d'un individu pour être libre, les obstacles moraux et politique qu'il doit surmonter pour rejoindre Ithaque.

  • Scholies d'Origène

    Le mépris réservé par le clergé à l'évangile de Jean, le "fils du tonnerre", et notamment à la révélation de Patmos, que les théologiens aussi bien libéraux qu'archaïsants zappent, m'incite à publier mes propres scholies sur l'Apocalypse au plus tôt - vu l'heure tardive.

    Quand l'Apocalypse n'est pas ouvertement discréditée comme étant une obsession de théologien "millénariste" par un clergé complètement absorbé par les valeurs séculières, elle est subvertie par des romans ou des films qui rendent le canevas historique de l'Apocalypse complètement abscon. Maurice Dantec est un exemple de cette subversion, du détournement de la Révélation au profit du Pacte Atlantique assoiffé d'or noir et armé jusqu'aux dents, Pacte auquel l'islam n'est en mesure d'opposer qu'un judéo-christianisme médiéval sans réelle force militaire. Or, non seulement l'Apocalypse n'est pas une lubie millénariste, mais elle est indissociable de toutes les grandes révolutions théologiques au cours de l'histoire, qui ont profondément marqué l'Eglise elle-même, avant que la religion laïque ne prenne le relais. Les passages un peu mystérieux de l'évangile de Jean concernent d'ailleurs les mêmes sujets que les passages demeurés assez mystérieux des épîtres de Paul.

    Mais il y a encore pire que Dantec, et qui explique sans doute la manière stupide qui consiste pour ce dernier à défendre l'Eglise en n'hésitant pas pour ce faire à se travestir en suppôt mélancolique (veste de cuir et lunettes noires), c'est l'exégèse officielle, validée par les autorités ecclésiastiques, de l'Apocalypse, qui revient le plus souvent à la disqualifier, à en faire un texte apocryphe.

    Je prends un seul exemple, l'ouvrage récent du franciscain yanki Stéphane Doyle, o.f.m. ("A catholic perspective on the book of revelation") : celui-ci, en fait de "perspective catholique", fournit une interprétation du texte à laquelle un adepte du soufisme musulman, un bonze tibétain ou un druide breton pourrait souscrire. Certainement pas un catholique, pour deux raisons :

    - Stéphane Boyle insinue que l'évangéliste Jean (le préféré de Jésus), n'est pas le véritable auteur de l'Apocalypse (!), mais qu'il s'agirait plutôt d'un disciple de saint Jean le Baptiste. Sans apporter aucune preuve ! simplement parce que l'Apocalypse dénote d'une bonne connaissance de l'Ancien Testament de la part de son auteur. Argument totalement absurde qui révèle qu'un franciscain accrédité aujourd'hui, ignore non seulement ce que la doctrine franciscaine doit à l'Apocalypse, mais aussi la Pentecôte et les dons de l'Esprit qui ne laissent AUCUN des évangélistes dans l'ignorance de l'Ancien Testament, auquel tous se réfèrent COMME Jésus lui-même. Jésus abolit la loi ancienne du sabbat, mais en toute connaissance de cause et d'effet.

    Argument débile, donc, mais lourd de conséquence, presque aussi stupide que la thèse des pasteurs protestants yankis selon laquelle l'Apocalypse -ici on se retient d'éclater de rire- serait un pamphlet contre saint Paul. Le franciscain yanki S.C. Doyle partage la même fascination que le dominicain français Philippe Verdin pour la théocratie, indubitablement satanique selon saint Jean, et c'est ce qui pousse bien sûr Doyle à un travail de sapeur sous couvert d'élucidation, procédé bien pire que celui d'un gugusse comme Dantec, qu'on n'est pas tenu de prendre au sérieux.

