"La Planète des Singes" est à la fois mieux écrite, plus facile à comprendre et plus savante que "L'Origine des espèces".
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que la fable s'oppose utilement à la science-fiction.
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"La Planète des Singes" est à la fois mieux écrite, plus facile à comprendre et plus savante que "L'Origine des espèces".
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que la fable s'oppose utilement à la science-fiction.
Une femme me reproche mon manque de délicatesse dans mes propos. La première image qui me vient à propos de délicatesse, ce sont des chimpanzés s'épouillant entre eux, avec une minutie et un amour qui forcent le respect, auxquels tendent à vrai dire nombre de couples modernes, suivant les conseils de leurs psys, sans jamais tout à fait y parvenir.
La thèse darwiniste repose pas mal sur le hasard et le calcul de probabilité ; mais de mon point de vue, ce n'est pas un hasard si les primates ont d'abord été retenus comme l'étape précédant l'homme. C'est loin de tenir seulement à leur capacité à se tenir debout. Le singe est doté de pas mal de qualités du point de vue féminin, et de beaucoup moins de défauts que le genre humain masculin. Non seulement les hommages de tel ou tel humaniste moderne à l'égard de l'espèce des singes sont sincères, mais en outre ils sont biologiquement fondés.
Etant donné la proximité démontrée par maints moralistes de l'âme bourgeoise avec celle du cochon, cette dernière espèce aurait pu servir d'appui à l'hypothèse transformiste si les porcs faisaient montre de plus de délicatesse et d'hygiène. On dit d'ailleurs que les hommes qui savent faire rire les femmes détiennent le moyen de les convaincre de s'accoupler avec eux, plus efficace qu'un physique apollinien. Le chimpanzé est inégalable, non seulement pour la délicatesse, mais aussi pour la variété de ses grimaces, en quoi il égale les meilleurs artistes de variété.
- La seconde image qui me vient à propos de délicatesse n'est pas une image à proprement parler, puisque c'est la petite musique de Proust, poète 100% délicat. La délicatesse, si l'on y regarde à deux fois, est une forme de recherche du temps perdu, qu'il s'agisse aussi bien de l'art le plus délicat de la broderie que de la toilette commune des singes.
L'indélicatesse est le péché moderne : naître homme vous fait naître pécheur dans le monde moderne, tandis que naître femme vous exonère du péché.
Plutôt que de souligner ce qui peut inspirer le dégoût de la délicatesse, et qu'il n'est pas difficile de deviner à travers les écrits prophétiques, je préfère souligner ce qui fait le prix si élevé de la délicatesse, au sens figuré comme au sens propre. C'est la même raison qui fait aimer l'opium - la souffrance. L'art moderne n'a de prix qu'aux yeux des personnes souffrantes.
"... Car il ne faut pas sous-estimer le chrétien : le chrétien, faux jusqu'à l'innocence, surpasse le singe, et de loin - eu égard au chrétien, une fameuse théorie des origines de l'humanité devient pure amabilité..." F. Nitche
En vertu de sa théorie du sous-homme chrétien, hypocrite et efféminé, et de sa théorie du surhomme nitchéen, le porte-parole de Satan ne gobe pas la théorie de l'évolution. Le surhomme nitchéen agit bien en vertu de la nature, mais d'une manière consciente, dont seul l'homme se montre parfois capable, lorsqu'il est capable de prendre du recul par rapport à la société.
Le transformisme est un préjugé socialiste. On trouve en outre chez Nitche la même observation scientifique que chez Alphonse Allais : les hommes les mieux adaptés à la société moderne sont les escrocs.
Il conviendrait d'ailleurs de dire que les anti-évolutionnistes, sous l'étiquette du "créationnisme" ne sont pas "chrétiens" mais "nitchéens" : ils conçoivent dieu comme un démiurge. Sur le plan de la science physique, Nitche se réfère en partie à Aristote. C'est la métaphysique, c'est-à-dire l'indication dans la Genèse qu'il y a une forme de connaissance supérieure au savoir éthique et à la vertu sataniques qui empêche les juifs et les chrétiens de croire dans le darwinisme. La philosophie de Nitche n'est pas totalitaire comme les philosophies milléranistes à l'arrière-plan de l'évolutionnisme, qui se servent de la biologie afin d'ouvrir le plan de l'avenir à l'infini.
Plus généralement il faut dire que l'histoire de la science moderne est une grossière propagande, exactement comme l'est l'histoire de l'art moderne. L'ouvrage de fonctionnaires payés pour démontrer le progrès social.
L'observation de l'infériorité de l'espèce humaine sur le plan de l'organisation, comparée à l'espèce animale, est dissuasive de croire dans le transformisme. Le propre de l'homme est de pouvoir rire du paradoxe des institutions humaines.
Toutes les utopies politiques, qui postulent la possibilité d'un monde parfait, grâce à la découverte par l'homme de la recette de l'harmonie qui règne au sein des espèces animales, toutes ces utopies qui ont permis de justifier les ravages subis par l'espèce humaine au cours des derniers siècles, constituent à la fois un préjugé favorable au transformisme, en même temps qu'un encouragement à la bestialité humaine.
Non seulement l'utopie nazie, dont l'argument darwinien est le plus évident, mais aussi le stalinisme et, surtout, principalement, le libéralisme. Non seulement parce qu'il est l'idéologie la plus résistante, donc la moins mal adaptée à la gouvernance mondiale, mais encore parce qu'il a postulé d'abord l'idée d'équilibre d'une organisation humaine fondée sur le commerce et ce qu'il y a de plus bas dans l'espèce humaine. La doctrine libérale est la moins idéologique parce qu'elle mise tout sur l'instinct humain.
L'effondrement des structures libérales, s'il se confirme, traduirait l'échec de l'homme à se soumettre pour le besoin de la collectivité à un sadisme et un masochisme qui n'effraient pas les espèces animales. L'idéologie libérale est le dernier soutien de la démonstration transformiste, qui accorde à l'homme une position avantageuse au sein des espèces, bien qu'il ne la mérite pas selon les critères d'évolution retenus par les biologistes évolutionnistes.
Parmi les philosophes des Lumières, le seul qui aurait sans doute cru dans l'évolution, c'est Diderot. Autrement dit le seul à ne pas reconnaître que les démonstrations économiques libérales sont pour la plupart d'entre elles de purs sophismes.
Tout gosse, déjà, je sentais que cette abréviation, "cqfd", était aussi creuse que les "valeurs républicaines", identiques à l'acier dont sont faits les coffre-forts et les missiles Dassault, et que la morale, comme l'esthétique, se résout à un simple calcul de singe.
Pour nier le progrès, il suffit de se situer sur le plan social, exactement le même où l'évolution se démontre.
Ce qui fait que l'artiste ou l'homme de science sera peu enclin à gober la théorie de l'évolution, c'est qu'elle est, de toute évidence, une pure clause de style.
Alphonse Allais, le seul surréaliste vraiment sérieux, comme son sens de l'auto-dérision l'indique (il est difficile de prendre l'humanité plus au sérieux que l'espèce des primates), emploie toutes les ressources de son art afin de souligner toutes les incohérences que la théorie de l'évolution entraîne pour un esprit français : elle oblige à prendre la religion au sérieux ; à voir dans les salauds des surhommes, puisqu'il faut être un salaud pour s'adapter à la société, etc. On devine derrière le ton badin d'Allais un homme extrêmement colère que la société française, du fait de son élite républicaine, soit en train de devenir nazie.
Si Céline avait lu Allais plus attentivement, il aurait été encore moins nazi, car il aurait su que les hommes les mieux adaptés dans ce monde ne sont juifs que dans la mesure où c'est à la mode de l'être. En principe, ils sont de confession assyrienne ou babylonienne.
"Robert Chambers - qui, avant Darwin, avait proposé une théorie de l'évolution - portait six doigts à chaque main. Est-ce pure coïncidence si sa théorie assimile les progrès évolutifs à d'heureuses monstruosités ?"
Jean Rostand
"Malentendus tenant au double sens du mot "sens".
Que l'évolution se soit effectuée dans un certain sens (dans une certaine direction) n'implique nullement qu'elle ait un sens (une signification)."
Jean Rostand
- Intéressante précision, ici, de Rostand, car elle permet de situer l'objection chrétienne au transformisme (qui n'est pas liée à la question de la création de l'homme par dieu). Du point de vue chrétien, des tas de choses à commencer par la morale ou la politique n'ont pas d'autre signification qu'une certaine direction ou volonté. Il y a bien un plan où l'homme est dans le prolongement des autres espèces animales. Mais, pour tout ce qui contrecarre la morale et la politique ou en diverge, et qui dans le christianisme prouve la capacité de l'homme à se soustraire ou à lutter contre le destin, l'évolutionnisme est impuissant à fournir une explication. L'évolutionnisme nie, comme le nazisme, que l'homme soit animé par autre chose que la bestialité ; au plan philosophique où Rostand prétend se situer, il émet un doute sur le fait que l'homme soit intelligent ou bête. Dans le christianisme, il n'y a d'intelligence que sur le plan individuel.
"Quant à Herbert Spencer, il tirait de son lamarckisme un hédonisme inattendu : "des parents qui mènent une vie sombre et monotone diminuent l'aptitude de leurs enfants à profiter le mieux possible des plaisirs qui peuvent leur échoir."
D'où, pour ce grave philosophe, le devoir de savourer les joies de l'existence, afin de disposer à l'optimisme les générations futures."
J.R.
Il semble que Rostand reproche aux lamarckiens ce que je reproche aux évolutionnistes qui, comme Rostand, récusent le principe de l'hérédité des caractères acquis : leur anthropomorphisme, celui-là même que le darwinisme social nazi ou libéral traduit. En raison de l'hérédité des caractères acquis, le lamarckisme collait mieux avec la théorie raciste du "sang bleu" aristocratique, tandis que l'évolutionnisme ultérieur, plus abstrait, s'adapte mieux à l'idéologie démocratique, bien que l'idéal pur de la démocratie soit totalement dépourvu de fondement dans aucune science ou théologie, et qu'un juriste un minimum compétent et honnête sera bien obligé de la déclarer improbable.