    - Pour interpréter le sens du nombre 666, que la vision incite à interpréter, S.C. Doyle passe par la numérologie ou la "guématrie", c'est-à-dire par une sorte de science kabbalistique qui, elle non plus, ne participe guère d'une perspective catholique ou chrétienne. Il traduit ainsi le "code 666" par "Néron", en se gardant de s'appesantir sur la démonstration. C'est une autre manière, elle aussi sournoise, de discréditer l'Apocalypse en frappant le texte de caducité. Le code 666 est cité en Ap. XIII, non loin de la phase ultime. Si 666 = Néron, l'Apocalypse n'a plus rien ou presque à nous dire, c.q.f.d. Je relève que sur internet, un autre site ouaibe passe par la guématrie, une guématrie qui paraît plus sérieuse que celle de Boyle, pour démontrer que l'antéchrist n'est autre que... Benoît XVI (Ce qui n'est pas sans rappeler les attaques ad hominem de Dante Alighieri contre les papes simoniaques.)

    En outre ce franciscain n'en profite même pas pour dénoncer -ce qui est le minimum dans un ouvrage de ce type- la scandaleuse récupération par le nationalisme européen de la symbolique chrétienne. Doublement scandaleux le procédé des chrétiens libéraux atlantistes dans la mesure où la femme aux douze étoiles N'EST PAS Marie, mère de Jésus, et ne peut pas l'être ("Les Pères et les interprètes catholiques sont presque unanimes à reconnaître dans cette femme un symbole de l'Eglise" dixit le chanoine Crampon, qui n'est pas un hurluberlu comme S. Boyle, lui.)

    Aussi scandaleux car l'Apocalypse contient la condamnation sans appel de la doctrine nationaliste en général, les nations étant animées par le diable, et en particulier celle, européenne, de Maurice Schumann et Jean Monnet, nation peut-être "aryenne", napoléonienne, laïque, démocrate-chrétienne, tout ce qu'on voudra, mais sûrement pas chrétienne.

    En attendant de donner mes propres scholies, et puisque le temps me serre à la gorge comme tout un chacun, je fais la publicité des scholies attribuées à Origène, perspicace contrairement à Boyle, et dont je m'apprête à recopier ici même quelques extraits. Il faut signaler ici que toute exégèse "augustienne" de l'Apocalypse est plus ou moins oblitérée par le fait que saint Augustin est pénétré de principes platoniciens décadents gênants pour comprendre l'association dans l'Apocalypse entre le diable, la "bête de la terre", et la politique des nations, qui confirme s'il était besoin l'interdiction prononcée par le Sauveur lui-même de sacraliser toute institution humaine.

    Les sept étoiles et l'épée acérée (1,16)

    "Dans sa main droite il a sept étoiles et de sa bouche sort une épée acérée, à double tranchant, et son visage, c'est comme le soleil qui brille dans tout son éclat."

    Il est écrit au Psaume 56 : "Les dents des fils des hommes sont des armes et des traits, leur langue un glaive acéré." (Ps 56,5). Non que les paroles soient absolument condamnables ; si elles sont les armes des justes (Ep 6,17), des traits choisis et une épée honorable (Is 49,2), - car tous les fils des hommes combattent, les uns pour Dieu et sa justice, les autres pour le mauvais et le péché -, il ne faut pas non plus en douter pour ce qui est dit ici de celui qui est devenu Fils de l'homme et qui a dans sa bouche une épée tranchante.

    Il a dit lui-même : "Je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre, mais le glaive" (Mt 10,34) et "un glaive qui peut pénétrer jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit" (He 4,12). Les méchants qui méditent sur les fausses doctrines ont fortement aiguisé leur intelligence comme une épée acérée (Ps 64,4), pour la rendre capable de faire du mal à leurs auditeurs, mais les autres ont aiguisé leur intelligence dans les divines Ecritures, pour leur propre salut et pour le salut de leurs auditeurs : leur langue est devenue une épée acérée pour le salut ; car les méchants blessent comme une épée, mais les sages guérissent par leur langue (Pr 12,18) et blessent d'amour : le Sauveur nous a donc blessés de son amour (Ct 2,5).